Lion, il est rare il faut de la chance ! (bis)

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babouins à la mare Bali

Dans le nord, on dit que l’amplitude thermique est grande, et que s’il fait très chaud le jour, les nuits sont fraîches. C’est peut être vrai « en général » mais pas « en particulier » cette nuit . Nous mijotons dans notre sueur sous un ventilo faiblard qui brasse mollement un air torride. Même Michel émerge  en se plaignant de la chaleur.

Nous déjeunons dans la nuit pour être prêts aux premières lueurs de l’aube si nous voulons rencontrer le lion. « Lion, il est rare. Il faut de la chance ! » Confiants dans l’habileté de Marcel à repérer les animaux, nous pensons tous voir le lion. Trois lions ont été vus hier vers 7 heures à la Mare Bali. Avec un  peu de chance ils reviendront aujourd’hui.

En chemin, deux hyènes tachetées se présentent. L’une d’elle traverse la voie derrière le véhicule la deuxième s’assied entre deux buissons. Elle nous observe. Cette réciprocité m’amuse autant que l’attitude canine du charognard. Elle s’éloigne ensuite avec son arrière train surbaissé et sa drôle de démarche.

Deux buffles par hasard. Le temps d’une photo.

Bubales, Waterbocks, nous aurons tous vu toutes les antilopes.

Mare Bali

buffles en chemin

Marcel m’avertit qu’il faut faire attention avant de monter sur l’affût : quelquefois, le lion s’y installe pour dormir à l’ombre. Point de lion. Point de Nestor. Les buffles tournent le dos dès notre arrivée pour s’enfoncer dans la savane.

Les crocodiles sont sortis. Les oiseaux les narguent. J’arme l’Olympus prête à filmer la capture d’une perdrix. Un petit crocodile se dirige vers un couple de volatiles occupés à une parade nuptiale. Sa vélocité me surprend. Raté ! Il retourne bredouille à l’eau. Marcel attend « dix heures zéro, zéro » l’arrivée du lion. Dès que nous quittons la Réserve, je range jumelles et appareil photo. C’est un tort. Une famille de babouins traverse la route.

l’éléphant solitaire

Dernière surprise : l’éléphant solitaire qui avait laissé ses empreintes hier sur la piste. Il est très vieux, sa peau est creusée de profondes rides. Nous filmons. Adieux à la Pendjari !

Safari à la Pendjari

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termitière

Lever de soleil sur l’Atakora

Le réveil à 4H45 coïncide avec l’appel à la prière du muezzin.

Petit déjeuner rapide à la Montagne.

Le départ est prévu à 5heures. Michel est en retard. De surcroît, la 4X4 est beaucoup trop petite pour contenir tous nos bagages. Nous avions pourtant prévu cette éventualité mais Michel avait soutenu le contraire. Nous voilà, en pleine obscurité sur le parking en train d’ouvrir les bagages pour laisser tout ce qui n’est pas indispensable.
La 4X4 traverse Natitingou en pleine nuit. Le soleil se lève dans l’Atakora, paysage de montagne magnifique. L’an passé Duran m’avait fait un cours de botanique : caïlcédrats, néré, Karité…je ne sais plus les reconnaître. Illusion du savoir trop rapidement acquis, aussi vite oublié. Plaisir de revoir, de réviser !

Sur le bord de la route, d’énormes camions sont arrêtés. Des branchages annoncent de loin l’obstacle. Sont ils en panne ? Ou est ce la pause pour le conducteur fatigué ?

Et toujours la théorie des femmes qui marchent, une bassine de mangues, un fagot, sur la tête, en route pour le marché de Tanguiéta.

Deux Peuls en longues robes bleues coiffés de leur chapeau de paille pointu, poussent devant eux un grand troupeau de bœufs. Marcel, comme Duran, l’an passé les regarde avec commisération, regard des sédentaires sur les nomades ! Après avoir lu « L’Enfant Peul » d’Hampâté Bâ, je connais leur fierté et leur noblesse.

