Essaouira : le port et médina

 

Atlantique, Anti-Atlas, Atlas et Riads des Mille et Une nuits

Essaouira port et barques
Essaouira port et barques

Cinq heures du matin : avec la pluie les chiens ont abondamment aboyé. Il est six heures à Paris. Nous sommes « décalées ». Le petit déjeuner est servi à neuf heures : grand verre d’orange, pain frais encore chaud, confiture d’orange. En principe, on mange dans la véranda qui est inondée après l’averse.

Dès dix heures le soleil arrive. De jour, je remarque une étoile de David cassée au-dessus de notre porte extérieure, de jolis petits auvents de tuiles vernissées au-dessus des fenêtres de vitrail bleu et jaune de la cuisine et surtout des volets de bois bleus que nous aurions été mieux inspirées de fermer.

Essaouira porte magen David
Essaouira porte magen David

Toutes les portes de notre rue sont décorées, chacune est différente. La belle pierre beige se sculpte bien de palmettes, étoiles à 5 ou 6 branches, rosaces et aussi coquilles comme à rabat. Des zelliges encadrent souvent les sculptures, mais pas toujours. Certaines sont encadrées de bois ajouré. Certaines sont cloutées… La rue passe sous des arcades décalées et parfois en tunnel sous des maisons. Le plafond est alors fait de fines traverses de bois.

Essaouira souk
Essaouira souk

Contrairement aux médinas aux ruelles tortueuses,  Essaouira est construite selon un plan en damier. Il est donc très facile de s’orienter en retournant dans les artères principales. L’une d’elles, Sidi Mohamed Ben Abdallah, est très commerçante. L’avenue de l’Istiqlal relie les portes principales Bâb Doukalah et Bâb-el-Menzeh qui s’ouvrent sur le port, axe de symétrie presque parfait découpant la médina en deux moitiés égales, perpendiculairement il y a aussi deux artères parallèles. Les souks sont situés au cœur de la vieille ville, à l’intersection de l’axe Est Ouest et de l’axe Nord Sud. Une autre façon de ne pas se perdre est de suivre les remparts et de prendre la rue de la Skala qui emmène au Bastion Nord (près de chez nous) et en poursuivant ensuite vers le Mellah. Le Mellah est bien ruiné, déserté par les juifs depuis près de 50 ans. Certaines maisons sont écroulées laissant imaginer des splendeurs anciennes en voyant des colonnettes avec des chapiteaux  ornés. Je cherche des Magen David ou des Mézouzot encore intactes, sans doute les a-t-on emportées dans le déménagement. L’emplacement est complètement effacé par la crasse et la patine.

Le port

Essaouira burnous et filets
Essaouira burnous et filets

Le port est très actif avec une criée à l’ancienne, vide aujourd’hui. Un poissonnier explique :

– « les pêcheurs ne sont pas sortis aujourd’hui avec le mauvais temps ».

Les bateaux sont à quai, gros chalutiers et barques  bleues – marine à l’extérieur, bleu roi à l’intérieur ; des filets roses traînent.

On entre au port par la Porte marine dans les fortifications construites sous le règne de Sidi Mohamed ben Abdallah (1764) qui y basa ses corsaires. Pour 10 dirhams, je visite la Skala du Port, grosse tour carrée dominant une esplanade armée de ses canons.

Essaouira port
Essaouira port

Le long des remparts, les commerçants qui nous ont vu passer avec la carriole nous reconnaissent. On nous présente les tapis. J’ai toujours un faible pour les tapis. Les tapis marocains ne sont pas aussi raffinés que  ceux de Perse ou de Chine mais ils ont des couleurs vives, des oranges qui flashent, des jaunes d’or qu’on ne voit pas en Orient. Les motifs sont extrêmement variés.

La coopérative de marqueterie de bois de thuya embaume. J’aimerai en rapporter rien que pour l’odeur. La marchande nous montre les différentes qualités du bois. Celui qui est plein de nœuds et de ponctuations intéressantes vient de la racine. Les branches et le tronc donnent un grain plus fin. Le bois de citronnier, plus clair, me fait penser au merisier. La variété des articles est infinie : tables, sièges ; boîtes, mais aussi animaux, échiquiers, pieds de lampe et même abat-jour ajouré assorti.

Je goûte à l’huile d’argan à la petite cuiller. Elle  a un goût de noix ou de noisette. Avant d’être moulues, les amandes sont grillées pour l’huile alimentaire qui se vend 150 dirhams la bouteille. L’huile cosmétique moins parfumée, est faite avec les amandes fraîches. Comme nous restons plusieurs jours à Essaouira, nous promettons de revenir. Les commerçants n’insistent pas. Ici, tout est tranquille.

La Skala du bastion Nord est une rampe qui monte doucement vers une place circulaire dominée par le bastion. De là, nous cherchons notre terrasse. Sous la Kasbah, des ateliers des menuisiers et des luthiers se sont installés. On nous reconnaît. Un jeune homme demande:

« vous avez réussi à ouvrir votre porte ? ».

Difficile de rester dans l’anonymat! Du bastion Nord, nous trouvons notre maison, la dépassons, traversons le Mellah pour arriver dans les souks construits sous des arcades. Petits marchés au poisson, aux épices, aux souvenirs. Impression d’intimité. Essaouira est vraiment une toute petite ville !
Nous mangeons sur la terrasse un demi-poulet sec, filandreux, immangeable, pire que le poulet bicyclette africain ! Heureusement que D a ses yaourts et moi, mes bananes !

Les Allemandes ont fini leur sieste sur les chaises longues. Elles nous les cèdent volontiers. Sur le carnet moleskine j’essaie de dessiner terrasses, minarets et cheminées. Trois gouttes de pluie nous chassent. Je retourne dessiner au port sans inspiration. Il y a un monde fou. Les pêcheurs ou les poissonniers lancent les viscères des poissons aux mouettes. De temps en temps, impression d’humidité : la pluie ? Les embruns des vagues? Ou le pipi d’un goéland ?

Auteur : Miriam Panigel

professeur, voyageuse, blogueuse, et bien sûr grande lectrice

3 réflexions sur « Essaouira : le port et médina »

  1. Je me souviens des soirées sardines grillées, sur de grandes tables sur tréteaux, installées sur le port … Un rituel que nous aimions, même si l’odeur des grillades restait parfois imprégnée sur nos vêtements! Là aussi, on était chaleureusement salué chaque jour, avec encouragements pour qu’on y revienne le lendemain…
    Pas su résister à la marqueterie Thuya-citronnier…

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