Gabès – oasis – gite – restaurant sur le port

CARNET TUNISIEN DE DJERBA AU GRAND SUD 

Mosquée si boulbala
Mosquée Sidi Boulbala

Une très belle palmeraie entoure Gabès et arrive jusque à la mer. Quand on arrive au point de vue, le soleil ne nous a pas attendu. Des nuées violettes bordées d’or se déploient au dessus des arbres sombres. L’oasis est à nos pieds dans le creux de l’oued bordant une ville invisible. Dans un petit parc de loisir est installé un café et un zoo, attraction pour les jeunes locaux. La piscine ronde était autrefois alimentée par une source, on y lavait le linge et s’y baignait, la source est maintenant asséchée. La route passe sous un pont romain de pierre, aqueduc conduisant l’eau aux rigoles irrigant les jardins sous les palmiers. Le coin est maintenant à l’abandon, les arbres fruitiers, grenadiers, vigne et petits bananiers sont encore florissants mais les jardins maraîchers ne sont pas entretenus, un peu plus loin à Chemini on cultive les carottes, tomates et salades que nous trouverons au souk demain matin.

Boulbala

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La nuit est tombée quand nous nous arrêtons sur la place animée de Boulbala. Le musée est fermé, il est installé dans une medersa qui fut, il y a longtemps une école juive comme l’attestent les nombreuses étoiles de David (raconte Majdi puisqu’on ne peut pas entrer).

La mosquée de Sidi Boulbala – barbier du Prophète qui mourut à Gabès en 661 – son mausolée est l’objet de vénération et de pèlerinage. La cour de la mosquée est construite une plateforme bordée d’un portique où peuvent se reposer les pèlerins. La cour dallée abrite une citerne qui recueille les eaux de pluie. A l’entrée de la salle de grosses poteries sont fermées par des couvercles de bois. Les fidèles boivent cette eau bénite. Maissa dénoue l’écahrpe qu’elle porte au cou, je sors le voile blanc avec les petites perles acheté à Beisehir, nous entrons du côté des femmes près du mausolée du saint derrière une clôture de bois à clairevoie, la tombe est recouverte de tissus verts brodés.

Autour de la mosquée des marchands ambulants proposent toutes sortes d’objets.

Notre gite : la maison d’Isabelle

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C’est u  luxueux duplex au 4ème étage d’un immeuble moderne sur une place plantée d’arbres dans un  jardin public. Un café réunit beaucoup de monde aujourd’hui veille d’élections. La grande entrée est occupée par une table rectangulaire, le salon avec trois canapés contemporains bicolores beige et marron, il s’ouvre par une immense baie vitrée. Cuisine américaine dans le coin opposé, la hotte métallique est au dessus d’une grande table de cuisson, chaises de bar, meubles laques, design. Un escalier de marbre blanc s’enroule pour conduire aux chambres du duplex, très belles, très classe, lits immenses, jacuzzi, deux terrasses. Nous resterons au niveau bas pour plus de commodité.

Dîner dans un petit restaurant du port de pêche tout noir et désert : les barques sont sorties avec le beau temps. Au choix : loup ou dorade. Pendant que la dorade grille on patiente avec une petite écuelle de soupe de poisson très épicée – soupe d’hiver, – « les épices réchauffent » , et  une salade de poivrons grillés. Le poisson est excellent. Le cuisinier a une marinade secrète qui donne un arôme incomparable.

Bougrara- Mareth – Gabès

CARNET TUNISIEN DE DJERBA AU GRAND SUD 

Barques au port de Bou-Grara
Barques au port de Bou-Grara

Nous pensions déjeuner sur le port de Bougrara : il est minuscule mais il a quand même son petit chantier naval et des dizaines de grosses barques. De restaurant, nenni !

