matinée sur l’Acropole

CARNET DES CYCLADES

caryatides de lErechtéion

Un peu avant 9h, nous arrêtons un taxi sur Athinas.

 Nouveauté : le compteur du taxi imprime un ticket et le taximan rend la monnaie.

Les handicapés peuvent accéder à l’Acropole  grâce à un monte-charge le long de la paroi nord. Un cheminement cimenté y conduit et tourne ensuite autour du rocher jusqu’au théâtre de Dionysos. Nous découvrons la source de la Clepsydre qui aurait alimenté la clepsydre située dans la tour des Vents dans l’Agora romaine. On arrive derrière l’ancien temple d’Athéna, Pandroséion, et l’Erechtéion.

Le Pandrosion contenait les lieux sacrés d’Athènes : l’olivier d’Athéna et la source salée jaillie du trident de Poséidon, lieu de la compétition des dieux pour parrainer Athènes. Il fut détruit par les Perses en 480.

 

 

L’Erechtéion et  ses caryatides me fascine toujours autant.  Il fut construit après les guerres du Péloponèse (431-404 av JC)  Je ne me lasse pas de photographier les caryatides (ce sont des copies, les originales sont au Musée de l’Acropole) .

Il fait encore frais, la fréquentation est raisonnable. En revanche, plus question de s’asseoir pour se reposer sur un bloc. Des cordes interdisent de s’approcher de tout vestige, elles sont assorties d’avertissements « interdit de toucher le marbre !».  Les gardiennes qui font respecter les consignes à coups de sifflet n’ont aucune pitié pour Dominique et sa béquille. Elle finira par trouver un banc à l’ombre derrière le Parthénon.

Un échafaudage occulte le fronton ouest. Je m’intéresse aux restaurations successives du Parthénon : la grue Pothain qui occupait le temple depuis 1985 a été remplacée récemment par une autre plus discrète. Les blocs manquant dans la reconstruction sont remplacés par du marbre blanc qui se patinera peut-être un jour. L’usage dans l’anastylose est qu’on puisse différencier les éléments originaux. Des caissons de plafond attendent d’être remontés. On peut observer les restaurations de l’intérieur entre les colonnes du côté Est bien dégagé.

parthénon : angle du fronton

Deux têtes de cheval sont coincées à chaque extrémité du fronton – je les avais oubliés ! Je me souvenais en revanche des trous rectangulaires où étaient suspendus les boucliers offerts par Alexandre après sa victoire sur le Granikos (334 av JC) en revanche je n’avais pas remarqué les petits trous sur l’architrave regroupés en paquets correspondant aux lettres de bronze de l’inscription de Néron (61 après JC).

Puisque nous sommes arrivées par derrière je descends vers les Propylées pour effectuer le parcours « officiel ». Un couloir pour la montée a été aménagé avec un autre à la descente pour canaliser l’afflux es touristes. Leur procession est impressionnante. Il faut déshabiller les silhouettes colorées de shorts, chapeaux à visière, T-shirts criards et imaginer des draperies antiques, transformer les perches à selfies en torches, rubans ou banderoles. On peut ainsi, avec un certain effort d’imagination, voir les Panathénées où Athéniens et pèlerins allaient rendre leurs dévotions à la Déesse. Les Propylées faisaient partie du programme monumental de construction de Périclès (437-432), interrompu par les guerres du Péloponnèse. Selon Pausanias (au 2ème siècle), une pinacothèque contenait une belle collection de tableaux. En plus de la statue Chryséléphantine d’Athéna Parthenos, attribuée à Phidias il existait une statue géante en bronze également œuvre de Phidias, Athéna Promachos , visible depuis le Cap Sounion.

Sur une aire, maintenant nue, s’élevait le sanctuaire d’Artemis Brauronnia, à droite de la voie processionnelle. Le culte d’Artémis fut établi au 6ème siècle avec Pisistrate.

Une rumeur monte de la ville, me rappelant le 1er mai 2010, 1er mai de colère, de manifestations violentes. Les chants révolutionnaires entraient en compétition avec la Messe diffusée par haut-parleurs de la cathédrale et la musique de Théodorakis des socialistes. Du bastion en haut d’un petit promontoire qui domine la ville, je ne découvre aucun rassemblement. Quand nous descendons, je vais à la recherche d’un taxi. Nous irons volontiers déjeuner au bord de l’agora romaine près de la jolie mosquée et de la Tour des vents sur les belles terrasses des Aérides….Aucun taxi n’est disposé à nous conduire en ville. Le centre d’Athènes est bloqué par les manifestations contre les mesures d’austérité et les réformes du régime des retraites. J’avais remarqué les affiches appelant à la grève aujourd’hui sans entrer dans les détails. Les chauffeurs de taxi profitent de l’aubaine (pas de métro ni d’autobus) saur les bus à impériale colorés des touristes. Ils proposent de nous conduire au Pirée, « good sea-food at Microlimani » ou à Rafina, ou n’importe où à la plage….mais pas à Athènes !

Rue Rovertou Galli, 300m plus bas, nous nous installons sur la minuscule terrasse en angle (3 tables avec un pot de basilic) et une jolie enseigne TO KAFENADAKI pour déjeuner et attendre le retour de la circulation. Délicieux jus d’oranges pressées (4€) une assiette de gyros très bien servie, les fines lamelles de porc sont accompagnées de grosses tomates, de pain pita tzatzíki et oignons crus, parsemées de thym et de fines herbes (8€ quand même !) Rien à voir avec le gyros qu’on mange debout, entortillé dans du papier.

