Melmoth réconcilié – Honoré de Balzac

LECTURE COMMUNE : BALZAC

En compagnie de Maggie et de Cléanthe, et peut être d’autres blogueuses, je poursuis l’exploration des nouvelles de Balzac après l’Auberge Rouge, l’Elixir de Vie, le Bal de Sceaux, le Colonel Chabert et la Vendetta. les écrits de Balzac sont si vastes que la lecture commune est un bon moyen de se lancer. 

Melmoth pourrait trouver sa place dans mon classement mental auprès de l’Elixir de Vie, de l’Auberge Rouge, El Verdugo et la Vendetta, dans un registre fantastique, presque romantique, avec des apparitions surnaturelles alors qu’avant de me lancer dans cette aventure, j’avais plutôt l’idée préconçue d’un auteur décrivant avec réalisme les rouages de la société du début du 19ème siècle

Ces apparitions sont d’autant plus surprenante que le récit se place d’abord sur un terrain très prosaïque.  Le héros Castanier est caissier dans la banque Nucingen ; décoré de la Légion d’Honneur, ancien chef d’escadron sous l’Empereur ; on imagine le caissier à longueur de journée enfermé dans sa loge grillagée.

Si le caissier a de l’imagination, si le caissier a des passions, ou si le caissier le plus parfait aime sa femme, et que cette femme s’ennuie, ait de l’ambition ou simplement de la vanité, le caissier se dissout. Fouillez l’histoire de la caisse? Vous ne citerez pas un seul exemple du caissier parvenant à ce qu’on nomme une position….

Mais qui manipule tant d’argent peut avoir des tentations

…notre civilisation qui, depuis 1815, a remplacé le principe Honneur par le principe Argent

L’action commence justement au moment où Castanier s’apprête à céder l la tentation de commettre un faux, puiser dans la caisse et  s’enfuir. Surgit alors John Melmoth, un Anglais mystérieux. Ce curieux personnage semble suivre ou précéder Castanier, deviner ses pensées, l’accompagner. Melmoth représente-t-il le Diable ou la Conscience de Castanier? Va-t-il faciliter sa fuite à l’étranger ou au contraire le forcer à réparer la faute? Pendant un bon moment la lectrice hésite entre ces deux idées (je ne vous donne pas la solution, ce serait gâcher le plaisir de lire!

Schütte

Pendant plusieurs pages, l’auteur laisse le lecteur dans l’expectative et en profite pour présenter d’autres aspects de la vie parisienne, les femmes entretenues, le théâtre…certains détails nous font basculer dans le fantastique, désorientent un peu le lecteur, mais pas trop.

Tout s’emballe vers la fin, Castanier se métamorphose. L’étrange colonise le roman comme

Les sciences furent pour Castanier ce qu’est un logogriphe pour celui qui en sait le mot

Qu’est ce que ce « logogriphe« ?

Brusquement on quitte l’univers de la Comédie Humaine pour Faust. Mais Faust chez les banquiers, à la Bourse. Je vous laisse découvrir la fin délirante ironique et drôle.

Evidemment un indice est donné par le choix du titre Melmoth est  sans doute inspiré de Melmoth ou l’Homme Errant de Charles Robert Maturin, roman gothique anglais paru en 1820. Quand j’ai lu la nouvelle de Balzac, je l’ignorais; peut être une certaine naïveté (ignorance) augment l’effet de surprise?

 

 

Ludwig van à La Philharmonie de Paris

PARIS/BANLIEUE / EXPOSITION TEMPORAIRE jusqu’au 29 janvier 2017

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Beethoven est produit comme un héros complet doté d’un discours (fait rare chez un musicien) d’une légende(une bonne dizaine d’anecdotes) d’une iconographie, d’une race (celle des Titans de l’Art comme Michel-Ange et Balzac) et d’un mal fatal (la surdité)/

Roland Barthes

Comment mettre en scène un musicien dans une exposition? (je m’étais posé la même question à propos d’un écrivain, Oscar Wilde). Avec de la musique, omniprésente : audioguide avec un casque gratuit, mais aussi musique baignant chaque pièce. Avec des documents d’époque. Surtout avec des images, des textes et des sculptures inspirés par la légende. Si c’était uniquement le compositeur dans l’histoire de la musique, l’intitulé de l’exposition aurait sans doute été Beethoven . Celle-ci ne s’appelle pas Ludwig van par hasard. Il s’agit plutôt de mettre en scène l’icône que Beethoven est devenu.