Bou Grara vu du port
Bou Grara vu du port

La route de Mareth traverse des oliveraies puis le paysage devient sableux avec des buissons épineux. Sur le bord de  la route des « stations-service » improvisées avec des bidons d’essence de contrebande en provenance de Lybie. Pourtant la frontière a été fermée en raison des élections qui se dérouleront demain. A l’approche de Mareth les cultures sont irriguées, agrumes et sous plastique. Nous arrivons à Mareth à 15h, affamées. Les fast-food tunisiens sont nombreux. On y propose « sandwich » « plat » ou « libanais ». je commande un  « hamburger » dans un pain rond avec mayonnaise, harissa, salade, oignons tomates. La viande est grillée et coupée en petits morceaux, on ajoute un morceau d’omelette et des frites.

La route de Gabès est bordée d’eucalyptus avec des grandes haies de casuarinas. Sur la RN1 la circulation est infernale avec les camions. Dans une zone aride nous voyons paître des dromadaires en liberté. 22km avant Gabès, la mer bleue est en vue. D’immenses stands vendent des poteries colorées pas spécialement belles et des dattes ?

Gabès

Nous avons rendez-vous avec Majdi sur le parking du Magasin Général à l’entrée de Gabès. Nous arrivons à 16h, il faut se presser si nous voulons voir le coucher de soleil dans l’Oasis. Mais avant il faut traverser Gabès qui est une grande ville très animée. La Hyundai suit à grand mal la Berlingo blanche dans la circulation. Nous avons déjà remarqué qu’en fin d’après midi le trafic devient infernal et que tout le monde est dehors, les enfants jouent au ballon au milieu de la chaussée, les vélos roulent à contresens

 

En voiture! Par le bac vers Gightis, site romain.

CARNET DE DJERBA AU SUD TUNISIEN 

porte du forum de Gightis
porte du forum de Gightis

Camel Car est venu apporter une très jolie Hyundai orange 5CV qui nous donnera toute satisfaction. Salah tire affectueusement le chauffeur pour qu’il accepte un café avec nous. Nous découvrons au petit déjeuner les dattes et l’huile tunisienne. Selon notre planning nous devrions déjà être parties mais nous nous attardons encore à table peu pressées de quitter si vite nos nouveaux amis.

Près de Houmt Souk, nous rencontrons nos premiers barrages, les militaires sont en treillis, tenue de camouflage et gilet pare-balles au milieu de la roue mais ils nous font signe de les  contourner et ne nous arrêterons pratiquement jamais.

Oliveraies

Sur la route nous remarquons les oliveraies bien entretenues avec les petites levées de terre et les maisons dispersées un peu partout, des maisons basses, de grandes villas. Les maisons traditionnelles tombent en ruines et sont cachées par l’urbanisation de ciment. Un âne sur le bord de la route a attiré notre attention sur les  cueilleuses d’olives. Les oliviers sont très écartés les uns des autres. Cultive-t-on dessous des céréales ? Les aires de battage de l’orge semblent l’indiquer, Mbarka nous a dit qu’il ne pleuvait pas assez. Les constructions mitent le tissu agricole.

Le bac à Ajim

la côte africaine s'approche
la côte africaine s’approche

10h, Ajim semble endormie mais une longue file de voiture est immobile. A l’abri de la digue, des barques multicolores. Les cormorans sortent leurs becs pour pêcher les mouettes planent et plongent, des aigrettes arpente le bord, bec piqué dans la vase. Les toits des bâtiments du port sont hémicylindriques. De petites échoppes ont pendu des robes multicolores gonflées par le vent. Une minuscule buvette est décorée par de grosses jarres. L’attente est d’1h30. Le bac contient environ 25 voitures, moins quand il y a des camions. Le coût est minime : 800 millimes (0.4€) le trajet dure 20 minutes. . La côte d’Afrique s’approche, falaises sableuses ou gréseuses brunes surmontées de palmiers. Le port en face El Jorf est bordé de nombreux restaurants.

