Sous le titre La Provocation, qui est le titre du premier micro-roman, ce recueil réunit des textes divers, trois inédits écrits après la chute du communisme, d’autres plus anciens extraits des romans. C’est donc un recueil un peu hétéroclite qui dérange un peu par le manque de cohérence.
la Provocation a été rédigée en 1962 mais parue seulement en 1972. Elle raconte comme dans le Désert des Tartares la vie de soldats gardant la frontière dans une montagne enneigée. Tout d’abord je me suis interrogée, quelle frontière? en 1962, Macédoine, Kosovo et Monténégro étaient réunis dans la Yougoslavie de Tito, au sud est, la Grèce. Je n’ai jamais entendu parler d’état de guerre entre la Yougoslavie et l’Albanie, dans la montagne grecque se sont déroulés des combats pendant la Guerre civile, contre l’occupant nazi, mais entre Albanais. J’ai demandé au guide de l’agence albanaise dès notre arrivée à Tirana : d’après lui la « provocation » ne serait que dans la paranoïa du dictateur de l’époque . Deux lectures sont donc possible : soit allégorique dans l’esprit du Désert des Tartares , soit politique dans l’isolation du pays du temps d’Enver Hoxha. Dans le second cas, on peut aussi s’interroger sur la censure qui a retenu dix ans la parution de la nouvelle. C’est affaire de spécialistes….
Deux textes sont des lectures de Shakespeare, de Hamlet et de Macbeth. Kadaré a beaucoup brodé sur ces thèmes surtout Macbeth qu’il a lu très jeune.
J’ai beaucoup aimé La Question d’Orphée, ironique et politique.
« Habitués au luxe de l’Olympe, les artistes pensaient rarement au monde des ténèbres. Pour autant Hadès ne se vengeait pas de son mépris… »
« les bruits sur les égards dont bénéficiaient les artistes alors que d’autres au moindre faux pas étaient broyés sans pitié reprirent de plus belle… »
« Un troisième groupe qui avait le mot plus rare, était d’un tout autre avis. Ils étaient persuadés que le pacte était biaisé. Nulle Eurydice ne suivait Orphée lorsqu’il avait franchi le seuil des enfers. le regard en arrière avait été une trouvaille diabolique… »
Dans le jardin, notre hôte élève entre 20 à 30 pigeons « modèle cowboy » blancs et bruns qui ont la particularité d’avoir de longues plumes sous les pattes là où les oiseaux ont ordinairement des écailles. Pigeons de race et de collection. « il ne sont pas voyageurs » a-t-il précisé. Ils font sans doute des concours .Il vient de les soigner. De temps en temps il vient avec un autre colombophile, prélève un pigeon qu’il emballe dans un journal enroulé. On ne l’a jamais vu les libérer pour voler. Cet élevage me fait penser au roman Hakawati de Rabih Allameddine que j’ai lu cet hiver et au vieil homme de Madaba (Jordanie) pigeons perché sur sa terrasse, qui sifflait les pigeons en vol.
modèle cow boy!
Avec le lever du jour les pigeons m’ont éveillée. Je me suis installée pour écrire sur le rebord du muret. Tout à coup j’ai senti quelque chose sur mon pied : la tête de la grosse tortue curieuse. Une autre petite est venue visiter mes tongs bleues. Elles sont étonnamment rapides. Les tortues sont endémiques , il y a peu nous avons arrêté la voiture pour en aider une à traverser la route.
transport du ciment
Vers 7 heures, les sabots d’un âne ont résonné dans la ruelle en pente à nombreuses reprises. Il remonte le ciment qu’on gâche en bas de la rue dans des caisses en plastique pour répare une maison plus haut. De nombreuses maisons de Mangalem sont ainsi restaurées et converties en chambres d’hôtes. Notre propriétaire en possède plusieurs dans la rue.
8heures, il vient nous chercher pour le petit déjeuner. . Au petit déjeuner, il y a du melon délicieux et un gâteau genre Forêt Noire que je mange plus par politesse que par goût. Je retrouve le groupe des français qui étaient à la Mosquée du roi. Ce matin ils vont visiter la Citadelle, j’aimerais me joindre à eux pour profiter des commentaires du guide. Ce ne sera pas possible annonce le guide, ils montent en voiture. Pas de problème je comptais bien faire la promenade à pied ! A 9h, je monte un bon kilomètre sur une rue pavée de galets bien glissants ; pour la montée je ne peine pas , il fait encore une température agréable .
Histoire de Berat
La citadelle est entourée de hauts remparts byzantins protégeant la ville .Les empereurs byzantins furent vaincus par les Croisés en 1204. Michel Commène II Doukas , despote d’Epire (1230-1268) entra en conflit avec Manfred de Sicile et lui céda Corfou puis il s’’allia avec ce dernier et Villehardouin pour combattre les byzantins Michel et Jean Paléologue. . Les catholiques notamment les Anjou vouaient contrôler la Via Egnatia allant de Dürres à Constantinople. En 1417, elle fut occupée par les Ottomans. Après la défaite de Skanderbeg au siècle suivant (siège de Berat en 1455) , Berat ne fut plus jamais assiégée. En 1808, Ali Pacha s’en empara par la ruse et le poison.
A la différence des citadelles visitées pendant notre voyage : Kruja, Prizren, Kotor ou Shkoder, qui étaient en ruine, la citadelle de Berat est habitée : les rues sont tranquilles, des maisons ont des jardins, des arbres fruitiers (en ce moment les abricots sont mûrs), de beaux porches arrondis en pierre calcaire soigneusement taillés, des murs blancs parfois chaulés. Les marchandes ont étalé des nappes de dentelles et de la lingerie ancienne brodée, beaux vêtements qui ne déparent pas.
Musée Onufri .
Musée Onufri
Le Musée Onufri est installé dans l’Eglise de la Dormition de Sainte Marie, es-cathédrale orthodoxe, construite au 13ème mais remaniée en 1797. Le mobilier, iconostase et chaire sont en bois travaillé et doré avec le plus grand soin. J’ai retrouvé le groupe des français et leur guide ; il fait remarquer les animaux sculptés, les fleurs et les fruits qui racontent les légendes. A l’apoque on savait déchiffrer les symboles. L’iconostase porte des icônes dont deux d’Onufri, le célèbre peintre d’icônes du 16ème siècle. Onufri fut un des premiers à avoir signé ses icônes. On sait qu’il faut prêtre à Elbasan mais son lieu de naissance, sa mort sont un mystère. On lui attribue des icônes aussi bien en Albanie qu’en Grèce, en Macédoine jusqu’en Roumanie. Il est célèbre pour son « rouge onufri » et pour avoir introduit le rose dans les icônes.
