La Porte du Voyage sans retour – David Diop

LIRE POUR LE SENEGAL

Gorée : la maison des esclaves

« La religion catholique dont j’ai failli devenir le serviteur, enseigne que les Nègres sont naturellement esclaves. Toutefois, si les Nègres sont esclaves, je sais parfaitement qu’ils ne le sont pas par décret divin, mais parce qu’il convient de le penser pour continuer à les vendre sans remords. 

je suis donc parti au Sénégal à la recherche des plantes, des fleurs, des coquillages et des arbres qu’aucun autre savant européen n’avait décrit jusqu’alors. Les habitants du Sénégal ne nous sont pas moins inconnus que la nature qui les environne. Pourtant nous croyons les connaître assez pour prétendre qu’ils nous sont inférieurs. »

Merci à Babélio et au Seuil pour  ce voyage au Sénégal et au voyage dans le temps, à la fin du 18ème siècle jusqu’à l’Empire! Merci pour cette lecture passionnante et poétique!

Du même auteur,  David Diop, j’avais beaucoup aimé Frère d’Ame lu à sa parution et dont la lecture à Avignon par Omar Sy m’a enthousiasmée (podcast France Culture, Avignon Fictions). Quand Babélio m’a proposé ce livre, j’ai sauté sur l’occasion et encore une fois j’ai lu ce livre avec un grand plaisir. 

Le titre, La porte du voyage sans retour, évoque clairement la Traite Atlantique. la première fois que j’ai entendu cette expression c’était à Ouidah au Bénin. Puis à Gorée où se déroule une partie du récit.  

La Porte du Non-retour Ouidah

L’esclavage n’est pas le seul thème évoqué dans le roman de Diop. Le personnage principal du récit est un Savant du Siècle des Lumière, Michel Adanson, personnage qui a vraiment existé, qui a débarqué en 1750 à Saint Louis du Sénégal pour décrire flore et faune de la région, cartographier, étudier les coutumes…Le jeune homme a appris le wolof et s’est lié d’amitié avec un jeune prince, Ndiak,  qui l’introduit au plus près de la population. 

Le livre est aussi une réflexion sur la culture orale des Sénégalais, par un Encyclopédiste qui passera le reste de son existence à écrire son encyclopédie. Le botaniste, proche de la nature, reconnaît l’importance des croyances africaine :

 » Malgré mon cartésianisme, ma foi dans la toute-puissance de la raison, telle que les philosophes dont j’ai partagé les idéaux l’ont célébrée, il me plaît d’imaginer que des femmes et des hommes sur cette terre sachent parler aux arbres et leur demandent pardon avant de les abattre. Les arbres sont bien vivants, comme nous, et s’il est vrai que nous devrions nous rendre comme maîtres et possesseur de la nature, nous devrions  avoir des scrupules à l’exploiter sans égards pour elle. « 

C’est une histoire d’amour impossible. Orphée et Eurydice. 

Portrait de madeleine : marie-Guillemine Benoist (1800)

C’est aussi une relation de voyage aventureux et une exploration des paysages, des mœurs, aventure et magie.

Des surprises, rien n’est convenu, pas de manichéisme non plus, chaque personnage apparaît sous plusieurs points de vue….

Je n’en dis pas plus, lisez-le!

 

Valle de los Ingenios

CUBA – Lundi 23 février 2004

La route de Sancti Spiritu longe la très belle vallée de los  Ingenios bordée par des montagnes bleutées dans le petit matin. La canne couvre de belles étendues vert tendre. Des ruisseaux serpentent . quelques fermes isolées sont ombragées par de gros arbres tropicaux à la cime arrondie.

Los Ingenios sont les raffineries à sucre parfois appelés moulins à sucre. Cette vallée est le centre de la production de la canne à sucre. 

Nous faisons un premier arrêt pour le panorama . . Deux vautours picorent le cadavre d’un malheureux chien.