Nous empruntons la route de Medenine très plate dans les oliviers dans une terre sablonneuse. Au loin, se profilent des montagnes.  Les constructions traditionnelles sont mieux préservées, on voit peu de ciment. Nous dépassons Bougrara pour trouver le site de Gightis

Gightis, un port antique
Gightis, un port antique

Gightis

C’est une ville romaine du IIème siècle. Le site est immense, il débouche sur la mer, le golfe de Bougrara limité au loin par la côte de Djerba. Entre le site et la mer se trouve une zone basse humide avec des groupes de palmiers. Au loin les flamands roses sont alignés.

sur son piédestal le Capitole
sur son piédestal le Capitole

Les monuments sont remarquablement préservés, ils sont colorés de nuances de grès jaune et orange soulignés de marbre blanc. Les stèles orangées ont gardé des inscriptions très lisibles. Le Forum est vaste, dallé, dominé par le Capitole surélevé sur un  piédestal qui a gardé les bases des colonnes cannelées.  Le  temple de la Concorde, le  sanctuaire d’Hercule sont d’un côté. Dans un coin se trouve le Trésor (aerarium). En face, le temple d’Auguste et d’Apollon. Un grand temple de Liber Pater est plus énigmatique. Vers la mer les villas sont moins lisibles.

le forum vu des thermes
le forum vu des thermes

On reconnait bien les thermes qui ont conservé des mosaïques. De curieuses constructions sont soutenues par des piliers verticaux blancs tandis que des moellons irréguliers comblent les vides.  Un peu plus loin, le marché est bordé de chapelles  arrondies.

Djerba : Erryadh et Guellala

CARNET DJERBA ET SUD TUNISIEN 

puits djerbien
puits djerbien

MBarka est guide touristique depuis une vingtaine d’année. Elle nous montre l’architecture djerbienne : Houchs et Menzels.  Arrêt-photo au puits aux montants verticaux. Certains puits sont abandonnés, d’autres, électrifiés servent encore à l’irrigation. Il pleut très peu à Djerba, la nappe phréatique est saumâtre. Les Djerbiens récupèrent les eaux de pluie dans des citernes.  Pendant le repas de midi, une averse d’ un quart d’heure fut la bienvenue mais elle a peine mouillé la végétation.

greniers
greniers

Nous descendons de voiture visiter un menzel. La propriétaire nous rejoint, impression d’exploration. Un peu plus loin, nous remarquons un bâtiment bas à moitié écroulé avec de belles arches de pierre qui soutiennent le toit. C’était un grenier où on entreposait l’huile, les olives et le grain dans des jarres. Ici aussi, le propriétaire accourt. MBarka s’extasie sur la qualité du bâti et l’enjoint de ne pas laisser s’écrouler le bâtiment déjà bien délabré. Le monsieur revient avec des ferronneries d’art qu’il fabrique chez lui : grillages fantaisie, boîtes à lettres, cages à oiseaux. Il m’offre un échantillon. Sa femme nous rejoint avec une navette cassée : le vieux bâtiment abritait aussi un atelier de tissage. C’est un couple de professeur de science, lui enseigne la physique, elle SVT. On échange les emails.  Ils viennent d’acheter la maison de ciment. Restaurer la ruine coûte cher.

Erriadh

la Ghriba
la Ghriba

Je tiens à visiter la synagogue de la Ghriba, une des plus anciennes au monde datant de la destruction du Temple. Le monument est récent mais sa valeur sentimentale est inestimable. Depuis l’attentat de 2002, des militaires montent la garde. Vendredi après midi, elle est fermée aux visiteurs à 15h. MBarka propose de revenir le dimanche 4 janvier avant de prendre l’avion.

Street art : mobylette
Street art : mobylette

Le village d’Errhiad est le théâtre d’une manifestation de Street Art. Des grapheurs de toute origine et de styles différents ont décoré les murs du village. Pieuvre géante dans cette île, motocyclettes…

 Street Art porte
Street Art porte

C’est bien fait, certains mettent en valeur un  élément architectural, une porte, une boutique…Le résultat est plaisant mais ne me parle pas autant que les Murales de Sardaigne qui avaient un contenu  politique ou sociologique. Les cavaliers en arme et armure, ocre, un peu ternes m’ont parlé d’Hannibal, des Romains ou peut être des chevaliers normands ou croisés, eux m’ont parlé !