Je n’aurais pas osé à aller derrières l’iconostase, le guide y entraine les touristes pour montrer les fresques encre visibles. Elles avaient été badigeonnées à la chaux. Un nettoyage les rend visibles ; C’est là qu’en 1965, à la période où les communistes détruisaient les églises , on découvrit derrière l’autel deux « codex » copie de la Bible sur des cahiers manuscrits écrits en lettres d’or. Par chance, les destructeurs prirent conscience de la valeur de leur découverte. Ils sont maintenant conservés à Tirana.
Dans le bâtiment annexe les icones sont commentées soit avec un QR code (encore eût- il fallu que la wifi soit disponible) soit sur des fiches plastifiées. J’ai recopié pour els icones que j’ai préférée :
Saint Jean Baptiste
La Présentation du Christ au Temple (n°9 le rouge du manteau splendide et roses caractéristiques d’Onufri, mouvement des membres et plis déjà observés au Musée de Korçe ; dans la merveilleuse Déisis, le Christ porte une tunique rose et la Vierge, un riche manteau rouge. On voit aussi plusieurs représentations de Saint Jean Baptiste portant sa tête. J’ai beaucoup aimé une Annonciation (n°21) et la Nativité de la Vierge (19) ainsi que les 40 martyrs de Sébaste où le ciel doré est gravé de 40 couronnes. .
minaret de la mosquée rouge
Je poursuis ma promenade dans la citadelle, en flânant plutôt qu’en visitant systématiquement. Au sommet de l’acropole je trouve logiquement la citerne, comme les châteaux d’eau modernes sont perchés / Une sorte d’esplanade porte les restes de bâtiments et les ruines de la Mosquée blanche dont le minaret est cassé, un peu plus loin les restes de la Mosquée rouge,. Sous l’Acropole, la petite église de la sainte Trinité 13ème 14ème est fermée,. Je descends le long des remparts et trouve une grande tête de Constantin sur une place à proximité de l’Eglise Constantin et Hélène (1639) fermée elle aussi) .
Sainte Trinité
Le Musée Ethnographique se trouve à mi-chemin, il occupe une belle maison ottomane, comme tous les musée ethnographique il contient de beaux costumes, des outils des artisans : ferronnerie, menuiserie, et à l’étage on a reconstitué le çardak balcon ouvert avec un coin élevés servant d’habitation d’été, on y travaillait aussi, on tissait. 3 fenêtres orientées au nord, rafraîchissaient l’air.
Dans la soirée, je me promène dans Bérat, passe le pont Goriça, le vieux pont de pierre 1777, 130 et 9 arches. Un panneau rappelle qu’Evleya Celebi y fait référence, par la suite j’ai cherché mais pas trouvé, mon édition est lacunaire. Passé le pont, j’arpente le quai du côté de Griça. Un cheval blanc est attaché, des chèvres paissent, atmosphère très paisible. J’entre dans l’Eglise Saint Spiridon (1864) son porche s’ouvre sur une galerie à 9 arcades. A l’intérieur la basilique est vaste avec ses 3 nefs. Comme à la mosquée, il y a à l’étage une galerie pour les femmes. Dans la cour poussent des aubergines ;
J’ai retrouvé la famille française qui est arrivée cet après midi à l’hôtel avec leur guide francophone très sympathique. Il nous montre au sommet de la montagne le nom ENVER toujours là. Je lui dis que ces inscriptions géantes me rappellent un film albanais que j’ai vu autrefois où un instituteur faisait écrire des slogans dans la montagne ; Le guide connait ce film c’est Slogans (2001) : on peut encore le visionner sur Youtube en cherchant Parullat :
Il me reste encore à explorer les monuments de la ville moderne : la Mosquée des Plombs (16ème siècle) également citée par Evleya Celebi qui a fait la liste des monuments d’Ahmet Bey. L’intérieur est très sobre, je remarque un beau Minbar de bois ainsi que la galerie des femmes au moucharabieh ondulant et un vitrail éclairant avec des rayons rouge/bleu/jaune et vert.
L’église Saint Dimitri qui est en face de la mosquée, est toute neuve avec une belle iconostase et un lustre impressionnant à l’aplomb de la rosace marquetée au sol. Très grande du dehors, l’intérieur paraît plutôt intime.
Je fais un détour avant de rentrer à la Mosquée des Célibataires qui est juste sous le jardin. Je fais des photos des fresques extérieures, mais encore une fois impossible de rentrer. Curieusement, sous cette mosquée il y a un magasin d’habillement tout à fait profane.
Retour à Fier par la même route, déserte à l’heure de la sieste. Entre Fier et Berat c’est tout droit. La chaleur (39°) écrase tout. Je remarque une odeur de goudron. De curieux réservoirs cylindriques sont alignés, plus loin brûle une torchère. Nous passons à côté du champ pétrolier de Marinza, pétrole conventionnel ou gaz de schiste, les articles que j’’ai trouvé sur Internet ne sont pas clairs même si tous s’accordent sur la pollution.
La rivière Osum à Berat
Les montagnes se rapprochent, nous arrivons à Berat vers 15h30. Nous nous orientons grâce à la rivière Osum qui sépare les deux quartiers anciens de Mangalem sous la kalaja où se trouve notre hôtel et le quartier de Gorica sur l’autre rive, adossé à l’autre colline. Le Road book stipule qui’l faut se garer près de la Mosquée des Célibataires. On se trompe de mosquée, je pars à pied, un peu perdue. Personne ne semble connaître l’Hôtel Nasho Vruho.
au paradis! notre jardin suspendu
Je monte une ruelle et trouve notre logeur qui nous attend et qui se charge de garer la voiture dans « son parking ». Dominique gravit péniblement la ruelle aux galets polis et glissants. Notre hôte ouvre une porte : nous sommes au paradis : la chambre s’ouvre de plain pied sur un jardin suspendu au dessus des toits. La vue est merveilleuse, sur la rivière Osum, les toits de Mangalem, la ville moderne avec sa promenade et la coupole de l’université.
notre vue
J’écris assise sur un siège de pierre, accoudée au muret sous un agrume non identifié en fleur (citron ou orange ? ) une dizaine d’arbres soigneusement taillés, au tronc chaulé poussent entre les dalles. Deux oliviers dépassent les orangers, un petit grenadier tente de se frayer une place. Dans des poteries, des plantes vertes ; les sièges sont maçonnés grossièrement ; Il y a aussi une chaise longue en bois et deux fauteuils de fer forgé très confortables. Des jarres « antiques » complètent le décor.
