28. Prun nous raconte le Ramayana sous les galeries d’Angkor Vat

Ici encore, Prun nous fait asseoir pour raconter les légendes indiennes. C’est un conteur très doué. Nous écoutons donc sa version du Ramayana

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la bataille de Langka sur le mur de la galerie ouest un  singe de l’armée d’Hanuman, allié de Rama, mord un démon

Rama était la 7ème incarnation du dieu Vishnou. Il était marié à Sita née au pays du démon Langka. A sa naissance, elle avait crié « Détruit Langka ! ». Sa mère avait décidé de l’abandonner dans une rizière en dessous d’un  sillon. Un roi humain, à la chasse l’a découverte et adoptée, lui donnant le nom Sita qui voulait dire sillon. Sita devint la plus belle de la Terre, des Cieux et des Enfers. Les prétendants étaient donc nombreux. Pour obtenir sa main on organisa donc un concours. L’épreuve consistait à tirer avec un arc très lourd. Seul Rama fut capable de soulever l’arc et épousa Rama.

Mais Ravanna, le démon aux 10 visages, enleva Sita et Rama lui fit la guerre avec l’aide d’Hanuman, le singe, roi des singes. C’est donc la bataille de Langka, le combat des singes et des démons qui est représenté sur la galerie. Les démons possèdent des armes modernes tandis que les singes n’ont que leurs dents. Mais ils sont plus rusés. Sur les bas-reliefs la bataille est saisissante.

Rama , ayant remporté le combat retrouve Sita mais doute de sa fidélité. Il lui fit subir l’épreuve de la flamme (figurée sur un bas-relief) . Sita déçue du manque de confiance de son mari, avant de franchir la flamme fit le vœu que la Déesse de la terre la cacherait aux yeux de Rama.

 Pour faire revenir Sita, Rama fit construire un tombeau et s’y cacha, faisant courir le bruit de son décès….

Ces épreuves qui s’enchainent, l’intervention des puissances divines ou démoniaques, les singes…tout cela est raconté sur la pierre et m’enchante.

Nous entrons ensuite dans le temple pour découvrir un dédale de galeries et de cours, les bassins, la salle aux 1000 bouddhas, bien sûr je monte après avoir fait une longue queue en haut de la tour Centrale. Ce n’est pas la partie la plus intéressante de la visite et la foule est dense. Mais j’aurais regretté de ne l’avoir pas fait !

27. Comment raconter Angkor Vat? Introduction, Généralités

 

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Devant un tel monument je suis impressionnée. Je ne vais pas recopier le guide que nous avons acheté 7$ à l’entrée du site :

ANGKOR CITE KHMERE  de Claude Jacques et Michael Freeman (Books guides)

très clair, très bien illustré contenant des plans très lisibles. indispensable pour ceux qui souhaiteraient s’affranchir des services d’un guide (humain). Ce qui serait dommage.

Nous lirons le livre sur le bord de la piscine puisque Prun nous guidera quatre jours.

A la billetterie 20$, la journée, 60$ pour le forfait semaine. On est photographié et il faut porter le badge plastifié autour de son cou. C’est très bien organisé. Malgré la foule il n’y a aucune attente.

Prun est très sympathique. Grand et costaud par rapport aux autres Cambodgiens.  Il est déjà venu en France et s’exprime dans un Français excellent. Il se destinait à être professeur de Français avant de passer l’examen pour être guide touristique. Très francophile, il dit que, sans doute, un Français mort au Cambodge, s’est réincarné en lui.

Avant de commencer la visite. Prun nous fait asseoir à l’ombre d’un grand arbre, sur le bord du bassin, et dresse la chronologie du Cambodge :

  période Pré-angkorienne 6ème siècle au 9ème

  Angkorienne 802-1432

 Arrivée avec les commerçants indiens, la civilisation indienne avec ses deux religions Hindouiste et Bouddhiste, imprègna le Cambodge. A l’époque Angkorienne l’Hindouisme était religion d’état jusqu’au 13ème siècle.

