Naples souterraine

CARNET NAPOLITAIN/ 8 JOURS EN JUILLET 2005

Pour déjeuner, une pizza et moi, une livre d’abricots que nous avons à peine le temps d’avaler : la visite de Naples Souterraine commence à 14heures.
Je ne sais pourquoi cette visite est celle que j’ai le plus désirée. Le guide est français, nous sommes trois, un français, sa copine napolitaine et moi,  descendons par un bel escalier aux marches basses, presque une rampe, et arrivons dans les carrières de tufo, roche très cohérente. Les salles sont très hautes avec des piliers naturels en pyramides inversées.

Naples est creuse, comme Paris, d’ailleurs, Les Grecs, les premiers, ont utilisé cette roche légère et très résistante à la compression, facile à tailler. Seul défaut, elle est poreuse. C’est une roche volcanique, grise assez claire, comparable à la pierre de Volvic. Après les Grecs, les Romains tirèrent parti du réseau des carrières pour faire passer l’aqueduc apportant à la ville l’eau venant des pentes du Vésuve ou plutôt de la Somma où se trouvent les sources. Cet aqueduc était encore fonctionnel au 19ème siècle.

L’épidémie de choléra des années 1880 causa sa fermeture. Les Napolitains utilisèrent cet espace comme décharge. Les souterrains furent à nouveau mis en service comme abris antiaériens pendant la 2ème Guerre Mondiale. Il suffit alors de concasser les débris, de rajouter de la terre et de tasser les gravats qui remplissaient 5m d’épaisseur. On chaula les parois  pour désinfecter et on installa l’électricité. On combla aussi les puits en coulant du ciment et on maçonna des escaliers d’accès.
Nous marchons sur ce sol de 1942. Plus loin, sur la muraille réapparaissent les traces de l’enduit romain qui imperméabilisait la roche poreuse : mélange de poudre de roche, d’huile végétale, de ciment à la teinte rouge  Au dessus une sorte de trottoir pour le passage des puisatiers. Dans les étroites galeries, des trous dans la paroi pour les pieds des puisatiers de part et d’autre du couloir. Ils devaient être petits : le plafond est bas. Ils devaient également être agiles pour remonter par les puits en mettant les pieds dans des encoches. Le puisatier a inspiré un personnage de légende napolitain : le « petit moine » qui s’introduisait dans les maisons soit pour voler soit pour faire des cadeaux ou encore pour séduire les femmes.
Il fait frais, très calme et humide. Un aqueduc virtuel a été reconstitué : une salle a été remise en eau. Pour y accéder, on se munit d’un bougeoir et on passe par un très étroit boyau. Le puisatier aurait utilisé les encoches, nous marchons sur un sol égal. Nous découvrons une eau verte. D’un puits, descend une jarre de terracotta. D’autres amphores complètent le décor. Je suis émerveillée. Bien sûr, rien de comparable avec les citernes d’Istanbul avec leur forêt de colonnes. Le contraste entre la ville bruyante écrasée de chaleur et la paix et la fraîcheur qui règnent ici est le même.

Théâtre romain

Un théâtre romain a été découvert depuis peu dans les caves des maisons du quartier derrière la place San Gaetano sous l’énorme église qui elle-même utilisait les colonnes du temple des Dioscures. On  ouvre une porte d’un logement en rez de chaussée encore habité il y a quelques années. Les habitants sont partis mais ont laissé leurs meubles : un buffet, une vieille télé des années 60 avec son écran bombé sous sa vitre, des lits au cadre de bois sculpté. On tire un lit, monte le bois de la trappe et on découvre l’escalier qui menait à la cave en maçonnerie romain. C’est un des couloirs qui menait à la scène. Jérémie, le guide nous montre l’appareil romain : le premier système antisismique : la fine brique romaine forme une sorte de cadre. Les vides sont remplis de ce qui ressemble à des pavés carrés. Ce ne sont pas des cubes mais des cônes pointus. La différence des matériaux, les ruptures absorbait les ondes sismiques. En effet, malgré les importants séismes, rien n’a bougé. On ne voit pas une fissure. Au dessus de ces galeries romaines tout un quartier vit, ignorant qu’il se trouve « dans le théâtre ». Celui-ci est quand même visible de l’extérieur. Les rues sont traversées de hauts contreforts de briques qui arrivent au 3ème étage ce qui donne une idée de l’ampleur de cet édifice.

San Lorenzo

La visite terminée, je visite l’église San Lorenzo : énorme façade baroque peinte en jaune ornée de personnages géants. Les chapelles abritent des trésors. Mais je suis un peu distraite.
Je rentre par des ruelles qui paraissent moyenâgeuses ; sans doute, le plan des rues est encore plus antique. Malgré l’étroitesse des ruelles, il est relativement facile d’avancer droit. Je débouche Place Cavour en un petit quart d’heure.