La chambre est éclairée par deux baies en ogive encadrées de briques. Les murs sont dallés de pierre grise avec des joints peints en rouge. Deux lits, une table de chevet, la télévision sur une tablette. La salle de bain est lilliputienne, la douche est en hauteur alimentée par un tuyau sur le lavabo. Quelle importance puisque nous sommes au paradis ! Le climatiseur est réglé sur 24°, il nous semble arriver dans une glacière ; je me dépêche de l’arrêter. Jamais je n’arriverai à me doucher dans un froid pareil.
Notre hôte parle français, il est aux petits soins et nous a aidé à monter les trois valises (quelle idée d’emporter tant d’affaires !). Pour éviter que Dominique n’ait à descendre en ville pour dîner, il propose que sa femme nous fasse de la soupe. De la soupe par cette chaleur ? J’irai acheter des yaourts et des pêches !
Après quelques temps dans le jardin je pars à l’aventure sans plan ni guide. Berat n’est pas si grande ! Je situe les deux quartiers de Mangalem et Gorica, de chaque côté de la rivière, emprunte la promenade moderne entre un jardin public et les terrasses des cafés alternant avec des boutiques de mode. Puis je rentre par une rue parallèle commerçante où je trouve les supermarchés et les petites boutiques, elle va de la cathédrale orthodoxe à la Mosquée où nous nous sommes garées la première fois.
merveilleuses boiseries de la galerie des femmes
Un panneau touristique indique le Complexe formé par la Mosquée du Roi, le Tekke halveti et un Caravansérail. Je m’approche timidement de la Mosquée. Pendant le Ramadan c’était un peu compliqué, fermé le jour. Ramadan est terminé depuis trois jours. La mosquée est ouverte mais vide. Je me déchausse, j’ai oublié mon foulard. Le gardien m’encourage en italien « vous pouvez monter à la galerie des femmes et prendre toutes les photos que vous voulez ».
Plafond mosquée du roi
Comme la Mosquée du roi d’Elbasan elle date de 1492 et le Roi est Bayazit II (1481-1512). Le plafond est peint en rouge , des sourates y sont inscrites. Les boiseries de la galerie des femmes sont travaillées ; c’est peut être la plus belle mosquée d depuis celle de Tirana. Au moment où j’allais sortir, la mosquée s’illumine, un groupe de français et leur guide arrivent. Le gardien commente, le guide traduit. Du temps du communisme, la mosquée fut transformée en salle de ping pong et utilisée pour que les femmes s’y réunissaient pour coudre. Une chance pour la mosquée qui ne fut pas endommagée par ces activités.
Tekke
De l’autre côté de la place, dans le Tekke, les derviches lisaient le Coran et les derviches tourneurs dansaient. Il fut construit au 18ème siècle et appartenait à la secte Halveti. Je me repère mal dans les sectes soufies confondant Halvetis et bektashis. Le plafond est peint dans le style « baroque musulman »fleuri, doré à la feuille, très différent du plafond ancien de la Mosquée.L’éclairage de la pièce provient de fenêtres décorées d’entrelacs délicats. On voit pendre les chaînes où étaient accrochées les lampes à huile. Dans le mur du fond, sous les moucharabiehs pour les femmes, on remarque des trous qui s’élargissent à l’intérieur du mur. Le son était réfléchi par des coupelles de céramiques conférant à la salle une acoustique particulière. N peut accéder à la galerie des femmes par un escalier extérieur. Dans le tekke régnait une atmosphère très différente de celle de la Mosquée voisine. Dans la Mosquée du ri se pratiquait un islam sunnite traditionnel tandis que le tekke était beaucoup plus tolérant : la séparation homme/femmes n’était pas aussi rigoureuse, une femme pouvait se joindre aux danses et aux chants des derviches. Les Halvetis et les bektashi s étaient plutôt rattachés au chiisme. Du temps du communisme le tekke fut fermé on y entreposait des légumes ; Le gardien et le guide parlent de cette époque où la prédication était interdite tant pour les musulmans que pur les orthodoxes et les catholiques. Des prêtres de toutes confessions furent emprisonnés. Paradoxalement cette répression eut des conséquences bénéfiques : els religieux de toute obédience se sont rapprochés et la tolérance y a gagné. Des mariages entre communauté ont eu lieu et cela continue actuellement .
Vers le soir la promenade se peuple
Nous avons terminé la soirée dans notre jardin . A 19h les rues se sont animées et la promenade noire de monde. Au bout,une estrade et un écran, les lampadaires se sont illuminés. Un spectacle s’est déroulé jusqu’à tard dans la nuit, musiques diverses puis un spectacle théâtral comique , nous nous sommes endormies dans les rires et le vacarme.
Pour profiter du site d’Apollonia, nous avons décidé un départ matinal. A 7h la voiture est chargée, le petit déjeuner servi.
Le pneu avant est à plat. Un clou est enfoncé. Le jeune serveur sympathique et un ami de l’hôtel s’affairent pour nous aider. Renault a inventé un système énigmatique : cric et manivelle sont stockés dans une sorte de cuvette en plastique et un système énigmatique avec une ficelle et une pompe pour libérer la roue d secours. Personne n’y parvient. La roue reste désespérément accrochée sous la voiture malgré les efforts de tous. Téléphone au loueur de voiture, téléphone au garagiste de Dukat. Les garagiste arrivent de la vallée, ils sont trois et viennent à bout du système récalcitrant.
Retour des parents au nid
Au garage on nous offre deux chaises. Au dessus un nid d’hirondelles avec 6 poussins dans le nid qui tendent le cou et ouvrent grand leurs becs à l’approche des parents. Comment sont-ils prévenus de leur retour ? leurs yeux cernés de blancs paraissent fermés. Le plus gros se tient au mileiu, il semble mieux nourri que ceux des côtés du nid. Les parents semblent effrayés par nos appareils photos. Le ballet des hirondelles nous a bien distraites.
