Catarina, jeune musicologue mène une enquête savante à la suite de la découverte de deux malles ayant appartenu à un musicien vénitien du 18ème siècle. Sujet intéressant. D’autant plus que le musicien a vraiment composé et que j’ai pu accompagner cette lecture de ses œuvres (trouvées sur Deezer).Le musicien était aussi un diplomate et un abbé…La recherche du contexte historique est très instructive.
Mais l’enquête traîne, la documentaliste mange des barres chocolatées dans la vénérable bibliothèque Marciana (sacrilège!) – j’aimais mieux la cuisine élaborée de Paola avec les recettes et ingrédients.
Remplissage: la chercheuse « clique sur Envoyer » à la fin de chaque mail. Le flirt avec le trop bien habillé avocat n’a aucun intérêt. Je m’ennuie. j’ai envie de connaître la fin mais cela traîne.
Enfin! surprise, le dénouement est curieux, mais bien artificiel.
1711-1715 la république de Venise nomme Sagredo, gouverneur de Morée. Il s’installe à Nauplie et se consacre à la construction d’un fort imprenable. L’architecte Lassalle est chargé des travaux.
Sagredo tient son journal pendant ces années.
Occasion de retourner à Nauplie, de chevaucher jusqu’à Corinthe, dans un Péloponnèse – en apparence – pacifié.
Occasion surtout de rêver à Venise, ses vénérables palazzi, ses bals maqués, les bouches de lions pour les lettres de dénonciation, de se pencher sur la politique subtile et parfois retorse de la Serenissime.
Le gouverneur se livre, sans se découvrir, se méfie autant des Vénitiens que des Grecs ou des Turcs. Prudence diplomatique, défiance, les échanges avec la population locale sont réduits à l’achat de marbre auprès d’un entrepreneur complaisant, ou service d’un ancien pirate gracié devenu le domestique du gouverneur.
Sagrédo nommera son fort Palamède et nous livre une évocation de ce héros mythologique. Réussira-t-il à édifier la chapelle, touche personnelle qui signera son oeuvre ajoutée aux fortifications de Lassalle?
…. »Je suis byzantine. Cela veut dire que je suis à la fois sophistiquée et barbare. »
déclare Zoé, figure principale de l’intrigue.
« C’est Byzance! »Synonyme de richesse et d’abondance. En ce sens ce roman de 975 pages est sur-abondant. Gros pavé. Riche de reconstitutions historiques de décors exotiques. Les héros nous promènent à Constantinople où se déroule la majeure partie de l’action, mais aussi à Rome, à Venise, Palerme, Jérusalem et même à Sainte Catherine du Sinaï.
Byzantine, l’intrigue compliquée que devra dénouer la narratrice, médecin. Constantinople encore dévastée par la IVème Croisade de 1204, se remet à peine de ses ruines 70 ans plus tard. Les familles impériales, Comnène, Lascaris, Cantacuzène, contestent l’autorité de Michel Paléologue. Les complots et les vengeances se succèdent : poisons et poignards utilisés avec cynisme et cruauté.
prise de Constantinople - fresque roumaine
Byzantines encore les implications religieuses, querelle du Filioque, adoration de l’icône de la Vierge miraculeuse protégeant la ville. Michel Paléologue craignant une nouvelle croisade avec des exactions des Latins, choisit de faire alliance avec le Pape pour se protéger des ambitions de Charles d’Anjou, Roi de Sicile. L’orthodoxie se sent menacée.
Byzantines encore la sophistication des amours, l’intervention des eunuques, la confusion des sexes et des genres.
Constantinople est à la frontière des puissances orientales , la Horde d’Or, les Seldjoukides, les Arabes …Rempart de la chrétienté? ou Carrefour des influences orientales?
C’est donc un roman historique très dépaysant qui raconte une période passionnante pendant que six papes se succèdent à Rome, faisant et défaisant les alliances, trois doges à Venise, s’achevant avec les Vêpres siciliennes qui remettent en question les rapports de force.
Cependant, dans cette abondance de reconstitutions historiques, le propos se dilue un peu. Roman choral où tantôt la narratrice-médecin byzantine, laisse la parole, aux légats du pape, ou à l’envoyé du doge de Venise. On perd de vue l’intrigue qui doit être élucidée : le bannissement de Justinien Lascaris.
J’ai été toujours intéressée par l’histoire, mais pas tout à fait séduite. Il manque la pointe d’épice, le « je-ne-sais-quoi » qui fait qu’on y croit vraiment, et qui fait la différence entre un Roman Historique et un grand roman.
