Kerkennah sous la pluie

CARNET TUNISIEN DU NORD AU SUD

Petit déjeuner extraordinaire aussi bien pour les goûts que pour la présentation. Sur un disque lourd et chaud, nous avons trouvé deux galettes de pain épaisses et savoureuses. A la farine de blé sont mêlées des particules de pulpe d’olive, une fois l’huile pressée. Les œufs sont dans de grosses coques, et une tranche de faisselle, dans un pecten. Des yaourts maison, dans des pots de céramique grise vernissées ; Des substances mystérieuses et nouvelles sont disposées dans des coupelles : du miel onctueux, de l’huile d’olive, une pâte verte recouverte d’amandes et une pâte brune à déguster avec des figues séchées. Les pâtes des coupelles m’intriguent : la verte contient des pois chiches, du sésame, des pistaches et encore d’autres graines. La pâte brune restera mystérieuse.

Malgré les prévisions météo très pessimiste, le soleil brille dans les flaques que la nuit a laissées sur la terrasse.

Rahma me montre son pressoir à huile, cuve en poterie de la taille d’une bassine pour laver le linge. Elle écrase les olives à la main avec une meule pour la première pression, avec ses pieds pour la seconde, la troisième se fera en ajoutant de l’eau. L’huile du petite déjeuner, excellente, provient de la seconde pression. On réserve la première qui donne de très petites quantités à des fins médicinales « pour la gorge des bébés ».

Nous retournons en direction du débarcadère et tournons au carrefour où une kerkennaise de ciment peint pétrit une pâte. On a aménagé une promenade sur la corniche bordée par des bornes bleues et blanches qui interdisent la circulation des véhicules à moteur. . C’est marée basse. Le Golfe de Gabès et les îles Kerkennah connaisse de véritables marées. Bateaux et barques gisent sur le sable mouillé luisant. A intervalles réguliers, des casiers en plastique. On sait qu’à Kerkennah depuis les Ottomans, le cadastre s’étend aux fonds marins.

En marchand le long du rivage, j’observe les maisons cherchant à déterminer un « style kerkennien » commun aux habitations. Difficile à affirmer, maisons blanches, ou crème. Chacun cherche à apporter une touche d’originalité : les portes sont souvent bleues, mais aussi rouge, vertes, marron, les encadrements souvent sont sculptés, linteaux ciselés. Plus loin, dans l’île, les beaux hôtels adopteront le bleu et les ferronneries. Dans les villages misérables, les maisons sont parfois dans un état de délabrement désolant, parpaing et ciment dans des ruelles boueuses qui paraissent encore plus déshéritées sous la pluie. Si je ne suis pas arrivée à trouver un style typique pour les maisons, il n’en est pas de même pour les bateaux. Le bateau traditionnel est le loud. Une grande barque à fond plat, deux mats, l’un incliné à 60° l’autre horizontal. Les couleurs varient peu, le plus souvent le dessus est bleu, le dessous rouge foncé ou marron. La proue est marquée de blanc tandis que des bandes égaient les bords. Au port d’El Ataya, les bateaux de pêches à moteur ressemblent à ceux des autres ports de pêche tunisiens. Mais les couleurs n’ont pas changé.

bateau traditionnel de Kerkennah

Nous avons traversé la zone hôtelière sur la côte qui fait face à Sfax. Il y a quelques jolis petits hôtels. Rien de comparable aux urbanisations de Tabarka ou de Hammamet.
Un peu plus loin, perché sur une butte : le fort ottoman de Borj el-Hassar : sur uneasisse ronde épaisse, un petit fort carré domine le détroit. Kerkennah fut successivement numide, punique (Hannibal y trouva refuge pendant sa fuite), romaine, normande(1153-1187), aragonaise(1287-1307, sous l’autorité du Pape, et finalement ottoman.1574.