9h45, 2h de retard sur notre programme, nous quittons Dukat pour la baie de Vlorë. Nous passons sans nous arrêter devant le site d’Orikum, conquis par Alexandre le Grand, il servi ensuite de port à la flotte de César en lutte contre Pompée, puis port ottoman, Pacha Liman, et beaucoup plus tard de base de sous marins soviétiques ; une base militaire occupe encore le site et les touristes sont sous surveillance militaire.
D’Orikum à Vlorë, le littoral est occupé par les établissements balnéaires et les marinas. Des complees immobiliers très récents poussent – bétonnage navrant et gâchis de paysage.
Vlorë est une grande ville. On suit d’abord la corniche puis se perd avant de trouver l’autoroute dans une campagne plate où de petits champs alternent avec des oliveraies et quelques rangs de vigne. L’autoroute s’arrête brusquement avant Fier qui s’annonce par des cheminées géantes d’usines démantelées. On traverse des quartiers déshérités, un marché aux puces de vieux vêtements vieilles chaussures s’étale sur le trottoir ? Ce n’est qu’au centre de la ville que des immeubles modernes affichent une certaine prospérité. Une flèche Apollonia nous indique la direction qu’un policier nous confirme.
»C’est tout droit ! »
Apollonia
Monastère sainte Marie
Apollonia n’est pas débordée par le tourisme comme Butrint. Il faut être motivé pour rouler sur des routes poussiéreuses creusées de nids de poules à travers les villages. Evidemment le GPS ne l’a pas répertorié !
Le gardien vend les tickets, place les voitures et nous accueille en français.
« c’est une mission archéologique française qui a travaillé ici ! »
Deux sites à visiter : la ville antique romaine et le Monastère sainte Marie.
Le site est écrasé de chaleur lorsque nous arrivons, 34° à l’ombre et il y a si peu d’ombre ! Je choisis donc le monastère (13ème 14ème ). Les bâtiments en excellent état forment une cour dont l’église occupe le centre. Son porche est roman avec des chapiteaux d’un bestiaire fantastique. La margelle du puits est creusée dans le tambour d’une colonne antique. Au mur, les fresques (1261-1322) représentent Michel Paléologue, son épouse et sn héritier Andronic II . L’église est sombre et petite comme souvent les églises orthodoxes byzantines, l’iconostase est belle et la coupole est peinte à fresques.
En face le réfectoire du monastère présente de belles fresques, les Noces de Cana, en revanche je n’identifie pas le Prophète Elie et la prière à Gethsémani, signalés par le guide de l’Albanie.
Le campanile, à l’écart est moderne, reconstruit au 20ème siècle.
Dans le cloître on a placé de belles statues antiques provenant du site voisin. On tourne la vidéo d’un mariage albanais, la mariée fait des effets de traîne et de robe parmi les tuniques et les toges antiques. Je ne me suis donc pas attardée.
Un musée très riche et intéressant est installé dans le bâtiment à étage. Une affiche, signée de l’ambassade de France, honore Léon Rey, archéologue français, commémore le 80èmeanniversaire des fouilles françaises.
Les vases grecs sont de toute beauté. Je retrouve les colonnes cylindriques hautes de quelques décimètres provenant de tombes macédoniennes,, gravées en lettres grecques de noms illyriens ou macédoniens.
Apollonia fut fondée par des Grecs de Corcyre en 580 av. J.C. et connut une grande prospérité
205 av. J.C. elle se place sous la protection de Rome et apporte son soutien à César contre Pompée. Octave y séjourna 6 mois. Les antiquités romaines sont donc très abondantes.
Une sandale romaine et le pied de bronze chaussé ont retenu mon attention. Il y a de nombreuses têtes de romains et de romaines, portraits réalistes. J’ai aimé les sirènes, avec leur air nostalgique et plaintif.
La ville romaine
J’ai peu de courage pour affronter la fournaise dans la ville romaine. Je fais l’impasse sur les murs d’enceinte et me limite au centre. Le bouleuthérion dépasse des ruines. On a relevé son fronton triangulaire soutenu par des colonnes corinthiennes. Le conseil de la ville – 160 membres – se réunissait sur ses gradins. On raconte que 25 paires de gladiateurs ont combattu pour son inauguration au 2ème siècle après J.C. Il a belle allure mais quand on regarde de près, on voit beaucoup de ciment dans les colonnes.
Odéon
En face le petit Odéon , théâtre couvert, pouvait contenir 650 spectateurs. Picard 1955 émet l’hypothèse d’un théâtre mystique lié au culte de la Dea Syria. « On peut imaginer » – dit le panneau – « que sa construction rappelle la visite d’Octave. »
Les piliers de brique entre l’Odéon et le Bouleuthérion marquent l’emplacement d’un arc de triomphe qu’il reste à imaginer.
Le Sacellum, à côté de l’Odéon, était dédié au culte impérial. Il contenait une niche pour la statue de l’empereur, une haie d’honneur de 8 personnages qui se faisaient face.
Adossée çà la colline, Stoa aux 17 niches, chacune garnie d’une statue retenait la pente. L’avant colonnade soutenait une galerie à l’étage.
Au dessus de la Stoa, il ne reste que les bases d’un petit temple. Je monte à l’Acropole traversant un bosquet de chênes puis une olivaie où se trouve un restaurant – au nom de Léon Rey .
Le site est immense, le temps me manque pour l’exploré, le climat estival ne s’y prête pas. Autant j’ai traîné en Avril dans les sites antiques de Sicile égayés par les fleurs, autant j’ai hâte de m’attabler au restaurant pour engloutir une bouteille de Glina pétillante et fraîche.
Déjeuner léger : Légumes grillés ( Périmé, ce nom m’amuse) et tzatsiki très bien présenté, disposé à la douille à meringues un filet d’huile, avec une olive et des poivrons en décor . servi avec du pain grillé à l’huile et au thym
A la suite d’Avril brisé et de Chronique de la ville de pierre, je poursuis la relecture des romans de Kadaré qui dorment bien sagement sur l’étagère, avec les livres que j’ai aimés dont je ne me séparerais pas, mais que j’ai un peu oubliés.
le Général de l’Armée morte raconte l’histoire d’un général italien, dans les années soixante, chargé de rapatrier les corps des soldats morts pendant la dernière guerre afin de les rendre à leurs familles. Cette mission en temps de paix s’avère pénible, dans les montagnes escarpées d’Albanie, dans la boue de l’automne et le froid hivernal. Le Général est accompagné d’un prêtre catholique qui lui sert de traducteur, de conseiller et de confident.