Ce n’est pas la Venise des Palais, ni celle des gondoles, des marbres…c’est celle des pêcheurs, des barques et des filets, du casone où l’on range les nasses et où l’on fait griller le poisson.
D’ailleurs, ce n’est pas Venise mais Chioggia qui a aussi ses ponts vénitiens, ses quais, sa lagune. On ne croise pas de masques de carnaval, mais des lanternes de papier qui flottent, en l’honneur du Poète chinois. On y croise des gens simples, des migrants chinois, des pêcheurs à la retraite qui viennent passer la soirée au bar, boire la grappa, le caffe corretto, ou le ballon de blanc ou de rouge. Sauf que la serveuse est chinoise. Et que de ces gens-là on se méfie…on parle, on médit. Pas Bepi, le poète qui rimaille en Italien, mais qui boit sa prune, en Yougoslave qu’il était.
D’abord, l’occasion de faire la visite en compagnie de 2 blogueurs amis que je n’avais jamais rencontrés. C’est quand même plus chaleureux que les commentaires, même s’ils sont fréquents et amicaux! Échanger devant un tableau, c’est plus enrichissant que sur le net! surtout quand on a un spécialiste de l’huile, moi qui ne connaissais rien aux couches et glacis….
Plusieurs longues minutes devant une gravure de Venise en 1500! Nous arrivons à reconstituer nos itinéraires de vacances récentes!
Cima (1459-1517)de Conegliano dans les Dolomites est moins célèbre que Carpaccio ou que Bellini ou Giorgione, les maîtres vénitiens les plus connus. C’est donc une découverte que nous offre cette exposition!
La première salle est dominée par un grand tableau de 1489 La Vierge à l’Enfant en trône entre St Jérôme et St Jacques : trône de marbre sous un arc formé par une tonnelle de vigne et chaque côté, des orangers modèrent un peu la solennité et la symétrie parfaite du tableau.
Cima vierge et l'enfant bologne
Plusieurs tableaux plus petits sont des variations sur le thème de la Vierge et l’enfant, Vierge très mélancoliques, enfants tout à fait adorables. Ma préférée est celle de 1494 exposée à Bologne. Déjà, perfection de la technique, mais je ne suis pas technicienne, mon esprit s’égare dans le souvenir d’une nouvelle de Stefan Zweig » les Prodiges de la vie » dans le recueil « L’Amour d’Erika Ewald« où un peintre cherche longtemps l’inspiratrice de la Vierge dans Anvers des guerres de Religion, la trouve en une jeune Juive et métamorphose la jeune fille en lui faisant asseoir l’enfant sur ses genoux. La tristesse de l’expression des Vierges de Cima m’a tout de suite fait penser à cette nouvelle.
lamentation sur le Christ
Les Lamentations sur le Christ est un tout à fait frappant d’expressivité. la douleur de la mère est palpable. Cima a représenté Marie vieillie, inconsolable malgré la présence des deux femmes qui l’entourent. En plus des visages la variété des couleurs des costumes en font un tableau remarquable.
Saint Sébastien et Saint Roch faisaient partie d’un triptyque, ils sont pourtant très différent. Saint Roch réaliste tandis que Saint Sébastien au corps marmoréen malgré la flèche qui transperce sa cuisse a le visage complètement détaché, déjà ailleurs? Les paysages en arrière-plan sont merveilleux. Ce n’est pas pour rien que la présentation numérique de l’exposition est sous-titrée : La Poésie d’un Peintre , Paysages et Visages à la Loupe. Francis nous fait remarquer les couches successives d’huile pour obtenir une telle transparence. Transparence et lumière extraordinaire dans une tête de Christ couronné d’épines!
Cima ne s’est pas cantonné à des sujets religieux. Des coffres de mariages montrent aussi des sujets mythologiques dont l’un racontant Thésée m’a bien amusée.
Pour les explications des spécialistes, le parcours numérique du Musée du Luxembourg est passionnant.
Film très vénitien, jouant merveilleusement bien du décor naturel de Venise, recréant aussi des peintures vénitiennes dans les intérieurs, plaisir des yeux.
Al Pacino est Shylock, très convainquant, poignant même. Sa présence sauve l’oeuvre d’accusation d’antisémitisme. Mention spéciale à Portia, Lynn Collins, blonde vénitienne, belle et astucieuse à souhait.
Toutefois, si l’adaptation est fidèle dans l’ensemble, je n’ai pas retrouvé la verve de Shakespeare dans certaines scènes mineures comme le dialogue entre Bassanio et Antonio qui m’avait étonné. Le caractère de Lancelot est effacé. La richesse de Shakespeare est aussi sa capacité à changer de registre de langage, à faire côtoyer gens du peuple, serviteurs et nobles seigneurs.
