JUILLET ÉCOSSAIS

L’ itinéraire trouvé au musée Groam commence au musée d’Inverness. Nous prenons le parcours en route à Beauly pour aller à Dingwall pour aller voir les pierres gravées par les Pictes sur place (souvent ce ne sont que des répliques, les originales étant conservées à l’abri dans des musées). C’est un grand jeu de piste. Nous disposons d’indices plus ou moins précis, parfois le parcours est fléché, pas toujours. Il faut demander aux passants.

Eagle stone
La première pierre a pour nom Eagle Stone et se trouve à 5 km de Dingwall à Strathpeffer. Nous suivons le camion des poubelles sur une route étroite, un chemin creux, caché sous une tonnelle de très beaux arbres dont les ramures se touchent. On a l’impression d’être à la montagne. Nous arrivons à une station thermale charmante et désuète. De grands hôtels sont cachés dans des parcs immenses. Les maisons de pierre grise ont des pignons pointus ornés de feston de bois laqué de vert, de brun ou de rouge. Bow-windows, chiens assis, véranda donnent un peu de fantaisie sur la pierre grise austère. Le style victorien rappelle les constructions de Biarritz ou de Deauville.

La pierre est bien cachée derrière une propriété. On y accède par une allée bordée par une palissade de bois gardée par une énorme chatte tricolore qui fait une démonstration d’équilibre, marchant sur l’étroit champ. Les pétroglyphes sont bien visibles : on reconnaît l’aigle, bien sûr, et le croissant avec les doubles disques. Les signes en Z sont plus difficiles à observer. Pleine de bonne volonté, je dessine sur mon carnet moleskine les motifs et recopie les légendes de l’Eagle Stone.
« Eagle Stone – 7ème siècle
A été enlevé pour marquer les tombes du clan Munro tués dans une bataille au 15ème siècle-
Brahan Seer a prophétisé au 17ème siècle que si l’Eagle stone tombe trois fois, les navires seraient capables de remonter pour être attachés à la pierre. L’Eagle stone est déjà tombé une fois. »
Tourisme thermal
- Tourisme thermal
Nous nous promenons ensuite dans la station thermale à la recherche de la Source d’eau sulfureuse qui se trouve dans le « square » près du pavillon des soins. Une dame nous accueille en français dans le petit établissement tout carrelé appelé « The Pump ». C’est ici qu’on aurait pu goûter l’eau si, pour une raison mystérieuse, la source ne s’était tarie. Le pavillon est converti en petit musée avec des personnages en cirre grandeur nature, certains sont parlants comme à Cromarty, le médecin délivre sa consultation en public !Une vidéo raconte « La Cure de Délia et Prudence en 1912 », film plein d’humour. Sur des panneaux, dans des vitrines sont exposés toutes sortes d’objets rappelant l’Age d’Or de la cure. Les plus drôles : les manuels de savoir vivre un pour les hommes, un pour la femme. Des ordonnances…
Sur la place de l’autre côté de la route, une petite gloriette sert d’échoppe au loueur de vélos des vélos noirs très classe sont proposés ainsi qu’un grand Bi.
Dingwall
Nous abandonnons l’époque victorienne pour aller retrouver les Pictes à Dingwall. La pierre gravée se trouve dans le cimetière d’une église. Laquelle ? Trois clochers au moins se détachent au dessus des toits. Comme le centre-ville est piétonnier nous abandonnons la Vauxhall sur un grand parking gratuit et je vais me renseigner au musée. La pierre est bien là où on nous l’a indiqué mais les gravures sont moins intéressantes : un double disque, deux croissants, des cupules… L’important c’est de l’avoir trouvée !
Ardross
Le jeu de piste continue sur la route A9 puis sur une petite route qui mène à Ardross. Ardross est un tout petit village. New Ardross Hall est un gymnase qui ne paie pas de mine. Nous sommes un peu déçues d’avoir tant tourné dans la campagne pour ne découvrir que des répliques. Un loup et un cerf gravés sont d’une élégance inouïe ! Une troisième pierre présente des motifs stylisés..
Rosskeen : The Thief’s stone

Encore une fois, nous croyons être perdues et demandons notre chemin à des jeunes qui ont une sorte de kermesse. Personne ne connaît la pierre ! Nous aurions dû faire plus confiance dans le plan qui est très bien fait. Évidemment, il nous faut revenir en arrière : j’ai vu le parking trop tard. Pour étudier les gravures, c’est raté. La pierre se trouve dans un champ enclos, on ne peut la voir que de loin.
La croix de Nigg

Le clou de notre périple ! Nigg est le village qui fait face à Cromarty de l’autre côté du Firth of Cromarty, sur une sorte de pointe. La vieille église est construite en hauteur cachée par de grands arbres. Comme à Cromarty, le plan de l’édifice est en T : un bâtiment rectangulaire long orienté E/O, très simple, surmonté d’un clocher. Elle est entourée de tombes moussues sur un terre-plein herbu. Certaines pierres tombales sont toutes effacées ou mangées de mousse. On reconnaît un crâne,e et deux tibias sur la tombe d’une femme riche ce qui rappelle que riche ou pauvre seront pareils dans la mort.