Villages Betamaribé

Nous quittons le goudron à Tanguieta. La piste traverse de nombreux village aux cases rondes coiffées de paille, aux greniers surélevés sur deux ou trois pieds, à l’ombre d’immenses baobabs. Des puits à balanciers modernes remplacent les anciens puits à margelle. Malgré d’innombrables petites mosquées blanches et vertes, des porcs très nombreux traversent la route. L’Islam est peut être majoritaire mais pas exclusif ! Nous remarquons les buttes coniques des ignames et les pieds de coton desséchés.

Après la pluie….

singes perchés

La végétation est beaucoup plus verte que l’an passé. Il a déjà plu deux fois. La piste est encore humide. Les baobabs portent de petites feuilles. Les karités aux troncs ridés sont couverts de larges feuilles vert tendre.

Nous retrouvons la Pendjari comme si nous l’avions quittée la veille. Le ciel était lourd de menace de l’orage qui allait tomber juste après notre départ. Il me semble que l’orage d’avant-hier était celui que nous attendions et que nous ne faisons que revenir après la pluie !

Instinct de chasse…

Marcel a repéré les pas d’un éléphant solitaire sur la piste. Il a aussi laissé crottes et feuillage. J’étais persuadée que les antilopes se présenteraient les premières. C’est une famille de babouins qui nous accueille à l’entrée de la Réserve. Je sens l’excitation qui grandit en moi. La présence des animaux réveille un instinct préhistorique de chasseur… A tout moment peut surgir une bête sauvage !nous traversons la savane arborée puis la savane arbustive. Les arbres de grande taille sont peu nombreux, caïlcédrats, les karités sont plus petits. Les branchages cassés racontent le travail des éléphants.

Mare Bali

A la Mare Bali, le vieux babouin Nestor n’est pas au rendez vous. Il y règne toujours le même calme. La tribu des babouins est installée sur la rive opposée à gauche du baobab. Deux guibs harnachés viennent boire timidement. Des cobs font leur apparition. Je les dessine. C’est l’occasion d’observer les lignes noires verticales qui confèrent une élégance supplémentaire à cette antilope. Les taches blanches sur le dos des guibs dessinent une selle justifiant leur appellation de « harnachés ». Les 3 grues couronnées sont accompagnées de 3 canards armés – noirs et blancs de très grosse taille.

Marcel connaît bien les oiseaux. J’apprends à reconnaître l’Ombrette qui a une curieuse silhouette : un corps massif perché sur des pattes très fines d’échassier. Sa tête a une forme bizarre, un triangle vers l’arrière et un bec fort. On dirait qu’elle a servi de modèle aux Shadocks. Le Jacana a un joli motif en losanges gris blanc et noir, gorge blanche ailes noires, corps gris. Des vanneaux et des perdrix  sont posés à portée de dent des crocodiles. Ces derniers sont peu actifs. On devine leurs yeux dans l’eau boueuse mais ils refusent de sortir.

Une 4X4 rouge avec une galerie se gare au parking. C’est Duran qui nous reconnaît immédiatement. Il semble ravi de nous retrouver.   Nous  nous croisons, il redescend sur Nati.

Antilopes

Tout le long du chemin nous retrouvons toutes les espèces d’antilopes : Bubales – antilopes ânes, Hippotrague, antilope cheval, mais aussi Damalisques et Waterbocks, plus difficiles à observer et à identifier. Ces derniers sont de  gros animaux.

 

antilopes


Calaos dans les rôniers

Le paysage change un peu. les Rôniers annoncent la forêt galerie qui borde la rivière de la Pendjari. C’est cette rivière qui fait la frontière entre le Bénin et le Burkina Faso. C’est aussi elle qui a donné son nom à la réserve. Les Calaos sont au rendez vous, au même endroit que l’an passé. Ces oiseaux, de la taille d’un Dindon, avec un bec extravagant qui n’a pas l’air de pouvoir se fermer, me fascinent. j’ai lu dans un polar se déroulant au Botwana que dans ce pays, ils sont craints comme oiseaux de mauvis augure portant la mort.

passage clandestin au Burkina Faso

pirogue sur la Pendjari

Marcel arrête la 4X4 non loin de l’eau et nous propose un passage au Burkina sans visa ni passeport. Il appelle les pêcheurs burkinabés qui font sécher leur poisson de l’autre côté de la rivière. un billet de 1000 CFA suffira pour la traversée. On jette un oeil au produit de leur pêche, une photo des charognards  à l’affût d’une aubaine, et nous retournons au Bénin. Ravis de cette aventure imprévue.