 Il nous initie à la triade :

           Shiva ayant pour monture le taureau Nandin, est à la fois le destructeur et le créateur. Il détruit pour purifier. Sa demeure est le Mont Merou dans la chaîne de 109 montagnes mythiques au milieu des 7océans cosmiques

          Vishnou est le préservateur de la Terre, du Ciel et des Enfers. Il a deux montures Garuda et un serpent.

          Brahma , est un dieu malhonnête. Il a deux têtes et 10 visages.

Angkor Vat utilise cette symbolique. Les douves sont les Océans cosmiques, les galeries, les Montagnes et au milieu, la montagne la plus haute (la Tour Centrale) représente le Mont Mérou. La statue de Vishnou (4m de haut) a disparu au cours de guerres de religion.

Un des rois les plus marquants d’Angkor : JayavarmanVII, 1143-1295, voulant unifier le royaume après l’occupation des Cham, imposa le Bouddhisme du Grand Véhicule.

JayavarmanVIII , 1243 – 1295 voulu rétablir l’hindouisme et supprimer le bouddhisme en une première guerre religieuse, on a alors transformé les statues du Bouddha en Linga.

Ensuite le royaume fut sur son déclin et subit des invasions de la part des Thaïs. Finalement en 1432 Angkor fut abandonnée et en 1434 Phnom Penh la remplaça comme capitale.

Angkor Vat

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Temple d’Etat du roi Suryavarman II , il était consacré à l’origine à Vishnou et orienté à l’Ouest. La statue de Vishnou de 4m de haut n’a pas été retrouvée, disparue au 16ème siècle au cours de guerre religieuse. Le palais royal en bois, comme les habitations était distinct du temple. Au milieu de la Galerie la porte centrale était celle du Roi, de côté celles des dignitaires et au bout delle des éléphants. Dans la galerie nous découvrons un nombre impressionnant d’Apsaras, gracieuse danseuses célestes toutes différentes par leur coiffure et leurs bijoux. Au dessus des cavaliers sur différentes montures ;

Après avoir franchi la galerie nous nous trouvons dans un vaste espace ouvert et il faut marcher sur une chaussée bordée de serpents Naga.

Deux petits édifices : les Bibliothèques sont vides

On arrive enfin aux galeries recouvertes de bas-reliefs racontant les mythologies indiennes.

26 – Siem Reap – tourisme de masse

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piscine de l’Hôtel Monareach

 

Nous traversons la ville sans la voir : des hôtels monstrueux aux noms antiques de dieux grecs ou égyptiens, bordent la nationale 6. Hôtels, salons de massage, restaurants énormes, galeries marchandes toutes neuves encore vides…. Un  monde voué aux millions de pélerins d’Angkor, cars climatisés qui ronflent à l’arrêt. On entrevoit un beau parc, on espère le marché. Les panneaux publicitaires ont phagocyté l’exotisme. Plus tard, demain peut être verrons nous  les touktouks et la vie provinciale calme dont nous parlait Khem?

Hôtel Monareach- Siem Reap

Notre hôtel est monumental, monstrueux, surdimensionné (et la plupart des hôtels du voisinage sont encore plus grands). Cet hôtel prétentieux est destiné à la clientèle asiatique, Chinois et Coréens ; 3 cars chinois attendent sur le parking. L’entrée est impressionnante avec salon de massage et business-centre…Au premier étage, le « restaurant panoramique » domine l’entrée, son mobilier est extra-lourd.

 

 Nous avons une chambre avec vue sur la piscine, un grand lit, une télé à grand écran, une bouilloire, une théière mais ni tasse ni thé ni café. Pas de sac pour la lessive ni de tarif. Pas de coffre non plus. Un épais livret relié donne le règlement alphabétique de l’hôtel.

13h30, je file au restaurant. Complètement vide. Je suis la seule cliente. La carte est chère et offre peu de choix. Le service est lent. C’est cher et prétentieux. L’assiette de nouilles frites est une divine surprise : c’est abondant et bon, le serveur est adorable. Le soir, il n’y aura pas plus de clients. On commandera avec le « Room-Service ». Le garçon le même qu’à midi, souriant et ébouriffé est charmant et prévenant.

Je descends demander du thé : il faut l’acheter soi-même. Internet est également payant, 1$ l’heure, non fractionnable. Tout et à l’avenant, payant et mal fichu.