Les panneaux roses signalent les sites touristiques. Nous parvenons sans encombre au village de Manaca construit autour d’un curieux édifice : une tour de guet de six étages avec des paliers à arcades. Dominique monte les échelles jusqu’au premier niveau (deux étages d’un immeuble ordinaires) je grimpe jusqu’au sommet. La vue est très étendue . On surveillait ainsi les plantations .

Les plantations vues de ma tour de guet de Manaca

Au pied de la tour un très joli marché est installé, tout blanc de dentelles : nappes et draps brodés, suspendus, flottant au vent. Sur des cintres, des blouses des combinaisons et des pantalons à l’ancienne. Des femmes brodent (pour authentifier la facture des broderies ?)

Le village est très fleuri, les jardins  bien entretenus . Les petites maisons de bois peint en blanc patiné, ouvertes à tout vent. A l’arrière la cuisine consiste en un plan de travail . Parfois des marmites cuisent sur de petits feux au milieu de la cour. Au fond des petits appentis, des cabinets.

Les porcelets se promènent tranquillement dans la « rue » ainsi que les poules suivies de leurs poussins. Une vieille femme avec un turban sur la tête propose de nous accompagner. Des cris nous surprennent : « c’est un calao qui parle » explique-t- elle. C’est un gros oiseau  qu’on devine entre les branches d’un manguier . Est ce un perroquet ? Elle vient avec nous sous l’arbre. L’oiseau noir et lourd s’envole. Une sorte de mainate ? Les villageois semblent beaucoup aimer les oiseaux . Au toit de leur auvent, ils suspendent de jolies cages faites de très fines lattes de palmier avec de petits oiseaux exotiques pour nous .Sur un petit terre plein soigneusement balayé une cage est suspendue à un poteau avec un écriteau « local des dominos » . Ce n’est pas l’heure, la place est vide . Je photographierais bien chacune des maisons mais j’ai peur d’être indiscrète. La tour provoque un afflux de touristes et je n’aime pas trop d’idée de participer à cette invasion .

Pour libérer ma conscience, je m’invente un code de savoir-vivre à ma propre intention : toujours demander, bavarder un peu, demander le nom des gens que je photographie . Nous nous promenons très tranquillement. Une petite fille pose gentiment . Je demande à sa mère à quoi travaillent les gens du village : « A la canne » et les femmes ? « A la canne aussi . C’est un dur travail » Il existe aussi une usine de papier un peu plus loin mais les gens de ce village n’y travaillent pas. Certains jardins sont clos par des poteaux serrés qui ont repris vie. D’autres, par les mêmes cactées qui étaient dans le salon de la mère de Dominique . Les tiges plantées serré bifurquent et forment un rideau piquant impénétrable. Dans un jardin, une pancarte : Chien méchant ;

Pour prendre une autre photo, j’engage la conversation avec une dame noire en tablier enturbannée qui se plaint que ses plantes ont soif . Elle me montre les coléus sur la terre sèche .Il n’a pas plu depuis six mois . Je m’étonne et lui raconte l’averse d’hier à Cienfuegos . Je lui demande son adresse pour lui envoyer la photo si elle est réussie , le code postal du village . Etonnement, personne ne connaît le code . Le nom du village devrait suffire .

Avant de repartir, je choisis une blouse sans manches au marché avec des jours et de discrètes fleurs brodées. Dominique insiste pour que je prenne aussi un pantalon qui coulisse avec un lacet . La vendeuse me fait un  prix 15$ pour les deux . Elle a eu raison ! Après la douche, j’ai mis mon nouvel ensemble qui est très léger et agréable à porter avec cette chaleur .

Le petit train à vapeur avec ses wagons de bois a apporté sa cargaison de touristes . Nous repartons à bord de notre petite Hyundai bleue vers des aventure hors des sentiers battus .

