Essouhé – Retour au village : la Cérémonie

3ème CARNET BÉNINOIS ET TOGOLAIS

 

Cérémonie

Au Bénin, la route est goudronnée. Nous arrivons vite à Azové où nous avions perdu Michel il y a deux ans. Je reconnais la route, le panneau « chez Essou », la concession, le bâtiment en parpaing où nous allons passer la nuit.

Ils sont là : Sébastien et ses frères. Je reconnais Hyacinthe qui a eu son BEPC, Félix n’est pas là,  Symplice qui a eu son bac est à la fac. Gilbert, enfant dans mon souvenir, a 16 ans et fait plus. Mithen est  un nouveau venu. Dominique a des lettres à distribuer et cherche des correspondantes.
Sébastien délègue Mithen à la recherche des filles de 12 ou 13 ans qui aimeraient écrire. Rapidement, arrive Yvonne puis Clarisse. Il nous avait semblé que dans ce village on ne voyait que des garçons, il suffit d’appeler les filles pour les voir.
Les chambres n’ont pas changé. Toujours pas d’électricité ni de moustiquaire.
On râle pour cette dernière. Sébastien emprunte une voiture pour en acheter une à Azové.

Après les salutations d’usage et une bonne douche au seau et à l’écuelle, il ne se passe rien. Je suis un peu déçue. Je pensais que Sébastien animerait la visite mais il ne semble pas du tout pressé de s’occuper de nous. Finalement il propose d’aller dans une maison où se déroule une cérémonie.

Gilbert et Hyacinthe nous accompagneront, le dernier, le plus vieux négociera le droit de prendre des photos. Mais avant la négociation, il faut aller s’asseoir dans la case du féticheur avec les sages qui s’entassent dans une toute petite pièce décorée d’une feuille de palmier où pendouillent des crânes variés. De nombreux sacrifices et libations ont déjà eu lieu si j’en juge l’état des fétiches dégoulinants de sang, alcool, plumes….En mon honneur le féticheur remplit un verre de rhum. Je me récrie : « je ne bois jamais d’alcool »Il verse le contenu sur le fétiche et sur le sol. Je suis rassurée. On ne m’offrira plus de boisson. La pièce est saturée de vapeurs alcooliques. Plusieurs bouteilles ont déjà servi : gin, rhum…Le prêtre prie pour que nous rentrions sans encombre chez nous. Je ne sais comment remercier. Je sors. Il est encore interdit de photographier

cérémonie

–    « il faut patienter ! »
–    « Veulent –ils de l’argent ? »

Hyacinthe nous prie aimablement mais fermement de ne pas nous mêler de cela. Je dois encore retourner dans la pièce des fétiches.

Enfin, j’ai le droit de  photographier. Tous veulent être filmés. Comment vont-ils recevoir ces films ? Je vais faire un CD que j’enverrai à Sébastien. Ils se plantent devant l’objectif regardent les petits films et sont ravis. Il y en a même qui jouent  les acteurs.

Hyacinthe m’emmène chez l’instituteur qui me fait entrer dans sa maison. Nous prenons place autour d’une belle table de bois. Il a un ordinateur mais l’unité centrale est gâtée. Nous parlons pédagogie de l’utilisation possible de l’ordinateur même en l’absence d’une connexion Internet. Tout le monde a un GSM au village, bientôt auront une clé USB ? je lui raconte qu’au Vietnam qui était encore sous développé et très pauvre, il y a peu, les enfants tiennent le cybercafé, comment l’Asie a pris le tournant informatique et comme il faudrait que l’Afrique s’y mette.

Ouidah : Fort Portugais, Forêt sacrée et Temple des Pythons

BÉNIN 2006 : BALLONS DICTIONNAIRES ET BÊTES SAUVAGES

Arrivée à Ouidah par la Porte du Non Retour

Porte du Fort Portugais

La route des Pêches arrive directement à la Porte du Non Retour – arche rose encadrée de sculptures métalliques. Une autre arche est  la Porte du Jubilée de l’an  2000 commémore l’arrivée des missionnaires en  Afrique de l’Ouest. La silhouette du Bénin évidée,  est précédée d’une croix.
La route qui mène à la ville est bordée de statues mais Thierry ne s’attarde pas. La Route de l’Esclavage est prévue en fin de visite.

Nous franchissons la lagune très peu profonde. A l’écart se trouve le village des sauniers qui vendent le sel de la lagune dans de petits bols.