La piscine est une autre bonne surprise. Elle fait une quinzaine de mètres et il n’y a personne d’autre que nous. Je compte les longueurs : 70 j’approche mon kilomètre. Vers 16h, ciel très sombre, on entend le tonnerre. Quelques gouttes tombent. Je plonge dans la piscine. Quelques bassins plus tard, le ciel est dégagé.

Quand le lendemain nous découvrirons le site d’Angkor toutes nos préventions s’évanouiront. Angkor est vaste et grandiose et supporte l’invasion touristique, comme Venise ou les chutes du Niagara. peut être a-t-il été conçu justement pour les foules antiques?

26. Sambor Prei kuk

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Poussière et krama

 Nous quittons la route secondaire goudronnée    vide et roulante, pour une piste de terre bien entretenue mais poussiéreuse ; toute la végétation est marron, couleur terre, les maisons, les manguiers et même le haut des palmiers. Je viens de me rendre compte de ce fléau qu’est la poussière. Khem nous en avait palé mais je n’avais pas relevé. Je vois une nouvelle utilisation au krama. J’aurais envie d’en avoir un pour le nouer comme un chèche dans un vent de sable au Sahara.

Devant chaque maison il y a un robinet, pompe ou borne-fontaine ? je vois également des antennes de télévision.

Dès la billetterie la voiture est assaillie par une horde d’enfant, le plus âgé a au maximum 87 ans. Ils vendent des krama à carreaux de toutes les couleurs 1$. Justement j’ai très envie d’un krama. Je sors mon billet d’un dollar et descend la vitre. Une dizaine de bras pénètrent dans la voiture. Je me fâche et sors. Je veux pouvoir choisir tranquillement celui qui me plait. J’en prends un vert assorti à mon pantacourt dans la pile de la plus petite gamine.

Temples de Prasat Sambor (7ème au 10ème siècle)

Comme nous n’avons plus de guide pour nous expliquer, je llis attentivement les panneaux qui citent deux rois Isanavarnam I et Rajandravarman .

On passe d’abord devant un linga symbole de Vishnou (phallus) sur un yoni (symbole féminin) sur un piédestal où peut s’écouler l’eau lustrale (Vu au musée avant-hier). Autour de la tour centrale que des archéologues japonais restaurant, il y a 4 petits édifices et deux arbres énormes. Dans la première tour, se trouve la statue de Durga – déesse féminine khmère – femme de Siva – tueuse du démon buffle

 

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Durga

 

Symétriquement Harihara occupe une autre tour  (L’original est au Musée de Phnom Penh).

Des petites filles ont surgi sans qu’on les voie venir. Elles portent aussi des écharpes à vendre et parlent très bien français.

          « Appris à l’école ? »

          « Non, avec les touristes »

Ce sont de vraies petites guides qui nous conduisent à la tour octogonale, écrin de la statue de Vajmuka, statue à tête de cheval, à qui il faudra rendre visite au Musée Guimet.

Notre escorte nous emmène au Temple du Lion (Prasat Tao)

          « Attention, les racines ! », dit la plus grande

C’est vrai, elles se cachent sous un tapis de feuilles. .

          « les méchantes termites »

           « pourquoi méchantes ?

           « elles mangent les arbres ! »

Les quatre petites ont 9 ans l’ainée 14, va au lycée

          « mais c’est dimanche » , explique-t-elle,

elle me montre les cratères qu’on fait les bombardements des B52 contre le Viet Cong. Les Américains n’ont eu aucun égard pour les antiquités. Déjà à MySon au Vietnam nous avions vu les destructions. Des garçons passent avec des rayons de miel qu’ils ont cueillis dans les grands arbres. Les gamines connaissent le nom des arbres : elles nous montrent les fromagers et l’impressionnnat ficus. Le Lagerstroemia a un joli tronc clair jaune tacheté de gris vert aec une fine écorce lisse.

Nous arrivons à l’enceinte extérieure à peine visible, puis au bassin sacré aux marches de brique. Deux lions gardent l’entrée de la tour. Leur crinière est torsadée. Autrefois il y en avait 6. De chaque côté de la tour deux fines colonnes sculptées et un fin linteau décoré de motifs floraux encadrent une fausse porte.