Nous nous engageons dans la palmeraie d’abord sur une petite route goudronnée qui arrive à une usine que de prends pour une unité de dessalement mais qui est peut-être une installation gazière de Petrofac. On continue sur des pistes. Dépaysement total – on se croirait en Afrique – pense-ton – mais on est en Afrique ! Au bout de la piste, quelques bateaux hissés à terre, une maison ? une coupole : un marabout ? Avec la pluie je dessine à l’intérieur de la voiture par morceaux, successivement un bateau, la maison et les palmiers.

Nous retournons dans la zone hôtelière déjeuner à l’hôtel Cercina où il y a de la Wifi afin de télécharger le Monde et envoyer quelques photos. On prend un brick à l’œuf et un café. L’ »espresso » a un goût très prononcé de nescafé mais on ne peut pas leur en vouloir nous sommes les seules clientes. C’est infect mais cela réchauffe.

Nous arrivons au bout de la route au port de El Ataya . la mer est verte avec des crêtes blanches. Les bateaux s’entassent à quai, ils ne sont pas sortis avec le mauvais temps. La promenade continue ici en corniche sur une digue surélevée. Bonnet sur la tête, capuche de la parka sur le bonnet mains gantées enfoncées ans les poches, je goûte la promenade sous la pluie. Les flaques ont noyé le terre-plein. J’ai l ‘impression de marcher dans la mer. Non loin il y a une île déserte. Je ne suis pas seule à me balader ; Trois filles – 14 ou 15 ans – marchent la tête dans leur écran de téléphone. Dans la rue du village les gens sortent, burnous à capuche pointues, femmes enveloppées d’un voile beige traditionnel, d’autres superposent des couches de tissus colorés.

Le jour décline. Les palmiers se balancent sur le ciel rose. Un arc-en-ciel fait une furtive apparition. Nous le poursuivons pour la photo. Nous avons tant tourné que nous nous avons perdu le nord. Sur quelle route sommes-nous donc ; la nuit va tomber et peut être roulons-nous à contre-sens ? On finit par se guider aux bornes qui indique Ramla. Nous rentrons à 17h30, la nuit est tombée.

 

 

 

 

 

 

 

 

Alham – Marc Trévidic

LECTURES TUNISIENNES

J’aurais aimé lire ce livre sur place à Kerkennah!

 

Je l’ai trouvé à notre retour et lu, la tête dans les images que nous avons rapportées, de felouques, pêcheries, palmiers et terres salées…..

 

Un peintre, Paul Arezzo,  vient se remettre d’un chagrin d’amour à Kerkennah, il retrouve la sérénité dans la douceur des îles et recommence à peindre. Il se lie d’amitié avec un pêcheur et sa famille.

« Autour de l’archipel, la mer était divisée en chrafis, pêcheries parfois délimitées par des barrières de feuilles de palmiers attachées les unes aux autres. Mais les délimitations physiques n’étaient pas nécessaires. chaque pêcheur savait à peu près où il avait le droit de pêcher et la triche n’était pas tolérée. « 

Jusque là j’ai beaucoup aimé l’évocation de l’île, les promenades en mer, la pêche,  les maisons basses avec le linteau des portes sculpté.

Vient le drame, Nora, la femme de Farhat, meurt d’une leucémie laissant deux enfants particulièrement doués, Issam l’ainé, pour la peinture, Alham, la cadette, pour la musique. Paul conduit une curieuse expérience artistique, alliant poésie, couleurs et rythmes et notes de piano. Recherche de l’art total! Thème intéressant  que l’auteur a développé en détail,  un peu trop peut être?

« marier les mots et les couleurs, c’était aller bien plus loin que Rimbaud. C’était inventer la peinture toujours modifiable, toujours perfectible : une rime qui change ici, une couleur qui change là »

Sous Ben Ali, les opposants, souvent des islamistes, sont traqués. Le père et le frère du meilleur ami d’Issam sont emprisonnés. Avec l’adolescence, Issam se dégage de l’emprise de Paul et se radicalise. Il rejette la peinture contraire à la pratique de l’Islam selon ses nouveaux camarades de lutte.

Vient la Révolution de 2011. Le frère a rejoint les salafistes, la sœur les étudiants révolutionnaires.

Evidemment cela se passe très mal.

