A l’entrée de Thiès , des panneaux géants vantent les bienfaits des moustiquaires imprégnées.
Thiès est une ville administrative, carrefour ferroviaire au temps de la colonisation. Nous passons devant un énorme lycée, la place de France avec son grand podium pour meetings, concerts ou cinéma de plein air. Le marché africain est construit comme les souks arabes avec d’étroites allées couvertes qui sont principalement occupées par les marchands de tissus, de chaussures et d’articles de mode, mais dans le désordre sans le rassemblement de boutiques qui vendent le même article comme au souk. Quelques tailleurs et coiffeurs ont installé leur échoppe. Les herboristes présentent les « médicaments » traditionnels dans des bassines : blocs irréguliers blanc éclatant du pain de singe, le fruit du baobab, paquets de feuilles, écorces en fagots ou enroulées dans les feuilles du rônier. Le choix des légumes est varié : petits choux pommés, tomates-cerises, tomates amères, salades vertes d’une fraîcheur étonnante sous le soleil, aubergines, navets…poissons frais.
calebasses,balais etc…
Bouba a retenu pour nous une calèche. Le cheval trottine tranquillement dans une large avenue bordée de caïlcédrats, s’arrête devant la cathédrale à l’heure de la messe. Les prêtres et les enfants de chœur officient en grande tenue mais l’assistance plutôt sage est clairsemée. Dans le quartier on voit de nombreuses institutions catholiques. Le restaurant est au coin de la rue.
petits légumes
Nous déjeunons dans une cour à l’ombre d’un caoutchouc aux racines aériennes impressionnantes. La température est idéale : 28°C. Nous goûtons au plat national, le Tiéboudienne : poisson blanc, riz et légumes vairés : chou, tomate amère, patate douce, navet aubergine. Pastèque au dessert. Encore une fois, c’est excellent.
8h30 : la piste suit la rive du Lac Rose. Les vanneaux sont réunis au trou d’eau douce où étaient les milans et où la vache avait conduit son petit.
Les plantations sont bordées d’euphorbes au feuillage charnu en forme de doigts. Tiges et feuilles toxiques éloignent les animaux des vergers. Le coton pousse en hauts buissons, il n’a pas été planté et n’est pas récolté. Le coton, gourmand en eau, profite de la proximité de la nappe phréatique superficielle dans la zone inter-dunaire. De grands murs de parpaing enclosent les vergers des « fermiers du dimanche » riches administrateurs citadins qui ne cultivent pas eux-mêmes. Ils sont plantés d’anacardiers, de manguiers et d’orangers. Certaines surfaces sont colonisées par les acacias mimosas aux petits pompons jaunes qui protègent le sol de l’érosion et sont des témoins de fertilité. Des tisserins ont tissé des nids en grosses boules.
Nous n’avons croisé aucune voiture. Près de Bambilor, la circulation se précise : des carrioles tirées par des ânes. Les abords du village sont jonchés de plastiques. Il y a bien une collecte des ordures, mais pas de recyclage des plastiques qui s’envolent portés par le vent dans tout le Sénégal qui est un pays plat. A l’approche du village, je remarque un lotissement avec des bornes pour les compteurs (vides) mais rien d’autre. Bouba nous explique que l’Etat est propriétaire du sol. Chacun peut se voir attribuer un lot à condition de le mettre en valeur dans les deux ans. Aucune date-butoir n’est fixée pour terminer les travaux. Il en résulte que pour s’approprier un terrain, on commence quelque chose qui n’est jamais fini : murs en parpaings, bornes…
Les baobabs portent de curieuses boules : les nids collectifs d’un petit oiseau Alecto (Bubalornis albirostris) qu’on appelle aussi oiseau polygame.
Dans la zone inter-dunaire de Niayes où la nappe phréatique est peu profonde on peut cultiver « hors-saison » en cultures irriguées, ici du maïs.
Bouba arrête le pick-up devant la Case des tout-Petits – école maternelle – œuvre du Président Wade qui a consacré selon lui, 40% à l’éducation. La crise économique mondiale a mis fin à ces projets. Son successeur Macky Sall poursuivra-t-il cette œuvre ? Avant Thiès, on passe devant le massif de Diass, point culminant du Sénégal, d’où on extrait dans des carrières du calcaire et des phosphates.