Auberge de la Pendjari

auberge de la Pendjari

Rien n’a changé à l’auberge si ce n’est qu’Etienne est parti à la retraite. Nos chambres ventilées nous paraissent luxueuses après les nuits passées à Essouhé et à la Montagne. La piscine  nous appelle.  Sans attendre, je me trempe tandis que D commande une salade au thon. Le petit Félix, notre passager sur la galerie dela 4X4 de Duran, vient nous saluer. Laure Damien et Stéphanie  me rejoignent  dans l’eau.  Nous restons à la piscine jusqu’à 16heures.

pachydermes

16h10, Michel n’a toujours pas apparu. Nous faisons un  coup de force : nous partons sans lui. Marcel, le chauffeur, est un guide très compétent et les animaux n’attendent pas !
En effet, à peine avons-nous quitté l’auberge que deux éléphants se présentent : la femelle plus « fine » (tout est relatif !) pourvue de défenses, le mâle, plus massif, plus ridé. Ils sont très calmes. Marcel descend, marche à leur rencontre. Ils ne prêtent pas attention à nous. Marcel nous invite à nous approcher. Il faut leur « montrer qu’ils sont les plus forts », on leur prête allégeance en marchant à reculons une dizaine de pas. Nous pouvons faire de très jolies photos de près. Les pachydermes cassent délicatement, une branche après l’autre d’un petit karité aux feuilles tendres et fluo.

phacochères
En route vers la Mare Sacrée, nous croisons plusieurs familles de phacochères très affairés. Ils sont aussi drôles de face que par derrière : leurs défenses recourbées, leurs crinières, leurs fesses rebondies et leur fine queue dressée très haute toute droite, les rendent très sympathiques !

Hippos à la Mare Sacrée
Les hippopotames se reposent au milieu de la Mare sacrée. Ils ne se montrent pas disposés à faire des démonstrations de bâillements. Nous devons attendre longtemps avant qu’un ne se décide à ouvrir la gueule. En attendant, je dessine aigrettes et hérons. Bonheur de se retrouver dans la sérénité du parc !
Sur la route du retour, nous croisons un troupeau d’éléphants. Pas question de les approcher ! Les petits sont avec eux. Ils pourraient charger. Les arbres craquent sous leur passage. Marcel s’amuse  à les provoquer. Nous préparons la fonction vidéo de nos appareils. Quel film d’action ce serait que la charge du gros mâle qui agite ses oreilles en signe d’avertissement !
La nuit chaude enveloppe l’auberge décorée comme un sapin de Noël. Au menu : couscous mouton.

 

Etape à Natitingou : deux bonnes adresses

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Natitingou : La Montagne

Arrivée à la tombée de la nuit à Natitingou, l’hôtel La Montagne est une grande structure de trois étages et deux grands bâtiments, sans aucun charme mais avec tout le confort : moustiquaires, douche, ventilateurs bien puissants, aucun effort de décoration mais tout est propre et on pourra charger les batteries pour faire des photos et des films à la Pendjari demain ! La mosquée est tout près, on entendra le muezzin juste avant de partir.

Dîner en ville: restaurant Le Taneka

Nous dînons en ville dans un restaurant très agréable le Taneka appartenant au frère de Michel. La table est dressée dehors sous un arbre. Il fait bon. Michel est chez lui. Il donne des ordres à l’employé qui part en détalant. Encore une expérience gastronomique : nous essayons une pâte de manioc en boule légèrement fermentée. Il faut que la sauce qui l’accompagne soit bonne parce que seule c’est encore pire que la bouillie de l’autre jour ! Encore du poulet bicyclette, il faut de bonnes dents ! Heureusement que nous avons toujours avec nous les « mangues, fruits de l’amitié de Pobé » pour améliorer l’ordinaire ! A la fin du repas, Michel disparaît. Nous l’attendons avec un peu d’impatience. Demain, il faut se lever tôt et nous sommes fatigués. Il réapparaîtra beaucoup plus tard. Mais c’est Kamal qui a disparu maintenant !  On le retrouve dans l’obscurité. Il est temps de se coucher pour être dispos pour le safari !