Après les négociations avec les autorités nécessaires pour entreprendre ces chantiers, le Général est pénétré de la solennité de sa mission, de son étrangeté aussi :
« et puis, ces derniers temps il m’arrive quelque chose d’étrange. Dès que je vois quelqu’un, machinalement je me mets à lui enlever les cheveux, puis ses joues, ses yeux comme quelque chose d’inutile, comme quelque chose qui m’empêche même de pénétrer son essence, j’imagine sa tête rien que comme un crâne et des dents (seuls détails stables) vous me comprenez? J’ai l’impression de m’être introduit dans le royaume du calcium…. »
Ils doivent extirper de la boue des ossements, mais aussi le passé de cette invasion repoussée par les montagnards albanais qui contraignirent à la retraite. Cette campagne ne fut pas très glorieuse et le Général en a conscience. Comme il craint l’hostilité des paysans que ses fouilles peuvent causer.
« il y a vingt ans, vous écriviez les mots d’ordre du fascisme sur les poitrines de nos camarades et maintenant vous vous révoltez à propos de cette phrase écrite sans doute par un écolier.[…..]Vous évoquez souvent les Grecs et les Troyens. pourquoi ne devrait-on pas parler de ce qui se passait il y a vingt ans? »
le général voulant fêter la fin de la campagne de fouilles, s’invite à une noce où les paysans chantent et dansent, une vieille femme fait resurgir sa douleur et on frôle le drame. Tout le roman est écrit sur le fil de l’ambiguïté. Générosité de celui qui offre l’hospitalité mais aussi méfiance vis à vis de l’ancien ennemi.
« ...en guerre il est malaisé de faire le partage entre le grotesque et le tragique, l’héroïque et l’attristant… »
J’avais d’abord fait une lecture sur le plan allégorique, mythique, tragique. Maintenant que je me suis familiarisée avec le monde de Kadaré, je replace les événements dans leur contexte historique : l’occupation italienne, Kadaré l’a raconté plus tard dans la Chronique de la ville de pierre. J’ai retrouvé au moins deux épisodes commun aux deux livres : celui de l’installation du bordel dans la ville et l’histoire du pilote anglais qui avait perdu une main. Une autre histoire, celle du prisonnier italien devenu valet du meunier a été racontée de manière analogue par Argolli dans l’Homme au canon. Dans les deux cas, l’italien, prisonnier ou déserteur avait écrit un journal intime.
L’auteur accorde une importance à la poésie des traditions, chants et musique des montagnards. A plusieurs reprise il s’attarde pour nous en faire ressentir la beauté étrange et sauvage :
» – moi je frémis à les entendre, ils m’effraient
tout leur folklore épique est ainsi, dit le prêtre.
– Le diable seul saurait dire ce que les peuples expriment par leurs chants, dit le général; On peut fouiller et s’introduire facilement dans leur sol mais quant à pénétrer leur âme, ça jamais…… »
C’est donc encore un roman tragique, prenant.
J’ai préféré dans le genre tragique Avril brisé et dans le genre historique,La chronique de la cité de pierre avec le regard naif de l’enfant.j’ai eu du mal à rentrer dans l’histoire, je ne suis laissée emporter qu’après une centaine de pages.
Panorama sur la Riviera albanaise vu du col de Llogara (1000m)
Nous quittons Himarë sans petit -déjeuner : la dame grecque, si gentille les autres fois, sert tous les vieux messieurs, café ou raki (ou les deux) sans s’occuper de nous. Après avoir attendu 20 minutes, on se lasse et on part.
Après Vouno et Dhermi, la « plus belle plage de galets blancs » est à Palase. Une belle route la dessert, un projet immobilier est en cours de construction. Je n’ai plus aucun regret. La route monte en grands lacets vertigineux. En quelques kilomètres le dénivelé est plus de 1 000 m. Heureusement que le goudron est en bon état ! Nous avons à peine le temps de voir le paysage et nous sommes déjà au col où il y a une aire de décollage des parapentes . Un parapente attend le client. Un groupe descend d’un mini-van noir avec du matériel photographique impressionnant, un camping-car étiqueté « Presse » les accompagne ; Les journalistes italiens couvrent un rallye moto de Gibralta Racer que nous avons croisé à Vouno et à Dhermi.
Grand pin de Llogara
Après le col, nous entrons dans le Parc National de Llogara. Les arbres sont de taille impressionnante. Certains pins ont la silhouette de cèdres, on signale des pins noirs et des pins de Bosnie mais je ne sais pas les différencier.
Yaourt au miel et aux noix
Un café a installé quelques tables au dessus d’un virage. Nous y prenons (enfin !) le petit déjeuner. J’avais rêvé de café frappé, il n’y en a pas sur le menu, à la place macchiato et deux yaourts au iel et aux noix. Merveille ! le yaourt épais, compact, servi dans une coupe est nappé d’une épaisse couche de miel de cerneaux entiers ou concassés. C’est le domaine des apiculteurs. Les ruches sont très nombreuses. Chaque fois qu’une voiture peut s’arrêter, un vendeur propose des pots de miel de la propolis ou des bouquets séchés de sauge ou d’origan. L’origan atteint une belle taille de 30 cm.
Hôtel Alpin
Quelques km plus bas nous trouvons l’Hôtel Alpinà la façade blanche et aux volets verts. Au rez de chaussée les arcades sont fleuries de rosiers , au 1er étage les chambres s’ouvrent sur des balcons. Dans la toiture il y a des fenêtres carrées. Une cour pavée sert de parking. Sur le côté, une salle à manger d’été est rafraîchie par un ruisseau, des bassins et une fontaine. De beaux pins bien fournis isolent l’hôtel de la route assez passante.