Introduction : un Beethoven très contemporain détourné par les humoristes, utilisé à outrance par les publicitaires. Un mur d’image projette des vidéos rigolotes (Pierre Desproges, entre autres).

Comment devient-il une icone? en mourant!

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La salle suivante, « Du passage de la vie à l’état d’icône » raconte la mort de Beethoven(1827). Rotonde autour de son(ses) masques mortuaire(s). Salle noire où l’on voit des annonces funéraires, des lettres et les représentations des funérailles et l’éloge funéraire de Grillparzer: « Ainsi fut sa mort, ainsi vivra-t-il jusqu »à la fin des temps. » Romain Rolland remarque : « jamais Empereur d’Autriche n’eut de funérailles telles que Beethoven. »

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Funérailles de Beethoven

La musique de la Symphonie n°7 baigne la pièce suivant, rotonde en grisaille, autour d’un masque pris du vivant de Beethoven et autour les œuvres inspirées par ce masque.

Alois Kolb : le baiser au monde entier
Alois Kolb : le baiser au monde entier

Le plus étrange est la gravure de Aloïs Kolb (1909) le Baiser au Monde entier et trois étranges pastels symbolistes de Lucier Lévy-Duhumer.

Lévy-Dhurmer : Appassionata
Lévy-Dhurmer : Appassionata

Au casque j’écoute la transcription pour piano de Liszt et une variation de Jacques Loussier.

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Une grande salle bleu nuit a pour titre Le Musicien comme Prophète la légende dorée est illustrée par des gravures ressemblant parfois à des images pieuses. J’ai surtout remarqué Beethoven dans un paysage d’orage de Carl Schweninger. De nombreux textes illustrent cette légendes : Ernest Theodor Amadeus Hoffman, Schopenhauer, Kandinsky, Gide et Le Corbusier. Le  grand tableau de Benjamin Constant Beethoven, la sonate au Clair de lune est bien sombre. Celui de Balestrieri (1900) Sonate à Kreutzer est plus gai avec la jupe rouge de la femme au premier plan et le plancher jaune.

Balestrieri Sonate à Kreutzer.
Balestrieri Sonate à Kreutzer.

Au casque écoute de La Missa Solemnis de Beethoven ayant  inspiré Bruckner et Mahler.

Une salle Têtes tragiques au son de la sonate pour piano n°31 est décorée de nombreux bustes, de Rodin (masque de Hanako), de Bourdelle d’un chinois Zhongsian.

Une série de livres est consacrée à la surdité de Beethoven : Romain Rolland, Victor Hugo et même Dali et Gauguin.

Kundera et Léo Ferré ont utilisé la formule Muss es sein? Es muss sein. Léo Ferré interpelle Beethoven à travers les siècles: Ludwig, Ludwig, reponds. T’es sourdingue ma parole…. 

Seulement après, vient l’évocation chronologique de la vie du musicien, dans des petites vitrines qu’on allume soi-même avec des documents d’époque. Anecdote : la Lettre à Elise et elle vraiment de Beethoven?

Enfin, comme une apothéose  les Destinées politiques avec l‘Hymne à la joie et toutes les occasions héroïques : ) Varsovie en 2004, devenue européenne, avec le Mur de Berlin, ) Kiev sur Maidan, en Chine…. au casque Pete Seeger.

Fidelio aussi avec un poème Chant des douleurs de Fleischmann écrit à Therezin…

Il faudrait aussi parler de Beethoven inspirant les artistes Sécessionnistes de Vienne avec Klimt, et bien sûr du cinéma.

L’exposition se termine sur un énorme cornet acoustique qui sert d’affiche à l’exposition.

 

 

 

Oscar Wilde, l’Impertinent absolu – au Petit Palais

OSCAR WILDE EXPO AFFICHE

Comment réaliser une exposition pour présenter un écrivain?

Depuis quelques temps, Oscar Wilde m’intéresse, je me suis même inscrite au MOOC qui lui est consacré. Je redoutais toutefois une accumulation de manuscrits, lettres ou photographies anciennes. Ou pire! des pages et des pages d’exégèses sur des panneaux.