J’avais gardé un excellent souvenir de la Première Gorgée de Bière et autres Plaisirs Minuscules. Quand Claudialucia a publié un article je me suis précipitée à la bibliothèque pour emprunter ce livre ! mais peut être faut-il savourer cet excellent billet après avoir lu le livre?
Le court roman s’ouvre sur la description d’un tableau trouvé dans une brocante : allusions à Matisse et à Marie Laurencin. Quel rapport avec Venise ? Le narrateur est critique pictural, le tableau le tente mais il laisse passer l’occasion. C’est une italienne de passage à Paris qui l’achètera.
Un si joli petit livrel’expression pourrait qualifier La Bulle de Tiepolo ou plutôt la Première Gorgée ; c’est le livre (à succès) Granité Café, allusion transparente à cet ouvrage de Delerm? Dédoublement de l’écrivain ? L’auteur est la jeune femme qui a emporté le tableau. Antoine Stalin travaille à une biographie de Vuillard.
Un autre tableau est prétexte à l’enquête à Venise : Le Nouveau Monde de Tiepolo. Le critique part-il dans l’espoir d’y retrouver l’écrivaine ? Il prend pension à l’hôtel Felice que tient la mère de cette dernière. Est-ce un roman d’amourou une double enquête picturale?Il y a décidément beaucoup de doubles dans ce court ouvrage qui se révèle très dense.(Double Tiepolo pour l’ignorante qui croyait connaître l’artiste ! Non le peintre du Nouveau Monde c’est Giandomenico ! Le Tiepolo que je connaissais était son père Gianbattista).
Vraie rencontre, amour avorté, complicité dans leur quête qui s’écarte de Venise pour aller à Vicence visiter une villa décorée d’une autre fresque du Nouveau Monde qui donnera la clé du mystère qui a piégé le narrateur. Les deux complices s’embarqueront sur le vaporetto pour les îles de la lagune à Burano où se résoudra la deuxième enquête. Pénible découverte : le drame du grand père d’Ornella coupable (ou non) de la déportation de six cent cinquante juifs à Auschwitz. Pourquoi Venise est-elle , pour moi inséparable du Ghetto ?
Le roman avait commencé légèrement. Roman ou nouvelle m’étais-je demandé ? Futiles recherches érudites. Au fur et à mesure de la lecture, il gagne en densité et en gravité.
Se fixe à une livre de votre belle chair à découper et prendre
En la partie de votre corps qu’il me plaira
MARY MC CARTHY / EN OBSERVANT VENISE
Ce sont ces mots « une livre de chair » que Mary Mc Carthy choisit pour raconter non seulement l’histoire du Ghetto de Venise mais aussi l’essor du Capitalisme à Venise et fait un parallèle étonnant entre l’antisémitisme qui assimile juif et usurier,personnifié par Shylock et la vague de répulsion culminant avec la Ligue de Cambrai au début du 16ème siècle unissant toute l’Europe contre Venise. Elle écrit : « on leur(les Vénitiens)attribuait une ambition sansa limite; ils étaient accusés de charcher à dominer le monde, ce qui semble avoir été bien loin de leurs intention….les termes du Pacte de Cambrai , signé par la plupart des puissances de la chrétienté…est un exemple d’hystérie collective , organisée par un politicien aventurier – l’empereur Maximilien en l’occurrence. » Une véritable guerre sainte fut livrée contre Venise. Le pape Jules II prononça l’interdit contre Venise.
« Les Vénitiens étaient haïs à peu près comme étaient haïs les Juifs… ils étaient haïs, jalouséset le savaient. C’étaient des gens à part… »
Il existait, selon elle, un lien subtil entre les Juifs et ls Vénitiens. Les Juifs avait le droit de constituer des banques de prêt. Les autorités interdisaient qu’ont persécutât les Juifs . Si la République tolérait les Juifs, elle ne le faisait pas gratuitement; Le Ghetto était une invention vénitienne, destiné à contrôler les Juifs et à profiter d’eux. La loi interdisant aux Juifs de posséder de la terre la République louait le Ghetto en augmentant régulièrement le loyer. Les immeubles grandisssaient en étages.
Un policier historique agréable et facile à lire, et même très instructif
Prologue : Pucci, orpheline confiée au couvent des ursulines de Vicence résout l’énigme des reliques volées.