L’accueil est très cordial. On nous offre la plus belle chambre avec le plus grand balcon. Il y a tout le confort , une belle salle d’eau, la télévision capte France 24, la climatisation n’est pas nécessaire en altitude. Le jeune serveur me recommande une promenade de 30 minutes jusqu’à un point de vue. Le sentier est facile, dallé par endroit. Aucun risque de se perdre. Il fait bon en sous bois. Je photographie plusieurs espèces de fleurs bleue ou mauves je reconnais une orchidée mais pas les grandes clochettes bleues. Les sauges de Jérusalem sont fleuries. Les liserons roses s’étendent partout. Les genévriers ont la taille d’arbre avec un vrai tronc.
Col Cesar
Au but de la promenade, le point de vue, le col de César, est dégagé sur Orikum et la baie de Vlorë encadrée par deux massifs montagneux. Le col de César rappelle les guerres entre César et Pompée. Deux Mamans et leurs petites filles se prennent en photo. Elles sont gaies, joyeuses désireuses d’essayer de pratiquer leur anglais. Je leur laisse de l’avance dans la descente pour profiter du calme e la montagne.
Pour déjeuner : des légumes grillés et une salade grecque.
L’hôtel a donné une carte du Parc de Llogara et de la région d’Orikum avec les descriptifs des visites et des promenades.la plupart des randonnées de montagne sont longues, plus de 4h et doivent se faire le matin. Il fait beaucoup trop chaud l’après midi. je sélectionne la plus courte d’une heure 1h30 à partir du village de Dukat. Du grand platane jusqu’à la Tour du DervicheAli. Dukat n’est pas dans le Parc National de Llogara qui englobe la forêt mais pas la campagne environnante. Les maisons s’étagent sur le versant est, le village est à 380m d’altitude, puis o n traverse la vallée du torrent Rhodina aux rochers ruiniformes, il y coule un peu d’eau. De la place du village, le sentier est bien balisé, il traverse le village par les arrière-cours et les jardins, les tonnelles et les figuiers s’accrochant aux murs en ruine. Un arbre à kaki (plaqueminier)dépasse d’un mur ; Des poules picorent près d’un tas de fumier. Les marques rouge et blanches me conduisent en dehors du village jusqu’à des tombes musulmanes puis ans la campagne, dans le torrent à sec. Distraite par le passage furtif d’un animal, un chien probablement. Je n’en mène pas large, perds les balises. Je monte dans le lit du torrent, arrive à la base d’un bois de pin. Le sentier disparaît, je rebrousse chemin. Si j’avais lu plus attentivement le topo-guide j’aurais descendu le torrent au lieu de monter.
La dame de l’Hôtel nous conseille de monter au col, à 19h30, précises. Ce nest pas un ban al coucher de soleil mais un spectacle inattendu. La montagne au dessus de Sarandë, Corfou émergent de la brume comme d’une légère mer de nuages. A nos pieds le nuage se forme, monte et s’effiloche. Les petites îles ont des contours précis, le bateau de croisière prend des teintes rosées. Spectacle saisissant et si difficile à photographier, évanescent, avec des couleurs opalines, sans contraste, fascinant !
La route SH8 est spectaculaire. Dès la sortie d’Himarë elle grimpe dans une garrigue odorante. Petit détour à la sortie d’Himarë par la plage deLivadhi, un camping, quelques hôtels.
Nous décidons de pousser jusqu’à Dhermi (au Nord ouest) et de visiter les plages sur le chemin du retour. La traversée du village de Vouno est en circulation alternée tant la rue est étroite. Les ânes stationnent devant les maisons.
Dhermi
Les plages sous Dhermi sont merveilleuses mais privées et très touristiques. Oserai-je me baigner au Drymades Beach : galets blancs, rochers sombres, côte très découpée, eau limpide turquoise mais parasols soignés et bar très chic. Je me lance à l’eau. C’est une baignade merveilleuse avec le sentiment que la plage est réservée aux clients de l’Hôtel situé plus haut. Les autres plages sont toutes sur le même modèle, un parking pour les clients, des installations sophistiquées, ..
Gyps
Gyps: le chemin qui mèneà la plage
Une belle route bordée de lampadaires, étroite mais avec des refuges pour se croiser, c’est trop beau pour être honnête. Qu’allons nous trouver ? Un parking sous un grand chêne, payant, 200lekë. La dame annonce une plage de rêve à 15 minutes de marche. Je pars sans eau, sans téléphone ni chapeau en sandales et robe de plage sur mon maillot. Le chemin est rugueux, il ne descend presque pas et se trouve en balcon très haut au dessus de l’eau. Je marche 25 minutes et enfin aperçois la plage qui est encore bien loin. C’est l’affaire d’une demi -journée si on veut profiter de la baignade et prendre son temps pour remonter tranquillement. Pas moyen de prévenir Dominique puisque je n’ai pas pris le téléphone .Je fais demi-tour sans m’approcher de Gyps qui a pourtant l’air merveilleuse, si attirante avec son canyon, échancrure dans des roches rouges piquetées de cyprès.
Jale
La plage de Jale est accessible en voiture. Nous nous y arrêtons pour nous baigner et déjeuner. Jale ne se montre pas sous son meilleur jour : des ouvriers travaillent à cimenter les trottoirs, des plagistes préparent les parasols de plage pour la saison qui commencera dans une dizaine de jours en juillet. Juillet c’est bientôt et rien n’est prêt ! Nous choisissons les lits de plage bleus. Il y a du vent, il fait bon. Autour de la plage, des constructions en ciments de couleurs criardes. Des gens passent avec des fruits frais ; j’achète un gobelet de framboises appétissantes. A peine ai-je sorti le porte-monnaie que surgit un gamin de 13/14 ans pour réclamer 500 lekë pour le parasol et les lits. Au lieu de donner un reçu, il file et donne le billet à des plus grands qui rigolent ouvertement de nous ; On s’est fait rouler !
calamars grillés
13h30, nous sommes seules à la taverne : tables carrées, chaises de bois, calamars grillés et makaronade de la mer. Au lieu d’un verre de vin blanc la serveuse apporte un pichet. Les calamars sont entiers, bien grillés ; les spaghettis sont aussi excellents avec la sauce tomate et persil. Ce serait un très bon repas si la serveuse n’avait pas cherché à nous arnaquer avec la monnaie. Nous rentrons contrariées. Dommage, on quittera Himarë avec cette impression.