Vers le nord, en passant par Abomey et par le village Taneka

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tissu appliqué d'Abomey

Abomey

D’ Azové on rejoint en moins d’une heure Abomey, pleine de travaux. On construit un nouveau marché.  La rue qui menait à notre hôtel  est éventrée.
Le guide de l’année dernière nous reconnaît .

Nous lui demandons des nouvelles de Gabin. Transmettra–t il notre bonjour ?

Je me souvenais très bien du trône sur 4 crânes, des murs cimentés avec de l’or des perles et le sang humain….
Route vers le nord

Le voyage en minibus est beaucoup plus confortable que dans le taxi brousse l’an passé. Nous reconnaissons la route, les collines vers Dassa, les rochers pelés vers Savalou, les belles forêts le long de la frontière du Togo. Cette longue journée de car permet de faire un peu le vide après les deux jours si intenses que nous avons vécus. On grignote des gâteaux secs achetés à Bohicon, on suce des oranges que je jette brusquement par la fenêtre quand je réalise que j’ai omis de les éplucher !

Le pauvre village Taneka

village Taneka

Il reste quelques dizaines de kilomètres avant d’arriver à Natitingou. Le minibus s’engage sur une piste à Copargo : nous allons visiter un village Taneka perdu dans la montagne. Dès que nous nous arrêtons, des enfants très sales, couverts d’une terre noire nous accueillent. Je n’ai jamais vu d’enfants aussi sales. Ils nous prennent par la main et nous emmènent au village où le chef du village nous attend ; les pauvres cases ont souvent perdu leur toit de chaume et ont coulé sous les intempéries.  Peut être l’exode rural explique-t-il que la moitié du village soit déserté, en ruine. Ces ruines, la saleté me mettent très mal à l’aise. Je ne vois pas les cultures. De quoi vivent ces gens sur leur montagne ? Au centre du village il y a une case rectangulaire plus grande que les autres surmontée d’une antenne. Les jeunes insistent pour qu’on photographie l’antenne. » Avec elle on peut voir des images ». Fascination de la télévision même ici.
Cela me  fait penser à une visite des Akas en Thaïlande : aller voir des gens une demi-heure, ne rien pouvoir partager, voir cette misère qui n’est même pas photogénique, comme l’aurait dit Coluche « c’est beau la misère ! » c’est ici que Dominique décide de distribuer les petits cadeaux que ses élèves ont donné pour les enfants béninois : un petit ourson de peluche pour une toute petite fille, un petit bracelet. Les autres enfants réclament ; On donne des peignes et des savons aux plus grands. Les savons plaisent. Est-ce qu’ils aiment réellement le savon ? Ou est ce le fait qu’on leur donne quelque chose- n’importe quoi. A la fin la distribution tourne au pugilat. Damien remarque qu’on n’aurait pas du s’y prendre ainsi. C’est un peu la réponse du berger à la bergère après la confiscation du ballon de Justin par les grands ! Impuissance de notre bonne volonté devant trop de pauvreté.

 

Essouhé, Adèle la potière, le ballon de foot de Justin

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La potière
Adèle, la potière, est  une artiste connue. Elle travaille sans tour, à la main, assise dans un couloir entre deux cases. Nue à partir de la taille, elle pose gracieusement pour la photo sans aucun geste de fausse pudeur pour cacher ses seins. Elle est âgée, de nombreux cheveux blancs parsèment sa coiffure. Son expression est très noble, empreinte de douceur, de calme et de sérénité.

Le ballon de Justin

Au marché d’Azové, les trois jeunes, en  plus des souvenirs, ont acheté un ballon de foot pour Justin,l’un des plus jeunes frères de Sébastien. Il s’est plaint que les grands ne les laissent pas jouer.

Mes trois collègues sont très contents de donner le ballon aux petits. Félix intervient :  confisque le ballon et le cache sous notre matelas. Il explique :

– « il ne faut pas faire un cadeau à un seul enfant. Cela provoque disputes et bagarre. Il faut le donner à un adulte qui en fera un usage raisonné. »

Les généreux donateurs sont déçus. Mais c’est ainsi qu’on procède au village !