Leçon de botanique : les arbres.
Fromager
Les grands fromagers(ceiba pentandra kapokier) dont on fait les pirogues et dont les fruits donnent le kapok.
Les acacias nim (Azadirachta indica) servent d’arbre d’alignement à Thiès, on les appelle aussi les arbres à quinine. Le feuillage attirerait les moustiques tandis que les applications de feuilles autour de la tête ferait baisser la fièvre.
caïldédrats le long d’une rue ( via wikipédia)
Le long des rues on a aussi planté des caïlcédrats (Khaya senegalensis) dontl’écorce est médicinale.
Une trentaine de cases coiffées de chaume aux murs crèmes, ornés de fresques naïves et colorées représentant girafes, éléphants, dromadaires sont dans un jardin de bougainvillées, taillées en grosses boules roses, ou mêlés à des hibiscus dans des haies fleuries. Les petites pelouses sont bordées par des filaos taillés comme des buis. Les allées sont jonchées de coquillages très blancs. Trois grande paillotes ouvertes abritent des hamacs , haltes aérées et ombreuses.La terrasse-restaurant, est perchée au sommet d’une d’une, à l’arrière une belle piscine, et plus loin, le « pavillon-conférence ».
Les murs de la salle de restaurant sont couverts de graffitis rappelant les exploits d’équipe de pilotes automobiles ou motocyclistes. C’est au Lac Rose que le Paris-Dakar terminait sa course, la dernière étape était le tour du Lac après avoir parcouru la plage. Le podium des récompenses existe toujours. Paris –Dakar est un mythe encore vivace. Bouba répète à plusieurs reprises « c’est un manque à gagner ! ». Les sports mécaniques sont à l’honneur : hôtels et campements se remplissaient lors de ces grands rassemblements et sont maintenant vides. L’hôtel loue quads et buggies (40.000CFA l’heure). Des véhicules tout-terrain attendent les excursionnistes.
La plage sur la Grande Côte
Un cordon dunaire d’environ 1km de large sépare le lac de la plage. Bouba nous conduit à travers la dune sillonnée de traces de pneus. Les rallyes sont peut être une catastrophe pour la dune, mais un mal nécessaire pour l’économie de la région. La4x4 Mitsubishi peine à grimper les dunes les plus raides. A plusieurs reprises, elle recule pour prendre de l’élan. Parfois cela passe, parfois, non et il faut ruser et prendre une autre trajectoire.
Paris-Dakar dans les dunes?
Chez Salim est à deux pas du lac Rose. Dans la brume du matin, opaline bleue, dès que le ciel se dégage le lac prend la teinte rose qui lui a donné son nom. Alors que les eaux du lac sont sur -salées (380g/l), ses berges sont baignées d’eau douce. Des maraîchers cultivent de petits jardins.
Des vanneaux sont perchés : assez grands oiseaux. Tête noire, cou blanc avec une cravate noire, ailes fauves. Haut dans le ciel, planent des milans. Les corbeaux portent ici un collier blanc.
En haut d’une crête : surprise totale ! Les hautes vagues de l’Atlantique se déroulent avec puissance et saturent l’horizon d’un brouillard d’embruns. Même prévenue, je suis scotchée ! J’avais oublié le spectacle de la splendeur des rouleaux qui se succèdent. Déjà, autrefois, dans les Îles Cap Vert et dans le Golfe de Guinée…leur puissance m’étonne toujours. Au cours du « Briefing » matinal, Bouba avait rappelé : la Grande Côte de Dakar à Saint Louis ne se prête pas à la baignade. En raison des rouleaux et des baïnes, elle est dangereuse et restée sauvage. Je compte plus d’une dizaine de pirogues. Comment les pêcheurs ont-ils franchi la barre ? « Ils se retournent parfois » répond Bouba. S’il n’est pas prudent de se baigner je peux marcher sur le sable mouillé dans la frange écumeuse. Il me faut faire attention. Une vague plus puissante que les précédentes, et je me retrouve trempée jusqu’à mi-cuisse. L’écume n’est pas blanche, elle laisse sur le sable une trace verdâtre – argile ou algues microscopiques ? La plage s’étend à l’infini, se perdant dans la brume des embruns.