Le gardien du parking nous a dit que nous devrions trouver su site intéressant après le pont sur le Rio . On pourrait même s’y baigner ; Nous tournons sur une mauvaise route dans les champs de canne à sucre . La route se transforme rapidement en piste . A notre rencontre, arrivent d’antiques camions bleus chargés de canne. C’est la Zafra. Leurs allers et venues sont incessants. Ils soulèvent une épaisse poussière qui s’enroule avec le vent comme une mini-tornade.

Nous demandons notre chemin au village suivant. Deux femmes montent à bord  . L’une d’elle avait une silhouette très pittoresque avec un parapluie noir qu’elle brandit comme une ombrelle. L’autre porte une cocotte .

Nous découvrons un bâtiment très vaste en haut d’un imposant escalier, précédé d’arcades majestueuses. C’est la maison des plus grands sucriers du début du XIX ème siècle 1820 . Ils ont fait peindre des fresques par un peintre italien. L’UNESCO rénove le bâtiment pour y installer un musée du sucre. Le garde nous commente très aimablement la visite.

Près de la route, dans une grande mare, des hommes battent l’eau avec des gourdins : ils pêchent .

C’est l’heure du déjeuner :J’entre dans une petite cantine en ciment sur le bord de la route .. La dame fait des difficultés pour accepter mes dollars, elle ne peut pas me rendre la monnaie Après maintes hésitations, on me prépare un bocadillo de jambon au pain se et un « hamburgesa » sur un minuscule réchaud. Elle me rend en « monnaie nationale » C’est la première fois que je vois des billets de 20 pesos . Le hamburgesa est très pimenté . Je me débarrasse du billet au bar du mirador pour acheter une glace très rose très chimique . Nous avons déjeuné pour 1$.

En rentrant à Trinidad vers 14h ,. nous doublons des carrioles tirées par des chevaux chargés de canne. Le cheval rentre seul à la maison, il connaît le chemin. Le paysan fait la sieste couché sur son chargement de canne.

Le Modèle Noir de Géricault à Matisse – Musée d’Orsay

marie Guillemine Benoist : Portrait de Madeleine

EXPOSITION TEMPORAIRE du 26 mars au 21 juillet au Musée d’Orsay

 

C’est une grande exposition, prévoyez du temps!

Si vous prenez l’audio-guide vous serez guidé par Lilian Thuram et Abdelmalik. 

François-Auguste Briard : L’Abolition de l’Esclavage dans les Colonies Françaises

Elle couvre la période historique allant de la Première Abolition de l’Esclavage (1794) au XXème siècle. Exposition chronologique, sous un aspect historique où l’histoire de l’Esclavage et son Abolition occupe une place centrale.  Tableaux et gravures voisinent avec les décrets d’Abolition, des éditions originales, le manuscrit de Bug-Jargal de Victor Hugo.

On peut aussi adopter plutôt un regard plus pointu sur le Modèle Noir dans la peinture comme nous l’invite le titre de l’exposition.

L’ambition est de redonner un nom à ces grands oubliés du récit des avant-gardes en plaçant l’histoire de l’art en miroir de l’histoire des idées; des sensibilités et des représentation »

Joseph : étude d’homme par Géricault

Les conservateurs qui ont organisé l’exposition on fait des recherches pour nous présenter ces modèles, leur donner un nom, une identité au lieu des titres anciens « portraits de Nègre » ou de « mulâtresse »….Nous découvrons des personnages comme Madeleine, la jeune femme de l’affiche, domestique affranchie du beau-frère de Guillemine Benoist. Joseph, modèle de Géricault qui en a fait le marin central du Radeau de la Méduse, était aussi le modèle de Chasseriau

Etude d’homme noir par Chasseriau pour une composition d’Ingres

Joseph, acrobate et mélomane était très apprécié dans le milieu artistique, une vrai vedette à l’époque.

Je m’intéresse à la personnalité des modèles presque autant qu’à celle des peintres connus comme Géricault, Delacroix ou Chasseriau, qui soutenaient dès le début du XIXème siècle la cause abolitionniste.