Premier Acte : Leonora Agnela Immacolata (surnommée Pucci) est retirée du couvent pour faire un beau mariage à Venise. L’incarcération du père de la fiancéeaux Plombs va contrarierce projet
Deuxième acte : Leonora ne se laisse pas abattre et cherche à savoir de quoi son récent « père » est accusé….
Je ne résumerai pas plus loin l’intrigue et ses nombreuses péripéties pour ne pas altérer le suspense d’une part, ensuite parce que ce serait beaucoup trop compliqué…Leonora ne manque ni d’astuce ni de courage et sa bourse est bien remplie pour acheter valets, barcarols, huissiers mais aussi tous ceux qui tenteraient de l’arrêter. Le courtisan qu’elle a recruté est également très bien renseigné.
Mais Leonora « ne connaît pas Venise ».
Nous non plus !
Cela tombe bien. Nous allons nous instruireaux coutumes singulières de la Dominante et nous promener pour assister au curetage des canaux de Cannoregio, au commerce de contrebande de dentelle, aux rénovations interminables (déjà à cette époque) d’une église à l’élection d’un doge et aux intrigues qui la précède, à un jugement de la Quarantie et du conseil des Dix ; à la Sensa et au Carnaval…..
Lecture passionnante pour celle qui revient tout juste de Venise et qui a encore bien présents à l’esprit les décors.
Si les Mystères de Venise, et surtout la naissance de Leonora s’éclaircissent au 5ème acte, un dernier mystère reste irrésolu : qui est donc cet auteur qui signe Loredan, les mystères de Venise et dont trois volumes sont déjà parus ? Pas d’indication de traduction, ce Loredan écrit donc en Français ! Je googlise sans résultat : Loredan fut un doge de Venise, cela ne m’étonne pas : déjà dans le roman le doge était un Loredan. Loredan renvoie aussi à des ouvrages de science fiction ou de BD, lien avec Corto Maltèse…
La gare de Bercy ne ressemble pas aux autres gares parisiennes. Seulement 4 trains sont programmés ce soir, le premier pour Rome, 2 TER pour Nevers et Avallon, et le Stendhal pour Venise 20h33. Inutile d’arriver des heures à l’avance comme pour l’avion. On s’installe comme dans n’importe quel train. C’est un train italien.6 Bouteilles d’eau frizzante attendent dans chaque compartiment, délicate attention.
Stendhal est un traînard qui s’arrête avant même d’avoir atteint le Carrefour Pompadour.
Je suis très joyeuse de prendre le train. C’est un acte militant mais pas seulement. Partir et arriver en centre ville est un avantage. Le prix est comparable à celui des avion Low cost (35€ pour le Prems, 51€ pour notre billet). Le train de nuit économise une nuit d’hôtel, les taxis des transferts, et surtout,est très reposant.
Le monde entier se retrouve à bord : beaucoup d’Asiatiques des étudiants japonais, coréens ou chinois qui ont sans doute un pass inter-rail pour toute l’Europe, des familles indiennes, des Italiens, des Africains….Dans l’avion, tout le monde se bat pour avoir un hublot, poser ses bagages à main dans les casiers. Dans notre compartiment s’établit une certaine intimité, on s’aide pour hisser les sacs, installer les couchettes. On échange la couchette du bas d’une étudiante coréenne pourcelle du milieu. J’offre des cerises. Un monsieur alpiniste ou randonneur (sac d’alpiniste, bâtons) qui descendra à Brescia tente de lier connaissance.
Coucher de soleil sur Montereau et la Roche Migennes.
Vu du train
6h30, Milano Centrale, jour blafard, l’arrêt se prolonge. J’ai dormi 8h30, mieux qu’à la maison bercée par le mouvement du train. Je recommande les couchettes aux insomniaques (se munir de bouchons d’oreilles et d’un masque en tissu). Milan : tissu urbain très serré. Seuls éléments pittoresques : de grandes bâches vertes pendant devant fenêtres et balcons. Campagne plate et verte, les maïs sont très hauts.
Brescia, sous la pluie battante. Les crêtes des Alpes ont disparu dans les nuages.la campagne est inondée. Verrons-nous Venise sous l’orage ? Le temps s’améliore juste avant les lacs : paysages somptueux. Des crêtes très déchiquetées se détachent sur un ciel rose, clochers pointus et cyprès se reflètent dans un miroir argenté. Vision fugace. Entre Peschiara del Garda et Vérone, les cimes nous accompagnent. Brusquement nous entrons dans la lagune. Sans prévenir, à Maghera toute une flottille de barques à moteur accompagne le train chargée de ciment ou d’autres marchandises. Les cheminées des usines de Mestre puis les gros ferries apparaissent. Le train court sur une digue.