Lisbonne (4) Musée du fado

CARNET PORTUGAIS

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Burro tocando guitarra – Julio Pomar

Du Musée des Azulejos au Musée du Fado

Le 794 relie ces deux musées, l’arrêt se trouve devant le porche de l’église, arrêt Madre de Deus. A l’arrêt de nombreux touristes attendant ainsi qu’une dame portugaise et son mari. La dame nous explique qu’il faudra descendre à la 2ème station Apolonia. Depuis un bon quart d’heure le 794 aurait dû passer, celui de 13h41 ne passe pas on plus, ni celui de 14h11. Le couple portugais a pris un taxi, une famille française avec trois gaillards est partie à pied, les autres ont pris d’autres bus. Je songe sérieusement à héler un taxi. Il en passe souvent en maraude. Avec 1heure de retard le 794 arrive bondé.

Musée du fado

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Le bâtiment rose 19ème siècle est en bas de l’Alfama ; Prix : 6€

Pour le prix de l’entrée, au vestiaire on distribue un audio guide en Français avec des explications intéressantes et surtout des extraits musicaux. Un grand montage photographique présente les fadistes de tous les temps (depuis que photos et enregistrements musicaux existent) pas de nom ni de présentation, des numéros. On compose le numéro et on entend le chanteur. L’ennui est que je suis complètement néophyte et que je ne comprends pas les paroles. Au bout d’un certain temps je m’ennuie un peu.

A l’étage, les salles sont plus variées.

Une maison de poupée ? C’est un bordel ! en témoignent les images explicites des jeunes femmes dénudées. Le fado est né dans les périodes de troubles ai 19ème siècle, dans les cafés, les bordels, chez les marginaux et les mauvais garçons. Il existait aussi une version théâtrale le « fado masqué » qui se jouait dans les carnavals lisboètes ou dans les fêtes populaires.

En 1927, une loi tenta d’encadrer ce phénomène marginal. La censure essaya de réguler les côtés troubles et d’enfermer le fado dans les Casas de Fado. . A partir des années 1950, grâce à Amalia Rodrigues, le fado s’internationalise, se popularise surtout au Brésil et en Afrique. Il devient une icône de la culture nationale, intéresse le régime de Salazar, par conséquence subit d’autres critiques.

Sans connaître le fado, je pense au Rebetiko qui lui est contemporain, aussi musique des cafés et des marginaux.

Des œuvres plastiques illustrent aussi le fado.

Le fadiste
Le fadiste de Malhoa

1872, première gravure sur bois d’un fadiste.

O Fado de Malhoa est un tableau très connu. Amalia Rodrigues l’a même chanté. Le fadiste,l’air éméché ou inspiré, tient une guitare. Sa compagne à moitié renversée fume. Sa pose est négligée une jambe posée sur un banc, la tête rejetée. Le peintre a porté une grande attention au décor, réaliste jusqu’aux mégots sous le banc, le bouquet d’œillets et les objets d’un intérieur populaire. Il a convoqué les habitants du quartier pour garantir l’authenticité.

O Marinheiro de Constantin Fernandes (1913) symbolise un autre aspect du fado la saudade- la nostalgie -. Dans ce triptyque on assiste au départ du marin, à sa nostalgie à la réception d’une lettre de sa femme, tandis que l’émotion est à son comble au retour à quai du bateau, scène de retrouvaille sur le panneau central.

Llisboète
Lisboèta de Costa Pinto

Lisboeta(1952) de Candido Costa Pinto : une femme masquée porte une guitare et un plateau avec une bouteille de Porto. Du linge sèche. Ses bas noirs trop courts donnent une impression équivoque, le masque une atmosphère étrange le tout a un air de surréalisme. .

Au sous-sol,  exposition temporaire du peintre Julio Pomar « Sans Caprice ou Présomption »

Ulysse
Ulysse

J’ai beaucoup aimé les couleurs éclatantes, les rouges, les jaunes et la variété des thèmes. Mon tableau préféré est Burro tocando guitarra(2011), un Portrait de Pessoa portrait de l’écrivain avec deux visages ainsi que deux versions d’un même thème Tableau grand format et lithographie de Ulisse e as sereias (qui voudra bien traduire ?). Je suis toujours sensible au thème d’Ulysse. Ici, Ulysse  a un air brésilien ou tropical, on reconnait par contre son embarcation grecque.

Je suis plus sensible aux expositions plastiques que musicales. Cela me donne envie de connaître mieux cette musique. J’ai l’impression que ce musée s’adresse plutôt à des initiés qu’à des touristes comme au Caire, le Musée Oum Kalsoum.

A 16h, le soleil cogne c’est une fournaise. Je n’ai qu’une envie : m’asseoir à une terrasse ombragée et commander une boisson fraîche. Dans les petites rues de l’Alfama il y a de nombreuses casas de Fado, des restaurants qui occupent les ruelles à l’ombre. Malgré l’heure tardive, toutes les tables sont prises par des « déjeuneurs ». Pas question de s’asseoir pour de simples consommations. J’ai si soif que je me précipite dans une épicerie et achète une bouteille d’eau glacée. Les ruelles de l’Alfama me donnent envie de dessiner. Je m’installe sur une marche dans une placette adorable à l’ombre d’une tonnelle – ficus et vigne – des guirlandes en papier crépon sont tendues entre les maisons. Je dessine les portes, les balcons et le linge suspendu. J’aurais bien aimé me promener plus longtemps mais la chaleur assomme.

Lisbonne (3) musée des azulejos

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Googlemaps  a fourni l’itinéraire : autobus 759 sur la place du Rossio.

Le Musée est dans le couvent de Madre de Deus dans un quartier industriel. Comme c’est trop tôt, je prends un café au comptoir d’un bistro très prolo 0.60€. Pusi on attends l’ouverture dans la cour fleurie. Des Althéas  fleurissent rose et leur pistil est grand comme celui d’un hibiscus.

Nous avions déjà visité ce musée et acheté le catalogue. Cette nouvelle visite est un plaisir renouvelé.

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Les salles d’exposition sont réparties autour d’un patio d’une simplicité monacale. Le parcours est chronologique et très didactique il y a aussi un parcours tactile pour non-voyants. Les premiers azulejos sont maures. Les plus anciens son 13ème . J’ai du mal à distinguer les motifs maures des motifs gothiques. Les carreaux Renaissance sont plus élaborés, les lignes sont plus courbes, il y a plus de fruits ou de fleur. On cite une commande du Duc de Bragance en 1558 d’azulejos italo-flamand-maniéristes.

