
C’est la biographie romancée de Mary Anning qui découvrit dans les premières décennies du XIXème siècle les fossiles d‘Ichtyosaures et de Plésiosaures sur les plages de Lime Regis (Dorset) qui sont les Prodigieuses Créatures qui ont donné le titre au livre.
C’est comme ça avec la chasse aux fossiles : elle s’empare de vous, comme une fringale, et rien d’autre ne compte à part ce que vous trouvez.
Ce roman à deux voix fait alterner le récit de Mary, la chasseuse de fossiles, et celui d’Elizabeth Philpot, dame de la bonne société passionnée de poissons fossiles.
Nous étions à peine installées à Morley Cottage qu’il devint évident que les fossiles allaient devenir ma passion. Je devais en effet m’en trouver une : j’avais vingt-cinq ans, peu de chances de me marier un jour, et besoin d’un passe-temps pour occuper mes journées. Il est parfois extrêmement assommant d’être une dame.
Le récit d’Elizabeth Philpot commence comme un livre de Jane Austen : trois sœurs, filles d’un avocat londonien, d’installent dans cette modeste station balnéaire après avoir laissé la belle demeure de Bloomsbury à leur frère qui vient de se marier. Trois soeurs à marier, les deux aînées sont déjà des vieilles filles, tandis que la cadette encore fraîche et jolie écume les bals et clubs pour trouver un soupirant. D’ailleurs Jane Austen a résidé à Lime Regis en 1805 et son roman Persuasion s’y déroule. Peut être les soeurs Philpot l’ont-elles rencontrée?

« …un monstre de pierre impressionnant qui mesurait plus de cinq mètres de long et qui ne ressemblait à aucun animal
connu. Ce n’était pas un crocodile. Non seulement il avait ces yeux immenses, ce long museau dénué de bosses
et ces dents régulières, mais il avait également des nageoires plutôt que des pattes, et son thorax était comme un
fût allongé dont les côtes s’alignaient à partir d’une puissante épine dorsale. Il se terminait par une longue queue,
dont la ligne des vertèbres était coupée par une déviation en son milieu. Il évoquait un peu un dauphin, une tortuemarine ou un lézard, sans pourtant concorder tout à fait avec la physionomie d’aucun de ces animaux-là… »
Mary a 12 ans quand elle découvre avec son frère le museau du fossile qu’elle prend d’abord pour un crocodile. Son père qui l’a initiée à la « chasse aux fossiles » vient de mourir laissant des dettes à sa famille qui a pour seul revenu le produit de la vente des « curios » (curiosités) fossiles d’ammonites, gryphées, lys de mer ou oursins dont les touristes sont friands. Elizabeth Philpot, passionnée de paléontologie va accompagner la jeune fille sur la plage, l’aider à extraire le squelette et à le vendre à un notable. Elizabeth, femme de bonne éducation, lit aussi des livres scientifiques et des revues et va partager ce qu’elle sait avec Mary.

Etre une femme-paléontologue ne va pas de soi! Les notables vont s’approprier les découvertes de Mary et les revendre à bon prix. Elizabeth bien introduite dans la société de Londres va tenter de les obliger à attribuer la découverte à l’inventrice. Mais être une femme dans ce milieu n’est pas facile, même Elizabeth doit subir les rebuffades des paléontologues qu’elle connaît par ailleurs, elle y laisse sa santé. Pourtant l’expertise de Mary est reconnue jusqu’à Paris.
« L’ichtyosaure était une créature qu’on n’avait jamais vue auparavant, qui semblait ne plus exister, qui avait
disparu… dont l’espèce s’était éteinte. De ce phénomène, on a déduit que le monde évoluait sans doute en permanence, si lentement que ce soit, qu’il n’était pas immuable, comme on le croyait précédemment. »[…]
« Cela ne me dérange pas de lire la Bible de façon métaphorique et non pas littérale. Par exemple, les six jours de la Genèse ne sont pas des jours au sens propre, mais différentes périodes de la Création, qui correspondent à plusieurs milliers, voire plusieurs centaines de milliers d’années. Cela n’enlève rien à la puissance de Dieu … »
Un autre aspect du roman m’a intéressée. Avant Darwin et les théories de l’Evolution, la découverte de ces « prodigieuses créatures » était contraire aux théories que professait l’Eglise : la création du monde en six jours. Comment s’accommoder de créatures disparues, peut-on imaginer que Dieu les a crées imparfaites et s’en est débarrassé lors du Déluge? L’écrivaine a mis en scène des scientifiques reconnus comme Lyell ou Cuvier et des universitaires d’Oxford.
Un roman qui m’a bien sûr passionnée. Et qui me donne envie de traverser la Manche pour voir la plage et le Musée!
Avec un thème pareil, c’était un livre fait pour toi !
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@Aifelle : exactement! une femme scientifique, des fossiles, la plage…tout pour moi
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Un très bon souvenir de lecture !
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Je garde un excellent souvenir de ce roman bien que je ne sois pas une grande adepte de Tracy Chevalier en général.
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j’en ai lu quelques uns d’elle que j’ai bien aimé, mais pas encore celui là!
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