Les filaos fixent la dune mais empêchent la percolation d’eaux salées de la mer qui viendraient contaminer la nappe phréatique d’eau douce. Cocotiers, bananiers poussent près des campements.
Deux âniers surgissent brusquement sur la piste juste au niveau capot. L’un est chevauché par un vieil homme vêtu de violet coiffé d’un chapeau pointu, l’autre par un très jeune enfant. Le 4×4, presqu’à l’arrêt heurte l’âne . L’enfant n’a pas su retenir sa monture. Heureusement, la collision est sans conséquence. Plus tard, nous rencontrerons à nouveau les deux cavaliers.
calotropis procera
Chez Salim, pendant que Boubaregonfle les pneus qu’il a dégonflé pour le sable, je photographie Calotropis procera un curieux arbuste aux tiges sinueuses et graciles portant de larges feuilles arrondies épaisses et bleu-gris avec des inflorescences mauves très découpées et décoratives. C’est une plante médicinale que Bouba appelle Péridurale sénégalaise car les sages-femmes l’utilisent pour masser le ventre des parturientes. Le principe actif se trouve dans les feuilles. Mélangé avec le beurre de karité il soignerait aussi les entorses en emplâtre.
Le Lac rose
lac Rose : sel
Autrefois, le Lac Retba – Lac Rose – était une lagune reliée à la mer et sa superficie était de 32km2. L’extraction du sel l’aurait fait régresser de moitié (je n’ai pas compris comment). Point de marais salant ici, ni de cristallisation de sel en surface. La croûte de sel est immergée. Les sauniers travaillent à bord de pirogues rectangulaire plus plateformes que bateaux. Ils s’enduisent de beurre de karité pour descendre le long de la pirogue et casser le sel qu’ils remontent à bord. A terre, le sel forme d’innombrables monticules. Les tas gris sont cassés à la pioche et on découvre les cristaux blancs. Ce sel n’est pas consommable car il est dépourvu d’iode (bizarre au bord de la mer !) qu’on ajoutera avant l’ensachage. Il sera raffiné plus loin dans le centre du Sénégal. Un camion est chargé de petits sacs prêts à être vendus ou exportés.
Sel du lac Rose
L’eau très rose, le sel très blanc, les barques peintes, les silhouettes des gens se détachant sur le ciel forment une composition très photogénique. Malheureusement, dès qu’on pose un pied à terre trois commerçantes surgissent, corbeilles sur la tête, tenues traditionnelles colorées, elles posent pour la photo. Évidemment il faudra acheter un collier. La noix de coco teinte et polie est une matière très séduisante qui ressemble à de l’écaille ou à de l’ivoire. Malheureusement à chaque arrêt d’autres vendeurs nous harcèlent. J’arbore bien en vue mon nouvel achat, espérant ainsi décourager les suivants. Peine perdue ! « Un seul collier ce n’est pas suffisant ! Les autres sont pour offrir ! » L’aspect le plus déplaisant de leurs pratique commerciale est le soit-disant cadeau qu’ils vous mettent dans la main de force : « Un cadeau cela ne se refuse pas ! Vous allez me vexer ! »L’objet en main le client est captif. Il faut le rendre de force, et si possible avec le sourire et dans la bonne humeur. Bouba n’est d’aucune aide. Ce n’est pas son rôle, ni de favorise un achat, ni d’empêcher une vente. J’ai acheté le collier, j’apprécie l’artisanat sénégalais mais je refuse de payer 3000CFA un paquet de sel qui va m’encombrer !
Au déjeuner : salade, poulet Yassa avec une sauce aux oignons, riz et une banane. Le poulet grillé est très tendre et a très bon goût.
Dans la salle du restaurant sont réunies des femmes de tout âge pour un séminaire de sages-femmes. J’admire la variété des costumes qui vont de la minijupe (organisatrice toubab) au long voile islamique blanc en passant par les turbans colorés, wax et mousselines, paillettes brillantes ou galons dorés. Certaines sont tête nue, cheveux tressés cheveux défrisés…Panachage insolite : un haut d’une tenue traditionnelle sur un collant ou un jeans serré. Toutes les combinaisons, toutes les longueurs de jupes, sont imaginables.