La mort et le sommeil portant Sarpédon
La mort et le sommeil portant Sarpédon

Oscar Wilde, le dandy, l’esthète, a lui-même mis en scène sa vie, ce qui a facilité la scénographie de l’exposition. Scénographie rythmée par ces citations ou aphorismes spirituels appropriés à chaque étape de son existence.

En introduction à l’exposition, le visiteur lit :

UNE BONNE REPUTATION. C’EST UNE DES CONTRARIÉTÉS A LAQUELLE JE N’AI JAMAIS ÉTÉ SOUMIS

ON NE DOIT JAMAIS FAIRE SES DEBUTS PAR UN SCANDALE. IL FAUT RÉSERVER CELA POUR L’INTÉRÊT DES VIEUX JOURS.

Plusieurs documents, photographie, de Sarah Bernhard ainsi qu’un sonnet manuscrit que Wilde lui a offert nous projettent dans l’univers de l’écrivain, théâtre, mondanité.…je découvre sa belle écriture régulière.

 

Dans la seconde partie, nous découvrons Wilde, critique d’art, sur un portrait de groupe à la Grosvenor Gallery, 1877. La plupart des tableaux ont des sujets mythologiques comme La Mort et le Sommeil portant le corps blessé de Sarpédon de William Blake Richmond, Orphée et Euridyce de Watts. Wilde était fasciné par Rome peinte par Heilbuth.

night and sleep
night and sleep

Sous Night and Sleep d’Evelyn de Morgan on peut lire le commentaire de Wilde. J’ai aussi aimé le tableau Préraphaélite de Stanhope, Love and the Maiden, la Renaissance de Vénus de Walter Crane…

John_Roddam_Spencer_Stanhope_-_Love_and_the_Maiden

1882 : conquête de l’Amérique

S’AIMER SOI MÊME C’EST SE LANCER DANS UNE BELLE HISTOIRE D’AMOUR QUI DURERA TOUTE LA VIE

L’écrivain , déjà célèbre, y fait une tournée de conférences.  A  cette occasion le photographe Napoleon Sarony tire une série de portraits dont celui de l’affiche de l’exposition. La citation introduit ces photographies ainsi que des caricatures et même des cartes publicitaires qui utilisèrent la figure de Wilde pour vendre un peu n’importe quoi.

Paris-Londres (1883-1889)

LA DANSE MAURESQUE

Reçu par Victor Hugo, rencontrant Verlaine, Paul Bourget, Gide, Wilde est introduit dans la société littéraire parisienne. Dans cette salle une vitrine consacrée à sa famille nous montre sa femme Constance et une lettre à son fils Cyril. Un panneau de Toulouse Lautrec décorant la baraque de la Goulue, la danse mauresque illustre cette période.

Les années créatrices (1890-1895)

IL N’EXISTE PAS DE LIVRE MORAL OU IMMORAL. UN  LIVRE EST BIEN ECRIT OU MAL ECRIT. UN POINT C’EST TOUT

 

LE PUBLIC FAIT PREUVE D’UNE TOLERANCE ÉTONNANTE. IL PARDONNE

salomé

 

Salomé

 

 

 

Salomé pièce écrite en français, a l’honneur d’une piece à elle-seule. Au sol sont projetés les deux films de Charles Bryant et d’Al Pacino. les illustrations de Bearsdsley : 17 estampes sont de toute beauté

J’ADORE LE THÉÂTRE, IL EST TELLEMENT PLUS VRAI QUE LA VIE

Le Procès, la prison et l’Exil (1895-1900)

VIVRE EST LA CHOSE LA PLUS RARE AU MONDE. LA PLUPART DES GENS SE CONTENTENT D’EXISTER

Une vitrine montre les éditions des oeuvres publiées après sa sortie de prison signées C.3.3 ou même « L’auteur de l’éventail de Lady Winthermer »

Un grand portrait d’André Gide qu’il a rencontré quand Gide avait 22 ans et qui lui est resté fidèle.

NOUS SOMMES TOUS DANS LA BOUE. MAIS CERTAINS D’ENTRE NOUS REGARDENT LES ETOILES