 

Ouidah : le Fort Portugais

ouidah : fort portugais

Le Fort Portugais ne ressemble pas à un fort, mais à une maison coloniale aux murs blancs. Un petit azulejo rappelle le Portugal. Dans la cour,  de splendides manguiers  et un frangipanier sont en fleurs. Fond sonore : musique en portugais. Le guide est d’origine brésilienne, grand, mince, vêtu à l’africaine, très distingué.
Les Portugais après l’Indépendance en 1961, à  l’époque de Salazar, ont brûlé le fort et les archives plutôt que de les laisser.
Le Musée ne contient que peu d’objets originaux mais il expose des photos intéressantes, cubaines et brésiliennes comme celles de l’exposition du Musée Dapper. Ici, point de visite de Chirac mais  de Lula.
Je suis surtout impressionnée par les chaînes des esclaves, entravés non aux pieds, comme je l’imaginais mais par le  cou. La Jarre percée de plein de  trous symbolise l’unité nationale : de nombreux doigts sont nécessaires pour boucher toutes les ouvertures. Les tambours annonçant la mort du roi sont de curieuses poteries qui résonnent quand elles sont frappées d’un chiffon. Un autre tamtam sacré est impressionnant : il est utilisé seulement par les orphelins, l’orphelin de mère tape de la main droite l’orphelin de père de la main gauche, il annonce la mort des parents.

 

Ouidah : Vaudou, Forêt Sacrée et Temple des Pythons

sakpata dieu variole

 

Devant la Forêt Sacrée, attendent deux cars d’écoliers en excursion.  Lundi de Pâques et la  fête du Mouloud coïncident, c’est donc férié. La Forêt sacrée n’est plus réservée aux initiés. Depuis 1992,  cet endroit est ouvert aux touristes pour présenter les dieux Vaudou.

Un arbre immense, l’Iroko, est entouré de nombreuses statues des divinités : Legba, avec ses cornes, le Dieu du Tonnerre etc.… Certaines statues sont modernes, faites de ferraille récupérée (phares de voitures, chaînes de vélo, boulons…). D’autres  plus naïves, ont des silhouettes courtaudes, pieds et jambes exagérément lourds, attributs colorés en rouge vif ou en bleu roi.

dieu du tonnerre crachant le feu

Notre guide, Anicet, explique patiemment le panthéon vaudou, raconte des anecdotes et chantonne . Son visage, comme celui de nombreux hommes ici, est orné de scarifications verticales, sur le front, coupant les sourcils, sur les pommettes. Cette religion est difficile à appréhender. Qu’un roi se transforme en arbre immense Iroko, est très poétique. Le drap taché d’œuf et de sang, à l’entrée du Temple des Pythons, est plutôt répugnant.

Temple des Pythons

 

 

Le Temple des Pythons comporte plusieurs cours avec de petites cases réservées aux prêtres et aux initiés, seulement fermées par un drap. Le bâtiment des serpents est plus important avec ses portes de bois. A l’intérieur 50 serpents sont entassés. Le jeune guide en prend un assez petit d’un mètre cinquante environ, le met autour de son cou. C’est un animal très lent, très doux. J’ai envie de caresser ses écailles fines et douces. Il est tiède. Je demande au jeune homme de me le passer autour du cou. Il darde sa petite langue. Ce contact me plait.

 

Abomey – La soirée avec Gabin : cérémonie et poulet-bicyclette

BÉNIN 2006 : BALLONS DICTIONNAIRES ET BÊTES SAUVAGES

statues du musée de Gabin

Il va venir… Il faut attendre…

Marie Josée est revenue, vêtue à l’Européenne en pantalon mode baggy, accompagnée par un homme « Gabin, comme Jean Gabin, l’acteur ! ». C’est le Directeur du musée privé dont elle m’a parlé en début d’après midi et c’est le guide officiel de l’hôtel. Nous voilà bien ennuyées.
Nous avons maintenant deux guides !
Ce n’est pas la première fois que nous sommes dans cette situation gênante. Nous ne faisons pas suffisamment confiance aux Béninois qui, de leur côté sont plutôt lents à la détente. Comme nous ne voyons rien venir, nous nous agitons en tout sens et nous adressons à une autre personne. C’est une erreur. Il nous faut être plus patientes, apprendre à attendre.

Il va venir », « Il faut attendre », nous serine-t-on ici.