street art cavaliers
street art cavaliers

Nous entrons dans une bijouterie. Dans les vitrines des parures de mariages authentiques. Le bijoutier le dit lui-même « ce n’est pas de l’or pur mais du métal doré » Heureusement elles  seraient tellement lourdes ! MBarka m’entraine chez le tisserand qui tisse le tissu traditionnel. Sur de petites bobines est enroulé du fil doré qu’il mêle au rouge et au bleu. Plus loin, les couturières cousent le tissu djerbien blanc à bandes rouges. Elles vendent aussi des robes et des tuniques rebrodées de grosses fleurs. Je demande : « qui porte ces habits traditionnels ? » Tout le monde protestent-elles en chœur ! Nous en verrons plus tard de ces dames chapeautées de aille dans ces tissus blancs.

Il y a aussi à Errhiadh des galeries d’art très chics qui exposent des céramiques d’artistes, des cuirs et des objets design.

Guellala

jarres
jarres

Le soleil descend vite. Nous sommes pressées d’arriver à Guellala, le village des potiers. Partout des jarres énormes : par terre, coiffant les murs, les toits, incluses dans la maçonnerie. Nous visitons l’atelier d’un potier qui est à moitié sous terre. Il fait maintenant presque noir et j’ai bien du mal à photographier le tour et les magasins. MBarka m’entraîne aussi dans un magasin où des objets de très belle facture sont vendus. Je retrouve les assiettes et les plats de son service à motifs bleus avec des poissons. J’achète un plat allongé avec ce même motif.

mariage djerbien : musée de Guellala
mariage djerbien : musée de Guellala

Nous arrivons au Musée de Guellala à la tombée de la nuit. Le musée domine l’île, il est construit sur son point culminant (52m) le ciel prend des lueurs violettes et se reflète dans la mer proche. Le musée est encore ouvert mais nous parcourons les salles au pas de course. Dommage, il aurait fallu prendre le temps de regarder les détails, de noter les curiosités, les traditions, décrire les costumes des noces. Le mariage djerbien est décrit dans ses différentes étapes de la préparation de la mariée à la cérémonie et à la fête…On voit aussi un petit dromadaire tourner autour du pressoir à olive dans une huilerie souterraine. D’autes maisons montrent la vie des pêcheurs… mais le temps presse. Maintenant il fait nuit.

Dans la nuit, MBarka ne voit pas tous les ralentisseurs et sa Renault saute dans les cahots. La conduite en Tunisie à la tombée de la nuit n’est  pas de tout repos. Les vélos ne sont pas éclairés, les mobylettes roulent à contre-sens, les priorités sont aléatoires…il semble que tout le monde ait attendu 6heures pour sortir dans la rue, à pied ou véhiculé !

Arrivée à Djerba

CARNET : DJERBA ET  SUD TUNISIEN

 

de l'avion, arrivée sur Djerba
de l’avion, arrivée sur Djerba

Départ mouvementé

Le taxi nous a fait faux-bond , arrivé une demi-heure en retard après nombreux coups de téléphone. Première angoisse. Au contrôle de sécurité, la policière examine avec une lenteur extrême et une méticulosité provocatrice la « samaritaine ». Deuxième énervement. Au Duty Free, encore une employée qui ferme soigneusement, plie la facturette consciencieusement alors  que l’avion s’envole dans vingt minutes.

En vol

Oliviers, palmiers et menzel
Oliviers, palmiers et menzel

L’avion vole au dessus des nuages, je dors presque deux heures et me réveille au dessus de la mer. La Tunisie apparaît enfin, brune piquetée de vergers en tenue hivernale, parcelles géométriques qui se surimposent aux courbes de niveau, couturée d’une cicatrice ondulante d’une montagne aride.

A l’arrivée sur Djerba, une langue de sable s’étire dans l’eau. Non loin, un port est protégé dans un polygone de jetées. Sur terre, des constructions blanches se détachent sur la terre brune, quadrilatères avec parfois le minaret blanc d’une mosquée.

