LIRE POUR LA GRECE

Cette année sera pour moi, une année avec Homère, commencée avec l’Odyssée de Daniel Mendelsohn : Une Odyssée – un père, un fils, une épopée que j’ai fait lire autour de moi, puis La Pensée Chatoyante de Pietro Citati d’une érudition passionnante. A la suite de ces lectures, nous avons programmé un voyage dans les Cyclades, et j’ai téléchargé Le sourire d’Homère de Jean Soler, commencé sur le ferry du Pirée à Amorgos et lu au bord de la mer Egée aux heures fraîches, sur les terrasses de nos gîtes. Je ne saurais dire lequel de ces ouvrages j’ai préféré.
Et voici que, en avril 2018, paraît Un été avec Homère de Sylvain Tesson à grand renfort de buzz. J’ai cru entendre qu’il était allé à Tinos, île des Cyclades que j’aime beaucoup pour écrire cet ouvrage. Comment ne pas le télécharger sur la liseuse? Dans ma bibliothèque virtuelle, Tesson est classé dans le « rayon » des écrivains-voyageurs, littérature qui me passionne. C’est donc avec grande impatience que j’ai attendu le moment de commencer cet Eté avec Homère.
Tesson n’est pas un helléniste comme Soler ou Citati, Vernant ou Paul Veyne qu’il cite dans sa bibliographie, il apporte un regard différent. Celui du voyageur ou celui du journaliste.
Dans l’avant -propos, je note:
« Tout événement contemporain trouve écho dans le poème, ou, plus précisément, chaque soubresaut historique est le reflet de sa prémonition homérique.
Ouvrir l’Iliade ou l’Odyssée revient à lire un quotidien. »
Pourquoi pas? Ce sera une réflexion contemporaine et journalistique, angle d’attaque original.
« Rien n’a changé sous le soleil de Zeus » affirme-t-il
« »Je crois à l’invariabilité de l’homme. Les sociologues modernes se persuadent que l’homme est perfectible, que le progrès le bonifie, que la science l’améliore. Fadaises! Le poème homérique est immarcescible, car l’homme, s’il a changé d’habit est toujours le même personnage, mêmement misérable ou grandiose, mêmement médiocre ou sublime… »
« Ce serait un malheur de priver les générations de ces chants divins, ces poèmes d’or, ce verbe de feu »
Certes, lisons le dans le texte!
« chaque vers a été analysé des milliers de fois, jusqu’à la névrose… » voilà qui ne présage rien de bon.
Dans la Géographie homérique, Tesson nous raconte qu’il s’est enfermé dans un pigeonnier vénitien de Tinos face à Mykonos. A voilà ce que j’attendais! Mais il n’ira pas plus avant; Dommage! j’adore les pigeonniers de Tinos! Il évoque Miller (il me faudrait relire le Colosse de Maroussi).
Viennent des vers bienvenus de l’Iliade « Comme un homme nourrit un pan d’olivier… » je jubile;
Pas pour longtemps, malheureusement!
« Thétis, la mère d’Achille va demander au dieu-forgeron de lui fabriquer des armes (oh quelle est touchante cette maman qui équipe son enfant aux Galeries Lafayette de la mythologie pour qui’l puisse se ruer, tambour battant vers son destin, c’est à dire la mort!) »
Quelle comparaison! quelle élégance! Pourquoi pas Amazon-prime pendant qu’on y est!
Le bouclier d’Achille contient la représentation de tout le monde grec merveilleusement décrit et le voilà réduit à un achat dans un grand magasin. !et plus loin il revient à ce bouclier en expliquant « voilà qu’un dieu offre une vision, une photographie de la vie sur Terre. C’est le Google Earth du dieu Hephaïstos » et tant pis pour la poésie, tant pis pour le tableau de la vie antique!
La suite est à l’avenant!
A propos de Télémaque, Tesson convoque les mânes de Freud et d’Oedipe dans un véritable galimatias : « Puis-je avouer que je trouve plus princière la figure télémaquienne? En quoi ne correspondraient-elle pas à nos structures psychiques enfouies » .
Dans les Royaumes du Mystère, « nous extrairons plus avant le retour d’Ithaque, Ulysse se glisse dans un interstice du merveilleux, comme le vaisseau de Star Trek dans un feuilletage spacio-temporel » quelle poésie!
Il y a pire quand Ulysse affronte les Sirènes « le contrôle intégral grâce aux offices des GAFA » plus loin, à propos d’un « culte du présentisme » Tesson note que « Le Grec antique n’est pas ‘homme de Zuckerberg ». De grâce!
« Tout est aussi compliqué sur l’Olympe que sur le sol des hommes, à l’université d’été du parti socialiste. L’Olympe bazar affreux » Là où chez Soler Zeus « sourit » nous atterrissons au congrès du PS…
Comment désenchanter le plus enchanteur des textes?