Forteresse d’Ali Pacha à Porto Palermo construite par les français
« Nous allons raconter l’histoire d’Ali Tébélen, pacha de Janina, dont la longue résistance précède et amène la régénération de la Grèce… » annonce l’auteur dans la première page du livre
C’est une relecture, le personnage d’Ali Pacha de Ioanina m’a intriguée surtout en ce qui concerne la fascination qu’il a exercée sur Byron et l’influence des Souliotes, klephtes et Armatolis dans les guerres d’indépendance d la Grèce. Nombreux de ces combattants étaient albanais et Ali Pacha a joué sur les rivalités entre les différents pachas de l’Epire et de l’Albanie. Alexandre Dumas a fait la biographie d’Ali Pacha, faisant oeuvre de journaliste puis le personnage l’a inspiré dans l’écriture du Comte de Montechristo.
J’ai l’édition PHEBUS à la maison où l’oeuvre est présentée comme un recueil de propagande en faveur de l’Indépendance grecque mais
j’ai préféré télécharger une édition électronique pour notre voyage, qui passe tout près de Tépéléné – son lieu de naissance – et devant plusieurs forteresses d’Ali Pacha. Regroupé avec L’Homme au Masque de Fer, il est sous-titré Les crimes célèbres et si le nom d’Alexandre Dumas est en premier sur la couverture il est suivi d’Auguste Arnould et de Félicien Mallefille.
L’accent est mis sur les luttes du Pacha présenté plus comme un brigand que comme un chef d’état. Ali Pacha a utilisé les conquêtes napoléoniennes puis l’engagement anglais et enfin les luttes d’indépendances grecques, non pas pour bâtir en Epire un état mais surtout pour son enrichissement personnel. Il n’a aucun scrupule à trahir ses alliés ou sa parole. Sa vengeance est terrible et surtout personnelle. Il va s’acharner contre deux villes où sa mère et sa sœur ont été prisonnières et humiliées. Ses manigances vont lever contre lui les armées du Sultan mais il préfère temporiser, ruser sans jamais proclamer des velléités d’indépendance politique. Brigand de haut vol, mais pas révolutionnaire pour autant.
Grande animation au centre-ville ! On vote aujourd’hui .Depuis le début du séjour nous avons vu les banderoles et les affiches du parti à la rose rose-violet. Un très gros 4×4 porte une affiche de l’OSCE qui vérifie que les élections se passent bien. C’est frustrant d’être témoin d’un évènement politiaus et de ne comprendre ni les partis en présence ni les enjeux. A la télévision, lundi matin, nous apprendrons que le Parti Socialiste rose a largement emporté la majorité.
Kalimera !
Le petit déjeuner est servi au café en face. Je peux commander mon café. Les vieux messieurs discutent entre eux e grec ; Le plus vieux parle de Melbourne, je m’amuse à les écouter, j’oublie que nous sommes en Albanie et pas en Grèce. Le Supermarché vend de l’Ouzo et de l’eau minérale grecque, le sac plastique est aussi imprimé en grec.
Porto Palermo
Agave
Porto Palermo est la jolie baie entre Himarë et Barsh. Sur les pentes poussent des agaves merveilleusement verts. Une petite île reliée à la terre par un tombolo de sable renforcé par des roches porte une forteresse construite par Ali Pacha .Entre l’île et la colline une digue en ciment fait un petit port de pêche. Deux petites plages portent quelques parasols. A une extrémité, un peu en hauteur est installée une taverne que nous avons remarquée hier et où nous nous sommes promises de revenir La vue est parfaite, je prends mon temps pour dessiner le paysage. Dans la baie voisine, s’ouvre un curieux tunnel, une base secrète pour les sous marins ?
Tunnel? base navale?
La forteresse d’Ali Pacha est beaucoup plus petite que je ne l’imaginais de loin. La plaque à l’entrée est gravée en Grec « Ali Pacha construisit ce château en 1804 avec l’aide des ingénieurs français ». son plan est triangulaire, une tour à chaque sommet, au centre à l’intérieur une rotonde, en haut une terrasse triangulaire porte une petite maison à toit de lauze. Dans la rotonde, l’exposition raconte la vie d’Ali Pacha illustrée par des gravures d’époque avec un portrait de Lord Byron.
Ali Pacha est né en 1740 à Tépéléné
1798 -1812 , profitant des guerres napoléonienne, il met sous sa coupe les pachas de la région
1812 – 1817 Alliance avec les féodaux contre la sublime Porte , relation du Pacha avec les grandes puissances
1821 Ali Pacha est assassiné à Ioaninna
Ce n’et pas la seule forteresse d’Ali Pacha, nous en avons vu une autre en face de Butrint
Barsh
petite plage de Porto Palermo
Les petites plages de Porto Palermo sont très mignonnes mais nous préférons retourner à Barsh sur « notre » plage. Les « baigneurs du dimanche » que nous redoutions ne sont pas au rendez vous ; Ils sont restés avec les élections. Nous sommes pratiquement seules sur la plage en dehors d’une famille qui était déjà là hier. Pour déjeuner, un bar (sea-bass) et des légumes grillés courgettes aubergines poivrons tomates avec un trait de vinaigre balsamique pour le décor et le goût. Le pain est aussi servi légèrement grillé avec de l’huile d’olive et du thym.comme il n’y a que nous au restaurant le barman choisit l’accompagnement musical qui devrait nous plaire : musique cubaine.
Nous restons jusqu’à 16h à profiter de la plage, rien que pour nous. Episode tragique : on a fait prendre un bain au bébé-chien, sans doute pour le rafraîchir. Il s’est noyé. Après des efforts de secourisme les gens du restaurant sont arrivés à le ranimer. Tout le monde était secoué.
Qeparo
une vache dans les rues de Qeparo
Qeparo est un village perché haut dans la colline. La petite route est très escarpée mais surtout très étroite et sinueuse carrossable, elle est cimentée. Si on devait croiser un véhicule la marche arrière serait bien périlleuse. Comme c’est l’heure de la sieste nous ne rencontrons qu’une seule voiture juste avant l’arrivée au village. Au retour, on laissera filer une grosse Mercedes. Les Albanais apprécient ces très grosses et très vieilles voitures, comment manœuvrer de tels tanks ? Il faut être albanais.
Qeparo : lauriers roses
Le village est encore habité, même si accéder est un exploit pour nous. Une vieille dame qui tricote devant sa porte me demande « Pou pais ? », il me parait normal de lui répondre en grec. Les porches des maisons sont encadrés d’un bel arc roman en pierre calcaire taillée soigneusement. Les murs en moellons plus grossiers sont badigeonnés de chaux ; les lauriers roses sont magnifiques. Tous les bords de la route en sont fleuris.