A la sortie du Temple des Lions nous achetons deux autres kramas et laissons 5$ aux petites guides

          « vous êtes sœurs ?

          « non ! amies »

Elles sont très brunes et ressembles plus à des Indiennes ou à des gitanes qu’à des chinoises oud es vietnamiennes ; Avec leur dollar chacune, elles nous quittent satisfaites. Cette rencontre nous a ravies. C’est un travail accompli, guidage et vente ; Elles ont bien mérité leur salaire. J’ai envie de leur faire un cadeau. J’offre à la plus grande mon stylo à bille à 4 couleurs qu’elle regardait avec envie

 

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Prasat Yae Pau

 

Le dernier ensemble de temples Prasat Yae Pau est plus difficile à cerner dans la végétation  dense. C’est un véritable arboretum : les arbres sont étiquetés Terminalia triptera, Dipterocarpus, Terminalia bi-allata, Garcina, espèces inconnues pour moi ainsi que l’énorme Irvingia malayena. Un temple semble dévoré entre les racines aériennes d’un grand arbre.

Nous rentrons  dans la poussière soulevée par le camion que nous suivons. On ne voit pas à 5m. Dans les villages, si un animal ou un enfant traversait la route on ne le devinerait qu’au dernier moment. Des buffles vont se baigner dans un lac ? Une moto est complètement couverte de sacs l’homme en est recouvert comme des bouées, il appelle dans un miro. C’est un camelot.

RN6 – 146 km Pour Siem Reap. La route traverse des étendues desséchées. Lac ou rizières ? Certains villages sont très misérables et les maisons ressemblent à des cabanes. Tout le long de la route le riz sèche sur ds bâches. Les meules de pailles aussi sont nombreuses. Un camion cherge de grands sacs remplis de paille. Certaines meules sont sur pilotis.

25. Kompong Thom

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la rivière Sen

13h, arrivée à Kompong Thom à notre hôtel Sambor village sur le bord de la rivière Sen, Joli cours d’eau qui paresse entre des berges herbues. L’eau est boueuse, beige. Des enfants jouent sur une bouée faite d’une chambre à air.

 

Une vingtaine de bungalows sont cachés dans un jardin fleuri. Les strelitzias jaunes Forment un buisson fourni sous notre fenêtre. De petits ananas s’alignent le long du sentier gravillonné. Devant le bungalow, il y a une terrasse avec deux fauteuils et une table de bois foncé. La chambre est très simple le bois de lit est monté à la chinoise, 4 montants de bois soutiennent moustiquaire  blanche délicatement nouée– décoration ou nécessité ? On ne la dépliera pas. Les tuiles ne sont pas jointives. La salle de bain en ciment beige est sobre. Sur un petit banc de bois patiné 4 serviettes sont pliées artistiquement. La déco se veut rustique, de très bon goût. Une gracieuse danseuse dans un cadre, un mobilier sombre.

La salle à manger se trouve dans une très belle maison  cambodgienne sur pilotis, bois noble ciré. De petits sets de paille bordés de tissu fleuri, une jolie vaisselle fleurie. Au rez de chaussée le bar donne sur la piscine. Nous déjeunons de nems et sauce pimentée et d’un curry de bœuf très doux. Les nems n’étaient pas une bonne idée : les légumes n’ont pas mijoté assez longtemps….

Il fait chaud, même très chaud. Jusqu’à présent nous n’avons pas du tout souffert de la chaleur. Il faisait une température délicieuse de 26° à 28°C. Ici, les 30° doivent être largement dépassés. Un après midi à la piscine nous rafraîchit et nous délasse du voyage en voiture

Cette piscine bleu nuit est une merveille.  Bananiers, hibiscus, coton arbustif poussant très haut, petits palmiers et deux magnifiques manguiers en pleine floraison. Les fleurs du manguier flottent à la surface ajoutant un charme spécial loin des bassins chlorés. De la maison voisine s’échappent des chants de la musique. On imagine un conteur.