Houmt souk

Samiha et le chauffeur de l’Agence Djerba-autrement nous attendent. Comme avec Sonia, le contact est chaleureux et facile. Nous traversons Houmt Souk : des maisons blanches  basses dispersées dans la campagne, ronds- points, banques, quelques grands magasins. Ce qui frappe désagréablement ce sont les ordures dispersées, les poubelles renversées, des tas brûlés, d’autres pas. » Le problème des ordures est politique » affirme le chauffeur sans explications.

La maison de MBarka

la maison de MBarka
la maison de MBarka

Nous quittons la ville sans nous en rendre compte et arrivons chez MBarka. La grande maison carrée domine un jardin soigné au sol soigneusement ratissé, aux oliviers et arbres fruitiers florissants. Notre chambre se trouve à l’étage dans un grand appartement de trois chambres, grande salle,  vaste cuisine et terrasses. La famille Saïdi vit au rez de chaussée.

Avant le déjeuner, petit tour dans la campagne jusqu’à la petite mosquée El Gallel en traversant les olivaies. Diverses constructions neuve se trouvent dans des états de finitions diverses : l’épicerie en briques rouge a une allure modeste tandis que la villa de l’autre côté de la route est précédée d’un fronton à colonnade hellénistique. Nous marchons sur des tessons, débris de jarres ou de briques. Le minaret de la mosquée El Gallel  est surmonté d’un édicule rond évidé d’arcades  où sont situés les hauts parleurs qui nous réveillerons demain à 5h55.Je tente de dessiner les volumes compliqués, escaliers et contreforts adossés au mur blanc, encadrés par les feuillages argentés des oliviers et les pointes bleues des agaves.

Déjeuner sur la terrasse

couscous poisson!
couscous poisson!

MBarka nous a invitées à déjeuner. Dans sa cuisine mijotent un couscous-poisson, la chorba et les poulpes aux petits pois du diner. La salade est déjà prête dans un grand plat creux. Olives et huiles sont les produits du jardin ; la cueillette à la main est terminée. On ne gaule pas ni ne secoue les branches. Cela les abime. Les petites olives trempent dans la saumure, d’ici quelques jours on les changera de bain et on ajoutera le citron. Des piments fins et longs marinent avec le citron. MBarka fend 5 piments frais et les fourre de sel sans les égrener et les plonge ans l’huile afin de décorer avec le persil  le plat de couscous très jaune. Les poissons sont servis à part en tronçons et recouverts de persil.  La table est dressée sur la terrasse : belle nappe bleue, vaisselle de faïence bleue aux motifs de poissons.  Le repas est familial. Salah  va chercher une carte, nous indique la Chaussée romaine pour nous épargner l’attente du bac d’Ajim.  Oumeïma (17 ans) apporte son ordinateur, on navigue dans mon blog. Nous resterions ici à bavarder jusqu’au soir si MBarka ne remarquait pas que l’heure tourne et que l’après midi de visite sera courte.

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Douiret : nous logeons dans un ksar!

CARNET DJERBA ET SUD TUNISIEN

15h, nous approchons de Douiret dasn un décor de western avec des montagnes tabulaires où se détachent les bancs de roche plus compacte, agrémentés de quelques palmiers. Sous la pluie Douiret est désert. Deux femmes en costume rouge enveloppées de leur vaste châle blanc à rayures colorées, quatre hommes dans leur burnous montent sur une piste vers le ksar.

Nous aboutissons sur une plateforme sous les ruines. Aucune indication. Ici aussi pas de réseau Orange. Je continue à pied. Au tournant je découvre une maison, une porte ouverte et trois femmes. Latifa nous attendait.