Les mécanismes de radicalisation, les manipulations des islamistes, la propagande par Internet sont décrites dans le détail. Cela m’a interpellée. Une rapide recherche sur Internet m’a donné l’explication : l’auteur, Marc Trévidic, est un magistrat spécialisé dans l’anti-terrorisme. Il est donc très bien renseigné!

Joli roman d’amour.

Réflexion sur la pratique artistique, mais de là se comparer à Rimbaud! un pas qu’il n’aurait peut être pas dû franchir!

Révolution et djihadisme…en font un livre intéressant, j’aimerais connaître l’opinion des Tunisiens cependant.

 

Arrivée aux îles Kerkennah

CARNET TUNISIEN DU NORD AU SUD

Arrivée à Kerkennah

de Kairouan à Sfax

La Route P2 file vers le sud, passe par Rakada où un musée est installé dans un Palais. Alternance d’oliviers et de champs de céréales. On cultive ici les piments rouges qu’on enfile pour faire des colliers qui se vendent sur les bords de la route. On voit partout ces étalages et aussi les piments qui sèchent au sol. On vend également de l’essence de contrebande.

A Bouhajila, nous quittons la grande route pour la route de Sfax à un rond- point où se trouve un cavalier. Cette route est presque déserte, on passe des huileries, j’en compte plus de 12. Oliveraies tout au long de la route, sur des kilomètres. Les arbres sont espacés, on labour entre les rangées laissant la terre tassée autour de l’arbre. On double des camions et des pick-up chargés de sacs de jute contenant les olives, un camion transporte de la pulpe, monstrueuse tapenade.

Parfois, on alterne oliviers et amandiers, jeux de lumières et d’ombres sur les sillons de terre brune aux courbes inattendues.

Sfax

Quand on entre dans le Gouvernorat de Sfax  il y a une grande étendue blanche : la sebkha er Rassa. Vers la mer l’horizon se grise, une barre nuageuse se fait plus menaçante et à l’arrivée en ville, il pleut. Nous arrivons à Sfax par la route de Gremda, c’était justement l’adresse des chambres d’hôtes Dar Salma, que nous avions beaucoup aimé. Passant devant les murs de la Medina de Sfax, j’ai des souvenirs très précis de notre premier passage, il me semble voir la place de parking où nous avions retrouvé nos hôtes. Ces souvenirs ne suffisent pas pour qu’on trouve le port (nous étions allées au ferry en taxi). Heureusement un jeune à vélo nous remet sur le chemin avec des explications claires.

Le bateau ne partira qu’à 12h30, il faut attendre une bonne heure dans la voiture. Le passage ne coute que 7dt (5 pour la voiture 2 pour les passagers soit un peu plus de 2€).

Ferry

J’adore les bateaux, ces traversées tranquilles, moments de rêve et de vacuité, un peu planants, où on se prépare pour de nouvelles aventures. Je guette la côte qui se rapproche. Panaches de palmiers émergeant presque de la mer tant les îles sont plates. Les pêcheries, charfia, traditionnelles de Kerkennah, filets formant des pièges en forme de flèches. Les Kerkenniens possèdent de véritables titres de propriétés sur les hauts fonds marins octroyés par les Ottomans nous a raconté notre hôtesse.

Maison d’Hôtes : MANARET KERKENNAH

Le ciel s’assombrit, la pluie s’abat sur l’île. Le tapis de fleurs jaunes, moutardes sauvages (diplotaxis) contraste avec le ciel si gris. Les îles Kerkennah sont un chapelet d’îles reliées par des ponts. La Maison d’Hôtes MANARET KERKENNAH se trouve à Ouled Yaneg, dans la deuxième île.