La production d’Azulejos ne commence à Lisbonne qu’au 16ème siècle.   Deux versions coexistent : grandes scènes historiées et carreaux répétitifs formant une « tapisserie ». Un magnifique retable polychrome 1580 occupe tout un mur ; Les motifs des « tapisseries » sont variés : ceux à la « pointe de diamant » peuvent avoir un carré au centre, ou une pyramide ou un ovale. (vu à Tomar à la chapelle)

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Au 17ème siècle l’Eglise était le principal commanditaire d’azulejos pour couvrir l’intérieur des églises. D’autres motifs sont floraux : camélias ou acanthes, d’autres religieux comme les coquilles saint Jacques ou les croix de Malte. Les azulejos évoluent sous des inspirations sont asiatiques, chinoises ou indiennes, paons et animaux exotiques sont représentés ainsi que dees éléphants ou des pagodes.

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L’église de Madre de Deus est très riche en dorures et tableaux. Comme notre visite est centrée sur les azulejos je les néglige. Le bas des murs est habillés de carreaux bleu et blancs de deux artistes flamands Willem van der Kloet (1666-1747) et Jan Van Qort . Flandre, bleu et blanc, chercher une piste du côté de Delft ? Les scènes sont bucoliques, la présence de crocodiles est étrange

Un petit cloître sur deux étages, bordé de fines colonnettes est « tapissé » de carrelage. A l’étage on retrouve motifs manuélins de cordages et feuillages.

 chasse au léopard
chasse au léopard

La visite continue à l’étage : trois tableaux colorés ont des sujets mythologiques « Neptune et Amphitrite » ou profanes.  Une « chasse au Léopard » m’a amusée ; se déroule-t-elle en Afrique en Amérique ou en Asie ? Des indiens sont nus avec des pagnes en feuilles, armés de lances, les léopards occupent une grande partie de l’espace. L’un deux se mire dans une glace trouvée dans un coffre ouvert, abandonné. Le tableau le plus burlesque est « le mariage de la Poule ». la Poule arrive dans un carrosse tandis que les singes viennent d’un autre angle dans une charrette, portant des instruments de musique ou chevauchant des chevaux. Le décor est oriental avec de nombreuses tours , minarets ou clochetons .

mariage de la poule
mariage de la poule

D’autres sujets sont plus classiques comme « La Bataille d’Alexandre au Granique contre les Perses ». autre burlesque : un médecin administre un clystère.

Au 18ème siècle, les scènes sont le plus souvent bleues et blanc parfois incluses dans une frise colorée dans les tons de jaune brun ou rose : scènes de la vie quotidienne racontant celle d’un chapelier.

18ème siècle
18ème siècle

A l’étage on voit le « panoramique de Lisbonne » qui montre la ville avant le séisme de 1755. La tour de Belem est bien reconnaissable ainsi que le monastère dos Jeronimos. Entourées par des murs, des quintas, des palais sont dispersés dans la campagne. Un grand palais occupe la Place du commerce. Les collines du château et de l’Alfama, en revanche sont construites. En face du panoramique « Lisbonne aux mille couleurs » a été réalisée pour l’Exposition de Paris e 1937 par Paolo Ferreira (1911-1999).

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Si le 19ème siècle m’intéresse moins, je me rappelle les azulejos des Gares de chemin de fer.

En revanche les œuvres du  20ème siècle sont bien représentées. Sous le titre « Réinterpréter les traditions » plusieurs séries de carreaux dessinés par Alvaro Siza Veira sont très intéressantes. Nous avons aussi aimé un  panneau de Querubim Lapa (pavillon du Portugal exposition de Lausanne 1957 et une composition 1991 sur un fond rosé rythmé par des carreaux en parallélogramme, un renard et un chat ( ?) se lancent une balle. Sorti du cadre il y a aussi une maison et un bateau.

Pour finir, une exposition temporaire est consacrée au design d’Alvero Siza Veira.

Le restaurant est installé dans le patio sous des bâches vertes. Au fond u n bassin carré et une vasque sont peuplés de poissons rouges. Nous choisissons d’y déjeuner. 9.5€ Bacalau au four et miettes de pains de maïs . Les miettes- de la chapelure – recouvrent le poisson qui s’effeuille. Sur le poisson on a disposé des oignons en rondelles, et en dessous des épinards en branches. Quatre pommes de terres dans leur peau craquante ont cuit avec le poisson. C’est délicieux et abondant. 2€ une soupe à la coriandre et à la crème, très fine. Et 6.5€ une quiche de légumes  accompagnée de salades.

C’est un peu cher dans les standards portugais mais c’est excellent et surtout le cadre est parfait.

Lisbonne (2) Belem

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Munies de nos cartes de transport, nous trouvons  Place Figueira le tramway 15 pour Belem . Le tramway est le moyen idéal pour visiter la ville.

Après les rues étroites de la Baixa, le tramway débouche sur l’énorme Praça do Comercio dont les arcades font penser à Rivoli, arc de triomphe, à l’arrière le Tage.

Le tramway s’arrête devant le Monastère dos Jeronimos. Eblouies par la blancheur du portail, la finesse des statues, nous en oublions de consulter nos guides. Je ne saurais donc pas identifier ces personnages de Joao de Castilho. L’émerveillement est total quand on entre dans le cloître. La dentelle de pierre, la profusion des décors fait oublier la foule de touristes plus ou moins bien élevés. La palme revient à une famille française qui sort les sandwiches emballés dans de l’alu et s’adosse aux colonnes.

