Les Buddenbrooks – Thomas Mann

Lübeck, 1835 – 1875, le déclin d’une famille de négociants. Saga de 630 pages qui se lisent avec  grand plaisir.

Lübeck, ville hanséatique, ville libre dans une Allemagne pas encore unifiée, pas encore industrialisée. Glissement vers un monde moderne déjà prévisible en 1835 quand le souvenir du passage des armées de Napoléon est encore perceptible, vers une Prusse qui va prendre la tête, en attendant l’unité le Zollverein est dans l’air. Johann Buddenbrooks,  négociant en grains fournit les armées. Consul des Pays Bas,  commerçant avec toute la Baltique de Riga au Danemark, et à la Suède, même plus loin vers Amsterdam ou Londres. Lübeck,  ville provinciale, est ouverte sur le monde, Christian est envoyé apprendre le commerce à Londres, il ira même à Valparaiso. 1830-1875, c’est aussi l’essor des chemins de fer.Période bâtisseuse où les notables quittent les maisons à pignons pour  construire des hôtels de prestige, galeries et colonnes…. Période des révolutions de 1848, Lübeck n’est pas épargnée par le bouillonnement révolutionnaire, le livre raconte comment les sénateurs et notables vécurent ces journées.

En dehors du contexte géographique et historique, ce roman est une formidable histoire familiale avec tous les ressorts psychologiques habilement disséqués par l’auteur. Thomas Mann prend son temps pour présenter ses personnages : les  35 premières pages racontent un repas de famille, au cours desquels il  présente les protagonistes et donne un luxe de détails aussi bien sur le décor, la maison des Buddenbrooks,que sur les costumes et les divers travers de tous les membres de la famille et leurs proches.

Une autre fête de famille, un réveillon de Noël marquera la chute de la maison Buddenbrooks. Magnificence de la fête, des cadeaux que l’enfant Hanno recevra : un théâtre miniature et un harmonium, cadeaux de rêve pour celui qui choisira la voie artistique plutôt que celle du négoce pour suivre l’affaire familiale et succéder à son père….Description des décors de Noël, menu de fête, toilettes…..

On peut aussi s’attacher à chacun des personnages dont le destin est raconté en finesse. J’ai suivi avec émotion Tony, la jeune fille heureuse de vivre qui sacrifiera son premier amour par obéissance à son père, en se mariant à un négociant, comme si ce destin était immuable. Tony deux fois mal mariée….

Déchéance de Christian qui n’était pas fait pour être commerçant…Encore un mauvais mariage-de-raison pour Erika, la fille de Tony… Dans les dernières pages on suit Hanno, le musicien de santé débile, impossible successeur de son père Thomas.

Les évènements se succèdent en douceur, logique implacable de ce déclin, sans éclat, l’analyse psychologique est toujours suggérée dans une foule de détails pittoresques, villégiature sur le bord de la Baltique, ou promenade en campagne.

 

un peu d’Allemand….