Il y a beaucoup de guides et peu de touristes.
Comme par magie, Otis, au téléphone, surgit au bon moment. Il a appelé l’office de Tourisme, tout est arrangé. Gabin  nous accompagnera à la Cérémonie et nous fera visiter la ville demain.

en attendant Gabin

Dans le quartier tout proche, ce soir il y a aussi des Revenants. Ce sont des Masques. J’espère que Gabin nous montrera également les Revenants.
Ce matin, j’ai demandé à Hawa, la bonne, s’il risquait de pleuvoir.
–    « Non ! parce qu’il y a des Revenants » affirme-t-elle.
Bizarre météo ! Ce soir, alors que nous attendons Gabin qui a disparu, elle nous confie :
– « Heureusement que vous serez avec Gabin qui est un grand initié. Quand les Blancs sont tout seuls les Revenants les poursuivent, et se moquent d’eux ».

Foot

Comme Gabin n’arrive toujours pas, nous sortons sur la place devant l’hôtel pour l’attendre et guetter les Masques. Des jeunes jouent au foot (la place est aménagée avec des cages) Le ballon arrive sur nous, D shoote. Les garçons la félicitent. Ils ont vite fait de nous encercler. Ils connaissent Zidane et Ronaldo et Ronaldinho (notre répertoire ne va pas plus loin). Au Bénin on suit sur FRI le Championnat Français, il y a même des paris.

Séance- photo. Pas de refus ! Au contraire, ils veulent tous être pris en portrait, seuls. J’explique :

L’appareil n’est pas numérique, il faut des rouleaux on n’en n’a pas beaucoup. »

Ils n’insistent pas. C’est vrai qu’avec un numérique on aurait pu leur montrer le résultat et éventuellement supprimer après !

statue du musée de Gabin

La Cérémonie

Gabin finit par arriver. C’est trop tard pour les Revenants. Il nous conduit à pied à la Cérémonie qui a lieu sur une place devant un petit temple peint en blanc tacheté de rouge décoré avec des personnages naïfs. Il s’agit d’honorer une divinité de l’eau et les esprits des enfants royaux mal formés. Dans la famille royale, on éliminait les enfants malformés mais ceux-ci devenaient alors des divinités. On est très choqué par cet eugénisme.
–   « Il faut que les rois soient beaux et sans tache ».

D’un côté l’assistance est assise autour des musiciens, joueurs de tamtam. En face, les danseurs, les initiés et les possédés qui sortent d’un porche. Un rang d’hommes et un rang de femmes vêtus de tenues chamarrées multicolores avec des mètres de tissus précieux repliés. Un couvre-chef décoré. Des bracelets de métal aux chevilles et aux poignets. A la ceinture, un sabre dont la pointe du fourreau ressort sous les tissus bouffants. Le Maître de Cérémonie arrive sous un parasol brodé. Ses habits sont tout dorés ou argentés ; il luit sous les perles cousues, les tissus aux fils d’or et d’argent et porte un bonnet à oreilles orné de perles.

Nous sommes les seules blanches mais personne ne fait attention à nous, si ce n’est pour nous offrir une bonne place assise. Les danseurs font des pas lents, très compliqués. Même ceux qui sont âgés sont d’une souplesse surprenante, sautant sur un pied, se ramassant, se détendant.  Gabin est très évasif. Sans doute, ne veut- il pas trahir des secrets. Après les hommes qui dansent seuls ou deux par deux, les femmes dansent en ligne à pas mesurés. Comme les hommes, elles portent des cannes, symbole de puissance. Plus la soirée avance, plus les chanteurs se déchaînent, suivis par l’assemblée. Gabin murmure. Une longue file d’initiés est placée devant nous distants d’à peine 1,50m. Je peux observer à loisir les bracelets de coquillages blancs et rouges haut encerclant leur bras près de l’épaule, presque à l’aisselle. Les nombreux colliers et pendeloques à leur cou. Les coiffures compliquées tressées avec des perles et des coquillages, chapeaux bizarres. Des spectateurs se précipitent, le front dans la poussière, baisent les pieds d’un danseur, puis se relèvent rapidement et reprennent les chants.