Mendelsohn et son Odyssée: coup de coeur pour moi! J’ai démarré l’Iliade derechef. Puis, sans doute timide devant l’ouvre, j’ai lu Tesson! Ouh là, mais c’est qu’il a failli me détourner de continuer ma lecture d’Homère, tellement c’est lourdingue et répétitif.
Je sesn qu’on est sur la même longueur d’ondes
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@keisha : ravie de lire ton commentaire, avec tout le buzz dans les médias (y compris sur Le Monde et France Culture )- je me sentais un peu seule
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Un livre que je vais pouvoir éviter .. J’attendrai patiemment le Mendelsohn en poche.
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Je ne l’ai pas lu mais écouté et cag passe un peu mieux à l’oral
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Quelle horreur ! On dirait des blagues de potache ! Cela confirme bien ce que j’ai ressenti lors d’une première lecture (et unique) de l’écrivain !
J’ai adoré Mendelsohn et j’ai La pensée chatoyante dans ma PAL.
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@claudialucia : tu peux aussi ajouter Jean Soler :e sourire d’Homère que j’ai bien aimé. Tesson est tout à fait évitable
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Mrrci Myriam Panigel!
Remercier je désire
à cette heure du soir
de ce point du monde
remercier je désire le labyrinthe divin
des causes et des effets
pour la diversité des créatures qui peuplent cet univers singulier
remercier je désire pour l’amour, qui nous fait voir les autres comme
la divinité les voit
pour le pain et le sel
pour le mystère de la rose
qui donne de la couleur
et ne la voit pas
pour l’art de l’amitié
pour le dernier jour de Socrate
pour la langue, qui peut simuler la sagesse
remercier je désire pour le courage
et le bonheur des autres
pour la patrie ressentie dans le jasmin
et pour la splendeur du feu qu’aucun humain ne peut regarder sans une stupéfaction antique
et pour la mer qui est la plus proche
et la plus douce de tous les dieux
remercier je désire
parce que les lucioles sont de retour
et pour nous quand nous sommes ardents et légers
quand nous sommes joyeux et reconnaissants
pour la beauté des mots
nature abstraite de Dieu
pour la lecture, l’écriture,
qui nous font explorer nous-mêmes
et le monde
pour le calme de la maison
pour les enfants
qui sont nos divinités domestiques
pour l’âme,
car si elle descend de sa marche
la terre meurt
pour le fait d’avoir une soeur
remercier je désire pour tous
ceux qui sont petits, clairs et libres
pour l’art ancien du théâtre,
quand il rassemble encore les vivants
et les nourrit
pour l’intelligence de l’amour
pour le vin et sa couleur
pour l’oisiveté avec son attente de rien
pour la beauté tant ancienne
et tant nouvelle
remercier je désire
pour les visages du monde
qui sont variés
et certains sont adorables
pour quand la nuit l’on dors embrassés
pour quand on est attentif et amoureux
pour l’attention qui est la prière spontanée de l’âme
pour nos maîtres immenses
pour ceux qui au cours des siècles
ont raisonné en nous
pour toutes les bibliothèques du monde
pour ce fait de se sentir bien parmi les autres qui lisent
pour le bien de l’amitié quand l’on dit des choses stupides et chères
pour tous les baisers d’amour
pour l’amour qui te rend intrépide
pour le contentement, l’enthousiasme, l’ivresse
pour nos morts
qui font de la mort un lieu habité.
Remercier je désire
parce que la musique existe
sur cette terre
pour la main droite et la main gauche
et leur accord intime
pour ceux qui sont indifférents à la notoriété
pour les chiens, pour les chats,
êtres fraternels chargés de mystère
pour les fleurs et la victoire secrète
qu’elles célèbrent
pour le silence et ses nombreux dons pour le silence qui est peut-être la plus grande leçon
pour le soleil, notre ancêtre.
Remercier je désire
pour Borges
pour Whitman
et François d’Assise
pour Hopkins, pour Herbert
parce qu’ils ont écrit déjà ce poème,
pour le fait que ce poème est inépuisable et change selon les hommes
et il n’atteindra jamais le dernier verset.
Remercie je désire
pour les minutes qui précédent le sommeil,
pour les dons intimes que je n’énumère pas
pour le sommeil et la mort ces deux trésors occultes.
Et enfin remercier je désire
pour la grande puissance de l’antique amour
pour l’amour qui meut le soleil et les autres étoiles.
Et bouge tout en nous.
Mariangela Gualtieri
Traduit de l’italien
ce mardi 14 janvier 2020 Enrico Alberti
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merci pour le poème, pouvez vous l’envoyer en italien
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