 

10Elle nous conduit à un escalier qui grimpe à une terrasse. Notre chambre est dans le ksar. C’est une suite troglodyte composée d’une grande chambre avec deux lits et d’une petite avec un grand lit. Nous choisissons cette dernière éloignée de la porte et bien chaude. Des couvertures mousseuses, épaisses et fleuries recouvrent les lits. On en met une deuxième sur le nôtre. Pas de chauffage dans les chambres troglodytes, c’est inutile !Nous avons même eu trop chaud pendant la nuit et j’ai enlevé mes chaussettes de nuit et le châle indien que j’enroule pour dormir depuis Gabès. Pourtant dehors il gèle presque. On grelottait dans la salle à manger en parka. J’ai alors remarqué la pierre de taille : la salle à manger est ajoutée et non creusée dans la roche.

Deux thèses s’affrontent à propos de ces habitations troglodytiques. Selon l’une, les Berbères  s’y enfermaient pour résister aux nombreux envahisseurs, Romains, Vandales, Byzantins, Arabes, Ottomans… Selon Patrick, ce n’est pas une stratégie défensive mais plutôt une excellente adaptation des Berbères à un climat particulièrement contrasté, glacial l’hiver et torride l’été. Il me revient à la mémoire la visite à l’Albaicin à Grenade.

Le dîner est simple et revigorant : chorba piquante à souhait, brick à l’œuf exquis, léger, couscous pimenté mais carottes et navets éteignent le feu de la harissa, j’ai pris du piment vert très fort par erreur.

Latifa arrive après le dîner avec le thé et des cornes de gazelle (invention de Tataouine, rien à voir avec les cornes de gazelles marocaines qui sont sablées, celles du sud-tunisien sont frites et dégoulinantes de miel, fourrées aux amandes, dattes et sésame).

Latifa nous parle de l’Association qui rénove le village en partenariat avec des associations étrangères italiennes, espagnoles et françaises. En plus du projet d’hôtellerie et de la restauration de l’ancien village ruiné, il y a l’irrigation grâce à une pompe solaire (aide espagnole), une bibliothèque et de l’aide à la scolarisation des enfants orphelins ou démunis(France) . L‘association bénéficie aussi de subventions de l’Etat. Elle compte 10 permanents : 8 hommes et 2 femmes (Latifa et sa sœur). En 1985 les villageois ont quitté l’ancien village. 1986, création de l’Association. Il a fallu d’abord obtenir l’accord de tous les propriétaires. Les gens du village s’emploient à la restauration. Pour ne pas commettre d’erreur il faut connaître la culture berbère et employer des matériaux et des techniques traditionnels.

Tunis connection, Printemps de Tunis, lectures avant le départ

TUNISIE

printemps de tunis

Vendredi, nous serons dans l’avion pour Djerba. Premier voyage en Tunisie. Quelles lectures? Bien sûr j’ai téléchargé Salambô et lu une biographie d’Hannibal. L’ Histoire antique m’intéresse mais la Tunisie s’est invitée dans les actualités télévisées récemment et nous assisterons au 2ème tour des élections présidentielles. 

J’ai donc cherché des ouvrages sur la Révolution de jasmin.

TUNIS CONNECTION de Lenaig Bredoux et Mathieu Magnaudeix

tunis connection

 

Les auteurs sont journalistes de Mediapart.

C’est une enquête très fouillée et circonstanciée sur les rapports entre la France et le pouvoir de Ben Ali.
Emprunté quelques semaines avant notre départ en Tunisie, j’espérais en apprendre plus sur le pays.
Gauche, droite, diplomates, hommes d’affaires ou de média, en France, tout le monde a fermé les yeux sur les entorses (le mot est faible) aux droits de l’homme de Ben Ali et de sa clique et sur la corruption. Peur de l’Islamisme, attachements sentimentaux ou familiaux, plaisirs de la plage, du soleil….
L’enquête est intéressante mais très franco-française.

PRINTEMPS DE TUNIS de  Abdelwahab Meddeb

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Abdelwahab Meddeb est le co-auteur avec Benjamin Stora de la magistrale Histoire des relations entre juifs et musulmans...