Au bout de trois quarts d’heure, D est rentrée seule. Je souhaite profiter plus longtemps de ce magnifique spectacle. Une bouteille placée devant les chanteurs « cela leur donne de l’énergie ». Peut être va-t-il se passer quelque chose. Au dessus de nous, le ciel est zébré d’éclairs qui renforcent l’atmosphère dramatique. Gabin remarque « on ne voit plus les étoiles, il va pleuvoir ». Nous rentrons sous de grosses gouttes qui ne mouillent pas. Au loin, le tonnerre. Chacun espère la pluie. Nous avons oublié de nous protéger des moustiques. Il n’y en a pas.

Le poulet-bicyclette est dur
On invite Gabin à dîner. Mauvais convive ! Il s’empare de la radio, écoute les nouvelles, les premières décisions du nouveau gouvernement, les commentaires sur la nouvelle politique cotonnière, les réactions des syndicats. Les Béninois sont vraiment passionnés de politique. Ils ont balayé Kérékou au nom du changement et continuent, même les élections terminées, à suivre avec ferveur l’actualité.

Le dîner tarde à arriver. Le troisième couvert a perturbé en cuisine. D,lasse d’attendre, s’est éclipsée. Elle n’est vraiment pas africaine ! Je suis un peu confuse de ce manque de politesse. A Rome fais comme les Romains ! A Cotonou, arme-toi de patience ! La perception du temps n’est pas la même que sous nos latitudes tempérées. Tout se fait plus lentement. Les nouvelles sont terminées, succède à la radio. une émission sur la constipation à la radio.

Enfin le poulet arrive. Est-ce le fameux « poulet-bicyclette » ? J’essaie de planter la fourchette dans la cuisse. C’est dur, impossible à couper. Gain mange avec entrain, utilisant ses doigts. Je détache l’aile et trouve le blanc, à peu près comestible. La graine du couscous est délicieuse.
La pluie a rafraîchi l’air. Il fait une température agréable. Nous retardons l’heure de nous enfermer. D me dit qu’elle s’est trompée et qu’elle a mis le bouton du chauffage . Sur un ventilateur ! la chaleur fait déraisonner !

Abomey : Le musée de Gabin

BÉNIN 2006 : BALLONS DICTIONNAIRES ET BÊTES SAUVAGES

musée de Gabin

Réveil chez Marie Josée

Aux premiers pépiements des oiseaux dans l’avocatier, je sors.

On sert le poulet d’hier avec le couscous au petit déjeuner,  du Nescafé en sachet avec du lait concentré, de la confiture et du pain frais. Les jus de fruits, les omelettes et les mangues d’Helvetia sont loin !

3 guides pour 2 touristes!

A 8h30, une moto arrive. Ce n’est pas Gabin mais le gros homme au costume étriqué. Gênée, je lui parle de Gabin.
–  « Gabin et moi, c’est pareil ! »

D’ailleurs, le voilà qui arrive, lui aussi. Avec un jeune à moto, ils sont trois à nous attendre. Finalement, nous partons, D, en selle derrière Gabin, et moi, sur la moto du jeune assistant du bureaucrate.

La maison de Gabin se trouve  à la lisière de la ville. Le fossé  et le mur d’enceinte de la ville sont dans son jardin. Il essaie de préserver le fossé menacé par les constructions des voisins. Depuis 1978, il plante et entretient. Je calcule, Gabin doit avoir à peu près notre âge. Il paraït beaucoup moins avec son visage rond, son sourire juvénile et ses yeux un peu bridés. Les arbres aux larges feuilles sont des tecks. J’ignorais qu’ils poussaient en Afrique.

Gabin nous ouvre son musée privé. Par terre, dans un coin, tout le nécessaire pour le Fâ (la divination) : les diverses graines, boules, perles de terre cuite, cailloux, les petites tables sur lesquelles est écrasée la boule de kaolin, les chapelets à pièces plates que le devin lance. Tout le rituel reste mystérieux. Nous restons sur notre faim. Comme pour les danses. Gabin entrouvre une porte pour la refermer aussitôt. Il laisse imaginer l’existence de secrets sans les révéler. L’initiation n’est pas réservée aux Béninois. Il nous parle d’une journaliste néerlandaise initiée.

Le long d’un mur, des poteries symbolisent des divinités, mais nous ne savons pas lesquelles. Dans un coin, sont entassées pêle-mêle des statuettes. Pour une fois, je peux photographier sans réserve. Gabin nous montre une tunique de raphia violette du Legba (sorte de bouffon de cérémonie en même temps une divinité). Sur le tissage sont cousues de toutes petites calebasses et des coquillages.