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Nous avons visités des cloîtres tous plus beaux les uns que les autres mais celui-ci surprend encore. Il me semblait qu’après Tomar rien ne pourrait le dépasser en gloire des Grandes Découvertes. A Tomar la puissance des Templiers et de l’Ordre du Christ, leur richesse étaient manifeste. La fenêtre manuéline était une allusion aux découvertes, mais on sentait l’ordre monastique. Le moistero dos Jeronimos est plus exubérant, plus fantaisiste. Les décors de Boytac, de Jérôme de Rouen puis de Jao de Castilho et enfin de Nicolas Chantereine, et de Diogo de Torralvo, sont d’une profusion inégalée. Je m’attendais à des cordages, des nœuds marins, des bateaux, des sphères armillaires : thèmes manuélins, il en a, au milieu de colonnes torses aux boutons de rose, feuilles de vigne, clous…Lequel de ces sculpteurs a eu l’idée de cet angelot qui taquine un oiseau ou de cet autre putti chevauchant un lion qui fait des grimaces. Certaines scènes auraient pu se jouer dans la Renaissance italienne. Dans la dentelle de pierre ajourée qui pare le haut des arcades je reconnais u bateau, une croix des Templiers mais parmi tant de fantaisie. Une photo du 19ème siècle montre le cloître rempli de fontaines de céramiques mauresques. La verte pelouse qui les remplace est bien sobre ! La galerie supérieure est dessinée par Jao de Castilho. De là on entre dans le haut chœur de l’église et on découvre la hauteur de la nef et ses décors tempérés par la pénombre.

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Leçon d’histoire dans une salle : une frise chronologique raconte l’histoire du Portugal et la place dans une perspective mondiale, se déroulant des premiers rois du Portugal jusqu’à la Révolution des Œillets. Une journée entière aurait été nécessaire pour l’étudier dans le détail ! Je me contente du début : de l’Expédition de Tanger (1137) – souvenir des tapisseries de Guimarães – jusqu’au règne de  Manuel (1495-1521). Juste avant la Prise de Constantinople (1453) je note en 1441 l’arrivée des premiers esclaves noirs au Portugal et l’installation de la première sucrerie à Madère (1552).

Avant que Colomb ne découvre l’Amérique en 1492, Dias avait passé le cap Bonaventure en 1488.

1500, les Hyéronimites s’installent à Belem.

1502 Cabral découvre le Brésil, c’est aussi l’année du début de la construction du monastère.

1510 : fenêtre manuéline de Tomar

1512 à 1515 Diogo et Francisco de Arruda fortifient Safin, Mazagan et Ceuta, ce même Francisco de Arruda qui a construit Brotas et Evoramonte mais surtout l’architecte de la tour de Belem(1519)

Je clos ma copie avec l’installation de la première sucrerie au Brésil en 1532.

Autre leçon d’Histoire dans la salle Capitulaire où se trouve le tombeau d’Alexandre Herculano (1810-1877) historien, écrivain, polémiste et journaliste. Cette leçon d’histoire commença avec la Révolution Française dont les idées furent propagées par les armées de Napoléon qui envahirent le Portugal, continuant avec les luttes entre monarchie absoljue et libéraux se concluant avec la Convention d’Evoramonte (1834). Suppression des ordres religieux en 1833.

Beaucoup de textes sont en Portugais et obscurs. Je ne prends pas tout en note.

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Le Réfectoire (1577-1618) est d’une sobriété monastique. Seul décor : une belle frise d’azulejos (18ème siècle) sur des thèmes bibliques.

Nous terminons la visite par l’église Santa Maria qui renferme els tombeaux de Camoes et de Vasco de Gama.

Nous aurions été bien inspirées d’aller à pied à  la tour de Belem (15minutes) plutôt que de reprendre le tram. La tour ne se voit pas de la rue où il passe. On se retrouve au terminus.

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La lige de chemin de fer coupe l’accès aux bords du Tage. Un haut pont la franchit à la hauteur de la Tour de Belem. Seulement 150 personnes sont admises en même temps dans la tour de Belem. Du rez de chaussée on peut admirer la merveilleuse loggia de Francisco d’Arruda, zoomer sur les sculptures. Nous aurions dû nous arrêter là. Après, c’est le piège à touristes : l’escalier qui conduit à la terrasse (93 marches) est en colimaçon ; on ne peut pas s’y croiser. Un astucieux système de flèches rouge et vertes et de signal lumineux est censé réguler le passage. Il ne marche pas toujours. si on rencontre des gens en sens inverse il faut reculer(si c’est possible) ou attendre dans els salles aux étages. Il y a tellement de monde qu’on ne voit rien. Tellement d’attente qu’on ne regarde rien tant on est pressé de sortir.

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On aurait envie de longer le Tage pour rejoindre le Padrao dos Descobrimentos – le Monument des Découvertes . la marina allonge le chemin, pas de banc deux terrasses de café. On se traine jusqu’au monument. Je ne goûte pas spécialement les sculptures gigantesques (52m de hauteur) élevée en 1960 par Leopoldo de Almaida. Un grand vaisseau de pierre porte sur chaque face une théorie de chevaliers, et d’autres personnage qui font cortège au roi Henri le Navigateur debout à la proue. A la poupe, il y a une très grande croix et un ascenseur (4€). Si j’avais pris le guide Vert j’aurais cherché Camoens le roi Manuel et le peintre Nino Gonçalves. Le livre étant resté à l’hôtel, non seulement je ne les ai pas cherchés mais j’ai effacé la photo de la face à l’ombre, où ils figurent.

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La place est pavée d’une grande rose des vents. En son centre la carte du monde raconte les découvertes. Les continents sont en marbre rose, les mers de calcaire beige. On a gravé dans les mers les caravelles et les dates des découvertes.

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Fourbues nous rentrons en tramway. A19h, les pastellarias et notre petit self rangent leurs chaises. IL ne reste plus que les restaurants pour touristes. Miracle ! Au rez de chaussée d’un hôtel au coin de notre rue, Pingo doce la grande chaîne de supermarché a un magasin. J’achète 8 yaourts, des sandwiches et des gâteaux puisque on a un frigo ans la chambre ; Dîner et petit déjeuner sont assurés, on fait des économies !

La place au bas de la gare et de nos fenêtre et éclairée, on dîne aux chandelles. Sur une estrade une chanteuse interprète des tubes planétaires : de la musique cubaine, Cesaria Evora…rien d’original mais cette musique vivante est plaisante. Il fait un peu frais pour rester bras nus sur la place. Notre chambre est un galetas mais le concert est gratuit !