Quai de Sen et chauve-souris

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les chauve-souris

16h30, le soleil a baissé, nous commandons un touktouk pour aller en ville. La ville est toute proche, moins d’un kilomètre. Le chauffeur fait des détours dans un marché et dans des rues tranquilles au lieu de prendre le chemin direct avant de nous emmener à destination : sous deux arbres énormes où nichent des chauves-souris géantes. Nous fixons rendez vous au touktouk à 18h, à la tombée de la nuit les chauves-souris seront réveillées. En attendant le spectacle, je pars explorer le « quai de Sen » jusqu’au double pont : l’ancien, le français, métallique, qui comme son homologue de Hanoï est interdit à la circulation automobile et parcouru par des cyclistes, le neuf en ciment, australien. Un peu plus loin, les halles sont en train de fermer. Sur les quais, des jardins publics, un pépiniériste. Je dépasse la « Maison du Gouverneur », longe l’hôpital et arrive dans des quartiers pauvres. On ensache du poisson. L’odeur me fait fuir.

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la maison du Gouverneur

En attendant le réveil des chiroptères, je dessine la « maison du gouverneur » bâtisse blanche coloniale dans un parc clos par un mur en briques peintes en jaune et blanc,  ajouré imitant des balustres. Réminiscences durassiennes : j’imagine un bal comme dans India Song.

Au dîner la Tom Yam Soup, soupe de poisson très claire dans laquelle nage un poisson blanc à chair serrée ressemblant à celle de l’espadon, des herbes ont été fraîchement coupées. Le bouillon est très parfumé, citronnelle, peut être ? C’est délicieux, très léger. Avec le poisson c’est

24. Collines jumelles : Colline des Hommes et Collines des Femmes, singes et hévéas

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les pagodes de la colline des hommes

Il faut revenir en arrière en direction de Kompong Cham pour trouver les collines jumelles. Dans ce Cambodge si plat, les collines sont sacrées. Elles représentent le Paradis.  Les prières y sont plus efficaces. Mais il faut d’abord gravir de raides escaliers pour mériter ce paradis.

Khem nous compte la légende de ces collines

          « Autrefois, les femmes demandaient les hommes en mariage et devaient payer la dot. Contestant cette dot, elles organisèrent un concours. Hommes et Femmes construiraient une colline séparément les vainqueurs seraient ceux qui ont construit la plus haute.  Les hommes, persuadés de leur plus grande force laissèrent les femmes travailler la nuit. Tandis qu’eux s’arrêtaient à la première étoile, les femmes allumèrent un feu. La colline des femmes est donc beaucoup plus haute que celle des hommes. »

Lonely Planet raconte une version plus œdipienne de la légende : un fils voulant s’unir de force à sa mère, cette dernière inventa un stratagème pour ne pas se soumettre à cette union incestueuse : le concours de construction des collines….

Khem a-t-il censuré la version scandaleuse ou Lonely Planet a-t- il cherché une version sexy, plus vendeuse ?

Les singes

Nous accédons en voiture au sommet de la Colline des Hommes coiffée de deux pagodes en ciment, la plus ancienne datant de 1970. Les singes sont l’attraction touristique principale. Des vendeuses tiennent une petite cantine où nous achetons pour 2500 riels un régime de bananes. Les macaques accourent à notre approche. Ils saisissent doucement les bananes qu’ils épluchent puis mordent sans conviction. Les femelles qui allaitent leurs petits ne se dérangent même pas. Pèlerins et touristes sont nombreux. Les singes ne sont pas affamés. Un jeune perché sur une glacière vide consciencieusement la poubelle des canettes de coca-cola. Avant de jeter chacune d’elle, il vérifie qu’il ne reste plus rien.

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l’escalier qui monte à la colline des femmes

Au bas de l’escalier raide qui monte à la colline des Femmes, une femme est assise sur une plateforme, son singe attaché à une chaîne. Elle l’a recueilli blessé et soigné et le considère comme son enfant. Comme il est apprivoisé on peut le caresser et jouer avec lui. Khem lui apporte un fruit du lotus qu’il épluche soigneusement ;

          « quand je pense que je t’ai filmée dans la voiture ! le singe fait cela beaucoup mieux ! »

Ses doigts sont déliés et experts. Blasé, il dédaigne les bananes mais c’est un vrai goinfre avec les graines de lotus qu’il fourre comme un hamster dans ses abajoues. Quand sa maîtresse fait mine de lui retirer la tige il lui montre les dents dans une horrible grimace.