Asen (autels) et Fâ (divination)

Dans des débarras en piteux état, il nous montre ses projets : une salle audiovisuelle, des entrepôts pour les fouilles archéologiques, costumes. Il nous raconte ses collaborations avec des Américains d’Atlanta et avec le Musée Dapper.

Abomey : les Revenants

BÉNIN 2006 : BALLONS DICTIONNAIRES ET BÊTES SAUVAGES

carte postale (nous n'avons pas osé faire des photos)

18h,  Revenants. Nous suivons Gabin  dans les rues poudreuses qui courent entre des murs. Il appelle ces ruelles des couloirs. Le public est déjà en place quand nous arrivons. Les jeunes, perchés sur une sorte de butte. Les musiciens et les dignitaires, alignés le long d’un mur. Gabin nous fait patienter dans une cour avant de  nous présenter .

Costumes

Les Revenants sont masqués. Leurs costumes magnifiques sont rebrodés de paillettes multicolores figurant des emblèmes ou des inscriptions. Leur visage est occulté par une bande de coquillages large de 15cm long de 70 ou 80. Quand le personnage est assis, sa bande me fait penser à une trompe d’éléphants. Les épaisseurs de tissus se superposent sur une grande ampleur. Certains sont décorés par des rubans très larges cousus. D’autres ont revêtu un grand manteau brillant. Tous ne sont pas également éblouissants. Il y en a même un poussiéreux, à la place des coquillages, un grillage comme sur une burka afghane. Les mains ne sont pas visibles non plu. Les revenants brandissent divers objets à travers le tissu.

une place à la tribune officielle

Un Masque, armé d’un sabre de fantaisie et d’une queue de cheval,  nous place sur des fauteuils à côté des musiciens, derrière les officiels. Gabin dépose ses sandales sous mon siège et disparaît. Deux vieux messieurs habillés de blanc s’installent. Ce sont les commanditaires de la cérémonie qui commémore le souvenir de leur père défunt. Les Masques  leur parlent d’une voix contrefaite. On ne sait pas bien s’ ils sont  des hommes ou des femmes, jeunes ou vieux. Plus tard, Gabin nous expliquera que le Revenant s’adresse au chef de famille au nom du défunt, mais aussi au nom de ses ancêtres, il lui parle du passé et de l’avenir.

LesMasques dansent, s’agitent, font des pitreries. Ils portent sur leur dos une sorte de plateau avec une tête en bois sculptée ou une figurine. Parfois les revenants se retournent redressant le masque sur le dos. Tantôt, les Masques se posent, assis. Ils sont très volumineux, plus larges que hauts,  leur bande de coquillages leur donne un aspect pachydermique.
Une autre activité des masques se déroule sur la placette et dans la rue.

Poursuites

Les Revenants poursuivent les jeunes, en  cavalcades,  courses et poursuites autour d’un petit arbre abondamment secoué. Les jeunes rigolent. On ne sait pas où commence la crainte des Revenants et où finit le jeu. Gabin nous dira plus tard, qu’autrefois, le costume des Masques était empoisonné. Maintenant celui que le Masque attrape est seulement chicoté. J’ai déjà entendu  ce mot dans la bouche de mes élèves. Certains jeunes sont armés d’une sorte de badine. La maintenant à l’horizontale, ils contiennent l’avancée des revenants.

Seules!
Gabin nous a laissées seules. On se demande s’il n’est pas, lui aussi, sous le costume d’un Masque.
En plus des Masques, il y a les musiciens, 3 tamtams frappés avec des baguettes recourbées et tout un chœur de vieilles femmes. Irruption soudaine d’un personnage nu, vêtu de raphia et d’herbe, au visage masqué très noir. Duels avec les jeunes armés de bâtons. Les cavalcades deviennent de plus en plus endiablées. Un Masque reçoit une gratification de la part des hommes en blanc et sollicite les Yovos. Nous sommes venues sans sac ni porte-monnaie. Ma robe africaine  n’a même pas de poches. Le ton monte.On sent l’agressivité Heureusement, Gabin nous défend.  Il promet que nous  donnerons une contribution pour la cérémonie.
De retour à l’hôtel, il demande 7000 F que nous lui donnons bien volontiers. Nous sommes sous le coup de l’émotion, conscientes d’avoir vécu une expérience hors du commun.
Gabin retournera plus tard au couvent. En tant qu’initié, il participera à la partie nocturne de la fête. Il est très fier d’être un notable respecté de tous, fêté, invité…