Nous rentrons juste à temps avant l’heure des moustiques pour la douche au seau. Le courant est revenu. Je m’installe pour écrire sous le néon de la maison à étage. Nous y dînons encore de riz mélangé avec des haricots, spaghettis, poulet à la sauce, bananes caramélisées, ananas frais.

Marché de nuit

au marché de nuit

 

La journée de tourisme n’est pas terminée. Nous visitons un très beau marché de nuit. Chaque vendeuse a fait des petits tas de sa marchandise : 7 ou 8 arachides, une petite assiette de tomates, quelques piments rouges ou verts. Au milieu, une lampe à pétrole artisanale (une boite de conserve) C’est un spectacle tout à ait merveilleux. « Il y a coupure ! » dit la rumeur. L’éclairage public s’éteint il ne reste que les lampions.

Dimanche 15 AVRIL

Petit matin à Essouhé

Au lever du jour les enfants sont venus très tôt dans la cour. Ils font toutes sortes d’exhibitions, d’acrobaties. Le tour le plus original : s’attraper le gros orteil dans une main, et  sauter dans l’anse ainsi formée. Plus classiques, le poirier, marcher sur les mains, faire la roue…. Ils attendent le ballon. Je sais où il est caché mais je n’ose pas leur donner. Il faudra attendre Félix ou Hyacinthe.

Une très belle femme en belle robe vient : c’est Adèle que je n’avais pas reconnue. Elle apporte le petit vase à Damien que je réveille. Elle a du marcher plusieurs kilomètres tôt ce matin !
Dernières photos. Notre passage au village a été beaucoup trop court. Nous avons tant de choses à voir, à nous dire, à partager. Nous remontons dans le minibus.

Essouhé : l’hôpital

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Au dispensaire, nous sommes reçus par le médecin-chef de l’hôpital (le seul médecin) qui revient d’une tournée de vaccinations (polyo) mais aussi distribution de vitamine A aux petits et vermifuges. Cette campagne est annoncée partout par de grandes banderoles vertes. Cet hôpital n’est pas équipé pour des interventions lourdes : il n’y a pas de bloc opératoire. La prévention joue donc un  rôle primordial.

Le médecin nous distribue sa carte de visite. Une spécialisation VIH est précisée. Laure le questionne à ce sujet. D’après le spécialiste 1 à 2  % de la population du district serait contaminée ce qui, dans l’absolu, représente beaucoup de malades. Ils peuvent fournir un kit gratuit de dépistage et de trithérapies (mais quid du long terme ?). La prévention VIH est mission impossible : la polygamie et la position d’infériorité des femmes qui ne peuvent ni refuser un rapport, ni exiger le préservatif à leur mari, favorisent la contamination. Sans parler des autres occasions de transmettre la maladie : en particulier lors des scarifications en série. On Utilise le même « couteau préparé ». Je lui demande quelle est la pathologie la plus répandue ? – le paludisme qui peut être fatal aux jeunes enfants sous sa forme neurologique ou aux femmes enceintes et aux immunodéficients.

Une question me taraude depuis ce midi. Quelle est sa position vis-à-vis de la « médecine traditionnelle » ? Nous avons tous à l’esprit le petit malade. Sa première réponse est claire. Les guérisseurs et les pratiques traditionnelles sont des obstacles à la médecine. Des villages entiers ont refusé la campagne de vaccination. Mais juste après cet aveu spontané,  il se reprend. « Je suis catholique, mais on ne peut pas vivre au Bénin sans constater certaines choses…. »Il raconte alors des guérisons miraculeuses, des lésions indétectables avec les techniques modernes et même de tumeurs contenant des clous et des morceaux de verre invisibles aux rayons X mais extraits miraculeusement par le guérisseur…

Sans doute, il est sincère. Peut être est il politique ? Son incroyance le couperait de la population qu’il doit soigner.
Nous cherchons un terrain plus neutre : le manque criant de médecins dans les régions rurales, le manque de moyens. « Faisons une vue d’ensemble ! » : photo de famille. Promesse de s’écrire.