Le Musée de l’Acropole est à 750 m plus bas.

 

Le va-nu-pieds des nuages – Takis Theodoropoulos

LIRE POUR LA GRECE

 

« BON TU T’EN DOUTES, Athéna n’allait pas rester les bras ballants pendant qu’Hermès et sa divine compagne mijotaient de lui piétiner ses plates-bandes. Athènes, c’était son domaine à elle; et si des fois elle acceptait une petite intervention de la part d’un de ses congénères, sous forme d’averse ou d’éclaircie dans le ciel de sas cité, ce genre d’incursion était tenu de s’apparenter au phénomène strictement passager, ou du moins rare, voire tout à fait exceptionnel. Avec cette histoire de contagion, elle s’était fait surprendre. Apollon, qui ne reconnaissait aucune supériorité au monde à part la sienne, avait berné tout le monde avec un de ces petits laïus froids et alambiqués – pareils à sa musique

Takis Théodoropoulos est aussi l’auteur du Roman de Xenophon et de l’Invention de la Vénus de Milo, deux ouvrages que j’ai lu avec beaucoup de bonheur.

Le Va-nu-pieds dans les nuages est Socrate, ou plus exactement, Socrate mis en scène par Aristophane dans les Nuées.

Le Va-nu-pied-dans les nuages commence avec la mort de Périclès de la peste (la contagion) en 429. Roman historique? Certainement, mais avec certains anachronismes qui font sourire le lecteur. Le narrateur est un Démon, le temps des mortels ne le concerne pas.

Un roman ironique et très amusant : p.21, « L’IRONIE N’EST PAS UN EFFET STYLISTIQUE, monsieur l’écrivain. » Affirme l’auteur. [….] « L’ironie est une perspective existentielle. «  J’ai beaucoup souri et même franchement ri au cours de cette lecture.

« AU COURS DU BANQUET  organisé par le cercle de l’éternité afin de fêter la déconfiture de l’orgueil humain, At.héna eut peine à cacher sa maussaderie »

Un roman mythologique : les scènes qui se déroulent sur l’Olympe sont les plus jouissives. Les dieux veulent rabattre leur caquets à ces prétentieux d’Athéniens. Après avoir envoyé l’avertissement de la contagion, ils pensent à d’autres mesures. Socrate, l’Original, pourrait servir leurs plans. Ils envoient le Démon, le narrateur du roman. Aristophane pourrait aussi être utile. Le Dieu en charge du Théâtre étant Dionysos, Athéna va essayer de le séduire, elle se maquille, porte une robe rouge sexy….la scène est absolument roulante..

Un roman philosophique? l’auteur possède une solide culture classique, il présente le cercle de Socrate, présente la plupart de ses disciples. Alcibiade, le sublime est aussi un chef d’oeuvre  comique. Intéressant mythe de la Caverne…syllogismes…et allusions à Nietzche (on s’est permis des anachronismes). Le procès de Socrate est annoncé.

J’ai moins aimé la fin : la mise en scène et la représentation des Nuées ne m’a pas vraiment fait rire. Théodoropoulos est très fidèle  au texte d’Aristophane.

Un roman érudit? Certes, mais une érudition qui se veut comique, et qui l’est. Une réussite

 

Villa Giulia : musée étrusque

CARNET ROMAIN

Villa Giulia
Villa Giulia

Par un beau soleil nous traversons le Tibre  au pont Sisto pour trouver le 23 vers Risorgimento. Il vient de passer. Le 280 nous lâche Via Delle Milizie où passe le tram 19. La Villa Giulia se trouve à l’extrémité de la Villa Borghèse, en bas, proche du Tibre. Le Pape Jules III qui l’a fait bâtir en 1551 dans de beaux jardin pouvait y accéder en barque.

On entre par un portique en hémicycle qui relie les deux ailes ù sont exposées les collections étrusques. Une tonnelle en trompe-l’œil où s’ébattent des amours, des oiseaux et des papillons coiffe les murs peints de grottesques et de fresque en petits tableaux sur fond rouge ou jaunes à la mode antique.

DSCN7713 - Copie
villa Giulia : tonnelle en trompe-l’oeil

Un magnifique nymphée haut de trois étages orné de sculptures dans des niches est construit dans un jardin de buis taillés de lauriers à l’ombre de pins très hauts qui étalent leurs parasols. Un petit temple reconstitué occupe un carré.

Le musée a été partiellement rénové. Dans l’aile refaite, les panneaux explicatifs sont nombreux, détaillés et illustrés, bilingues (italien/anglais). Dans l’hémicycle, les objets sont sagement rangés dans des vitrines comme à la fin du 19ème siècle, ce qui génère une certaine monotonie. Les collections sont impressionnantes par la quantité comme par la qualité. Le parti pris du rangement par provenance ou par collection est, certes parfait, pour les archéologues qui font un travail scientifique, mais il est déroutant pour les touristes. Je tente une approche chronologique, rapidement je me perds.

urnes
urnes

Les objets les plus anciens de l’âge de bronze sont des urnes assez rustiques.  Certaines en forme de vase à une seule anse avec un chapeau. D’autres imitent une cabane avec toit à deux pans, des chevrons pour tenir la toiture et une porte amovible. Les poteries sont décorées de motifs animaliers.