De retour à Himarë je réalise le projet de m’installer à la terrasse d’un beau café pour écrire ; je commande un café frappé avec du sucre et du lait (il ne faut se priver de rien) , il arrive dans un verre XXL, la mousse onctueuse ne retombe pas. Il est parfait. Quand Dominique arrive pour le dîner, je n’ai pas faim du tout. Le café frappé à 19h30 n’était pas une bonne idée. On renonce donc au restaurant et s’assoit sur un banc sur la promenade regarder les étoiles et surtout les reflets des lumières sur l’eau du port.
La route longe la côte de la Riviera albanaise. Premier détour à Kakomë suivant un panneau « monastère », la route est large, bien goudronnée mais elle est barrée par un portail fermé. au bout, une très jolie baie. Interdite ? Pourquoi ? Des carcasses de béton abandonnées suggèrent une opération immobilière mais peut être autre chose ; Le café du gardien est encore sur la table, preuve que le site est surveillé. J’emprunte allègrement un chemin de terre et découvre le monastère de Kakomé fleuri de lauriers roses ? Il me faut passer devant un alignement de ruches et une bergerie. Je n’ai pas peur des abeilles mais qui dit bergerie, dit chiens….
Les chèvres sur la route
Le troupeau occupe la route, il y a des centaines de chèvres : vison du Tour de France en peloton serré. Sauf que les chèvres ne sont pas pressées, elles grignotent debout grignotant des branches à plus de 2 m de haut sur les arbres au bord de la route.
On se rapproche de la mer à Lekovë, de la route nous voyons deux jolies plages, une petite séparée de la grande par une butte surmontée par une chapelle blanche à la coupole bleue. On se croirait en Grèce. La route qui descend du village de Lekovë serpente dans maquis. Première baignade dans une eau tiède et limpide.
La seconde sera sur la plage de Barshi , le village est en hauteur sous une citadelle qui coiffe la colline. Bien qu’il fasse partie des « villages perchés à visiter » nous le négligeons pour nous précipiter à la plage que nous parcourons dans toute sa longueur avant d’élire « Luna Mare » tout neuf avec un joli restaurant s encadrées de claustras en bois clair et tables assorties, une estrade de bois recevra en saison des musiciens et sur la plage, des parasols de paille avec des lits de bois classiques mais aussi d’énormes coussins de billes, rouge, orange ou beige, tout neufs. Ces lits de plage, version coussins sont très confortable, on peut s’y nicher, s’y coucher, lire mais ils ne sont pas adaptés au service d’un repas chaud et impossible pour moi, d’écrire. Prétexte commode pour retarder l’écriture du Journal de bord – après trois semaines assidue, j’ai un coup de mou – je préfère la lecture de F. Maspéro dans Balkans-Transit que j’ai lu à l’occasion du voyage en Bulgarie et que j’ai téléchargé dans la liseuse pour une seconde lecture.
La baignade est idéale, la limpidité de l’eau est extraordinaire, elle est fraîche mais pas trop. Trois bouées jaunes balisent mon parcours. J’aime bien donner des objectifs à mes trempettes. C’est donc une très belle journée de plage 500 lekë pour un parasol et deux lits. Au restaurant il y a du calamar : grillé entier pour Dominique, excellents et risotto-calamar, je suis un peu déçue j’attendais d’autres fruits de mer en accompagnement. Le risotto est très bon ils n’ont pas lésiné sur le caciocavallo.
Riviera albanaise
Vers 16h, après deux chapitres de Balkans-transit et de nombreuses trempettes nous reprenons la route pour découvrir notre Hôtel à Himarë. Himarëest plutôt un village et une petite station balnéaire(cela change de Sarandë) . Personne n’a entendu parler de l’Hôtel British ni chez les marchandes des petits markets assises, devant leur étal de bouées, serviettes et maillots de bain, ni dans les restaurants. On sillonne la ville en voiture, puis à pied. Je finis par trouver : bâtisse d’un étage, rouge sang (couleur maison des cantonniers en Italie). La réception dans l’entrée est un comptoir bas et un banc en skaï, notre hôtesse, en bermuda, ne fait aps très « pro ». Elle note ses réservations sur un cahier au stylo à bille. L’informatique est pourtant arrivée jusqu’à l’entrée (il y a une boutique d’opérateur téléphonique dans la maison) mais pas la Wifi dans la chambre.
Notre chambre est à l’étage, avec la mezzanine on pourrait coucher à 6, la salle d’eau a des carreaux violets une douche sans rideau. Le frigo est efficace. La télévision ne capte que les chaines albanaises, avec des efforts, peut être grecques…Le climatiseur est débranché. La dame fait des acrobaties pour la brancher, mais la télécommande est capricieuse. Seule originalité : une belle terrasses pour étendre le linge, il fait très chaud, la lessive est un plaisir.
« Sleeping pause », Himarë ne s’éveille qu’après 19h. Notre hôtel est très bien situé presque sur la promenade, où sont installées les terrasses des cafés, restaurants, « fast-food grecs » avec gyros et souvlakis, des pizzerias, un glacier le long de la belle plage Spilé qu’il faut prononcer à la grecque et non à l’anglaise « spail » jusqu’à ce j’arrive à la grotte (spilé) . Elle a été découverte par des archéologues, son occupation est antérieure au Néolithique. La légende locale dit même qu’il s’agirait de la Grotte de Polyphème. Corfou est tout près, Céphalonie et Ithaque ne sont pas loin , nous sommes en pleine Odyssée !
Dans les cafés on parle grec. Boit-on du raki comme les Albanais ou de l’Ouzo ? Il y a même une place Omonia comme à Athènes. Les agences de voyage vendent des tickets pour Athènes, Corinthe en autobus.
Nous dînons à la pizzeria Sol e Mar en regardant passer les familles avec les poussettes, les vieux et leurs cannes, jeunes gens et jeunes filles. Himarë est une station familiale loin du tourisme de masse international. Affirmation qu’il convient de nuancer : les plaques d’immatriculation des voitures sont serbes, albanaises, grecques ou kosovares, touristes balkaniques que je n’arrive pas à différencier des habitants.