Delacroix : Jeune Homme en buste coiffé d’un turban rouge

Le Jeune noir à l’Epée de Puvis de Chavanne a déchaîné l’admiration d’Abdelmalik dans le commentaire, pas le mien, je n’aime pas beaucoup ce peintre.

Le Châtiment des quatre piquets démontrant la cruauté de l’esclavage fut refusé au Salon de 1843 et la date de 1849 (après l’Abolition) est inscrit .

Châtiment des 4 piquets

Au milieu du XIX ème siècle l’anthropologie tenta de caractériser les types et les races (souvent pour établir une hiérarchie justifiant le colonialisme). Sans tomber dans ce travers négatif Charles Cordier produisit alors des bustes saisissants

Cordier : buste d’une femme des Colonies
Cordier : Vénus africaine

La salle suivante s’intitule Métissage littéraire un mur entier est dévolu à Alexandre Dumas d’abord caricaturé en exagérant ses traits africains puis portraituré comme un blanc quand il devient célèbre et respecté.

caricature de Dumas

Je découvre Jeanne Duval, la muse de Baudelaire

Jeanne Duval peinte par Manet

et dessinée par Matisse dans les illustrations  pour les Fleurs du Mal

matisse : illustration des Fleurs du Mal

D’autres personnages de couleur ou métisses sortent de l’ombre : Ira Aldridge acteur noir américain shakespearien qui émigra à Londres et triompha dans Othello. la musicienne havanaise : Maria Martinez, Miss Lala, acrobate peinte par Degas

Degas : Miss Lala

Autour d’Olympia est le thème d’une salle . On a retrouvé le modèle de la servante noire d’Olympia qui brandit un bouquet : elle s’appelle Laure.

Esther de François-Léon de Benouville
Bazille : jeune femme aux pivoines

On arrive au XXème siècle, une salle avec des vidéos est consacrée aux tirailleurs sénégalais (Valotton) et, après la Grande Guerre Joséphine Baker est célébrée ainsi que le jazz (Fernand Léger)

Paul Colin : La Revue nègre

Le jazz inspire Fernand Leger tandis que la dernière salle présente des collages colorés de Matisse. 

Basquiat à la Fondation Vuitton

Exposition temporaire jusqu’au 14 janvier 2019

C’est une exposition très riche :  les tableaux sont grands, colorés, très nombreux. On pourrait déambuler sans chercher à comprendre, seulement séduit par les couleurs, les motifs variés, les textes (ou plutôt listes de mots) comme des rébus ou des messages secrets. Et cela suffirait sûrement à notre plaisir!

Nous avons eu la chance de suivre des micro-visites gratuites (15 minutes dans une salle) avec un médiateur passionnant qui nous a donné des clés pour comprendre l’intention, le message (un des messages) contenus dans les tableaux.

irony of negro police

 

On reconnait bien sûr la préoccupation majeure de Basquiat : le racisme et la violence que subissent les noirs de la part de la police éventuellement. Plusieurs tableaux représentent des policiers, leurs insignes, les symboles de l’Etat Américain….

les tableaux de Basquiat contiennent de nombreux mots, onomatopées, lettres. On peut imaginer que cette peinture est bruyante. Cependant les bouches des noirs sont souvent verrouillées par des cages, symbolisant l’esclavage ou le silence qui leur est imposé.

Autre motif récurrent : l’auréole qui surmonte les têtes, auréole des martyres ou couronne d’épine du Christ. Le boxeur est aussi un personnage que Basquiat affectionne, représenté parfois uniquement avec son short.