Dans une tombe avec tout son matériel guerrier on a pu reconstituer un petit char et des armes (680-670 av JC) .

Grec ou étrusque?
Grec ou étrusque?

La Nécropole dell’Osteria (640-630 av JC) a livré de nombreuses céramiques. La plupart sont grecques, venant de Corinthe. Des petits objets sont égyptiens. Il y a aussi de très jolis bijoux en or. Autour de 630av JC les céramiques étrusques atteignent presque la qualité des poteries grecques. On note l’extrême diversité des provenances et la permanence des échanges entre l’Etrurie et la Grèce. L’absence de lois somptuaire qui existaient alors en Grèce et à Rome explique le luxe des objets retrouvés. La plupart des vases sont corinthiens ou attiques. Les motifs sont le plus souvent mythologique. Ce musée étrusque pourrait être un musée des vases grecs !

 

Au sous-sol, deux tombes ont été reconstituées : celle de Banditaccia (Cerveteri) est la plus sobre : on entre dans un couloir entre deux banquettes puis dans une chambre où se trouvent également deux banquettes. De nombreux objets sont posés, surtout de la vaisselle.

La seconde de Tarquinia est peinte à fresques : autour du catafalque se déroule le banquet mortuaire, des cavalliers, des musiciens, des acrobates animent le banquet. Sur le registre inférieur sont peintes des vagues des poissons et des animaux marins.

Revenant au premier niveau, je suis très étonnée de trouver dans des vitrines des représentations d’organes humains reproduits à taille réelle, des seins, des utérus avec des « ovules », un abdomen avec les intestins etc…S’agit-il d’ex-voto ou de rituel de fertilité ?

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sarcophage des épou

La plus belle pièce est sans doute le sarcophage des époux allongés sur un lit comme pour un banquet, une terracotta très belle. Le mari et la femme sont complices. Elle verse du parfum sur les mains de son époux. De la tendresse se dégage dans les gestes et les regards. Ceci change bien du monde grec où hommes et femmes étaient séparés.

Après avoir vu les têtes des divinités étrusques Hercule, Menerva, Tums/Hermes, Rath/Apollon, la religion étrusque a assimilé les dieux des latins et des grecs ?

Corbeille en bronze finement ciselée
Corbeille en bronze finement ciselée

A l’étage supérieur, les bronzes sont très originaux : matériels de banquets, brûle-parfums, et surtout les « corbeilles » de bronze ciselées à couvercle portant des figurines. L’une d’elles le ciste de Ficoroni est gravée : elle raconte la victoire de Pollux sur le roi Amikos attaché à un poteau, près de lui, la déesse Athéna se tient debout. Qui est ce Pollux ? A-t-il un rapport avec les Dioscures ?

 

Haruspices
Haruspices

Les silhouettes d’haruspices ressemblent à des Giacometti. Non loin, un modèle de foie(foie de Piacenza) en céramique explique l’interprétation des viscères par les haruspices pour prédire l’avenir.

7 de Thèbes
7 de Thèbes

Le fronton du temple d’Apollon est remonté, les antéfixes sont en parfait état ainsi que les frises. Les figures des héros et des dieux sont colorés.

Nous passons ensuite, un peu blasées devant des centaines d’objets, vases ou bronzes très beaux : un  plat avec un éléphant évoque la bataille de Bénévent (275 avJC) cntre Pyrrhus qui perdit ses pachydermes.

plat éléphant
plat éléphant

D’autres frontons de sanctuaires possèdent de magnifiques antéfixes et des personnages dans l’un les Sept de Thèbes, Hercule,, Apollon et Latone.

Apollon
Apollon
Latone
Latone

Choephore et Euménides au théâtre d’Epidaure

CARNET PÉLOPONNÈSE ET CRETE 1999

Théâtre antique d’Epidaure

La route d’Epidaure tortille dans les collines de l’Argolide, plantée d’oliviers, d’orangers, de tabac. Au hasard de la route, une tombe mycénienne avec des blocs cyclopéens.

Les costumes de scène du Festival d’Epidaure sont exposés dans des vitrines.Ils sont très modernes. La mise en scène est contemporaine.
Le spectacle ne commence qu’à la nuit tombée. En attendant, nous observons les spectateurs qui s’installent dans le théâtre antique. Peu de toilettes, l’ambiance est cool, beaucoup de touristes, des enfants avec leurs parents, des militaires en uniforme venus par camions entiers. Les gens se déplacent, ils mangent, fument…. Il n’y a aucun contrôle des billets. Nous restons en haut, notre rangée a des dossiers !

Le site est merveilleux, les gradins sont taillés dans la colline. En toile de fond, de belles montagnes boisées de pins et d’oliviers . Nous arrivons juste pour le coucher du soleil.

costume contemporain pour théâtre antique

J’ai lu Choéphores et Euménides. J’ai un peur qu’on s’ennuie. ces pièces manquent d’action, les dialogues sont interminables. J’envisage une sortie avant la fin.