Il fait très frais au restaurant à la hauteur des frondes des cocotiers qui s’agitent. L’eau de la piscine est presque froide, je dois nager sans arrêt pour me réchauffer.
vanneaux à la source d’eau douce
16h, Bouba nous conduit à pied à la baignade. J’ai gardé mes tongs béninois pour entrer dans l’eau sur salée. Je flotte, pieds en l’air, assise. Il faut éviter de se mouiller la tête, le sel brûlerait les yeux. Je vais ensuite chez le « rinceur » qui me douche énergiquement en balançant un seau d’eau de source. Pourboire 2000CFA et visite à sa boutique où je trouve des sacs en plastique tissés très modernes très flashy. Je choisis un qui a la forme d’un panier à provision gris et prune qui hébergera la moustiquaire et les livres destinés à l’école ;
Au pie de la petite mosquée au minaret carré recouvert de carrelage cassé, se trouvent un restaurant Aïcha peint en rose et un petit marché proposant des papayes, des bananes et des oranges, et encore…des boutiques de souvenirs. L’une d’elle a pour enseigne Au Boulevard Ousmane : les Sénégalais ont le goût des jeux de langage !
Au retour, nous sommes escortées par un vendeur qui propose un éléphant sculpté pour 1.5€, pour 2€ il ajouterait un hippopotame (dit-il). Un autre se joint à lui et « m’offre » un collier avec un cauri incrusté sur un médaillon de cuir aux couleurs africaines. « Un cadeau, cela ne se refuse pas, tu vas me vexer » (refrain !). Une femme s’associe à eux avec des colliers en plastique affreux. Une vache grise passe avec son veau. Nous la suivons en procession, nous deux plus les trois vendeurs dont on n’arrive pas à se défaire. On cède pour l’éléphant après une demande en mariage. Je rigole. Je pourrais être sa grand-mère ! Non ! Il sort sa carte d’identité, il n’est pas si jeune, il a 36ans. Pour 2€, on n’aura pas l’hippopotame.
Dîner : des musiciens s’installent au fond de la salle sous une fresque rose criard figurant l’extraction du sel. Il y a deux guitares, une kora, une calebasse et une grosse sono. Un vidéaste et un photographe professionnel et un porteur de lumière immortalisent le concert. C’est sans doute un groupe connu Xam-Xam(le savoir en Wolof).La kora est très belle avec son haut manche d’où sont tendues 24 cordes. La calebasse est retournée, le percussionniste en tire des sons très différents selon qu’il tape avec la paume, le poignet, les doigts ou ses bagues. Les dames du séminaire se sont faites belles pour la soirée. Leurs turbans sont élaborés. Je demande la permission de les photographier ce qui les amuse beaucoup.
Au menu : brochettes de zébu avec des frites ; la viande est très savoureuse, souple et tendre.
Paris- Dakar : Dernière course sur la plage avant l’arrivée au Lac Rose! pour nous c’est plutôt un galop d’essai
Vendredi 1er mars : Vol Corsair
Programmé initialement à 15h35, puis à 16h35. A l’enregistrement on annonce du retard. Sur le tableau défile l’heure du vol : 17h10 puis 18h10. On se perd en conjectures. Corsair ne donne aucune explication. En revanche, au passage de la sécurité, les passagers pour Dakar sont orientés vers des files spéciales. Que se passe-t-il ? En ce temps de guerre au Mali, on devient un peu parano. Une rumeur se répand auprès des habitués : aujourd’hui Corsair inaugure sa nouvelle liaison pour Abidjan, l’avion de Dakar aurait été réquisitionné pour ce vol et on attendrait un nouvel appareil pour Dakar.
L’embarquement est chaotique. On décolle vers 19h dans les nuages. Rien à voir par le hublot, on joue au Solitaire sur l’écran. Très bonne paella aux crevettes. Nous atterrissons juste avant minuit. Les formalités durent une bonne heure. Notre guide, Bouba, attend depuis 21h30 dans la rue.
La voiture est un pick-up Mitsubishi . Bouba enfile une cordelette dans les poignées des valises qui seront à l’air libre. « Ici on est au Sénégal, elles ne risquent rien »répète-t-il.