Per capita
per capita

Dans ce tableau « per capita’ on reconnait le boxeur à son short, l’auréole, « ex pluribus… » est le début de la devise américaine mais il manque « unum » l’unité, les noirs, la diversité ne seraient ils pas compris dans ce « pluribus« . Per capit& par tête introduit la lise de revenu brut par habitant selon les Etats des USA ,  on voit la différence entre les états peuplés de nombreux noirs, ce tableau dénonce la spéculation initiée par Reagan qui augmente la pauvreté et les inégalités. Dans un quadrillage des S peuvent symbolise Sugar ou Sacks(de coton) et les échanges commerciaux. La torche peut être celle de la Statue de la Liberté que voient les immigrants en arrivant à New York, elle peut aussi être la torche olympique de Jesse Owens, premier sportif noir médaillé olympique. Quelle richesse dans le contenu de cette toile. Et nous aurions pu passer sans rien voir d’autre que des graffitis ou des couleurs sans l’intervention du médiateur!

Zydeco 1984

Triptyque comme un retable d’église, à la limite de la sculpture : référence à la musique. Les allusions à la musique sont nombreuses!

Not for sale

L’esclavage est clairement le thème du tableau : le bateau doré au centre : traversée transatlantique puis le marchand d’esclave avec la mention « not for sale »

Encore un triptyque, retable, en plus des symboles chrétiens, on voit des masques africains et Ogun le dieu Yoruba qui est aussi vénéré dans le vaudou d’Haïti (le père de Basquiat était haïtien), on voit aussi des motifs avec les bras en l’air courants en Afrique de l’Ouest et toujours des graffitis qu’il faudrait prendre le temps de lire et de déchiffrer.

Dos Cabezas : Andy Warhol et Basquiat
Andy Warhol et Basquiat

 

Ces deux portraits ont été peints en 1h30! et inaugurent une collaboration entre Warhol – star de la peinture new-yorkaise et de Basquiat qui ont peint ensemble, exposé ensemble. Cette association s’est mal terminée, chacun pensant que l’un tirait profit de l’autre.

Riding with death (1988)
Riding with death (1988)

Un des dernier tableaux de l’artiste, ne rien voir de prémonitoire. Basquiat est mort d’overdose mais il avait encore plein de projets, entre aute ce nouveau style avec un fond uni!

Nous avons passé plus de trois heures dans l’exposition sans nous ennuyer ni nous fatiguer! Passionnant! Mais il faut avoir les clés pour déchiffrer les messages.

Togo : route inter-états d’Aneho à Kpessi

 

3ème CARNET BÉNINOIS ET TOGOLAIS

la mer à Aneho



La route inter-états, très fréquentée, est bordée de terres cultivées et prospères. Cette richesse apparente au Togo s’arrêtera-t-elle dès que nous quitterons le grand axe de circulation ?
Un pont  traverse la lagune : le train du phosphate exploité non loin de là.
Comme au Bénin, les routes bien entretenues, sont barrées de péage. Des jeunes filles y proposent des alocos que j’achète avec joie. Le petit sachet plastique bien fermé en contenant 6 vaut 125F ?
Plus loin, un épervier emporte un rongeur dans ses serres. Avait –il été percuté par une voiture ?

Porto Séguro : Maison des esclaves

la maison des esclaves, l'entrée dees maîtres et le soupirail des esclaves

 

La Maison des Esclaves de Porto Seguro
Dans des ruelles blanches de sable, la maison Woods est bien cachée derrière une porte en fer. C’est une maison coloniale de style Afro-Brésilien avec un perron haut de quelques marches agrémenté de plantes vertes. Un beau manguier orne la cour. Seuls les soupiraux trahissent l’horrible fonction de cette demeure. C’est là qu’était le lieu de stockage des esclaves attendant le passage vers le Nouveau Monde. Les entrées des soupiraux étaient si basse qu’il fallait ramper. Dans le salon des négriers,rien ne laissait soupçonner la présence des esclaves. Le guide ouvre une trappe qui ressemble à celle d’un bateau et nous propose de descendre. J’hésite un peu : il n’y a pas d’échelle. Il faut se laisser couler en se retenant à la force des bras. Une fois en bas, impossible de se relever : on doit marcher à 4 pattes. La cave ressemble à la cale d’un navire, ainsi les hommes devaient s’habituer à l’exigüité et à l’enfermement.

