JUMELAGE CRETEIL/POBE

Guérisseur
Le guérisseur est un homme très maigre, très marqué, avec un œil blanc. Ses fétiches forment un très bel ensemble décoratif. Ils ressemblent à de vieilles bouteilles recouvertes de cuir ou de cire ou de toutes sortes d’offrandes bizarres. Incantations, libations, encore de l’alcool qui circule. On peut filmer ou faire des photos sans problème mais il faudra faire parvenir nos images si nous ne voulons pas décevoir.
Python

– « avez vous vu les pythons de Ouidah? »
– « Comment les avez-vous trouvés ? »
– « touristiques ?
– Ici, ce sera autre chose ! »
Le prêtre des pythons est vêtu d’un short clair et d’une toque blanche barrée de rouge avec des bracelets de perles. Il revient après les présentations d’usage, avec trois ou quatre serpents enroulés autour de son cou, ses bras, de la taille. Je me porte volontaire pour porter les pythons autour de mon cou. Je suis très fière de moi. Le maître des Serpents propose de faire une « vue d’ensemble » (une photo). Nous sortons donc sur la place. Mon serpent s’agite un peu. Je ne peux pas savoir si c’est sa tête ou sa queue qui me chatouille. Le guérisseur se plaint que les touristes promettent toujours d’envoyer les photos et le font rarement. Ceci nous motivera à tenir notre promesse.
La Croissance
La Croissance est un élevage de lapins et dindons. On nous montre les cages de bois fabriquées maison et les animaux qui ont des abreuvoirs par cette chaleur. Un lapin plus malin que les autres tient sa boîte de conserve entre ses dents pour monter qu’elle est vide par cette chaleur !
Médecine traditionnelle

Un troisième guérisseur officie non loin de là. Il ne s’agit pas de bénédictions ou de spectacle à notre attention mais d’une véritable cérémonie : deux hommes, torse nu, arborent des taches de peinture blanches. Un jeune garçon aux traits très fins, aux grands yeux affolés est maquillé de même. Le Maître de cérémonie promène une cassolette de braises sur le sol et sur une fourrure d’animal aux pieds du petit garçon. C’est le malade. Nous découvrons peu après d’horribles ulcères sur un pied tout boursouflé et sur une main. Les sacrifices sont destinés à le guérir.
Après libations, génuflexions, oraisons diverses sur des fétiches disposés sur une estrade garnie de plantes vertes, le prêtre procède au premier sacrifice : un poulet à qui il coupe le cou et dont il répand le sang sur l’autel. L’animal bouge encore, il tressaute, cherche à s’envoler et atterrit à nos pieds. Sept petites volailles subiront le même sort. Leur sang éclabousse nos habits. Quand arrive le tour des deux chiots et du chaton enfermés dans une cage, c’en est trop nous rejoignons le minibus. Seul Damien restera et filmera. Le sacrifice des volailles m’impressionne peu : c’est de cette manière qu’on tue les poulets et les poules destinés à la cuisine. Nul d’entre nous n’est végétarien. Chats et chien, en Europe ne se mangent pas. Cette barbarie nous révulse.
Mais il y a bien pire. Pendant que nous attendons la fin de la cérémonie ,les quatre filles, avons eu la même pensée pour les blessures horribles du petit enfant.
Avant de procéder à la cérémonie, les parents ont consulté le Fâ. L’oracle a dit que la maladie n’avait pas une origine naturelle, qu’un traitement médical ne ferait que compliquer le travail du guérisseur. L’enfant est victime d’un envoûtement qu’il faut exorciser. Que ce soit Félix – futur médecin- garçon intelligent et ouvert – qui soutienne cette théorie, me consterne. Quel dommage que parmi nous ne se trouve ni médecin ni infirmier pour poser un diagnostic sur ces ulcères qui déforment le pied de l’enfant qui paraît épuisé, probablement fiévreux.
Le Fâ
Les sacrifices terminés, Félix propose de se faire dire le Fâ. Les quatre filles refusent. Nous n’avons aucune envie de prédictions effrayantes. Damien se prête à l’oracle. Le prêtre lui donne un galet auquel Damien confie le secret de la question qu’il pose au devin. Ce dernier sort d’un sac des chapelets de grosses graines aplaties qu’il secoue et dispose savamment après les avoir mêlés, démêlés, secoués en récitant des formules magiques (à ce que nous devinons). C’est très long. Les prêtres se répondent, se consultent. L’un d’eux traduit. La première prédiction est funeste : Damien sera victime d’un vol. Pour conjurer ce sort, il lui faudra élever un chien à son retour (comme il chuchote, j’avais entendu une chèvre, heureusement que c’est un chien. D’ailleurs un chien est tout à fait approprié pour faire fuir les voleurs !). Le prêtre lui demande s’il souffre du ventre (question bien anodine, sait-il que les Européens sont souvent victimes de la turista ?)Il devra surveiller ses plats pour qu’on ne l’empoisonne pas. Il faudra également qu’il rapporte un souvenir (pas de problème, Damien ne fait que cela : acheter des souvenirs et qu’il l’offre à son père. Enfin l’oracle demande si les prédictions correspondent à la question secrète. « Pas du tout ! » Tant mieux ! L’inverse aurait heurté mes convictions rationalistes !
Azové
Après une matinée si chargée nous aimerions rentrer nous reposer et digérer les émotions. Au marché, les trois jeunes veulent encore acheter des pagnes. Au lieu d’aller au restaurant local (en supplément) et nous contentons de beignets (25CFA l’un) et de bananes (même tarif)et nous installons sur une terrasse ombragée appartenant à la famille Essou.