 

Pereira prétend – Antonio Tabucchi

CARNET PORTUGAIS/LE MOIS ITALIEN

Pereira prétend

Pereira prétend, ces deux mots reviennent comme un refrain. Pourquoi prétend ? Pereira donne sa version d’une histoire singulière, dans une période singulière de l’histoire du Portugal. Portugal sous Salazar alors que fait rage la Guerre d’Espagne, où les jeux ne sont pas encore faits, où un bataillon portugais combat aux côtés des franquistes. Lisbonne, semble calme et pacifique mais dans  « un charretier socialiste avait été massacré sur sa charrette dans l’Alentejo et avait couvert de sang tous ses melons » tandis que la presse portugaise célèbre le « yacht le plus luxueux du monde ». Pereira est journaliste. Mais les nouvelles, il les apprend du garçon du café Orquidea .

Le doutor Pereira est responsable de la page culturelle du Lisboa un journal catholique. Il mène une vie rangée, ne s’intéresse pas à la politique, entre omelettes aux herbes et citronnades bien sucrées, il traduit des pages de Balzac, de Maupassant ou d’Alphonse Daudet pour sa page hebdomadaire et aimerait rédiger des billets, éphémérides ou des nécrologies d’auteurs qui viendraient à disparaître. Pour cette dernière éventualité, il songe à embaucher un jeune stagiaire.

La rencontre avec ce jeune homme et son amie Marta,   plus que les turbulences de l’actualité, fait prendre un tournant à cette existence tranquille. Tandis qu’il pousse le futur journaliste à s’intéresser à des écrivains catholiques Bernanos et Mauriac, le jeune homme écrit des billets politiques impubliables sur D’Annunzio, Marinetti ou Maiakovski… Pereira ne parvient pas à licencier son stagiaire inutile, au contraire il paie de sa poche son salaire. Un médecin, dans une cure de thalassothérapie qui lui ouvre les yeux  « Et si les deux jeunes avaient raison ?[….]ma vie n’aurait pas de sens, ça n’aurait pas de sens d’avoir étudié les lettres à Coimbra, et d’avoir toujours cru que la littérature est la chose la plus importante du monde, ça n’aurait pas de sens que je dirige la page culturelle de ce journal où je ne peux pas exprimer mon opinion, et c’est de cela que je sens le besoin de me repentir, comme si j’étais une autre personne et non pas le Pereira qui a toujours été journaliste, comme si je devais renier quelque chose. »

La routine quotidienne est bousculée, Pereira prend conscience de la censure, puis de la violence de la dictature….

J’ai beaucoup aimé ce récit qui m’a promenée dans Lisbonne, et m’a raconté une période que je connaissais mal.

logo eimelle, le mois italien

 

 

 

Magellan – Stefan Zweig

LIRE POUR LE PORTUGAL 

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Les Grandes Découvertes ont été un des thèmes récurrents de notre voyage. la biographie de Magellan, une évidence, surtout par Stefan Zweig, un écrivain que j’admire infiniment. 

Zweig replace cette biographie dans le contexte historique de la Route des Épices:

« Derrière les héros de cette époque se cachent les forces agissantes, les commerçants, l’impulsion première elle-même a eu des causes essentiellement pratiques. Au commencement étaient les épices. »

Il raconte comment le Portugal s’est lancé dans les Grandes Découvertes :

« Transformer le Portugal; ce petit pays impuissant, en une puissance maritime, et l’Océan Atlantique, considéré comme un obstacle, en un moyen de communication a été en substance le rêve de toute la vie de l’Infant Henrique, celui que l’Histoire a surnommé le Navigateur. »

Le monument des Grandes Découvertes à Belem
Le monument des Grandes Découvertes à Belem

« Au début du 16ème siècle « le plus petit état d’Europe pourra prétendre posséder et régir un territoire plus vaste que l’empire roman au temps de sa plus grande extension. »

C’est donc un épisode d’une épopée digne des conquêtes d’Alexandre que Zweig  va nous conter. Explorations des mers lointaines et rivalité entre le Portugal et l’Espagne de Charles Quint, régulée par le pacte de Tordesillas.

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Après la Découverte de l’Amérique « Un seul exploit reste encore à réaliser, le dernier, le plus beau, le plus difficile : faire sur un seul et même navire le tour du globe, prouver envers et cotre tous les cosmographies et les théologiens la sphéricité de la terre. Accomplir cette mission sera le but et la destinée de Fernao de Magalhaes. « 

Magalhaes, c’est le nom de l’aventurier dans Les Mystères de Lisbonne j’aime bien ces clins d’oeil que se font les livres. Hasard ou volonté de Camilo Castelo Branco? Zweig retrace la carrière que Fernao  Magalhaes fait au service de la marine portugaise, ses expéditions aux Indes et dans les îles lointaines où il apprend la navigation et où il s’illustre dans des faits d’armes. Il ramène un esclave malais Henrique qui servira de traducteur dans son tour du monde. Années d’apprentissage puis démarches auprès du roi Manoel afin de réaliser sa grande idée : rejoindre les îles Moluques ou poussent les épices en passant par la route de l’Ouest. Est-il un mauvais courtisan? Le roi ne soucie-t-il plus d’élargir son empire? Il ne réussit pas à le convaincre.

Fernao Magalhaes quitte le Portugal pour se mettre au service de l’Espagne, il devient Magellan et ira conquérir des îles pour Charles Quint

« Ce que Magellan vit en cette minute, c’est la tragédie de Coriolan, du transfuge par amour-propre, immortalisée par Shakespeare. Comme lui coriolan a servi fidèlement sa patrie pendant des années, qui repoussé par elle, met son talent dédaigné au service de l’adversaire. » 

« il sera toujours seul, et seul contre tous »

Zweig montre les minutieux préparatifs de l’expédition qui pourra durer de longs mois voire plusieurs années. Il raconte les embûches que les nobles espagnols et le roi du Portugal sèmeront sur son passage pour faire échouer le départ. 

Le 20 septembre 1519 cinq navires quittent Séville, 1 seul rentrera.

« …c’est ainsi que surgit brusquement au milieu de tous ces navigateurs, chercheurs d’or et aventurier, un étrange idéaliste; qui ne se lance pas dans l’aventure pour la gloire ou l’argent, mais par amour sincère du voyage, pour la simple joie de voir, d’apprendre et d’admirer… » 

c’est l’italien Pigafetta qui consignera les souvenirs de l’aventure.