Je compte les marches de l’escalier de ciment : 150, ce n’est pas franchement un exploit ! La vue sur les environ est étendue.

Hévéas

De Kompong Cham à Kompong Thom il reste encore deux heures de route. Nous traversons les plantations d’hévéas qui s’étendent sur 80.000ha. Un arbre peut être saigné dès 6 ans mais son meilleur rendement se situe entre 15 et 35 ans. Après 55ans l’arbre doit être abattu. Deux usines traitent le latex au Cambodge mais la fabrication de pneus se fait à l’étranger.

Les arbres sont plantés serrés, alignés à perte de vue. L’incision fait une trace noire, un récipient rond est fixé en dessous. Le sol est très propre.

En traversant des villages on devine la vie des Cambodgiens : de gros tas de pierres sont entassés destinés à être vendus pour faire des fondations aux maisons de ciment. De hauts dattiers dépassent des maisons. Un camion passe, chargé de tiges de manioc destinés à faire des boutures, justement à proximité, d’une usine de farine de manioc. Des gendarmes arrêtent des camions pour vérifier qu’ils ne transportent pas de planche. Le gouvernement a décidé de lutter contre l’exploitation illégale de la jungle.

23. Temple de Nokorbaty(11ème 12ème siècle)

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Le mur d’enceinte en latérite a subi de lourdes destructions du fait des bombardements américains. L’entrée était autrefois gardée par des nagas. Il reste un Garuda sur un naga. On devine l’emplacement des douves qui cernaient le complexe.

L’entrée est joliment sculptée avec des apsaras gracieuses sous un bel éclairage. La tour était accompagnée de deux bibliothèques où l’on conservait les « teck d’adoration » qui servent aussi de divination. Des bibliothèques, il ne reste pas grand-chose. La tour est au beau milieu d’une pagode moderne en ciment peinte de fresques colorées et naïves. Au 12ème siècle c’était un temple hindouiste puis bouddhiste. Les sculptures, principalement bouddhistes ont été dorées par les bouddhistes actuels.

Khem nous raconte l’assaut  où les démons veulent tuer Bouddha. Une mêlée de combattants est sculptée avec des éléphants. La Déesse qui essore ses longs cheveux fait tomber: l’eau : l’inondation noiera les éléphants.

Un Bouddha couché avec les bonzes qui le pleurent décorent un linteau.

Un  fronton triangulaire raconte comment le Prince Siddhârta à cheval s’est échappé du palais royal avec la complicité des dieux qui ont étouffé le bruit des sabots du cheval.

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un temple antique dans une pagode moderne

Sur un troisième fronton est représenté le père du Bouddha, occasion pour Khem de nous raconter la naissance du Bouddha, bébé extraordinaire, qui a marché dès sa naissance. Son père, le roi, ayant convoqué un devin pour savoir si ce fils lui succéderait, l’avait enfermé dans son palais pour qu’il ne connaisse ni la maladie, ni la misère ni la mort. Ce récit explique le fronton précédent/

Cette visite est aussi l’occasion d’observer la piété des gens ordinaires. La pagode récente contient une fresque de l’enfer qui rappelle étrangement l’enfer chrétien et les fresques que nous avons vues en Grèce ou en Roumanie. Si paradis, Réincarnation, Nirvana différent, il y a une étrange similarité dans la punition. Démembrement, cuisson dans l’huile bouillante, faire rôtir …

Un jeune couple a garé sa moto devant l’entrée, c’est gênant pour la photo, ce sont des fiancés qi vont se marier. Le garçon s’agenouille à côté du bonze tandis que la fiancée va voir une vieille femme (bonzesse). Khem nous dit que nous employons à tort ce mot, nous confondons moines et bonzes. Non loin de la pagode s’alignent les stupas en ciment – cimetière de village ?