 

C’est en feuilletant ce gros livre qui ressemble plus à une encyclopédie que j’ai eu l’idée de télécharger le Printemps de Tunis

 

 

« Le 14 janvier est un évènement qui a pour vertu de confirmer que l’histoire ne s’arrête pas. Le désir de liberté et l’appel à la démocratie ont émané du cœur d’un peuple d’islam informé de la référence occidentale assimilée à un acquis universel dont jouit tout humain »

Abdelwahab Meddeb raconte la Révolution de Jasmin,  du 17 décembre 2010  Mohamed Bouazizi s’est immolé par le feu à Sidi Bouzid au départ de Ben Ali le 14 janvier 2011, et les jours où la démocratie s’est imposée jusqu’à la fin de janvier 2011.

« bienvenue au temps qui renoue avec la médiévale courtoisie, d’Ibn hazim à guillaume d’Aquitaines, d’Ibn Arabi à Dante[…] C’est un concert qui emporte dans son sillage tant d’idiomes romans dont je reçois les échos dans Tunis donné à la révolution »

C’est à la fois un livre très personnel et très optimiste, regard éclairé d’un intellectuel qui cite aussi bien La Boétie que Ibn Arabi, le soufi. Meddeb convoque aussi bien Hobbes que Condorcet pour analyser la dictature de Ben Ali. Il impute à Bourguiba une part de la responsabilité du régime autoritaire tout en lui accordant le mérite d’avoir promu l’éducation et la laïcité. Selon lui « l’état créé par Bourguiba a une triple genèse » : la domination du parti unique, « l’exercice de l’autorité de Bourguiba procède de l’émirat » le comparant à Haroun al-Rachid. Ben Ali ayant transformé cette autorité en état-voyou à caractère mafieux. 

Dans le déroulement de la révolution il met en avant l’importance cathartique du bûcher de Bouazizi « cette révolution du  jasmin eût pu s’appeler la révolution du phénix » .

« L’instrument de cette révolution aura été Internet. » En Tunisie et dans la blogosphère mondiale où 8000 hackers ont répondu à l’appel à Anonymeous contre la cyberpolice avant la chute de Ben Ali. la circulation des images ont aussi galvanisé les foules.

Se laissant porter par l’euphorie, il parle d’une révolution aimable, polie, même.

« Les femmes en Tunisie m’impressionnent par la manière souveraine avec laquelle elles vivent leur conquête. »

 

Il est conscient que le moment de grâce ne durera pas.

« Quand la poésie de la révolution se retirera, comment nous accomoderons- nous de la prose du quotidien? »

La condition de la réussite de la révolution est l’indépendance de la justice. note-t-il plus loin.

Le rôle des forces armées est aussi essentiel. Certains officiers sont entrés en rébellion et ont terrorisé les populations. L’autre péril est celui de la récupération islamique.

La ré-islamisation des sociétés par les télévisions arabiques n’est pas à négliger.  Même les rappeurs sont touchés par cette tendance observe-t-il. Si la tendance laïque et séculière domine, l’islam politique est une force organisée qui possède une stratégie élaborée.

« Ceux qui sont dans la passion et dans la technique du militantisme politique, ce sont les islamistes. la jeunesse populaire est infra-politique. Celle des classes moyennes qui s’est ralliée via Internet est post-politique ; elle est semblable aux jeunesses européennes et occidentales : elle partage leur défiance du politique sans qu’elle en ait goûté la saveur »

L’histoire continue, il faudra que j’en trouve la suite. les élections me donneront peut-être l’occasion d’un nouvel épisode.

 

 

 

Hannibal Barca – Abdelaziz Belkhodia

LIRE POUR LA TUNISIE 

Hannibal barca

Le souvenir des  Guerres Puniques est bien flou depuis le lycée: »Carthago delenda est  » de Caton l’ancien,  les éléphants passant les cols Alpins, les délices de Capoue aussi et le Lac Trasimène. Finalement, beaucoup de choses 50 ans après. 