« Que serait Achille sans Homère? »

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« Shakespeare a utilisé pour sa Tempête une scène du récit de voyages de Pigafetta » note Zweig. En plus d’une narration précise du périple à travers les mers, un vrai roman d’aventures avec tempêtes, mutinerie et famines, Zweig donne une dimension littéraire à sa biographie de Magellan avec les références à Homère et à Shakespeare; même à Tristan et Isolde de Wagner!

Quelle joie quand il atteint les Philippines puis les Moluques, quand l’esclave Henrique retrouvent des hommes qui parlent son langage.

« Ainsi le cercle s’est fermé : à l’autre bout du monde, sous d’autres cieux, l’Europe s’est heurtée à l’Europe. Jusqu’à présent dans sa route vers l’Ouest, Magellan n’avait trouvé que des territoires inconnus. » [….] par dessus les océans immenses un pont est jeté de leur monde à ce monde nouveau »

Magellan ne connaîtra pas la gloire à Séville.

« Ainsi périt, dans une bagarre stupide avec une horde de sauvage, le plus grand navigateur de tous les temps. un génie, qui, comme Prospéro, a maîtrisé les éléments et vaincu toutes les tempêtes et triomphé de tous les obstacles, est abattu par un misérable roitelet indigène »

Le retour se fera sans lui du 27 avril  au 6 septembre 1521 sur des routes maritimes connues mais tenues par les Portugais qu’il faudra éviter.

« De même que le Cid mort maintenu par ses hommes sur son fidèle cheval de bataille remporte encore une victoire, de même l’énergie de Magellan impose, par delà le trépas, sa volonté. Ses hommes contemplent enfin la terre promise qu’il ne lui a pas été donné de voir »

Je referme le livre avec la furieuse envie de lire maintenant sa biographie d’Amerigo.

 

 

Arrivée à Lisbonne

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On quitte à regret la maison dans les bois, la terrasse et les oiseaux. Uier, un œuf est tombé du nid d’hirondelles. Il a attiré une colonne de fourmis. Nous retrouvons à Vendas Novas la RN4 qui nous emmène jusqu’à Montijo en face de Lisbonne. Nous traversons des cultures maraîchères et horticoles. Le revêtement de la chaussée est en très mauvais état. Toujours la même observation : de magnifiques autoroutes vides et un réseau secondaire mal entretenu. A Montijo nous montons sur l’autoroute A12 puis sur le Pont Vasco de Gama. Avant le pont nous voyons des marais avec des flamants roses, puis des marais salants en exploitation. Le pont Vasco de Gama est spectaculaire, suspendu à de haubans triangulaires. En face, Lisbonne se profile hérissée de  tours modernes. L’aéroport est très facile à trouver, le retour de la voiture se fait dans un parking souterrain.

A 11h, nous sommes dans un taxi avec nos trois valises.  Le métro a une belle bouche de céramique rouge sur le parvis de l’aéroport mais nous sommes vraiment trop chargées et la valise verte ne roule pas. Cela nous coûtera 20 € (16 au compteur)le chauffeur n’est pas d’humeur à rendre la monnaie, ni nous à contester.

L’hôtel Estrela do Mondego, calçada do Carmo, est juste au dessous de la gare du Rossio dans un vieil immeuble. Pas de réception en bas, un bouton d’interphone. Je grimpe au deuxième étage par un escalier ciré . Heureusement, il  a un ascenseur ! On nous offre d’abord une vaste chambre à deux litsavec une salle de bain (reliée par un très étroit passage). Nous n’avons pas encore déballé la valise que le réceptionniste vient nous annoncer qu’il faut déménager. La nouvelle chambre est étrange, elle est précédée d’une sorte d’antichambre avec – grand luxe ! – un frigo, une sorte de canapé mais pas de salle de bain ni toilette. La douche est bien dans la chambre, perchée sur une estrade, en plein milieu. On a collé du vénilia à fleurs sur la paroi transparente. Le lavabo est minuscule, pas de tablette pour le verre à dents. Un tube de néon éclaire le lit (cela fait hôpital). Des fleurs artificielles, cela fait cimetière. En revanche par la fenêtre une vue très agréable sur une placette sous la gare avec les terrasses de restaurants. Le soir, sur une estrade, il y  même de la musique vivante. Les dîneurs ont une bougie dans un photophore, très classe ! Nous allons rester 3 nuits. Il faudra nous adapter et surtout sortir le plus possible :

Premier objectif : acheter une carte de transports pour 3 jours. Cela se vend à la Casa do Sorte(la maison de la chance ? pas si étrange, c’est une boutique qui vend des billets de loterie et des jeux à gratter et accessoirement des titres de transport. 18€ pour 72h, la carte des 7 Collines qui donne droit au tramway, métro, autobus et ascenseurs mais pas aux ferry pour traverser le Tage.

notre cantine, prix imbattables
notre cantine, prix imbattables

Deuxième objectif : chercher un restaurant pour le déjeuner. Notre rue Calçada do Carmo est occupée par les tables de deux restaurants pour touristes(menu en 4 langues), prix pour touristes (sardines 8.5€ alors qu’on avait payé 6.5€ le repas complet à la mer).

La Calçada débouche sur la grande Place du RossioDom Pedro IV est en majesté. Belles terrasses de la Pastelleria Suiça et de Nicola qui ne correspondent pas à ce qu’on cherche. Nappes chics, prix encore plus élevés. Les rues adjacentes sont elles aussi remplies de restaurants touristiques.

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En face du kiosque de l’information touristique, je découvre la cantine idéale (depuis 1840 !)6 tables rondes des chaises en aluminium. Self-service à des prix défiant toute concurrence. On va au comptoir choisir la marchandise, on la rapporte soi-même sur un petit plateau ! soupe 1.20€, bacalau 2.20€, rissois de crevette, bolhinos de bacalau…. Le problème est de trouver une table. Elles sont toutes occupées. Deux jeunes femmes qui terminaient le café et le dessert nous proposent de partager leur table. La soupe est délicieuse, haricots blancs chou,  la morue aurait pu être plus dessalée elle s’éffeuille avec de grosses arêtes mais elle a bon goût.

Quels sont ces chevaux qui jettent leur ombre sur la mer – Antonio Lobo Antunes

LITTÉRATURE PORTUGAISE

 

quels sont ces chevaux

 

Je prolonge le voyage par l’exploration de la littérature portugaise : Antonio Lobo Antunes , un auteur à découvrir.

