LITTERATURE ISRAELIENNE

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Le voyage de l’écriture ressemble, par bien des aspects, au voyage que je faisais en été avec mes parents pour me rendre dans la maison de mes grands-parents, dans les Carpates.
Un regard d’enfant est indispensable à tout acte créateur. Lorsque vous perdez l’enfant qui est en vous, la pensée
s’encroûte, effaçant insidieusement la surprise du premier regard ; la capacité créatrice diminue. Plus
grave encore : sans l’émerveillement de l’enfant, la pensée s’encombre de doutes, l’innocence bat en retraite,
tout est examiné à la loupe, tout devient contestable, et l’on se sent contrarié d’avoir simplement aligné des mots.
Je retrouve toujours avec un grand plaisir l’écriture nostalgique et intime d’Appelfeld qui, encore une fois, a choisi un enfant-narrateur pour évoquer ses souvenirs et un monde disparu. Mon père et ma mère se déroule pendant les vacances d’été 1938 sur les bord du Pruth (affluent du Danube) dans un pays qui a disparu : la Bucovine, entre Roumanie et Ukraine, Czernowitz est maintenant ukrainienne. De nombreux juifs sont en villégiature à la veille de la catastrophe. Certains se baignent, bronzent, piqueniquent mais
Les rumeurs sur la guerre bruissaient dans le moindre recoin. On aurait cru que les gens étaient dans une cage
dont ils essayaient d’écarter les barreaux. Le fleuve coulait, prêt à accueillir encore de nombreuses personnes
sachant nager ou ramer, mais les gens couraient dans tous les sens.
Erwin, 10 ans 7 mois, fils unique, choyé par ses parents est curieux de cette société. L’auteur brosse des caractères originaux comme Rosa Klein qui lit les lignes de la main, ou Karl Koenig, l’écrivain, ou l’homme à la jambe coupée, le docteur Zeiger, d’autres plus ordinaires qui cancanent ou geignent.
Atmosphère idyllique dans la montagne après une chevauchée, simplicité de ces Juifs paysans et pieux : les parents de la mère. Mais aussi un pogrom villageois, tentative d’extorsion du cocher ukrainien. Erwin redoute le retour à l’école sous la menace de Piotr. L’antisémitisme diffus est bien présent mais personne ne se doute de ce que la guerre apportera.
Un récit tout en finesse et en tendresse. Moins impressionnant et tragique que Les partisans, Tsili ou Le garçon qui voulait dormir mais encore un grand livre.
J’attendais ton avis. Le thème de la villégiature juste avant la guerre me fait penser à « Badenheim 1939 » dont j’avais peu apprécié le côté étrange. Ici, on retrouve davantage sa veine autobiographique pure j’ai l’impression ?
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@eifelle : je n’ai pas lu Badenheim 1939, en effet l’inspiration est voisine, la villegiature, l’approche de la guerre.
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Du coup je viens de l’acheter ! J’ai aussi lu un très bon article sur ce roman.
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@nathalie : peux tu me donner les références de l’article?
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C’était dans Le Monde des Livres, mais je ne sais plus quand… 2-3 semaines.
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Je n’ai lu que Les partisans qui m’avait beaucoup intéressée et je me dis qu’il faudrait que j’en lise d’autres de cet auteur. Peut-être celui-ci ?
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@ claudialucia: tu m avais envoyé les épreuves des Partisans que j ai préféré. Tout Appelfeld est a lire!
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