La mise en scène nous a ravi. Le chœur antique, vêtu de noir se livre à une véritable chorégraphie. Le costume des choristes se transforme grâce à des voiles noirs, blancs, des manches pendantes. Tantôt veuves voilées, esclaves dans les Choéphores, elles deviennent Erynies sans visage dans les Euménides. Les mouvements d’ensemble se passent de paroles. Les costumes des dieux Apollon, Athéna  et du Coryphée représentant les anciennes divinités sont éblouissants, dorés, éclatants.

costume contemporain pour théâtre antique (2)

La musique est contemporaine sur des gammes antiques. Le spectacle peut se regarder comme un ballet. Je suis  attentive au texte. J’arrive à capter de temps en temps des bribes de phrases qui me permettent de suivre en français sur le livre de Ladja que je tiens sur mes genoux. Heureusement, la lecture est très récente et j’ai encore bien en tête le texte. C’est vraiment une soirée mémorable : la magie du théâtre a opéré son charme et nous n’avons pas eu un seul instant l’envie de nous éclipser.

Le retour en Panda est épique. Nous ne trouvons pas les phares.  Dominique doit tenir la manette comme si elle faisait des appels de phares permanents.

costume contemporain pour théâtre antique(3)

Quelques heures après le coucher, la climatisation s’arrête, j’ai la très mauvaise idée d’ouvrir la fenêtre, c’est ensuite une nuit de bataille contre les moustiques..

Xenophon : Anabase , à travers l’Arménie – anecdotes pittoresques

LIRE POUR L’ARMÉNIE

carte de ‘expédition des Dix Mille

L’Anabase est un souvenir du lycée. Je n’ai jamais oublié « Thalassa! Thalassa! » et j’associe ce texte à une séance-diapos de veille de vacances où la prof nous avait montré l’expédition en Dauphine avec d’autres profs du lycée à travers la Turquie, Ephèse, mais aussi la Mer Noire « Thalassa! »…

A Yerevan, au Musée historique et au Musée D’Erebouni, les conférencières avaient abondamment cité Xénophon. Il était temps de revenir au texte.

Je n’ai pas tout lu. L‘Anabase raconte la retraite des Dix Mille – Grecs partis soutenir Cyrus dans la guerre contre son frère Cléarque – de Counaxa près de Babylone où il subi une défaite jusqu’à Trapezonte (Pont Euxin). Reporter de guerre mais aussi général, Xenophon a rapporté le plus grand reportage de guerre de tous les temps!

Comme il serait passionnant de poursuivre l’itinéraire des Dix Mille à travers l’Irak, le Kurdistan, Iran et Arménie, Géorgie et Turquie! Quoique la géographie moderne a morcelé le pays des Cardouques (Kurdes) et celui de l’Arménie. Les Grecs du Pont Euxin et du Caucase ont maintenant été « rapatriés » en Grèce (lire Kazantzakis) ….

Je me suis contentée des chapitres concernant l’Arménie pour vérifier les dires des conférencières enthousiastes! :LIVRE IV Ch III : Arrivés au bord du Centritès qui sépare l’Arménie du pays des Cardouques…. qu’est-ce donc que cette rivière? un affluent de l’Euphrate? Les Grecs passent à gué, Xénophon donne tous les détails….

Le ChIV : me plonge dans la perplexité « Les Grecs se rangèrent et se mirent e route à travers l’Arménie, pays entièrement plat.. »près des sources du Tigre, « où le satrape Tiribaze y avait un palais.  » Les sources du Tigre seraient dans le Taurus et Tiribaze satrape de Sardes en Lydie. Nous voici beaucoup plus à l’ouest que je ne l’imaginais! Ou peut être la cartographie au 4ème siècle était-elle bien approximative? Dans cette Arménie plate les Grecs rencontrèrent une grande abondance de neige[….]qui tenait chaud aux hommes couchés » mon étonnement croît! – non pas que le haut plateau soit enneigé mais que cela puisse réchauffer les troupes. En revanche pas de trace de ski annoncé par la conférencière d’Erebouni. Les « vivres excellents…raisins secs, vins vieux parfumés, légumes de toutes espèces.. » concordent plus avec mes impressions d’Arménie.

Au ChV, les soldats peinant dans la neige furent pris de boulimie. Ils subirent aussi des conséquences plus graves : aveuglement dû à la blancheur de la neige, gelures et pieds gangrenés « que l’on combattait en se remuant sans jamais rester au repos et en se déchaussant pour la nuit ». Toutes ces remarques précises rendent la lecture passionnante.

C’est là qu’ils découvrent des habitations souterraines dont l’ouverture ressemblaient à un puits.J’ai autrefois en Cappadoce visité de grandes villes souterraines. « Il y avait aussi du vin d’orge dans des cratères.. les grains d’orge mêmes nageaient à la surface et il y avait dedans des chalumeaux sans nœuds, les uns plus grands les autres plus petits. Quand on avit soif, il fallait prendre ces chalumeaux entre ses lèvres et aspirer. Cette boisson était très forte si on n’y versait pas d’eau…. « 

Autre détail charmant : l’histoire des chevaux arméniens consacrés au soleil. Le comaque apprit à Xenophon à envelopper de petits sacs les pieds des chevaux pour les mener dans la neige…

Ch VI : ;les Grecs arrivent au Phase que je connais : c’est l’Araxe. bientôt ils arrivent à la mer.

Le chapitre VII réserve encore une anecdote pittoresque : l’empoisonnement avec du miel!

J’ai eu bien du mal à retrouver sur une carte moderne le voyage des Dix Mille et je crois que l’époque n’est pas propice pour refaire cet itinéraire….entre guerre en Irak, frontières fermées, troubles en Turquie..mais je me suis régalée avec cette lecture rafraîchissante.