Un beau titre, une belle couverture m’ont séduite à la Médiathèque. Si j’avais lu 4ème de couverture, je ne sais pas si j’aurais entrepris cette lecture .  La famille est réunie pour veiller la mère qui se meurt. Triste dimanche de Pâques pluvieux à Lisbonne. Souvenirs d’enfance, secrets de famille resurgissent, jalousies, ressentiments.

Ce livre choral est d’une lecture difficile. Peu ou pas de ponctuation. Des phrases hachées, même des mots coupés. On ne sait pas qui est le narrateur. La phrase est coupée par une parenthèse en incise, ou une interjection « -toi, » ou « -ma fille ». Qui est donc intervenu? les récits s’entrecroisent. Flash-back,  images de la quinta où le père élevait des taureaux, vacances dans une pension à la mer. Photos anciennes d’ancêtres .

Chacun garde son quant à soi. Il y a peu de dialogue, peu d’échange entre les frères et sœurs désunis. Francisco cherche à tirer profit des restes de la fortune perdue. Du mépris pour Ana, la laide, la droguée qui fouille à la recherche de quelque objet de valeur. Peu de compassion non plus pour Joao, qui drague les garçons au parc. Qui est donc ce mystérieux frère caché à la quinta? Les disparus aussi interviennent.
Il m’a fallu, une bonne centaine de pages pour m’y retrouver. J’ai envisagé abandonner. Puis, je me suis laissé emporter par les phrases poétiques, par la sensibilité de l’auteur. Le style est haletant, des phrases mystérieuses, des images reviennent comme ces chevaux qui jettent leur ombre, on retrouve une pensée interrompue, comme une obsession.

Le 4ème de couverture annonce une tragédie, comme une corrida. Je ne connais rien à la tauromachie. Je n’ai pas pu apprécier les allusions, ni en  comprendre le plan.

 

Evoramonte – Arraiolos

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Evoramonte sur sa colline
Evoramonte sur sa colline

Le village d’Evoramonte est à 20km à l’est d’Evora. Pour gagner du temps et éviter la traversée de Montemor et d’Evora nous choisissons l’autoroute que nous quittons à la sortie 6 juste après Evora. Il reste encore 17km de route.

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Négligeant le village moderne au pied de la colline, nous montons à l’assaut du château Ses remparts foncés encerclent le sommet ; le château blanc les domine de sa hauteur. On peut entrer en voiture dans l’enceinte.  Une rue monte à l’esplanade où se tient le château, une autre, dans son prolongement, descend à l’église et au cimetière. Ces deux rues sont bordées de maisons bien blanches ornées de plantes en pots. Près du château  on remarque deux portes au tour en granite et à l’ogive gothique. Une maison porte une simple plaque : c’est ici qu’a été signée la Convention d’Evoramonte fin 1834 qui a mis fin à la guerre civile entre Libéraux et Absolutistes. L’Office de tourisme est fermé, le café-restaurant aussi. Seule boutique ouverte : celle d’une céramiste. Nous faisons donc une promenade très tranquille à travers les rues désertes, animées seulement par les allers et retours de quelques chats. Tout est photogénique : les pavés de la rue en pente, les hautes cheminées blanches, les façades rehaussées de jaune d’or ou bleu.

Le château d'Evoramonte
Le château d’Evoramonte

En me rapprochant du château, je suis déçue de découvrir que le château blanc est recouvert d’un enduit de ciment gris fort laid au lieu des belles pierres blanches que j’imaginais. . La restauration aurait-elle été bâclée ?

Le château se visite. Un plasticien a conçu des installations à l’intérieur du château. Son œuvre-maîtresse qui donne le titre à l’exposition – Pegasus – une moto à voile, le cheval ailé  s’envole de la grande salle du 2ème étage.

Salle du château d'Evoramonte
Salle du château d’Evoramonte

Au rez de chaussée, dans une salle voûtée aux belles arcades sont  soutenues par de courts piliers de roche claire qui sont sculptés de motifs manuélins « flammes » évoquant l’amour mystique ou les vagues de la mer. Dans cette salle basse on a disposé des panneaux explicatifs qui m’ont beaucoup intéressée. Certains présentent le château, son « plan centré » avec ses trios salles carrées superposées flanquées de quatre petites pièces dans les tourelles.  Contrairement à ce que j’imaginais en le voyant dominer ses remparts crénelés, Evoramonte n’est pas un château-fort ni une forteresse. C’est une résidence de chasse, un palais de prestige « imitation de Chambord ». Là, je tique, Chambord est autrement plus grand et plus beau !

Construit très rapidement en 2ans en matériau composite – pierre, briques –  à l‘origine, on a donné la part belle au mortier. Le ciment de la rénovation rappelle donc l’esprit de la construction.

Un autre panneau établit une longue chronologie que j’ai recopiée en sautant des étapes.

1166 Evoramonte est conquise par Afonso Henriques

1248 : octroi de la charte d’Evoramonte

1306 : une inscription sur la forte de Feixo apporte le témoignage de la fondation du château

1512 le duc de Bragance se réfugie dans le château accusé du double meurtre de sa femme et de son amant

1531 un séisme met à bas la forteresse

1532-1533 reconstruction du palais

1725 nouveau séisme 2 tours s’écroulent

1834 convention d’Evoramonte

On a pas trouvé de vestiges de la période maure mais le village a des caractéristiques méditerranéennes : maisons blanches, carrées, dôme rond sur la chapelle.

D’autres panneaux montrent des châteaux construits à la même époque qu’Evoramonte. Je retrouve Aguias Brotas, la tour vue hier. Elle a été construite en 1530.

La Tour de Brotas, le château d’Evoramonte, la tour de Belem seraient toutes les trois de la même veine.

Des décorations manuélines discrètes ornent le château chaque étage est enserré à l’extérieur d’une corde marine sous les fenêtres carrées, on voit un nœud de marin. A l’intérieur al base des chapiteaux représentent des flammes qui peuvent aussi être les vagues de l’océan.

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De la terrasse du château, la vue est panoramique : on voit partout des oliviers plantés régulièrement ;   les oliviers portugais ont une coupe un peu bizarre, ils sont comme étêtés, cours et non pas taillés en coupe comme en Italie ou en Grèce. Au lieu de voior de beaux troncs noueux et tordus on voit une sorte de buisson. Les arbres majestueux sont les chênes-lièges.