 

Fanfare aux funérailles

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Après le marché, on nous a promis des groupes folkloriques. Nous n’aurions jamais imaginé qu’on nous inviterait à des funérailles !
La personne qu’on porte en terre est un personnage assez considérable si on se réfère aux marques des voitures garées à l’entrée du hameau : Mercedes Benz, BMW, gros 4X4 brillants. Du beau monde s’est déplacé !
La musique bat son plein : un orchestre de cuivres et de tambours en tenue bleue de fanfare fait un bruit assourdissant. Une sono avec d’énormes baffles doit prendre le relais de la fanfare. Les funérailles ne sont  ni tristes ni privées. On y danse, on y rit, on y mange sans retenue. Nous, occidentaux, sommes interloqués surtout quand on nous propose de rendre visite à la dépouille de la défunte. D’un commun accord, cette démarche nous semble déplacée. Nos guide se contenteront de présenter nos condoléances aux proches parents de la vieille dame décédée : sa co-épouse nous remercie chaleureusement d’être venus. Je dis un peu sottement à une dame qu’elle a une très belle robe sans savoir que c’est une très proche parente (sa fille).Aucune trace d’affliction ou de deuil.  Moronikê nous l’avait dit. Si c’est quelqu’un de jeune, mort avant l’âge, on est triste. Mais si le défunt était très vieux « Alors ! C’est la fête ! ». Félix ajoute que si c’est un prématuré ou un jeune enfant, il n’y a pas de cérémonie du tout. Finalement, assez gênés, nous quittons les lieux avec soulagement.

 

Fétiches, médecine traditionnelle, oracles

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Fétiche

Guérisseur

Le guérisseur est un homme très maigre, très marqué, avec un œil blanc. Ses fétiches forment un très bel ensemble décoratif. Ils ressemblent à de vieilles bouteilles recouvertes de cuir ou de cire ou de toutes sortes d’offrandes bizarres. Incantations, libations, encore de l’alcool qui circule. On peut filmer ou faire des photos sans problème mais il faudra faire parvenir nos images si nous ne voulons pas décevoir.

Python

pythons

– « avez vous vu les pythons de Ouidah?  » 

  « Comment les avez-vous trouvés ? »
–    « touristiques ?

– Ici, ce sera autre chose ! »

Le prêtre des pythons est vêtu d’un short clair et d’une toque blanche barrée de rouge avec des bracelets de perles. Il revient après les présentations d’usage, avec trois ou quatre serpents enroulés autour de son cou, ses bras, de la taille. Je me porte volontaire pour porter les pythons autour de mon cou. Je suis très fière de moi. Le maître des Serpents propose de faire une « vue d’ensemble » (une photo). Nous sortons donc sur la place. Mon serpent s’agite un peu. Je ne peux pas savoir si c’est sa tête ou sa queue qui me  chatouille. Le guérisseur se plaint que les touristes promettent toujours d’envoyer les photos et le font rarement. Ceci nous motivera à tenir notre promesse.

La Croissance

La Croissance est un élevage de lapins et dindons. On nous montre les cages de bois fabriquées maison et les animaux qui ont des abreuvoirs par cette chaleur. Un lapin plus malin que les autres tient sa boîte de conserve entre ses dents pour monter qu’elle est vide par cette chaleur !

Médecine traditionnelle

le Fâ

Un troisième guérisseur officie non loin de là. Il ne s’agit pas de bénédictions ou de spectacle à notre attention mais d’une véritable cérémonie : deux hommes, torse nu, arborent des taches de peinture blanches. Un jeune garçon aux traits très fins, aux grands yeux affolés est maquillé de même. Le Maître de cérémonie promène une cassolette de braises sur le sol et sur une fourrure d’animal aux pieds du petit garçon. C’est le malade. Nous découvrons peu après d’horribles ulcères sur un pied tout boursouflé et  sur une main. Les sacrifices sont destinés à le guérir.
Après libations, génuflexions, oraisons diverses sur des fétiches disposés sur une estrade garnie de plantes vertes, le prêtre procède au premier sacrifice :  un poulet à qui il coupe le cou et dont il répand le sang sur l’autel. L’animal bouge encore, il tressaute, cherche à s’envoler et atterrit à nos pieds. Sept petites volailles subiront le même sort. Leur sang éclabousse nos habits. Quand arrive le tour des deux chiots et du chaton enfermés dans une cage, c’en est trop nous rejoignons le minibus. Seul Damien restera et filmera. Le sacrifice des volailles m’impressionne peu : c’est de cette manière qu’on tue les poulets et les poules destinés à la cuisine. Nul d’entre nous n’est végétarien. Chats et chien, en Europe ne se mangent pas. Cette barbarie nous révulse.
Mais il y a bien pire. Pendant que nous attendons la fin de la cérémonie ,les quatre filles, avons eu la même pensée pour les blessures horribles du petit enfant.
Avant de procéder à la cérémonie, les parents ont consulté le Fâ. L’oracle a dit que la maladie n’avait pas une origine naturelle, qu’un traitement médical ne ferait que compliquer le travail du guérisseur. L’enfant est victime d’un envoûtement qu’il faut exorciser. Que ce soit Félix – futur médecin-  garçon intelligent et ouvert – qui soutienne cette théorie, me consterne. Quel dommage que parmi nous ne se trouve ni médecin ni infirmier pour poser un diagnostic sur ces ulcères qui déforment le pied de l’enfant qui paraît épuisé, probablement fiévreux.