Khor Virap

CARNET ARMÉNIEN

Khor Virap et le Mont Ararat

Au petit déjeuner Hasmik a servi la curieuse verdure du marché « chouchan », des saucisses, de la confiture de figues et des pêches au sirop. Nous évoquons notre retour le 9 mai, ce sera la célébration de la fin de la seconde Guerre Mondiale, il y aura une parade militaire et des feux d’artifice embraseront toute la ville. Au jardin, je découvre les orties qui ne sont pas des mauvaises herbes mais tout à fait comestibles, excellentes pour la santé.

La route du sud est presue une autoroute avec les chaussées séparées. L’Ararat avec ses deux cônes Sis(le petit) et Massis(le grand) est séparé par la plaine de l’Araxe où les vergers alternent avec les champs. Le colza est en fleurs, la vigne verdit. Les cigognes arpentent les endroits humides.  La frontière turque est  signalée par des miradors et une petite base militaire où flottent les couleurs arméniennes mais aussi le drapeau russe. Artachat : une église moderne dépasse les barres soviétiques. Les zones industrielles sont délabrées. Aujourd’hui, 1er mai, tout est arrêté, on ne peut pas distinguer ce qui fonctionne encore et ce qui est à l’abandon.

Sis et Massis sous le porche de Khor Virap

Avant d’arriver à Khor Virap, on traverse un village tranquille aux maisons basses carrelées elles aussi de tuf rose. Ce parement est joli et donne l’illusion de maisons de pierre. Khor Virap est perché sur un éperon rocheux dominant la plaine de l’Araxe. Sur une petite colline, une statue de guerrier regarde la frontière turque matérialisée par des barbelés. Juste avant d’arriver, on traverse un cimetière impressionnant. Certaines tombes sont très récentes et le marbrier a gravé les portraits des défunts. L’un d’eux est représenté en pied, fusil mitrailleur à l’épaule. Ce cimetière est assez désagréable à voir parce que chaque concession est entourée d’une barrière métallique souvent rouillée. Pourquoi ces tombes ici ? A cause de la proximité de l’Ararat ? De la frontière ? Ou du monastère ?

J’essaie de cadrer dans mes photos les deux cônes et le monastère . Il semble bien petit à côte de la montagne !

De nombreux panneaux explicatifs multilingues guident le visiteur curieux.

Ce site est occupé de longue date. Dans l’Antiquité la ville d’Artachat fut fondée en 188 au confluent de l’Araxe et de la rivière Mitsamor.

Selon Strabon et Plutarque, Hannibal y passa ses années crépusculaires et fut le conseiller d’Artachès après la bataille de Magnésie quand Antiochos fut battu par les Romain.

Selon Moïse de Khoren une statue d’Apollon fut installée sur le bord de la route à la manière d’Hermès.

Selon Strabon et Tacite, Artachat était bordée e muraille de dix milles. Tigran II(140-55av JC) peupla la ville qui atteignit 150 000habitants et qui était équipée d’un système d’adduction d’eau et de bains publics.

L’histoire se poursuit sur le site :

Au 3ème siècle, les Perses sassanides renversent les Parthes. Tiridate, le roi arménien fut élevé à Rome où il étudia dans une ambiance hostile aux Chrétiens tandis que Grégoire l’Illuminateur à Césarée était élevé dans la religion chrétienne. Tiridate, à la tête d’une légion romaine nommée par Dioclétien (284-305) chassa les Parthes d’Arménie en 287. Sur la route Tiridate rencontra Grégoire et l’invita à sa cour. Il lui ordonna de remettre une couronne à Anahit. Grégoire refusa parce qu’il était chrétien. Tiridate le jeta dans une fosse à l’emplacement de Khor Virap pendant 13 années. Apres le massacre de Hrpsimé et de Gayané le souverain fut atteint d’une maladie dont il faut guéri à sa conversion.

la conversion de Tiridate

 Matenadaran : miniature représentant la conversion de Tiridate  figuré avec la tête d’un sanglier.

A la suite cette conversion, Khor Virap est devenu un lieu saint.

Il l’est aussi à cause de la proximité de l’Ararat où Noé échoua après le Déluge. Sur un belvédère face à la montagne un panneau cite la Genèse (8-1-17)

« Dieu se souvint de tous les animaux, de tout le bétail qui se trouvait dans l’Arche…. »

L’église est  17ème siècle. L’église primitive fut détruite par Timur Lang au 14ème.  Écroulée par de nombreux séismes, reconstruite en 1939,1949, 1957…Elle fut bâtie sur l’emplacement le Temple Ti-Apollon couvert de marbre, de feuilles de cuivre avec des statues dorées et argentées. C’est une église plutôt simple, très dépouillée (sauf des décorations actuelles kitsch).

Avant de quitter Khor Virap,  je grimpe à la petite colline pour faire des photos.

Erebouni

CARNET ARMÉNIEN

 

Au petit matin j’ai une irrésistible envie de m’installer sur le balcon pour dessiner l’Ararat avec ses deux sommets Massis et Sis. Je triche un peu parce qu’un rideau de peuplier cache le petit sommet de là où je suis assise.

Hasmik a enroulé le pain arménien lavach fourré au fromage et l’a fait frire dans la poêle, puis parsemé d’herbes. Confiture d’abricots maison, et « thé » d’herbes aromatiques.

 Musée d’Erébouni

 Nous avons rendez vous à 10heures pour une visite guidée. Je reconnais Tigran qui guide un groupe de Belges. La conférencière mène sa visite rondement et avec humour.

