Tour du château supérieur

Pour aller au château, il aurait suffi de suivre la Néris,mais on se laisse embarquer dans la circulation pour un nouveau tour de ville, encore Uzupis, Ste Anne, la Cathédrale….Au pied du château je retrouve le parc et le club de tennis chic où nous laissons la voiture. On pourrait monter en haut de la colline en funiculaire, nous préférons grimper une rampe aux pavés inégaux et malaisés. La colline de Gediminas ne culmine qu’à 48m. C’est un bel observatoire : nous reconnaissons tous les clochers et les coupoles, celle de la Cathédrale toute proche, Saint Casimir dont le lanternon est ceint d’une couronne, Sainte Anne apparait encore plus gracieuse. Au sommet d’une colline nous apercevons les bulbes verts de l’église des Romanov, vert très vif !
La tour octogonale du 13ème se visite. Deux niveaux sont aménagés ; au premier des maquettes au second des cottes de maille, armures boulets et au sommet le panorama est encore plus dégagé que sur la plateforme.
Traversant le parc j’arrive au Château inférieur et aux Arsenaux où plusieurs musées sont installés. Je choisis le Musée Historique.
Les salles du rez de chaussée sont éclectiques : des silex taillés voisinent avec des sarcophages égyptiens. Bien peu de commentaires traduits en anglais. Heureusement, j’ai la chance de rencontrer des groupes accompagnés. Je tends l’oreille. Au 19ème siècle, les Tsars jugeant que l’Histoire était une discipline subversive, ont fermé le département d’Histoire de l’Université .De ce fait, les Lituaniens accordent beaucoup d’importance à ces collections.
Je m’attache à regarder les portraits et les gravures des souverains, rois de Pologne, gouverneurs de la voïvodie de Vilnius.
A l’étage : 19ème siècle : tableaux, gravures et témoignages du passage deNapoléon 1er et de la Grande Armée, souvenir de l’éveil des nationalités à partir de 1840, portraits d’universitaires et de patriotes. Une conférencière raconte la révolte de 1863 et la répression qui a suivi : pendaison des meneurs déportation dans les mines, montrée par un grand tableau très noir.
L’ autre aile est plutôt ethnographique : des intérieurs ruraux ont été reconstitués avec costumes et meubles. La conférencière pointe un pressoir à lin sont l’huile est utilisée dans l’alimentation.

Des croix ont été réunies contre un mur blanc formant un ensemble saisissant. Un vidéogramme explique que la construction des croix, calvaires, sont une forme très élaborée de la culture populaire. Les images montrent les croix mais aussi les auvents à deux pans, parfois une maisonnette, souvent agrémentés de toute une décoration de sculpture sur bois.
En face des croix, sur des gradins on a rassemblé des statues de bois peint, des anciennes, des naïves, des pietas, des saints…si la gardienne ne m’avait pas surveillée j’aurais fait des photos.
Au rez de chaussée toute une salle est occupée par des cartes anciennes ; je vois les contours de la Livonie, de la Courlande, Prusse orientale, Salmogitie, Lituanie. Frontières à géométrie variables qui débordent selon les traités. Les frontières de la Lituanie actuelle débordent largement à l’Est sur la Biélorussie et au sud jusqu’à l’Ukraine. Difficile de retrouver la Pologne au 18ème et au 19ème siècle. Difficile aussi d’identifier les villes dont les noms ont changé, parfois écrits en cyrillique que je peine à déchiffrer.
Une dernière exposition concerne le retour des déportés en Sibérie. Photos de Krasnoiarsk, des enfants sibériens, de neige. Ces déportations et l’affirmation de l’identité lituanienne sont encore d’une actualité criante.
La conférencière, tout à l’heure expliquait que les Tsars avaient interdit la publication d’écrits en lituanien. Des livres étaient toutefois imprimés à Königsberg, dans la Prusse voisine. Empêchés de parler leur langue, niés en tant que nation, il n’est pas étonnant que ces frustrations n’aient déclenché des réactions nationalistes.
A l’heure de la Crise Grecque et des remises en cause de l’idée européenne, celle–ci me paraît d’autant plus importante. L’affirmation de nations nouvelles de quelques millions de citoyens à peine, doit s’inscrire dans l’Union européenne sous peine de voir rallumer des conflits comme actuellement au Kosovo. D’autant plus que certaines affirmations ne sont pas tellement fondées. Linas affirmait que la Lituanie avait une population homogène où la nationalité se définit par la langue. Par ailleurs nous rencontrons des Russophones qui ne sont pas des touristes. Sans parler des absents, des Juifs qui parlaient Yiddish. Vilnius célèbre le Prix Nobel Czeslaw Milosz(1911-2004) exilé en France puis aux États Unis , mort en Pologne, dont on fête l’année 2011 « année Czeslaw Milosz » sans parler de Pouchkine !

Sous la pluie nous allons voir l’église des Romanov St Constantin et Michel, construite en 1913 dont nous avons remarqué les bulbes verts. La pluie devient déluge. Les rues en pente ruissellent. Des cascades dégoulinent d’un escalier que j’avais pris pour une fontaine. Nous restons un moment à contempler l’église à l’abri dans la voiture. Elle était plus belle de loin.
Les Halles
Comme la pluie ne faiblit pas nous passons par les halles proches de l’hôtel. Les marchands de vêtements et de chaussures occupent une grande partie du bâtiment. Pauvre qualité, pauvre goût, mais prix étonnamment élevés. J’avais pensé que les petits étals dehors, des grand- mères vendant un bocal de myrtilles, un bouquet d’aneth et une botte de carottes, auraient disparu sous la pluie. Non ! Ils sont encore là ! Des sacs de plastique transparents en guise de protection sur la tête ou les marchandises. Il y a quand même quelques charcutiers et poissonniers sous la halle.
La pluie nous retient à l’hôtel. Nous visionnons les photos sur la télévision. Les trier est un crève-cœur. Nous en avons 600, c’est beaucoup trop. Mais la plupart ont déjà subi de nombreuses éliminations.
16h30, la pluie a cessé. Nous retournons boire un pot à « notre » café sur la « place des français ». Sous les parasols carrés le garçon apporte des coussins sur les canapés de rotin gris et des plaids en polaire. Nous avons découvert à Kaunas cette coutume locale : quand il fait frais on s’emmitoufle, même au mois de juillet.