 

Il faut imaginer  cette maison clandestine cachée dans une épaisse forêt. Après le traité de Lagos ces maisons furent détruites mais celle-ci était bien cachée et discrète.

A Porto Seguro nous faisons quelques achats : des bouteilles d’eau Voltic (imitation de Volvic ?), des bananes, des oranges que nous mangerons à Kpessi dès que nous serons installées.

Ouidah : Fort Portugais, Forêt sacrée et Temple des Pythons

BÉNIN 2006 : BALLONS DICTIONNAIRES ET BÊTES SAUVAGES

Arrivée à Ouidah par la Porte du Non Retour

Porte du Fort Portugais

La route des Pêches arrive directement à la Porte du Non Retour – arche rose encadrée de sculptures métalliques. Une autre arche est  la Porte du Jubilée de l’an  2000 commémore l’arrivée des missionnaires en  Afrique de l’Ouest. La silhouette du Bénin évidée,  est précédée d’une croix.
La route qui mène à la ville est bordée de statues mais Thierry ne s’attarde pas. La Route de l’Esclavage est prévue en fin de visite.

Nous franchissons la lagune très peu profonde. A l’écart se trouve le village des sauniers qui vendent le sel de la lagune dans de petits bols.

 

Ouidah : le Fort Portugais

ouidah : fort portugais

Le Fort Portugais ne ressemble pas à un fort, mais à une maison coloniale aux murs blancs. Un petit azulejo rappelle le Portugal. Dans la cour,  de splendides manguiers  et un frangipanier sont en fleurs. Fond sonore : musique en portugais. Le guide est d’origine brésilienne, grand, mince, vêtu à l’africaine, très distingué.
Les Portugais après l’Indépendance en 1961, à  l’époque de Salazar, ont brûlé le fort et les archives plutôt que de les laisser.
Le Musée ne contient que peu d’objets originaux mais il expose des photos intéressantes, cubaines et brésiliennes comme celles de l’exposition du Musée Dapper. Ici, point de visite de Chirac mais  de Lula.
Je suis surtout impressionnée par les chaînes des esclaves, entravés non aux pieds, comme je l’imaginais mais par le  cou. La Jarre percée de plein de  trous symbolise l’unité nationale : de nombreux doigts sont nécessaires pour boucher toutes les ouvertures. Les tambours annonçant la mort du roi sont de curieuses poteries qui résonnent quand elles sont frappées d’un chiffon. Un autre tamtam sacré est impressionnant : il est utilisé seulement par les orphelins, l’orphelin de mère tape de la main droite l’orphelin de père de la main gauche, il annonce la mort des parents.

 

Ouidah : Vaudou, Forêt Sacrée et Temple des Pythons

sakpata dieu variole

 

Devant la Forêt Sacrée, attendent deux cars d’écoliers en excursion.  Lundi de Pâques et la  fête du Mouloud coïncident, c’est donc férié. La Forêt sacrée n’est plus réservée aux initiés. Depuis 1992,  cet endroit est ouvert aux touristes pour présenter les dieux Vaudou.

Un arbre immense, l’Iroko, est entouré de nombreuses statues des divinités : Legba, avec ses cornes, le Dieu du Tonnerre etc.… Certaines statues sont modernes, faites de ferraille récupérée (phares de voitures, chaînes de vélo, boulons…). D’autres  plus naïves, ont des silhouettes courtaudes, pieds et jambes exagérément lourds, attributs colorés en rouge vif ou en bleu roi.

dieu du tonnerre crachant le feu

Notre guide, Anicet, explique patiemment le panthéon vaudou, raconte des anecdotes et chantonne . Son visage, comme celui de nombreux hommes ici, est orné de scarifications verticales, sur le front, coupant les sourcils, sur les pommettes. Cette religion est difficile à appréhender. Qu’un roi se transforme en arbre immense Iroko, est très poétique. Le drap taché d’œuf et de sang, à l’entrée du Temple des Pythons, est plutôt répugnant.

