CANARIES 2005

La tempête s’est calmée et le beau temps est revenu. Nous allons sur la côte sud. Après les tunnels sous les sommets nous débouchons sur le versant ensoleillé désertique où poussent cardon, tabaïbas, opuntias, les plantes grasses du désert.
San Sebastian, capitale de la Gomera
San Sébastian n’a que 7000 habitants mais c’est la capitale de La Gomera avec de très beaux bâtiments officiels : une Mairie à balcons canariens en bois sombre sur une jolie place plantée de palmiers. Nous arpentons la vieille rue la Calle del Medio, bordée de petites maisons basses blanches avec de nombreux commerces. C’est dans cette rue que se trouve la petite église et la Maison de Christophe Colomb.

L’autre monument historique est la Torre del Conde, une tour carrée chaulée de blanc avec des parements de lave rouge. A l’intérieur, une exposition de gravures anciennes de San Sebastian et des cartes marines du port. Les cadres modernes de bois plat ciré, tout simple mettent en valeur ces documents qui sont aussi beaux qu’une exposition de peinture. Les marins et les historiens peuvent apprécier la valeur historique.

Nous allons au port nous renseigner des horaires de bateaux vendredi pour notre retour. Les passages sont nombreux la veille du week end. Espérons qu’on n’aura pas de tempête !
La plage de San Sebastian, abritée par le port et par des rochers pointus. Elle est assez grande et son sable est fin Sous le pâle soleil trois couples de touristes adossés à la digue, essaient de bronzer. je sacrifie à ma marche favorite au bord de l’eau, bien fraîche après le mauvais temps d’hier.

A midi et demie, nous avons épuisé les curiosités de la capitale.
On remonte au Parc de Garajonay
La route du Parc de Garajonay en direction du NE remonte au flanc d’une arête comparée au dos d’un chameau. Plus on grimpe, plus le panorama est spectaculaire : Tenerife parait toute proche. On voit les stations balnéaires occupant la côte sud, les villages à mi pente, les bâches des bananeraies. Nous repérons les Gigantes, la falaise et la ville. Un nuage coiffe le Teide. Au dessus de nous, les nuages passent, tantôt cachant le soleil tantôt nous avons une belle éclaircie.

Nous cherchons le coin pique-nique idéal avec un parking, une belle vue et si possible du soleil ! Dominique nous trouve un véritable jardin : une rocaille fleurie de cistes d’asphodèles de soucis oranges, et planté d’opuntias de tabaïbas pour l’exotisme, au loin des palmiers, un petit ravin très creux aux parois abruptes, des crêtes découpées sur une mer bleue. Nous sommes tellement bien que je dessine les plantes et les crêtes.

Nous sommes près de la Degollada de Peraza, lieu qui raconte la fin de l’histoire commencée à la Torre del Conde .Cette tour fut édifiée en 1450 par Fernan Peraza l’Aîné pour se défendre contre les Guanches qui résistaient à la colonisation espagnole. Son fils Fernan le Jeune épousa Béatriz Bobadilla. Puis il conçut une passion pour la princesse Guanche Iballa. Alors qu’il allait la rejoindre, il tomba dans une embuscade tendue par les frères de la princesse et fut jeté dans un précipice.
Les Roques de Aguando sont des dykes aussi grands que la Cathédrale du Teide Ils dominent une vallée verte où poussent en altitude des pins des Canaries remplacés par les palmiers près de la mer. Le printemps semble arrivé ici : les vipérines bleues sont en fleurs ainsi que les genêts qui forment une grosse boule blanche.
L’Ermita de la Nieves est une jolie petite église blanche toute simple dans un site magnifique. le Teide est presque sorti des nuages. J’en profite pour le dessiner tandis que Dominique fait une sieste sur une arête rocheuse parmi les bruyères arborescentes et les genêts en fleurs. Nous sommes à l’altitude de la Laurisilva mais sur ce versant sud, seule pousse la bruyère moins exigeante que les autres arbres. Elle a la taille d’un arbuste. Comme nous passons devant le panneau Cedro je demande à Dominique d’aller prospecter le départ de la promenade qui arrive à notre gîte et que j’ai très envie de faire. La SEAT Ibiza s’engage sur une belle allée dallée dans un sous bois très dense. La descente est impressionnante la montée nous fera apprécier davantage notre voiture « Bord de Mer » qui grimpera sans chauffer et sans renâcler.

La Hermigua
Nous terminons cette belle journée en nous engageant sur la petite route sur le versant faisant face à notre maison. Nous faisons le tour d’Hermigua, gros village dispersé en nombreux hameaux dans la vallée étroite. Notre hameau, est nommé El Convento à cause du couvent dont j’avais entraperçu le clocher ajouré. C’est seulement sur le versant opposé que nous le voyons, en contrebas de la route. C’est aussi seulement maintenant que nous découvrons la silhouette de notre maison : une des plus belles du quartier,bâtie sur deux niveaux, blanche avec des pierres apparentes aux angles, un toit de tuile, son jardin et les deux palmiers qui la précèdent.
De la route principale on ne devinait que deux quartiers : la Ville d’en haut et la ville d’en bas. On découvre maintenant que les maisons s’étalent très haut au dessus de nous. Autour de l’hôtel rural où nous sommes allées chercher les clés dimanche, il y a encore un autre hameau. . Le long de la petite route les maisons sont plus dispersées, des chemins partent dans tous les tournants vers des ravines insoupçonnées.
La petite route qui mène à la mer est coupée par un gigantesque glissement de terrain. La montagne est fissurée et risque de basculer à tout moment. Depuis quelques jours, je suis saisie par l’ampleur de l’érosion qui est un phénomène très lent sous le climat français et qui reste pour moi une notion très abstraite. Les élèves acceptent très bien cette idée et parlent de l’ »usure du temps ». Je suis forcée de leur expliquer que le temps en lui même n’use rien du tout et que les facteurs de l’érosion sont l’eau et le vent. Ici le phénomène se déroule sous mes yeux. La route principale de San Sebastian a été coupée aujourd’hui par un amas de roches et de boue. Depuis ce matin une pelleteuse remplit des camions qui se succèdent sans arrêt. Le tas n’avait quasiment pas diminué à notre retour à 5 ou 6 heures. Ici, à la Gomera, les basaltes sont anciens, les roches sont marron ocre, très oxydées, très altérées. Les pluies de Dimanche et Lundi ont fait couler dans les rues de San Sebastian une fine argile rose sur laquelle j’ai failli m’étaler ce matin et que les cantonnier raclent à la pelle. A Tenerife, sur le Teide, les chutes de pierres de l’après midi quand la glace fond étaient impressionnantes. Dans les Alpes à haute altitude je connaissais ce phénomène mais ne l’avais jamais constaté de visu. Ces vacances sont vraiment un stage pratique de géologie.
Bonne surprise de retour au gîte, avec le beau temps, la télé est revenue ! Le journal télévisé consacre l’essentiel de son temps à la vague de froid et de neige qui sévit sur l’Espagne. Dès notre arrivée à Tenerife nous avons vu le Pays Basque, la Galice sous d’épaisses couches de neige ce qui ne nous a pas vraiment étonnées. Puis Madrid et la Castille, ce qui n’est pas exceptionnel. Depuis quelques jours on nous montre l’Andalousie sous la glace et la neige. Aujourd’hui le bulletin local des Canaries fait le point sur les intempéries : la tempête a mis à terre des tonnes d’oranges et d’avocats. Le froid et l’humidité ont favorisé le développement du mildiou sur les tomates. C’est toute l’agriculture canarienne qui est touchée. Sans parler du téléphérique du Teide encore bloqué !