Nous avions prévu une courte visite au Musée Archéologique tout proche. Je pensais y avoir un accès permanent avec l’Artecard. Cette dernière ne donne visite qu’à une seule visite gratuite qu’on nous déconseille. Les collections les plus intéressantes sont fermées. Nous reviendrons un autre jour !
La belle Galerie Principe vitrée nous attire. Elle paraît abandonnée aujourd’hui, des bureaux vides le week end. Nous nous retrouvons à l’arrière du bâtiment des Beaux Arts dans une rue piétonnière qui conduit à la place Dante, une des places monumentales de Naples. .Sur la place : une structure gonflable, une sono, une animation bruyante. Des enfants dansent sur une musique stridente, guidés par une animatrice hurlante. Nous fuyons sans un seul regard pour les bâtiments pompeux.
Nous retrouvons les rues parcourues ce matin. Mais, tout est fermé : les belles librairies ont fermé les volets. Seuls restent ouverts les commerces d’alimentation. Il n’y a personne dans les rues. Nous nous asseyons à l’arrière de la nef de Santa Chiara ; un mariage se déroule. Il est trop tard pour visiter le cloître. Nous terminons la promenade au hasard. J’arrive dans le quartier du Port et retrouve la circulation, la vie moderne, les soldes sur le Corso Umberto 1er bordant les quartiers antiques. Je longe les grands bâtiments de l’université retrouve San Gaetano par les ruelles. Les santons et les crèches sont  rangés.

Environs de Naples – Amphithéâtre de Pouzzoles

CARNET NAPOLITAIN/ 8 JOURS EN JUILLET 2005


L’Amphithéâtre de Pouzzoles, est  le 3ème par la taille, après le Colisée et celui de Capoue. Cette visite est la suite logique de celle du Théâtre romain enfoui dans Naples souterraine.

Ici, les gradins sont bien visibles. Le plus impressionnant : les souterrains et les couloirs où se trouvaient les cages des fauves, les loges des gladiateurs et toute la machinerie.

L’amphithéâtre romain est très différent des théâtres grecs que nous connaissons bien adossés à une montagne et utilisant la topographie naturelle. Celui-ci est entièrement construit de brique et de petites pierres en opus reticulatum (l’appareil en cônes à base carrée que j’ai observé hier dans les souterrains). Encore une fois j’admire les qualités parasismiques dans cette région de bradyséisme. Construire un édifice de cette taille et le conserver en parfait état témoigne de ces qualités. Nous cherchons longtemps l’entrée des souterrains.

On entend des voix venant de dessous la scène. Nous faisons presque le tour du théâtre. Des énormes arcades qui soutiennent les gradins abritent des couloirs qui, alternativement mènent au niveau supérieur ou inférieur par des escaliers qui montent et descendent. Nous imaginons dans ces couloirs les entrées du public en toge, les gladiateurs. Finalement, nous découvrons le passage vers les souterrains. La lumière tamisée par les grilles projette de fines rayures sur les volumes évidés qui s’emboîtent, les arcs de cercle, les voûtes, les contreforts. J’espère que les photos seront réussies. Un souvenir me revient ; les énormes greniers de Mekhnès!

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Environs de Naples – pique-nique à Baia

Baia : château aragonais et au loin, le Vésuve

CARNET NAPOLITAIN/ 8 JOURS EN JUILLET 2005

Le bus pour Baia, tarde. Il fait chaud.  Pourtant je trouve que nous nous sommes drôlement bien débrouillées avec les transports en commun jusqu’à présent. En dehors de l’erreur de parcours, nous avons trouvé les sites sans galérer et les autobus sans attendre. Nous avons faim aussi. Dans la vitrine d’une tavola calda on vend des arancini bien appétissants ; nous ne sommes pas les seules à les convoiter.

13h30, le bus nous dépose sur une placette à Baia en face de l’escalier qui monte aux thermes. Nous préférons le port et les bateaux qui conduisent aux villas submergées. Baia était un lieu de villégiature très chic pour l’aristocratie romaine qui a bâti de véritables palais.

Bradyséisme ? une partie de la station balnéaire antique s’est retrouvée noyée dans le golfe. Des fouilles récentes ont permis d’explorer les ruines en plongée. L’excursion en bateau à fond de verre coûte 15€  et part à 15h30 .Il faut donc attendre.

Le port est très joli : une marina de taille raisonnable, pas de voitures et surtout une vue extraordinaire sur le Vésuve tous les caps îles et rochers qui plongent dans le golfe. Deux ou trois restaurants chic ont installé des tables à l’ombre de stores, sur de petites terrasses : les tables d’une pizzeria et d’une gelateria. Malheureusement, le soleil de midi cogne dur, il n’y  pas un coin d’ombre même pas sous les grues du petit chantier naval.

Nous pique-niquons dans la « villa communale » un peu pelée, à l’herbe jaunie parsemée de crottes de chien, sur des bancs à l’ombre. Un palmier en occupe le centre. De vieux pins aux branches contournées encadrent le château aragonais.

L’attente  ne me déplait pas. J’ai l’occasion de dessiner. L’étude des pins noueux m’occupe, je suis plus maladroite pour la forteresse perchée sur la colline de guingois surmontée de constructions postérieures en équilibre bizarre, comme posée de travers. J’aimerais terminer mon dessin, faire également un croquis de la baie.