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Nous trouvons la RN4 venant d’Espagne pour gagner Arraiolos, la ville des tapis brodés. Comme à notre habitude, nous montons au château perché entouré de ses murailles (1306-1310). Elles ont fait l’objet de nombreuses reconstructions, la dernière de 1944(il semble que Salazar ait consacré beaucoup d’énergie aux châteaux médiévaux !).

Du château (1306-1315), il ne reste que deux tours, l’une d’elles à peu près carrée, l’autre à peu près octogonale.

La colline est coiffée d’un imposant sanctuaire : l’église du Salvador (1275 modifiée au 16ème siècle )à qui détonne dans cet environnement médiéval.

Les rues très en pente sont bordées de maisons blanches au décor bleu. Pas de brodeuses sur le pas de la porte ! Peut être n’existent-elles que dans l’imagination du rédacteur du guide touristique (ou préparent elles le déjeuner à cette heure-ci).la ville semble active avec des équipements neufs, de nombreux cafés.

Brotas

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Tour de Brotas
Tour de Brotas

Pour profiter davantage de notre belle maison j’ai prévu un circuit dans les environs immédiats : route jusqu’à Ciborro (9km), puis vers le nord sur la route de Mora,  une dizaine de km jusqu’à Brotas et de là  Arraiolos, village des tapis brodés et retour par Montemor-o-Novo.

A la sortie de Ciborro, dans une propriété privée, mais bien visible de la route, nous percevons un petit dolmen, en bon état avec sa table bien entière (son chapeau comme disent ls pancartes en Portugais). Une carte montre d’autres dolmens dans la propriété. Il faut prévenir le Musée de Coruche qui organise des visites en 4×4. Ce petit dolmen d’Agua Doce est un bonus à la journée d’hier, une surprise.

Dolmen d'Agua doce sur la route de Coruche
Dolmen d’Agua doce sur la route de Coruche

Brotas est un village compliqué. Un feu tricolore régule les entrées. Le centre historique est tout en bas du village à droite de la route principale. Nous en ratons l’entrée, très discrète. Le village moderne est en haut : il est composé de petites maisons blanches de plain-pied au tour des fenêtres soit bleu soit jaune, au plan très simple : une porte, une ou deux fenêtres. Tout est fermé, tout est calfeutré pour éviter le soleil de l’été. Un café a installé sa terrasse dans un angle bien ombragé : sept hommes y sont assis, trois sur un banc, les autres sur des chaises. Ils vont nous voir passer à plusieurs reprises parce que nous ne trouvons pas le chemin et que nous tournons en rond. Enfin, sous le château d’eau deux flèches : Torre d’Aguas et Ermida S. Sebastiao.

la Tour de Brotas perdue dans la campagne
la Tour de Brotas perdue dans la campagne

La tour est le but de notre venue. Le gérant du Monte dos Arneiros m’en a fait l’éloge. Une très belle photo de la tour orne le bureau de son ordinateur de bureau. Une petite route va jusqu’à l’entrée d’une propriété privée et se poursuit par un chemin de terre sur lequel on s’engage sans savoir si nous arriverons à la tour, et surtout à quelle distance elle se trouve, ou si la visite est permise. Dès qu’on descend, la route se dégrade ; les eaux de ruissellement ont dégagé de grosses pierres, les ornières sont difficiles à négocier. Nul endroit assez large pour faire demi-tour. Au détour d’un virage, on vit la tour, assez loin. La voiture mord le milieu bombé du chemin. Cette VW Up ! est très basse, rien à voir avec la » 205-4×4-berbère » des pistes marocaines ou avec les autres voitures que nous avons lancées sur les pistes crétoises ou grecques.

Pour gagner un peu de légèreté je continue à pied sur la route poudreuse. Les routes affleurent de plus en plus.

La tour est grise, sur le même modèle que la Tour de Belem mais dans une version fantôme à côté d’un village-fantôme aux toits crevés, niché dans un creux. Une seule maison porte une antenne de télévision et ses portes sont peintes de frais. Une petite chapelle se tient à l’écart. J’ai peur des chiens, j’évite les maisons.

Au retour, une fouine, peut être un putois, travers la piste. Très tranquille. Le museau allongé, la longue queue fournie, de la taille d’un chat mais plus long.

au café!
au café!

Au village, nous repassons encore au moins trois fois devant le même homme qui ponce sa grille (auparavant il la soudait). Nous revoyons les vieux du café. Enfin, nous retrouvons le feu tricolore et découvrons enfin l’église ancienne au bout d’une pittoresque rue blanche aux tours des portes bleus.

Brotas
Brotas

Chaque maison porte une petite plaque rectangulaire en céramique. « confrérie de Lavre « , « confrérie d’Arraiolos »etc… cela me rappelle ces grands sanctuaires de pèlerinage en Espagne ou les plus petits en Sardaigne où chaque paroisse avait une maison prête pour les jours de fêtes.

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Une dame très aimable qui repeint sa façade avec un petit pinceau m’adresse la parole. Est-ce que je veux visiter l’église ? « Oui, bien sûr ! ». Elle téléphone à la voisine qui détient la clé. La dame tout en noir, arrive avec une grosse clé. L’église est toute carrelée d’azulejos de type « tapis » aux motifs géométriques avec une dominante de jaune. Une scène est peinte en camaïeu de brun. Dans un coin, la dame me montre la Vierge de Bratos très révérée c’est une petite statue de moins de 30cm de haut qui semble être d’ivoire, très simple. Avant d partir, je laisse de la monnaie dans le tronc. La dame me fait signe que non ! C’est à la Vierge qu’il faut donner directement sur l’autel. Ce qui me force de choisir une grosse pièce de 2€, et comme je ne veux pas paraître pingre, je laisse 2.5€. Ce n’est pas fini : elle réclame son propre pourboire. Un peu en colère je lui fais cadeau de toutes mes pièces jaunes.

Il est trop tard pour Arraiolos, passé 13h, les tapis ne seront pas visibles. Nous avons hâte de retrouver le gîte.

circuit des mégalithes

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cromlech d’Almendres

Ce circuit figure dans le Guide Vert et dans Voir. Il démarre à 10 km d’Evora sur la RN114. Tourner au panneau Guadalupe puis suivre les flèches marron Cromlech d’Almendres.