Le Fâ

Les sacrifices terminés, Félix propose de se faire dire le Fâ. Les quatre filles refusent. Nous n’avons aucune envie de prédictions effrayantes. Damien se prête à l’oracle. Le prêtre lui donne un galet auquel Damien confie le secret de la question qu’il pose au devin. Ce dernier sort d’un sac des chapelets de grosses graines aplaties qu’il secoue et dispose savamment après les avoir mêlés, démêlés, secoués en récitant des formules magiques (à ce que nous devinons). C’est très long. Les prêtres se répondent, se consultent. L’un d’eux traduit. La première prédiction est funeste : Damien sera victime d’un vol. Pour conjurer ce sort, il lui faudra élever un chien à son retour (comme il chuchote, j’avais entendu une chèvre, heureusement que c’est un chien. D’ailleurs un chien est tout à fait approprié pour faire fuir les voleurs !). Le prêtre lui demande s’il souffre du ventre (question bien anodine, sait-il que les Européens sont souvent victimes de la turista ?)Il devra surveiller ses plats pour qu’on ne l’empoisonne pas. Il faudra également qu’il rapporte un souvenir (pas de problème, Damien ne fait que cela : acheter des souvenirs et qu’il l’offre à son père. Enfin l’oracle demande si les prédictions correspondent à la question secrète. « Pas du tout ! » Tant mieux ! L’inverse aurait heurté mes convictions rationalistes !

Azové

Après une matinée si chargée nous aimerions rentrer nous reposer et digérer les émotions. Au marché, les trois jeunes veulent encore acheter des pagnes. Au lieu d’aller au restaurant local (en supplément) et nous contentons de beignets (25CFA l’un) et de bananes (même tarif)et nous installons sur  une terrasse ombragée  appartenant à la famille Essou.

Essouhé : la vie au village

prêt à vendre!

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fabrique de savon

marmite de savon

On nous fait bon accueil. « Bonne arrivée ! ».

Les vieux se lèvent et nous serrent la main. Les petits veulent tous nous toucher.

Sous des auvents dressés sur 4 piquets contournés,  une femme fabrique du savon : dans des calebasses des cendres, de l’huile de palme, des liquides caramel, ambrés, rouges remplissent des bassines. Sur le foyer une pâte cuit, se boursoufle, se craquelle, prenant une teinte grise peu engageante avec des taches jaunes. Ce savon artisanal sera vendu jusqu’à Cotonou dans des paniers.

Gari

 

Gari

Plus loin, on tamise et grille le gari. Une petite fille m’offre une poignée de semoule : c’est bon !

Adolphe nous fait voir sa maison : dans la vaste salle cimentée, trône le poste de télévision.

Filer  le coton!

coton filé au village

Des pelotes de coton blanc brut sont entassées dans la cour voisine. La vieille dame qui file nous fait entrer et nous montre sa quenouille qu’on peut faire tourner soit à la main soit au pied.

Dans chaque cour les greniers de vannerie surélevés sont vides actuellement : c’est le temps des semailles. Comme les greniers, les citernes sont vides pourtant la saison pluvieuse vient de commencer.