Temple des Pythons

 

 

Le Temple des Pythons comporte plusieurs cours avec de petites cases réservées aux prêtres et aux initiés, seulement fermées par un drap. Le bâtiment des serpents est plus important avec ses portes de bois. A l’intérieur 50 serpents sont entassés. Le jeune guide en prend un assez petit d’un mètre cinquante environ, le met autour de son cou. C’est un animal très lent, très doux. J’ai envie de caresser ses écailles fines et douces. Il est tiède. Je demande au jeune homme de me le passer autour du cou. Il darde sa petite langue. Ce contact me plait.

 

Ouidah : la route de l’Esclavage

BÉNIN 2006 : BALLONS DICTIONNAIRES ET BÊTES SAUVAGES

place des enchères

Pèlerinage, 4km,  de la place des Enchères à la Porte du Non retour.

Place des enchères
La Route des Esclaves  commence place Chacha – surnom de Francisco de Souza, personnage très ambigu, marchand d’esclaves portugais qui aida à faire revenir du Brésil la mère du roi, dont Chatwin s’est inspiré dans Le Vice-roi de Ouidah. Cette place ornée maintenant d’un très bel arbre, était la Place de la Vente aux Enchères.

La route vers la mer, dernier parcours en Terre d’Afrique

 

Ici, commençait le calvaire de ces malheureux. Calvaire marqué par des statues, comme autant de stations d’un chemin de croix historique. Histoire tragique, qu’Anicet et Thierry nous content avec émotion. Les statues présentent pour la plupart les attributs des rois du Dahomey, le Martin Pêcheur, le Tamtam du roi détrôné, le Lion…

arbre de l'oubli

L’arbre de l’Oubli
Les esclaves faisaient 7 fois ou 9 fois le tour  de l’Arbre de l’Oubli pour prendre congé de leurs souvenirs  d’Afrique.

Zomaï

ouidah zomai

Case hermétiquement close où l’on enfermait les esclaves pour les préparer à la traversée dans la cale du bateau. On visite aussi L’Aire du Marquage et la Fosse commune où furent enterrés ceux qui mourraient avant le départ.

Arbre du Retour

Enfin, l’Arbre du Retour figure  retour de leur âme immatérielle en Afrique tandis que leurs corps resteraient en Amérique.
Porte du Non Retour

Nous sommes arrivés à la plage d’où s’embarquent les esclaves pour l’Amérique.

La Porte du Non-retour

De nombreuses statues jalonnent la route jusqu’à la Porte du Non Retour. J’accompagne Anicet jusqu’aux deux bornes qui figurent l’esprit des morts. An fin de parcours nous sommes tous remués par ces souvenirs tragiques.

J’offre à Thierry et à Anicet un Fanta orange. Il fait très chaud. Nous avons hâte de rentrer.

Après midi tranquille à Helvetia

Diane nous apporte au bungalow deux salades : niçoise et poulet. Nous nous reposons pendant les heures où la chaleur est la plus intense, avant de terminer l’après midi à la plage. Les vagues interdisent la baignade. Je me  promène dans l’écume blanche en laissant mon esprit vagabonder à la lisière des vagues avec grand plaisir.

Au dîner : salade niçoise, côte de porc valaisanne accompagnée de courgettes et de plantains, pour finir, une glace moka maison. Moronikê nous livre ses secrets de cuisine. Ses épinards sont cuits à l’étouffée avec très peu d’eau (1dl) parfumée au bouillon de volaille et de l’oignon. Les courgettes sont blanchies 3 minutes avant d’êtres sautées avec du beurre et du persil.
Les moustiques font leur apparition. Je déserte la terrasse du bungalow pour écrire sous la grande paillote plus près de la mer et plus aérée, où il n’y en a pas.