Nous avons croisé les traces des Carthaginois en Sicile, en Sardaigne récemment. Bientôt nous serons en Tunisie. Nous ne visiterons pas Carthage mais Gabès. J’ai donc eu envie de mieux connaître ce héros presque aussi célèbre qu’Alexandre. De nombreux ouvrages actuels lui sont consacrés. Lequel choisir? Au hasard d’Amazon, j’ai téléchargé celui-ci.

C’est une biographie un peu sèche – nous ne nous promènerons pas dans les jardins d’Hamilcar – c’est prévu , j’emporte Salambô dans ma valise. Basée sur les textes  de Polybe et de Tite-Live, elle s’attarde peu sur le personnage . En revanche, elle détaille avec vivacité les exploits stratégiques, les ruses, les hardiesses du génial capitaine d’armée.  C’est amusant au début, lassant parfois.

L’originalité de ce texte est l’analyse politique presque militante. Abdelaziz Belkhodia fait d’ Hannibal le champion des peuples contre l’impérialisme de Rome réalisé au détriment de la liberté et de la diversité.

« cette pax romana s’est réalisée au détriment de la liberté et de la diversité : Rome a laminé toutes les autres civilisations en imposant une standardisation dont les effets ont été humainement, culturellement et politiquement dévastateur »

l’auteur décrit un monde méditerranéen  encore divisé. Ibères, Gaulois, Italiques, Grecs, Macédoniens, Siciliens ou Numides,  se combattent, s’allient, retournent les traités et les alliances contre Rome, ou contre les Carthaginois.
Il analyse  la vie politique de la République romaine, où les intrigues au Sénat se jouent à coup de bluff, parfois de corruption. Les Scipion n’y ont pas toujours le beau rôle.
A Carthage, deux clans s’affrontent : les Conservateurs qui tiennent le Sénat et la vie politique de la métropole punique, et l’Armée acquise aux Barca. Hamilcar, le père  est parti coloniser l’Espagne avec Hasdrubal et ses fils. Le plus fameux, Hannibal auréolé de sa gloire militaire mais politiquement impuissant. Selon l’auteur, les défaites italiennes d’Hannibal, devant Rome puis à Capoue auraient été imputables au refus de Carthage d’envoyer des renforts plus qu’à la puissance des légions romaines et de leurs stratèges.

Hannibal_traverse_le_Rhône_Henri_Motte_1878
Hannibal traverse le Rhône Henri Motte 1878

A propos de la traversée des Alpes, il écrit :

« la prouesse est herculéenne, ceux qui y ont participé se sentent immortels, plusaucune épreuve ne peut les abattre. Avant même de combattre els légions romaines, Hannibal a gagné la légende…. »

Les batailles de la Trébie, de la traversée des marais de l’Arno, du lac Trasimène et de Cannes suscitent le même enthousiasme…Le génie, l’inventivité d’Hannibal sont imprévisibles et victorieux. Un tremblement de terre pendant la bataille de Cannes passe même inaperçu.

Belkhodia présente l’ultime bataille, celle de Zama, comme un coup de bluff, un mensonge de Scipion.La bataille de Zama, défaite d’Hannibal, ne se serait peut être jamais déroulée.Scipion aurait joué des rivalités carthaginoises entre les sénateurs et Hannibal.

« en stratège politique, Scipion a préparé son plan qui consiste à défaire quelques armées carthaginoises de troisième ordre et à donner aux sénateurs carthaginois l’occasion qu’ils attendent si impatiemment de signer un armistice »

L’histoire aurait été falsifiée pendant des siècles par la censure romaine qui s’exerçait encore au temps de Domitien pour faire disparaître à jamais la gloire d’Hannibal. Thèse surprenante, mais les réécritures de l’histoire par la puissance victorieuses sont courantes.

La thèse est originale. Militant de la décolonisation? Ou hagiographe du héros carthaginois?

Il faut être féru d’histoire romaine pour apprécier ce livre, et aimer récits de batailles.

Je n’ai pas épuisé le sujet, l’Histoire de Polybe est téléchargeable pour 5€ mais 1500p) et les biographies sont nombreuses. Un récit de Rumiz dans les pas d’Hannibal me tente aussi. La PAL s’alourdit!