Le Côté de Guermantes – (1ère partie) – Le téléphone

LECTURE COMMUNE AVEC CLAUDIALUCIA, AIFELLE, KEISHA, FANJA, SANDRINE, DOMINIQUE et d’autres…..

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« Un matin, Saint-Loup m’avoua qu’il avait écrit à ma grand’mère pour lui donner de mes nouvelles et lui suggérer l’idée, puisqu’un service téléphonique fonctionnait entre Doncières et Paris de causer avec moi »

Quelques privilégiés avaient déjà fait installer le téléphone à domicile, entre autres, le père du narrateur. Saint-Loup l’utilise pour joindre sa maîtresse à Paris. Cependant, il faut se déplacer là où se trouve l’appareil, convenir d’un rendez-vous et espérer que le miracle s’opérera.

« Et nous sommes comme les personnages du conte à qui une magicienne, sur le souhait qu’il en exprime, fait apparaître dans une clarté surnaturelle sa grand’mère ou sa fiancée, en train de feuilleter un livre ou verser des larmes, de cueillir des fleurs, tout près du spectateur et pourtant très loin »

Ces magiciennes existent, ce sont, selon Proust,

« les Vierges Vigilantes dont nous entendons chaque jour la voix sans jamais connaître le visage, et qui sont nos
Anges gardiens dans les ténèbres vertigineuses dont elles surveillent jalousement les portes; les Toutes-Puissantes par qui les absents surgissent à notre côté, sans qu’il soit permis de les apercevoir :
les Danaïdes de l’invisible qui sans cesse vident, remplissent, se transmettent les urnes des sons; les
ironiques Furies qui, au moment que nous murmurions une confidence à une amie, avec l’espoir que
personne ne nous entendait, nous crient cruellement: «J’écoute»; les servantes toujours irritées du
Mystère, les ombrageuses prêtresses de l’Invisible, les Demoiselles du téléphone! […]

Ce jour-là, le miracle n’eut pas lieu. Quand le narrateur arrive au bureau de Poste, sa Grand’mère l’avait déjà demandé. La ligne était occupée….

Quand j’amenai à moi le récepteur, ce morceau de bois se mit à parler comme Polichinelle, dès que je le ramenais près de moi, il recommençait son bavardage. je finis en désespoir de cause en raccrochant définitivement le récepteur, par étouffer les convulsions de ce tronçon sonore qui jacassa jusqu’à la dernière seconde

Quand, enfin, il entre en contact avec sa grand’mère, il se rend compte de la douceur de la voix de sa grand’mère mais aussi de sa tristesse de sa grand’mère pour la première fois séparée de lui. Elle lui donnait la liberté de rester éloigné mais le narrateur ressent une telle nostalgie qu’il se compare à Orphée resté seul qui répète le nom de la morte et qu’il ressent l’urgence de chercher l’horaire des trains et de prévenir Saint-Loup de son retour à Paris

« j’aurais voulu une dernière fois invoquer les Filles de la Nuit, les Messagères de la parole, les Divinités sans
visage; mais les capricieuses Gardiennes n’avaient plus voulu ouvrir les portes merveilleuses, ou sans
doute elles ne le purent pas; « 

Entre modernité et poésie. Et avec beaucoup d’humour!

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Auteur : Miriam Panigel

professeur, voyageuse, blogueuse, et bien sûr grande lectrice

5 réflexions sur « Le Côté de Guermantes – (1ère partie) – Le téléphone »

  1. J’avais noté ce passage et cette manière d’envisager le miracle du téléphone. C’est là que l’on s’aperçoit combien nous sommes blasés ! Ce passage est humoristique et triste à la fois. Il préfigure la mort de la grand-mère !

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