Erebouni est la première ville fondée en 782 – une trentaine d’années avant Rome fait-elle remarquer -. Au mur, les divinités principales du royaume d’Ouartou Khaldi sur un lion, Techeba sur un taureau. Une maquette en liège représente la citadelle d’Erebouni avec ses remparts, ses tours, ses palais avec les cours des sacrifices,  la ziggourat où l’on  allumait des feux pour prévenir les gens.

la maquette d’Erebouni en liège

Des stèles gravées en écriture cunéiforme donnent le « passeport » de la ville : date de fondation, nom du souverain qui l’a fondée, mais aussi toutes sortes d’insultes et de malédiction pour qui oserait l’attaquer. Les stèles ouartiennes sont réparties dans les musées européens. Les Turcs ont empêché les archéologues qui fouillaient sur leur territoire de les emporter. Sur le sol arménien, les russes les ont  mises à l’Ermitage à Saint Petersbourg. L’écriture cunéiforme a été empruntée aux Assyriens mais les Ouartiens l’ont perfectionnée en ajoutant un système de voyelles et des indications de genre.

Une première vitrine présente les canalisations de terre cuite ouartiennes. Les Ouartiens ont fait de gros travaux reliant les lacs par des canaux. Le canal Sémiramis est encore fonctionnel. Un grand mortier de tuf servait à filtrer l’eau de pluie.

Dans la vitrine suivante, on voit des outils agricoles, fer ou bronze, ils sont peu différents de ceux d’aujourd’hui. Faucilles, pioches, houes. On a également retrouvé à moitié calcinés des grains de blé, d’orge, des lentilles, sésames et pépins de raisin. Dans les tissus d’époques on a pu reconstituer les colorants : rouge de cochenille – bleu – orange : les couleurs du drapeau arménien ? Le bleu symbolise la tranquillité du ciel, le rouge pour le sang et la victoire, l’orange, le blé, le soleil et l’abricot.

On a retrouvé enterrées d’énormes jarres de terre cuite dans le palais. Xénophon, dans l’Anabase, décrit la bière (eau d’orge) à l’époque très alcoolisée (19°). La conférencière raconte que selon Xénophon, les Arméniens auraient inventé le ski. Les jarres à vin étaient semi-enterrées pour conserver la fraîcheur. On tirait le vin avec une paille.

Dans d’autres vitrines sont exposées toutes sortes de poteries, lampes à huiles plates rudimentaires ayant deux compartiments, le grand pour l’huile, le petit pour la mèche avec un trou. Des lampes semblables ont servi il y a peu pendant la guerre qui a suivi l’Indépendance de l’Arménie. En 1991 il n’y avait plus rien, ni pétrole, ni gaz, ni électricité. Les urnes funéraires étaient percées de 3 trous pour laisser s’envoler l’âme du défunt.

Dans la dernière vitrine,   beaux rhytons d’argent,  l’un d’eux représente un satrape de Perse.

stèle d’Erebouni

La visite se poursuit sur le site d’Erebouni. Une incompréhension entre le groupe de Belges et nous, se produit ; un petit car blanc les transportera au site mais il nous faut nous débrouiller seules. Il aurait été si facile de dire au chauffeur du car de nous attendre pour qu’on le suive. Au lieu de cela, nous devons nous dépêcher . D se presse tant qu’elle ne boucle pas sa ceinture. La police l’appelle au micro. Il ne manquait plus que cela. Je parle français au policier à l’énorme casquette plate à la russe qui n’insiste pas. La voiture monte à la citadelle par une rampe pavée à la suite du car. Le gardien ouvre la barrière pour permettre au car de faire demi-tour mais pas à nous, il referme la barrière juste devant le capot de la Kia sous les yeux de Tigran qui aurait quand même pu intervenir ! Dominique est forcée de redescendre la rampe en marche arrière. Furieuse, elle loupe la visite.

Autant la guide était prolixe dans le musée, autant elle se hâte sur le site. Un auvent de bois soutenu par des piliers de bois (comme alors) protège de belles fresques sur fond bleu, sorte de roues ou de soleils surmontées de frises géométriques sur fond clair. Ici étaient reçus les ambassadeurs. Une allée court entre des murailles de gros blocs de basalte surmontés de briques crues ; La guide se désole : les intempéries vont détruire en quelques années ces vestiges âges de plus de deux millénaires. Le gouvernement ne peut rien faire, il est si pauvre, mais les Arméniens de la Diaspora pourraient faire des donations au lieu d’investir dans des choses aussi stupides que des casinos et des restaurants, se plaint-elle. On entre dans la grande salle des colonnes dont on voit encore les bases. Les jarres enterrées ne sont plus là.

Il faut se souvenir de la maquette du Musée pour imaginer la cour des sacrifices et la ziggourat.

La guide reprend son discours : du temps de l’URSS, l’Arménie était une république-modèle, la plus agréable des quinze républiques ! C’était un paradis. Elle pouvait voyager chaque mois où elle voulait . Maintenant son salaire couvre à peine les dépenses courantes indispensables.

Les Belges remarquent « nous avons entendu ce discours en Ouzbekistan ».

Nous avions tout sauf le pouvoir. Maintenant le gouvernement a vendu l’eau à la France, l’industrie à la Russie. Nous n’avons plus rien et tout se décide encore à Moscou.