Difficile de se faire une impression de Dakar en pleine nuit. L’odeur iodée de la mer nous saisit plaisamment. Le 4×4 roule sur des autoroutes (même signalisation bleue qu’en France) périphérique ? Contournement ? Ronds-points, la voirie sénégalaise est plutôt moderne et bien goudronnée sauf aux approches du Lac Rose où on emprunte une piste de latérite sur un tronçon avant de retrouver le goudron.
notre bungalow au petit matin!
3h du matin, arrivée Chez Salim Emile ouvre le bungalow n°2, une case ronde décorée avec un perroquet bleu, recouverte d’un toit de chaume. L’intérieur est assez spartiate mais de bon goût. Le plafond est en vannerie soignée : de petits boudins réguliers faits de paille de graminées enroulés dans des feuilles de rônier, longs et élégants cigares couleur paille s’enroulent autour de la pièce. Les deux lits sont équipés de moustiquaires suspendus à un cercle. La clim est règlée à 25°C pour chasser les moustiques et assécher l’atmosphère. Une cloison discrète sépare la salle d’eau derrière un rideau, de l’autre côté on peut ranger les valises et poser les vêtements sur des étagères en feuilles de palmier.
Après avoir éteint le climatiseur le grondement régulier de l’océan nous berce.
Quelques jours avant l’envol pour Dakar, j’ai trouvé de DVD à la bibliothèque dans la collection de La Bibliothèque du Centre Pompidou, collection diffusée dans les bibliothèques publiques de prêt.
Il me semblait indispensable de consacrer mon attention à Senghor – grande figure du Sénégal.
Ce documentaire de 52 min. est vraiment magnifique, alternent des documents d’archives en noir et blanc, des séquences actuelles en couleur, vraiment très belles et des interviews d’artistes ayant côtoyé Senghor : le poète mauricien Edouard Maunick, le percussionniste Doudou Ndiaye Rose ainsi qu’une très belle performance du danseur Papa Sy.
Senghor le poète, Senghor le député puis le Président (discours de sa démission), Senghor le promoteur de la culture africaine avec en prime un discours de Malraux joué par un couple antillais, très drôle, puis la voix de Malraux.
Senghor en trois idées-forces : négritude, universalité, métissage
Un de ses amis a dit de lui :
« Quand il dit négritude, c’est la racine. quand il dit métissage, c’est les branches… »
Cher frère blanc,
Quand je suis né, j’étais noir,
Quand j’ai grandi, j’étais noir,
Quand je suis au soleil, je suis noir,
Quand je suis malade, je suis noir,
Quand je mourrai, je serai noir.
Tandis que toi, homme blanc,
Quand tu es né, tu étais rose,
Quand tu as grandi, tu étais blanc,
Quand tu vas au soleil, tu es rouge,
Quand tu as froid, tu es bleu,
Quand tu as peur, tu es vert,
Quand tu es malade, tu es jaune,
Quand tu mourras, tu seras gris.
La vie en spirale est l’histoire d’un dealer – sipikat – chauffeur de taxi clandestin dont la seule préoccupation est de faire la foire avec sa bande de copains, cannabis –yamba – et alcool. A la suite d’une pénurie d’herbe, il se lance dans le trafic. Et cela lui réussit! Les affaires deviennent de plus en plus prospère, il croise des trafiquants importants, importe des tonnes dans des ravitaillements hasardeux. Protégé par un grigri efficace tout semble lui réussir. Son négoce lui rapporte des coups de canon – des millions de CFA. Villa, voiture luxueuse, femmes séduisantes, le petit trafiquant mène grand train. Jusqu’à l’accident, la prison d’où il sort par miracle.
Ce roman noir est écrit dans un style alerte et efficace mêlant des expressions exotiques – argot des junkies ou wolof?-.Il entraîne le lecteur dans les bouges, les clubs chics, les mosquées, les villages. Voyage étonnant. Seules les conquêtes féminines et les gueules de bois inévitables m’ont un peu lassée. Il y a assez d’action pour ne pas s’ennuyer.
Analyse pessimiste d’une société corrompue où le trafic de drogue étend ses ramifications aussi bien dans le monde des affaires, la police ou les hauts fonctionnaires et même chez les imams. L’argent y est roi. Même en prison, tout s’achète, y compris sa libération!
