CHALLENGE SHAKESPEARE
J’ai attendu très longtemps avant de lire Le Marchand de Venise; Lire une pièce antisémit e en cachette, passe encore. Mais l’analyser dans mon blog me pose des problèmes de conscience.
« La facture est « antisémite ». Sauf à vouloir lire la pièce au troisième degré, Shakespeare, le grand Shakespeare, semble partager ici les pires préjugés de son siècle «
affirme une critique de la mise en scène de Cécile Garcia Fogel fort bien documentée.
Le génie ne donne aucune excuse. Il faut, certes, remettre la pièce dans son contexte historique où l’antisémitisme était banal dans toute l’Europe. On peut aussi penser qu’une pièce porteuse d’une idéologie délétère et dépassée trouve plutôt sa place aux oubliettes de l’histoire, queShakespeare a écrit assez de chefs-d’oeuvres pour remiser la plus sulfureuse et pourtant on monte encore et encore Le Marchand de Venise.
Le Marchand de Venise c’est Antonio et non pas Shylock comme certains le pensent. Shylock est pourtant le personnage le plus intéressant et le plus ambigü. Comique, c’est l’usurier, le vieillard avare et méchant, renié, abandonné, volé par sa fille, qui pousse sa vengeance au delà de son intérêt et qui maintient son bon droit même quand on lui propose de tripler la somme due. Tragique, c’est l’homme humilié, moqué, insulté parce qu’il est juif, poussé à la vengeance, dont la tirade est un très bel appel à la tolérance.
« Un Juif n’a-t-il pas des yeux ? Un Juif n’a-t-il pas des mains, des organes,
des dimensions, des sens, de l’affection, de la passion ; nourri avec
la même nourriture, blessé par les mêmes armes, exposé
aux mêmes maladies, soigné de la même façon,
dans la chaleur et le froid du même hiver et du même été
que les Chrétiens ? Si vous nous piquez, ne saignons-nous pas ?
Si vous nous chatouillez, ne rions-nous pas ? Si vous nous empoisonnez,
ne mourrons-nous pas ? Et si vous nous bafouez, ne nous vengerons-nous pas ? »
— William Shakespeare, Le Marchand de Venise, Acte III, scène 1[18Cette tirade est un des beaux moments de To Be Or Not To Be dont j’ai visionné les deux versions ce week end. Lubitsch ou Mel Brook m’on réconciliée avec le Marchand de Venise ou tout au moins, la vision de Shylock porte parole des juifs face aux nazis est la plus belle résistance au cinéma.
A miriam : mais tu passes le mur du son (shakespearien)!!
Un beau sujet de discussion : et To be or not to be est une réponse en effet :
La pièce est-elle vraiment antisémite? Cette tirade semble prouver que non et elle est tellement belle que l’on se dit que c’est Shylock qui a raison et les autres qui sont cruels et inhumains. D’autre part, à son époque, pour prendre le parti d’un juif, ne fallait-il pas (pense à la toute puissance de l’Eglise) le faire d’une manière détournée.
REMARQUE d’ordre pratique : miriam pourrais-tu chaque fois que tu publies un texte sur Shakespeare nous avertir Maggie et moi en mettant un lien dans nos blogs dans la page shakespeare (vignette colonne de gauche dans mon blog; tu cliques dessus pour aller aux commentaires). C’est important parce que sinon on risque de laisser passer des publications et puis on ne peut aller dans tous les blogs chercher les liens.
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@claudialucia : j n’ai pas bien compris comment les liens marchent : je vais essayer d’aller cliquer sur la vignette dans la colonne de gauche mais sur laquelle? il y en a 3 . ensuite je mets quoi au juste dans les commentaires? le lien avec mon blog? le titre de l’article?
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Miriam,
Excuse moi mais comme le fait remarquer Claudia, tu fais tant de lecture, que je n’arrive pas à suivre !!!! Je ne savais pas que cette pièce était qualifiée d’antisémite mais c’est peut-être une figure littéraire : il y a le mythe du juif errant mais aussi dans la littérature du XIXeme siècle, chez Balzac notamment, ce sont toujours des usuriers…
En plus, je ne peux pas parler de cette pièce car je ne l’ai pas lu !
Merci pour ta participation..; et ne t’inquiète pas si j’ai du retard dans mes liens ! J’essaie de mettre un peu à jour tout ça !
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L’antisémitisme ne peut pas être vu comme une « figure littéraire », des vexations, des pogroms, ou pire découlent de ces « figures » ou de ces rumeurs.
Il appert qu’aux temps Élisabéthains, les Juifs étaient assez peu nombreux et assez peu discriminés et pourtant la « figure de l’usurier » était connue. Marlowe a aussi écrit un Juif de Malte (que je n’ai pas lu), il est vrai aussi que les Juifs fuyant l’Espagne d’où ils ont été chassés ont trouvé plutôt bon accueil dans la ville de Venise. Ghetto est un nom vénitien. Ils étaient protégés par les lois de la Sérénissime. Ce mythe de l’usurier a été néfaste et perdure encore dans l’inconscient de certains.
Merci de mettre des liens!
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