Nous pique-niquons de fruits secs et de yaourts dans le jardin d’Hasmik. J’admire les variétés d’arbres fruitiers : pêchers, cerisiers, abricotiers, amandier, mûrier….

Garni -temple hellénistique

CARNET ARMÉNIEN

 

le temples hellénistique de Garni

La maison d’Hasmik est à 1170m des quartiers s’étagent plus haut. La route serpente ensuite dans une campagne printanière verte, herbes rases des alpages – on parvient rapidement à 1400m – peupliers aux feuilles nouvelles bien épanouies, splendeur des vergers, pommiers et poiriers en pleine floraison.

Panorama sur le Mont Ararat et sur la ville de Yerevan. Un arc de triomphe a été justement érigé : arc de triomphe de Tcharentz – poète arménien, admirateur des futuristes, influencé par Maïakovski/il s’engagea d’abord dans la voie socialiste mais fut emprisonné et supprimé lors des grandes purges staliniennes de 1937. Deux lignes du poème Ma douce Arménie sont citées :

« Cours le monde tel Ararat tu ne verras plus blanche amie

J’aime toujours mon fier Massis, unique voie d’éternité »

Le GPS a parfois de fantaisies : il nous fait quitter la route principale pour une piste défoncée qui traverse un village de montagne, occasion de voir un berger poursuivre son troupeau à grand renfort de houlette. Où sont donc ses chiens ?

La rase campagne est très animée si on se donne le mal de regarder aux jumelles. Trois personnes, un grand sac à la main ramassent des herbes (pour les lapins ou comestibles ?). Les hirondelles sillonnent les airs, un petit rapace marron (faucon ?) chasse.

Garni est très bien indiqué. Devant le site, le gardien de parking (brassard rouge et badge épinglé) nous fait ranger. Le site est très bien entretenu, pelouses tondues, massifs de rosiers, même sonorisé mais tous les panneaux explicatifs ont été enlevés. Il vaut mieux prendre un guide.

le torrent a entaillé la coulée et fait un canyon

La citadelle est installée sur un éperon rocheux, site exceptionnel, forteresse imprenable. Les falaises sont entaillées à pic par un torrent qui fait une épingle à cheveu. En face les montagnes sauvages surmontent une coulée de prismes basaltiques.

Le petit temple gris périptère est très harmonieux avec ses 24 colonnes. Très décoré aussi. La feuille d’acanthe typique des constructions hellénistiques est accompagnée de grenades arméniennes mais aussi, selon le guide de feuilles de chênes et de lauriers (que je n’ai pas trouvées). On pense qu’il était dédié à Hêlios ou Mithra, divinités solaires. Il faut construit en 77 ap. JC par Tiridate dès son retour de Rome avec l’aide de Néron.

Du palais, il reste quelques fondations mais surtout un très joli établissement de bains – hypocaustes bien reconstitués -mais surtout une ravissante mosaïque colorée et de fines tesselles. (Malheureusement enfermée, j’ai eu la chance de suivre un groupe de touristes italiens).

acanthes, grenades feuilles de laurier et de chêne

L’église est circulaire de l’extérieur mais à plan cruciforme à l’intérieur. Ses fondations en tuf brun contrastant avec le gris du basalte  sont bien conservées.

Yerevan – Place de la République et Musée Historique National

CARNET ARMÉNIEN

Place de la République

J’achète du shwarma et un pâté à la viande pour pique-niquer dans les jardins au bord d’un « lac ». La rue piétonnière qui relie l’Opéra à la grande place de la République, est bordée d’immeubles neufs et de boutiques de luxe aux enseignes américaines, russes ou européennes.

Au coin de la place de la République pause pour un café « oriental » qu’on appelle également café « arménien ». Ces variantes autour du café »turc » m’amusent « grec » en Grèce, j’ai même trouvé « byzantin » à Chypre,  qui a beaucoup faire rire Samer notre guide en Égypte. Je bois « à la grecque » c’est à dire très lentement en occupant trois chaises, Charles Aznavour en accompagnement  sonore.

Place de la République : tuf rose et jets d’eau

La place de la République est rafraîchie par des bassins et des fontaines. Les grands bâtiments officiels sont parfois surmontés d’une colonnade.  Les rues adjacentes passent sous des arches. L’ensemble est très théâtral et très réussi, peut être grâce au tuf beige rosé, chaleureux. Marbre blanc, basalte gris ou pire ciment, c’eût été glacial.

Musée Historique National

Visite en compagnie d’un groupe de pèlerins français. Amalia, la guide francophone, s’adapte à son public pour qui cette visite est la conclusion de leur voyage, je me sens un pue déphasée.

L’histoire de l’Arménie débute au Paléolithique. L’obsidienne était un matériau de choix et d’abondance : jolie collection de lames translucides, presque transparentes.

  8ème millénaire : figurines de la Déesse-Mère.

On a retrouvé la plus vieille chaussure au monde : 5700 ans en cuir de vache et de sanglier.

3ème millénaire : figurines de la Déesse-Mère représentant la fertilité. Parmi les petites idoles à la silhouette caractéristique, triangle à la taille fine et très larges hanches se trouve un couple enlacé. La pierre du foyer ronde creusée comme un trèfle ou en fer à cheval, portant parfois des têtes de bélier,  est un autre objet symbolique de la famille. Une énorme jarre en poterie est décorée de triangles et de spirales. Amalia nous montre des cigognes stylisées figurant le retour du printemps et des serpents sur une autre.