Préparant notre voyage au Sénégal, j’ai emprunté à la médiathèques plusieurs DVD sénégalais. Chaque fois : une surprise. De madame Brouette, à Guelwaar, en passant par Naye, ou récemment au cinéma la Pirogue, des productions, des styles très divers. Je n’aurais jamais imaginé une telle diversité.
Hyènesest un film flamboyant, théâtral, très original, avec une bande-son magnifique.
Quand j’écris théâtral, je ne fais pas seulement référence au scénario qui est l’adaptation africaine d’une pièce de Dürrenmatt : La visite de la Vieille dame, ma à la mise en scène du film haute en couleurs, loin de la réalité et du quotidien, aux costumes qui auraient plus leur place sur une scène que dans la vie de tous les jours : les soldats portent des costumes d’opérette rouges aux manches arrachées, les mendiants sont vêtus de sacs de jute, Linguène Ramatou est hiératique, raide avec ses prothèses en or, ses suivantes auraient plus leur place dans le chœur d’une tragédie antique que dans la banlieue de Dakar. Que dire de la japonaise aux lèvres trop rouge porteuse de menottes?
Loin de toute réalité les attractions de foire, clinquantes, les cabriolets-coupés de deux-chevaux rouge et noires qui surgissent dans le désert.
Animaux de légende contribuent à l’atmosphère de légende et de mythe dans laquelle baigne l’histoire de la vengeance de la petite bonne Ramatou engrossée par Draaman Drame, chassée du village, devenue richissime, « plus riche que la banque mondiale, » vient acheter la condamnation à mort de Draaman en déversant des largesses sur Colobane et ses habitants, comparés aux hyènes. La solidarité des habitants est rapidement mise à l’épreuve de la corruption. « le monde a fait de moi une putain, je veux faire du monde un bordel »
La vieille dame aux pieds d’or symbolise-t-elle l’aide occidentale à l’Afrique avec son cortège de corrompus, de hyènes?
Deux semaines avant le départ pour Dakar, ce tire a attiré mon attention, mais je me suis retrouvée au Etats Unis. Du Sénégal je ne verrai que Gorée, en prologue et en épilogue.
Film sur la traite des esclaves? Au début oui, Alloune, ancien guide de la Maison des Esclaves de Gorée, du part à la recherche des esclaves de sa famille dans les archives américaines et parvient malgré les difficultés à reconstruire un arbre généalogique et à retrouver des descendants encore vivants.
Rapidement l’action bifurque. New York, Alloune retrouve son neveu et un « Little Senegal », émigrés africains tentant le rêve américain. Les descendants des anciens esclaves ne sont pas tendres avec les nouveaux émigrés. Ils se considèrent pleinement américains et n’ont que mépris pour les Africains. Alloune parvient à se faire embaucher par la dernière descendante des Robinson qu’il a identifié dans ses recherche généalogique.
A nouveau, le film prend une nouvelle tournure; On découvre la dureté de la vie Newyorkaise, sa violence, la primauté de l’argent, les combines, la délinquance. Alloune, le sage met de l’ordre dans sa « famille ». Une autre histoire se greffe sur la famille d’Alloune celle de Karim (Reschdy Zem) qui contracte un mariage blanc pour avoir des papiers américains. On ne comprend pas bien ce que cela vient faire là.
Film un peu foutraque, bien sympathique, plein de surprises porté par la présence magnifique de Sotiguy Kouyaté. De belles vues de New York, mais on ne saisit pas très bien le propos. Le thème de l’esclavage est à peine abordé et les bons sentiments opposant une solidarité africaine à l’égoïsme américain sont un peu simplistes.
d’un village ou les cases sont de bois et de paille, de canisses les palissades. Où les traditions ancestrales semblent régner.
Pourtant les cases vides qui s’effondrent témoignent déjà de l’exode rural. comme le trône du chef du village, un transat de toile, les anciens ont encore en mémoire la noblesse des castes. mais on sent la décomposition.
Le griot raconte la honte répandue sur le village : le chef a conçu un enfant incestueux à sa fille. La mère ne supportera pas l’opprobre. Son fils est rentré fou de la guerre coloniale. il arpente la place en uniforme avec son drapeau au pas militaire. la musique militaire « au près de ma blonde « couvre la musique du griot… les catastrophes se succèderont jusqu’à ce que la petite fille soit chassée avec son enfant.