CARNET TUNISIEN DU NORD AU SUD
Petit déjeuner extraordinaire aussi bien pour les goûts que pour la présentation. Sur un disque lourd et chaud, nous avons trouvé deux galettes de pain épaisses et savoureuses. A la farine de blé sont mêlées des particules de pulpe d’olive, une fois l’huile pressée. Les œufs sont dans de grosses coques, et une tranche de faisselle, dans un pecten. Des yaourts maison, dans des pots de céramique grise vernissées ; Des substances mystérieuses et nouvelles sont disposées dans des coupelles : du miel onctueux, de l’huile d’olive, une pâte verte recouverte d’amandes et une pâte brune à déguster avec des figues séchées. Les pâtes des coupelles m’intriguent : la verte contient des pois chiches, du sésame, des pistaches et encore d’autres graines. La pâte brune restera mystérieuse.
Malgré les prévisions météo très pessimiste, le soleil brille dans les flaques que la nuit a laissées sur la terrasse.
Rahma me montre son pressoir à huile, cuve en poterie de la taille d’une bassine pour laver le linge. Elle écrase les olives à la main avec une meule pour la première pression, avec ses pieds pour la seconde, la troisième se fera en ajoutant de l’eau. L’huile du petite déjeuner, excellente, provient de la seconde pression. On réserve la première qui donne de très petites quantités à des fins médicinales « pour la gorge des bébés ».
Nous retournons en direction du débarcadère et tournons au carrefour où une kerkennaise de ciment peint pétrit une pâte. On a aménagé une promenade sur la corniche bordée par des bornes bleues et blanches qui interdisent la circulation des véhicules à moteur. . C’est marée basse. Le Golfe de Gabès et les îles Kerkennah connaisse de véritables marées. Bateaux et barques gisent sur le sable mouillé luisant. A intervalles réguliers, des casiers en plastique. On sait qu’à Kerkennah depuis les Ottomans, le cadastre s’étend aux fonds marins.
En marchand le long du rivage, j’observe les maisons cherchant à déterminer un « style kerkennien » commun aux habitations. Difficile à affirmer, maisons blanches, ou crème. Chacun cherche à apporter une touche d’originalité : les portes sont souvent bleues, mais aussi rouge, vertes, marron, les encadrements souvent sont sculptés, linteaux ciselés. Plus loin, dans l’île, les beaux hôtels adopteront le bleu et les ferronneries. Dans les villages misérables, les maisons sont parfois dans un état de délabrement désolant, parpaing et ciment dans des ruelles boueuses qui paraissent encore plus déshéritées sous la pluie. Si je ne suis pas arrivée à trouver un style typique pour les maisons, il n’en est pas de même pour les bateaux. Le bateau traditionnel est le loud. Une grande barque à fond plat, deux mats, l’un incliné à 60° l’autre horizontal. Les couleurs varient peu, le plus souvent le dessus est bleu, le dessous rouge foncé ou marron. La proue est marquée de blanc tandis que des bandes égaient les bords. Au port d’El Ataya, les bateaux de pêches à moteur ressemblent à ceux des autres ports de pêche tunisiens. Mais les couleurs n’ont pas changé.

Nous avons traversé la zone hôtelière sur la côte qui fait face à Sfax. Il y a quelques jolis petits hôtels. Rien de comparable aux urbanisations de Tabarka ou de Hammamet.
Un peu plus loin, perché sur une butte : le fort ottoman de Borj el-Hassar : sur uneasisse ronde épaisse, un petit fort carré domine le détroit. Kerkennah fut successivement numide, punique (Hannibal y trouva refuge pendant sa fuite), romaine, normande(1153-1187), aragonaise(1287-1307, sous l’autorité du Pape, et finalement ottoman.1574.
Nous nous engageons dans la palmeraie d’abord sur une petite route goudronnée qui arrive à une usine que de prends pour une unité de dessalement mais qui est peut-être une installation gazière de Petrofac. On continue sur des pistes. Dépaysement total – on se croirait en Afrique – pense-ton – mais on est en Afrique ! Au bout de la piste, quelques bateaux hissés à terre, une maison ? une coupole : un marabout ? Avec la pluie je dessine à l’intérieur de la voiture par morceaux, successivement un bateau, la maison et les palmiers.
Nous retournons dans la zone hôtelière déjeuner à l’hôtel Cercina où il y a de la Wifi afin de télécharger le Monde et envoyer quelques photos. On prend un brick à l’œuf et un café. L’ »espresso » a un goût très prononcé de nescafé mais on ne peut pas leur en vouloir nous sommes les seules clientes. C’est infect mais cela réchauffe.
Nous arrivons au bout de la route au port de El Ataya . la mer est verte avec des crêtes blanches. Les bateaux s’entassent à quai, ils ne sont pas sortis avec le mauvais temps. La promenade continue ici en corniche sur une digue surélevée. Bonnet sur la tête, capuche de la parka sur le bonnet mains gantées enfoncées ans les poches, je goûte la promenade sous la pluie. Les flaques ont noyé le terre-plein. J’ai l ‘impression de marcher dans la mer. Non loin il y a une île déserte. Je ne suis pas seule à me balader ; Trois filles – 14 ou 15 ans – marchent la tête dans leur écran de téléphone. Dans la rue du village les gens sortent, burnous à capuche pointues, femmes enveloppées d’un voile beige traditionnel, d’autres superposent des couches de tissus colorés.
Le jour décline. Les palmiers se balancent sur le ciel rose. Un arc-en-ciel fait une furtive apparition. Nous le poursuivons pour la photo. Nous avons tant tourné que nous nous avons perdu le nord. Sur quelle route sommes-nous donc ; la nuit va tomber et peut être roulons-nous à contre-sens ? On finit par se guider aux bornes qui indique Ramla. Nous rentrons à 17h30, la nuit est tombée.