Voyager pour lire/Lire pour Voyager
Deux « jours avant le bonheur » : le premier, celui de Don Gaetano, le concierge de l’immeuble napolitain, en 1943 quand la ville s’est soulevée contre les Allemands avant l’arrivée imminente des Américains. Le second, celui du jeune homme, le narrateur, le jeune orphelin, qui va retrouver Anna, la petite fille derrière la vitre de son enfance, qui lui a promis leur grand rendez vous d’amour, les noces que la petite fille et le petit garçon n’osaient rêver.
Entre ces deux grands jours, l’histoire d’un orphelin qui grandit sous la protection de Don Gaetano dans une cour où se tient une statue du roi Roger. Orphelin gracile qui récupérait les ballons que perdaient les grands pour s’approcher de la petite fille de la fenêtre. Orphelin studieux qui trouvait son évasion dans la lecture des livres d’occasions prêtés par don Raimondo, le libraire. Bon élève, étudiant le latin et le grec mais trouvait que le dialecte napolitain convenait parfaitement aux maximes et proverbes. Plombier et électricien aidant le concierge à toutes les réparations de l’immeuble, même les dépannages les plus improbables chez une certaine veuve.
Don Gaetano, également orphelin, lui transmet tout son savoir, lui enseigne la scopa, mais surtout l’histoire de sa ville, Naples, la révolte du peuple, le sens de l’honneur.
Roman d’apprentissage. Evocation merveilleuse de Naples, de ses vieux quartiers, du bord de mer à Mergellina…de sa cuisine, de son dialecte. Naples et son volcan. Naples et ses souterrains Naples et ses quartiers espagnols. Et la camorra…
« Naples s’était consumée de larmes de guerre, elle se défoulait avec les Américains, c’était carnaval tous els jours. C’est à ce moment là que j’ai compris la ville : monarchie et anarchie. Elle voulait un roi et pas de gouvernement. C’était une ville espagnole. L’Espagne a toujours connu la monarchie, mais aussi le plus fort mouvement anarchiste. Naples est espagnole, elle se trouve en Italie par erreur. »
Le jour d’avant le bonheur est le livre jumeau de Montedidio, autre roman napolitain où un jeune garçon apprenait la vie auprès d’un homme qui vivait encore au temps de la guerre. Ce livre m’avait tant ému que quelques semaines plus tard nous nous envolions pour Naples.
Lire également le billet :
Erri de Luca ; Le Jour avant le bonheur – Gallimard – 138 p