Des photos montrent des menhirs et des pétroglyphes. En verrons-nous sur place ?

Dans les vitrines se trouvent des bijoux en or, des coupes ciselées.

On a remonté deux chariots de bois ; des arceaux soutenaient une bâche. Datés de 4500ans ils furent conservés aux abords du Lac Sevan. Ce sont des chars funéraires retrouvés avec de nombreux objets présentés autour dans les vitrines.

Amalia déchiffre pour nous la signification des animaux gravés : les oiseaux médiateurs entre le ciel et la terre. Les chevaux étaient les accompagnateurs du soleil

Un saut dans le temps nous conduit à Erebouni, pour découvrir la civilisation du royaume d’Ourartou. Les originaux des fresques d’Erebouni sont abrités ici. On voit des petites maquettes en argile représentant un  temple et des personnages sacrifiant  un bélier un peu comme celles du Musée du Caire.

De l’époque hellénistique, on voit une merveilleuse Aphrodite – Anahit en marbre blanc et Artémis en bronze. Nous avons un avant-goût du temple de Garni. Les bornes miliaires sont gravées en araméen – langue de Jésus mais aussi lingua franca  pour les commerçants du Proche-Orient. A l’époque de Tigran II. Le fils de Tigran II fut capturé par Marc-Aurèle et décapité en Alexandrie. Les guerres arméniennes sont citées par les romains : Marc-Aurèle  et Septime Sévère ont battu monnaie  « Armenia conquista ».

La visite de l’Arménie antique au 2ème étage (3ème pour les Arméniens) s’arrête là. Je décide de quitter le groupe afin de revisiter à mon aise toutes ces merveilles à peine entrevues. J’aime faire des révisions, m’attachant avec grand plaisir à certains objets qui m’ont parlé. A 17h15, les gardiennes éteignent les lumières « Allez-voir les tapis ! Cela ne ferme qu’à 18h » me conseillent-elles. . A l’étage intermédiaire se trouve la suite de  l’histoire, du Moyen Âge à la période soviétique. Ces collections n’ont pas été modernisées, les explications sont en Arménien et en Russe – les deux incompréhensibles et illisibles. Je passe donc au pas de course devant les costumes folkloriques et les photos anciennes poussées par les gardiennes qui éteignent l’électricité après mon passage.

17h45, il reste un petit quart d’heure pour poster nos cartes postales. En Arménie il n’y a pas de boites aux lettres et les timbres s’achètent exclusivement à la Poste. La Poste se trouve de l’autre côté de la place. La guichetière est revêche (comme partout dans le monde entier).

Nous appelons Jacques avec le téléphone arménien qu’il nous a prêté et qui nous rendra bien des services.  Un taxi  nous ramènera chez Hasmik dans les hauteurs de Yerevan et rentrera avec nous.

Hasmik est une jeune femme charmante, très chaleureuse, qelle parle bien Anglais mais elle est accaparée par ses quatre enfants, surtout la plus petite Mati tout juste assez grande pour marcher, monter les escaliers et faire des tas de bêtises avec un plaisir évident. Elle est craquante.

Pour seul Cortège – Gaudé

Alexandre : Puget au Louvre

Nous suivons le cortège funéraire d’Alexandre le Grand avec les pleureuses.

Alexandre le Grand d’Angelopoulos

Alexandre est un personnage que je croise souvent: au Louvre, à Naples, à Siwa et à Perpérikon, en Bulgarie où les oracles lui ont prédit la gloire, même dans une exposition sur l’Afghanistan au Musée Guimet même dans le film de l’Homme qui voulait être roi…ou l’Alexandre le Grand d’Angelopoulos.Plusieurs versions de la Légende d’Alexandre ont traversé les siècles. J’ai bien aimé celle de Lacarrière.

Gaudé livre sa version poétique du mythe. Chant funèbre en prose, lente épopée au rythme du pas des caravanes dans la première partie, de Dryptéis, la princesse perse mariée à Hephaistion, compagnon d’Alexandre, de Nemrou sa servante et de la vieille Sisygambis, la vieille pythie, diseuse de mort, tapie dans les ruines de Persépolis. Au galop effréné du cavalier sans tête Ericléops qui a dépassé l’Indus où Alexandre avait arrêté sa conquête et qui a atteint les rives du Gange, Ericléops qui rapporte le message du roi indien, son défi qui ranimera Alexandre et le ramènera à la vie.

Au palais de Babylone où agonise Alexandre, on sent se nouer les intrigues, les rivalités entre les femmes et les compagnons qui se disputerons la succession de l’empire. Alexandre meut au mitan du livre.

La deuxième partie raconte l’étrange errance de la dépouille d’Alexandre. Qui détiendra son corps, détiendra le pouvoir. Au rythme des centaines de pleureuses vers la Macédoine, puis traversant le Nil, enfin vers l’Orient. Au delà de la mort, la voix d’Alexandre commande encore. Il ne sait pas mourir avait dit la pythie. Il ne connaît ni le repos, ni la fin de ses conquêtes.

Affranchi de la « vérité » historique, Gaudé imagine cet étrange entre-deux, entre terre et enfer. Déjà dans la Mort du Roi Tsongor on devinait cette fascination, Dans la Porte des Enfers, elle était explicite. Alexandre dont on ne connaît pas la sépulture , cénotaphe vide en Alexandrie, introuvable correspondait tout à fait à cet univers.