22. Fruits et araignées sur la route de Kompong Cham

 

Fruits et araignées

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Les vergers d’anacardiers et de manguiers remplacent les rizières. Sur les bords de la route on vend des fruits. On vend également des mygales frites entassées dans une bassine. Je ne reconnais pas trop la silhouette de l’araignée, les pattes velues étalées de chaque côté. Pas appétissant du tout ! Les ananas sont empilés en pyramide. On propose aussi des canards entiers laqués d’orange. Des vieilles femmes enturbannées du krama à carreaux rouge et blanc traditionnel portent d’étrange cylindre : du riz gluant enroulé dans des feuilles de bananes qu’il faudra faire cuire dans le cylindre. Des petites filles apportent à la fenêtre de la voiture des fruits du palmier à sucre : décortiqués ils ressemblent à de petites méduses translucides élastiques.

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Kompong Cham

On s’approche de Kompong Cham, autrefois la troisième ville du Cambodge. Elle doit son nom : embarcadère des Chams, aux Chams venus autrefois du Vietnam, musulmans et souvent pêcheurs. La province de Kompong Cham du temps de l’Indochine française fut une province coloniale où fut introduite la culture de l’hévéa en 1920 (5000ha) 1921 (10.000 ha). La ville a gardé ses maisons coloniales au centre que nous ne traverserons pas.

21. lotus

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Nous passons devant des bananiers très hauts et des champs de lotus. Khem achète deux tiges portant des fruits. Il ne s’agit pas de décoration mais de friandises. On fait sortir les graines du fruit qui ressemble à la pomme d’un arrosoir, on décortique la graine en ôtant le tégument blanc et élastique. La gaine ressemble à une amande encore verte, juteuse et croquante. 

Je photographie les fleurs :

          « il y a deux variétés de fleurs de lotus : les blanches et les roses. Les roses sont pour la prière et le mariage, les blanches pour la prière et le deuil.

Khem casse la tige de lotus pour nous montrer les fines fibres élastique qu’on tisserait en Birmanie comme de la soie. 

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Dans une mare, se serrent de nombreux canards. Justement, un homme passe sur une moto portant des dizaines de jeunes canards vivants attachés tout autour de lui. Dans des nasses placées horizontalement sur le porte-bagage on entasse aussi de nombreux petits cochons.

20. De Phnom Penh vers Kompong Cham

 


La RN6 file vers la Thaïlande. 126km séparentKompong Cham de la capitale en longeant le Mékong qu’on aperçoit de temps en temps, brillant aux intersections. Les maisons sont perchées très haut sur leurs pilotis indiquant le niveau pendant l’inondation.

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Indra  sur son éléphant tricéphale

 l’inondation :

En septembre, le lac TonleSap quadruple, passant de 3 .000km2 à 13.000, envahit les terrains bas. Le Mékong s’y déverse en le faisant grossir. En Novembre le courant se renverse. Pour remercier Indra qui a donné l’eau vitale on célèbre la Fête des eaux avec des bougies flottante, nous raconte notre guide. La Fête des régates est également une fête aquatique. L’an passé un terrible accident a coûté la vie à des centaines de Cambodgiens dans une bousculade sur un pont où des milliers de spectateurs s’étaient rassemblés.

Les maisons sont traditionnellement orientées face à la rivière, la porte vers l’eau pour permettre aux ancêtres de revenir.

A la sortie de Phnom Penh, les champs de maïs sont florissants en saison sèche. Dans des cantines sur pilotis les habitants de la ville peuvent venir se délasser et manger le maïs cuit à la vapeur avec des brochettes. Sur le bord de la route on voit les beaux épis encore emballés de vert entassés et les grosses marmites dans lesquelles on les cuit. La terre est très fertile, avec l’eau pompée dans le Mékong tout proche on peut faire alterner la riziculture, le maïs puis les légumes. Pendant l’inondation, la circulation deviendra très difficile sur la route surélevée où le bétail se réfugie.

De nombreuses briqueteries se succèdent.

Certains champs sont labourés pour la deuxième récolte de riz. Dans d’autres on voit les pousses vertes du « riz précoce » qui se contente de peu d’humidité et qui aura des grains plus légers. Dans des mares on pratique la pisciculture. Dans les marchés de village, le troc a encore cours, on échange riz contre poisson, poisson contre légume.