Cromlech d’Almendres

Cromlech d'Almendres
Cromlech d’Almendres

Miraculeusement, tout se passe comme prévu. A Guadalupe, une piste poussiéreuse à peu près lisse sur 3 km conduit à un parking à 200m du Cromlech pour préserver la surprise et la magie du site.

Le Cromlech est un alignement d’une centaine de mégalithes dont certains sont gravés. Les pétroglyphes sont difficile à identifier dans le granite en pleine lumière. Comme souvent, on avance des interprétations astronomiques. J’envie un groupe arrivé dans un minibus avec un guide anglophone EBORA MEGALITHICA Guided tours.  Pour faire parler les pierres, il faut un spécialiste. Celles-ci sont très vieilles et peu causantes.

Menhir d’Almendres

Menhir d'Almendres
Menhir d’Almendres

Près de la somptueuse propriété d’Almendres au portail énorme s’ouvrant sur une allée de cyprès et conduisant à une maison magnifique près de laquelle de curieuses tours blanches (citernes ?), un sentier discret est ménagé pour atteindre le Menhir. Cette fois-ci je me joins au grupe pour profiter du guide d’Ebora magalithica qui explique que le menhir a été trouvé couché qu’on l’a relevé récemment mais à l’envers : la face ouest devrait être à l’est. Il explique la technique de levage. Les cordes à l’époque n’étaient pas assez résistantes, la seule solution pour l’ériger était de le faire glisser sur un plan incliné de terre dont on augmenterait la pente petit à petit. Il montre des gravures sur la pierre, invisibles en pleine lumière. Il faut se tenir dans l’ombre du menhir et très près pour les deviner.

 

Retour à Guadalupe pour prendre la route de Valverde où se trouve le plus grand Dolmen de la péninsule ibérique : le dolmen de Zambujeiro (Anta de Zambujero). Il se trouve non loin du village. Une mauvaise piste, heureusement courte part des étables d’une très grosse ferme. Ici aussi, j’ai la chance d’écouter les explications du guide d’un couple arrivé en même temps que nous. Il déplore les techniques brutales de fouille qui ont cassé la grande pierre sommitale pour accéder à la chambre funéraire. Celle-ci git à  côté brisée en plusieurs morceaux. L’allée couverte est obstruée de briques et de poutres tandis que le hangar de protection rouille. S’il se plaint de la négligence et du mauvais entretien  il est peu disert sur le dolmen lui-même. L’amas de pierres est énorme mais les dolmens bretons de Locmariaquer ou de Gavrinis sont autrement plus beaux !

La visite de la Grotte d’Escoural est à 14h30. Notre logeur a eu la gentillesse de prendre rendez vous par téléphone. Il nous a assuré que nous n’aurions aucun mal pour déjeuner sur place avant la visite.

Chapelle Sao Brissos
Chapelle Sao Brissos

Une route très étroite relie Valverde à Escoural. Elle passe à quelques mètres de la chapelle de Sao Brissos dont le narthex est un ancien dolmen. Le tout est chaulé de blanc. Gentille chapelle, mais il faut chercher les montants du dolmen. Le christianisme a assimilé les traditions populaires qui lui étaient antérieures. Jusqu’à des temps récents, cette chapelle était lieu de pèlerinage. On y rôtissait l’agneau pascal le  Lundi de Pâques  et s’y réunissait pour l’Ascension. On y processionnait pour demander la pluie en période de sécheresse. Une légende raconte que la Dame du dolmen aurait eu un enfant de saint Brissos qui l’avait trompée avec Notre dame des Neiges. Quand on avait besoin de pluie, on allait chercher la Dame du Dolmen pour l’emporter à l’église  mais en laissant l’enfant au dolmen. Les larmes de Notre Dame du dolmen parce qu’elle était éloignée de l’enfant mais proche du saint qu’elle détestait, provoquaient la pluie.

Escoural à midi
Escoural à midi

Escoural, sous la chaleur de midi, paraît déserte. Nous attendions une terrasse de restaurant à l’ombre. Tout parait fermé. Fermé ou les vacances annoncent des affiches sur les portes des deux restaurants de la place. Une épicerie, invisible au premier passage nous dépanne : banane, yaourt, doughnut au citron et un petit fromage de chèvre. Piquenique sur le banc sous l’unique pin de la place principale. Ce n’est ni gastronomique, ni portugais mais cela cale.

14h10 je rejoins le Centre d’Interprétation de la Grotte d’Escoural et y rencontre un couple portugais sans rendez-vous. Je leur propose de m’accompagner et de profiter de mon rendez-vous. Ils m’offrent un café. « Un café portugais ? »- « Bien sûr ! ». Je n’avais pas compris qu’un « café portugais » était corrigé à la goutte. Le café qui fait face au Centre d’Interprétation est un restaurant -petit restaurant qui n’a que deux tables. Nous n’aurions jamais deviné qu’il était ouvert. En étant plus attentive, j’en découvre d’autres. Par 35°, dans l’Alentejo on ne s’expose pas au soleil. On préfère manger dans la fraîcheur des maisons et il fait plus frais avec la porte fermée.

Gravures préhistoriques
Gravures préhistoriques

La jeune fille qui fait visiter la grotte est ferme : pas de visite sans réservation ! Dix personnes à la fois. L’espace est très restreint. Ce n’est pas Lascaux ni la Grotte Chauvet ! Les peintures sont d’une facture grossière, rouge ou noire. On croit deviner ici un auroch, là deux chevaux qu’elle pointe de son rayon laser, avec beaucoup de conviction. Les gravures sont encore plus difficiles à trouver seul. Si la roche (un calcaire rugueux) est sèche, on ne voit rien, si elle est trop mouillée, non plus. Il faut de la patience. Je suis bon public. Les relevés que la jeune guide brandit montrent des tracés très élégants. Le graveur a multiplié les traits pour donner l’impression de volume ou de mouvement et le résultat est intéressant.

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Retour par Montemor. Beefsteak haché à Intermarché qui ne vend ni poissonnerie ni boucherie sous vide. Les coqs sont vendus avec la tête et les pattes. On choisit sa viande à hacher. Le boucher prend son temps pour que le client soit satisfait.