Quand on pousse la porte de l’église, une bonne odeur de bois ciré nous accueille. On est frappé par l’austérité la sobriété du lieu de prière. A part deux lustres de cuivre il n’y a aucun décor. Des murs crépis de crème, des bancs de bois, une chaire très simple entre deux grandes fenêtres. La croix que nous cherchons est cachée dans une petite pièce sombre fermée par une porte. Sa présence aurait distrait les fidèles de la prière ? Deux interrupteurs commandent l’éclairage. On nous prévient qu’une caméra nous surveille. Les deux faces de la Pierre sont finement ornées. D’un côté, une croix surmontée d’un fronton triangulaire racontant la légende de Paul l’ermite. Un corbeau tient en son bec un pain rond (cela ressemble à un fromage !) Paul et Antoine sont à genoux. Au dessous la croix est entourée de curieuses boules figurant des serpents enroulés ? A l’envers, David tue un lion et protège son troupeau. Il est représenté avec sa harpe. On voit également un aigle et des scènes de chasse.
Pierre de Shandwick
La pierre de Shandwick est, elle aussi, érigée au milieu d’un champ. Un abri de verre la protège des intempéries. Décoration de toute beauté, encore des bosses et des scènes de chasse. Malheureusement séparés par une vitre on ne sent pas l’intimité avec l’œuvre. On la voyait beaucoup mieux sur la vidéo de Rosemarkie !
Pique nique
Le cadre est idéal, un parking donnant sur une plage de sable clair, de belles pelouses, des tables et des bancs. Nous sommes très bien installées pour la salade de pommes de terre thon et olives. Au dessert un gâteau sponge avec de la crème au citron.
Sous un soleil voilé – mais soleil tout de même – j’arpente la plage le long de la mer du nord. C’est la première fois que l’horizon n’est pas limité par des terres. Nous sommes sur une pointe entre le firth of Cromarty et le firth of Dornoch. Le Firth of Moray est ici très ouvert. Ciel d’ardoise, crêtes bleuies et mer très brillante, miroir reflétant le soleil lumineux. Une famille a relevé aux genoux les pantalons des survêtements. Ils portent des seaux et des épuisettes. La mère et la fille sautent à pieds joints dans les vaguelettes. Trois jeunes gens plus téméraires sont en maillot de bain, ils ont gonflé un canot pneumatique. Seuls se baignent les labradors.
Stèle Hilton of Cadboll
Nous traversons Balintore : quelques maisons au bord de mer et un petit port. La stèle se trouve au milieu d’un vallon, quatre jardiniers tondent l’herbe. Derrière la pierre, les vestiges d’une ancienne chapelle sont cachés par la végétation. La véritable pierre a beaucoup voyagé : en 1676 elle a servi de dalle funéraire à Alexander Duff et à ses trois femmes, puis elle a été transportée au château d’Invergordon, enfin elle a été exposée au British Museum. Maintenant elle se trouve à Edimbourg. Sur place la réplique n’a que 7 ans et n’a pas encore reçu la patine du temps. Même si la copie est fidèle, elle est trop neuve pour être émouvante. C’est pourtant une sculpture très intéressante représentant une princesse à cheval et des cavaliers partant à la chasse.

Dans les champs les céréales sont presque mûres : orge ou seigle ? Difficile de le dire de la voiture. Le Pictish Trail est ici balisé avec un pictogramme aux entrelacs pictes. La piste nous mène à l’église de Portmahomack, long bâtiment blanc coiffé d’un court clocher qui se détache sur le ciel gris du haut de sa butte verte. A ses pieds, des fouilles archéologiques : un rectangle découpé dans la terre très noire. Trois archéologues travaillent. Une jeune fille dégage doucement un trou avec une sorte de truelle pendant qu’un garçon prend des notes. L’église de Tabat a été transformée en musée. Les sépultures pictes contenant encore des ossements sont recouverts d’une plaque de verre. On voit de très belles sculptures : deux vaches et un veau, la mère lèche son petit, c’est précis et touchant. De nombreux panneaux, des photos, des écrans racontent les fouilles ou la vie du village. Nous avons été des touristes studieuses jusqu’à présent mais notre attention arrive à saturation. Nous regardons tout cela distraitement. Il est temps de s’aérer. La balade au phare est la bienvenue. Une allée abritée par des ajoncs très hauts nous mène à la pointe fleurie de bruyères. Il en existe au moins trois sortes dont une à grosses clochettes roses pâle que je n’ai jamais vu ailleurs. Les rochers de grès rose ont été sculptés par la mer. La stratification est bien visible. D’ici aussi on guette les dauphins à la jumelle. Des arlésiennes !
Nous rentrons par Tain, encore une pierre gravée au cimetière, inscriptions peu lisibles. Sur l’A9 le trafic en direction du nord est très chargé, départs en week end ou en vacances. J’ai oublié de parler des panneaux bilingues depuis Cromarty, lettres noires en Anglais, vert en Gaélique. Les noms sont imprononçables. Arrêt au Tesco de Dingwall. La soirée se termine devant la télé : concert Beethoven.