 

Essouhé : les sages et le Palais royal

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la bibliothèque de Symplice

les enfants nous prennent par la main pour visiter leur bibiliothèque

Essouhé veut dire « chez Essou ». Nous sommes entourés par les membres de cette importante famille qui a donné son nom au village. Sébastien a tant de frères (ou demi-frères) qu’on ne les compte plus. Le plus grand : Félix, 24 ans, est en Terminale et se destine à la Médecine. Symplice, 20 ans est également en Terminale. Hyacinthe, le « Gros », en 3ème.Ils nous pilotent avec Adolphe, l’instituteur et entraîneur de foot de l’équipe locale, Avec  Laure ils forment un duo saisissant.

Tout le monde chemine dans le village tranquille. Des petits se saisissent de nos mains. Ils sont contents de nous toucher. Symplice nous ouvre la bibliothèque dont Sébastien m’avait parlée et dont tout le village est fier. Sur les murs, des rayonnages portent des manuels scolaires d’un côté. En face sont rangés les romans, la bibliothèque rose, bibliothèque verte et rouge et or. Les livres de mon enfance dédaignés par Elise et Célia, seraient ici lus et appréciés.

Le conseil des Sages

les sages et ...nous

Les Sages du village nous attendent dans une salle ouverte sur un perron et meublée de bancs le long des murs. A la place d’honneur : Essou André, le chef du Village qui assure l’intérim du roi Essou décédé en 1972. Il arbore un costume blanc, fuchsia, bleu et porte une calotte blanche marquant son rang. Les sages sont assis autour de lui sur le banc du fond, ce sont des hommes très âgés. Chacun se présente, explications dynastiques, relations familiales. Curieusement, ils sont aussi avide de savoir qui nous sommes, d’où nous venons, nos professions, le but de notre voyage. Deux sages présentent les doléances du village : le village a besoin  d’un centre de santé. Une parcelle a été choisie mais rien n’a encore été construit. Si nous pouvions les aider … Nous posons aussi nos questions : de quel ordre sont les problèmes résolus par le Conseil des Sages ? – conflits de voisinage, bagarres, peut être vols…Comment le prochain roi sera-t-il désigné? C’est le Fâ qui décidera. Mais ce n’est pas pour demain. Il faudra d’autres cérémonies…Le Chef du village nous donne solennellement l’autorisation de nous promener là où bon nous semble dans le village. Puis on sort pour une photo de groupe.

Palais Royal

On nous conduit ensuite au Palais Royal qui doit être transformé en musée. Plus exactement deux palais sont juxtaposés. Comme à Abomey, le nouveau roi ne s’installe pas dans le palais de son prédécesseur. L’héritier en construit un nouveau avec une orientation différente : le Roi et son fils ne doivent pas regarder dans la même direction. Nous passons à travers de vastes cours où les épineux ont été sarclés au milieu de bâtiments de terre rouge bas couverts de tôle ombragés par de beaux manguiers. Comme à Porto Novo ou à Abomey, une cour est réservée aux 41 épouses qui n’en sortent jamais, y vivent et y cuisinent .

Le « roi par Intérim », Essou André, officie comme prêtre. Il fait des libations de Sodabi, de gin, de bière, de boisson gazeuse. Il fait des incantations, réveille doucement l’âme du souverain défunt. Ce sont des bénédictions de bienvenue en notre honneur. Une écuelle d’eau passe. J’y trempe mes lèvres. Puis un verre de sodabi que je renifle, puis du gin…A l’intérieur du bâtiment se trouve une crypte. Nous allons nous prosterner à genoux, face contre terre, contre la croix sur la tombe du roi Essou. Le palanquin porté par six hommes est bien poussiéreux depuis 1972 !

bénédiction des ages dans le Palais Royal

Après avoir parcouru des cours et des jardins nous passons dans le palais du premier roi. Il a deux tombes peintes de motifs multicolores dont un drapeau français.Le premier roi fut inhumé une première fois sans sa tête. La deuxième tombe contient la tête. Un bel arbre, un faux acajou dépasse des murs du Palais. C’est l’arbre fondateur du village et du palais. Il porte de gros fruits roses qui s’entrouvrent pour libérer des graines brillantes. La pulpe est comestible. Le tronc de l’arbre est complètement creux. Une chèvre noire sort de sa cachette au centre de l’arbre.

les cours du Palais