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Naples – Musée archéologique

CARNET NAPOLITAIN/ 8 JOURS EN JUILLET 2005

Manger à Pompéi !

Une exposition  est consacrée aux aliments et à l’alimentation à Pompéi. Un triclinium est meublé d’épais coussins recouvrant les banquettes mais pas de table. Les murs sont peints de rouge avec de petits paysages à la place des fenêtres. Des panneaux très modernes expliquent comment on apprêtait les repas, les herbes le garum, les différents poissons…

On a aussi reconstitué une échoppe à bière ou à vin. La décoration murale est à motifs animaliers. Même les graffitis sont présents. Dans une vitrine : les restes carbonisés de figues, olives, noix, grenades, siliques de caroubes et les pains ronds aplatis partagés par les encoches radiales. Les panneaux montrent la boulangerie et même le portrait du boulanger.

La vaisselle des Romains

Les salles suivantes nous projettent encore plus dans la vie quotidienne des Romains : salles de l’argenterie et des bronzes où l’on voit la vaisselle des Romains.

Les vitrines anciennes sont des merveilles du genre : leurs pieds sont de petits personnages encapuchonnés, atlantes d’une vaisselle magnifique. Luxe des poignées ciselées ou embouties, des motifs, des sculptures. On voit surtout des brocs, des cratères ou des pots, pas d’assiette ni de couverts. Les moules en forme de lièvre ou de porcelets pour les pâtés sont très sophistiqués : la cheminée pour évacuer la vapeur se trouve à la place de la queue du lapin. La verrerie est extrêmement variée : belles carafes et carreaux de vitres pour les fenêtres en passant par des chef d’œuvres comme le vase bleu ornée de camées ou la coupe en cristal parfaitement transparent gravée de motifs dionysiaques. Cet étalage de luxe cadre bien avec les villas de Baia ou de Pompéi.
Cabinet secret

A 9h45 précises, nous nous présentons au Cabinet Secret. La censure qui pèse sur les objets érotiques leur donne encore plus de valeur. Cette censure des Bourbons était politique Les Romains, depuis la Renaissance et peut être même avant, étaient des modèles pour la monarchie. On les imaginait courageux et virils. On les découvre très portés sur le sexe et la luxure, un très mauvais exemple pour les Espagnols très-catholiques. De plus, tous les visiteurs de toute l’Europe seraient capables de ternir la réputation de Naples en propageant ces images choquantes. Mieux valait les enfermer dans un Cabinet Secret.
Évidemment, pour nous, peu d’image sont choquantes : les personnages de Satires ou de l’Hermaphrodite sont connus, anciens souvenirs du Satiricon de Fellini qu’il faudrait revoir . Différents objets en forme de phallus, lampes à phallus, clochettes, jouets érotiques… rien de très surprenant.

les musiciens ambulants

Mosaïques

Les mosaïques sont d’une finesse incroyable. Elles surpassent par leurs coloris, leurs détails, tout ce qu’on a pu voir jusqu’à présent. Et pourtant, nous en avons vues : à Istanbul, à Paphos, ou à Piazza Armerina .Mise à part la très belle bataille d’Alexandre les sujets sont plus intimistes, de très petits tableaux montrent des artistes, la sorcière…les portraits sont saisissants ainsi que les animaux.

Le Temple d’Isis, décor de la Flûte enchantée

Quatre grandes salles sont consacrées au temple d’Isis de Pompéi et à son portique peint de rouge avec une frise noire. Ce tout petit temple a fasciné le public lors de sa découverte en 1770.Elle serait à l’origine de l’Egyptomanie et aurait inspiré Mozart pour sa Flûte enchantée. Les décors de l’opéra, à sa création, auraient été les copies du temple d’Isis. Une maquette récente a été réalisée par informatique d’après les photos. Tout autour de la pièce, les gravures du 19ème siècle. Les panneaux rouges du portique sont décorés de petits rectangles représentant soit des paysages d’Égypte soit une naumachie- galères sur le Nil- censée rappeler la légende d’Isis et d’Osiris. Je ne reconnais pas trop Égypte.  Un ibis ou le crâne rasé d’un prêtre font couleur locale.

Des bronzes retrouvés dans une seule villa occupent deux grandes salles.
Archéologie de Naples

Le temple des Dioscures, remplacés par la grande église San Paolo place San Gaetano puis le forum situé dans le cloître de San  Lorenzo… Je suis contente d’identifier les lieux après notre promenade de samedi.

Romains!

Collection Farnèse

Principalement des marbres. Dans un grand hall au rez de chaussée tous les empereurs, ou presque, sont alignés : Caracalla, Marc-Aurèle (très beau) Domitien coiffé d’une couronne, Vespasien et sa sale gueule, César. Néron et Hadrien, eux,  sont absents. Les Romains ont désormais un visage !
Encore des chefs d’œuvres ! Le grand taureau Farnèse, le plus grand bloc de marbre sculpté dans l’Antiquité, l’Artémis d’Ephèse