On reconnaît la maison à sa tour de pierre, le mur de pierre cache un ensemble de bâtiments sur trois niveaux ; Le logis de notre hôtesse et le jardin sont au rez-de-chaussée, un escalier mène à une vaste terrasse. C’est là que s’ouvre notre chambre (et deux autres) . A l’étage, des petits appartements s’ouvrent sur une autre terrasse, derrière, dans la cour, un olivier ; Rahma était en train de récolter ses olives. Elle me montre son charfia et la barque rouge qui permet d’y aller « demain s’il fait beau…. »

Notre chambre est crépie, couleur sable, certaines pierres sont apparentes mais en creux. L’armoire est intégrée dans le mur avec une porte coulissante. Le lit est dans une sorte d’alcôve, avec des niches dans le mur formant table de nuit, et des lucarnes. Près de la baie vitrée, un canapé bleu au bois peint de motifs floraux et au-dessus une fresque bleue peintre par un peintre de Kerkennah : deux pêcheurs dans une barque rouge et blanche relèvent des filets. Un coffre ancien et une table basse complètent l’ameublement. C’est sobre, moderne, de bon goût !Rahma et son mari ont construit eux même la maison dans le style kerkennien.

Promenade en bord de mer

 

Après la grosse averse, le soleil est revenu, nous partons en exploration, traversons Ramla – la capitale – et suivons la mer. Je suis à pied la promenade en cailloutis. Des petites barques colorées, quelques palmiers, des maisons basses blanches ou pas terminées, ciment et briques. Une digue avance dans la mer. Un peu plus loin, une belle coupole blanche sur laquelle se détachent ls silhouettes de trois palmiers. Plus loin, une mosquée crème. Un homme, adossé, téléphone. Trois silhouettes féminies, mère et filles emmitouflées, bonnets et capuches, le vent est très frais.

Une voiture de police s’arrête à notre niveau et contrôle les passeports très sérieusement. « Montrez le tampon d’entrée en Tunisie ! ». Nous n’avons pourtant pas le profil d’immigrés clandestins ! « C’est pour votre sécurité ! » nous serine-t-on partout. Les policiers sont bienveillants mais pas laxistes.

Le soleil descend tôt, c’est le solstice d’hiver ! Avec les flaques, le coucher de soleil flamboie aussi bien sur terre que sur la mer.  Sur les îles Kerkennah la notion de terre et de mer est très floue. Les bancs de nuages accentuent l’éclairage théâtral. Les palmiers se détachent sur le rose du ciel longtemps plus tard. Le retour est somptueux.

Dîner gastronomique

A notre retour, Adam, le fils de la maison, ouvre le portail et court partout pour les illuminations colorées qui mettent en valeur les jarres dans les niches. La chambre est glaciale, le climatiseur tourne à plein pour dégourdir l’atmosphère. Le dîner se chargera de nous réchauffer : la soupe au poulpe, rouge et bien épicée avec de la semoule pour donner de la consistance. Une assiette de la mer suit : poulpe, seiche, crevettes et deux très grosses gambas. Les lanières de seiche et le poulpe sont fondants. Habituellement c’est élastique. Je demande le secret à Rahma : « on les bat, on les sale, on les lave », pas de préparation spéciale et pourtant c’est exceptionnel.

 

 

 

 

 

 

 

 

Kairouan : médina (bis)

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Restaurant de poisson

La gargote de poissons grillés est pleine. Justement une table se libère que le serveur débarrasse sommairement. Il apporte deux assiettes de salade de crudités qu’on ne touchera pas, des frites, une salade de poivrons (piments) grillés additionnés de harissa et beaucoup d’huile, du pain et ensuite une dorade chacune avec du persil. Nos voisins mangent avec les doigts et crachent les arêtes sur les nappes en papier. On nous apporte des couverts. Le poisson est excellent, frais et bien cuit. Seule surprise : l’addition 30 dinars, on a dû nous faire le « prix-touristique ».

Médina (bis)

La Mosquée aux trois portes est un des plus anciens monuments de Kairouan (866) de petite taille, sa façade est recouverte d’un texte calligraphié en écriture coufique. Pour y parvenir, un homme me conseille de prendre une rue et de continuer « direct ». La rue est courbe et sinueuse, au hasard, en évitant les impasses, je passe dans des ruelles désertes, blanches aux portes et fenêtres bleues. Je remarque des plaques en céramique qui balisent un itinéraire touristique et qui me rassurent. Un enfant me suit  se plante devant moi et esquisse un signe de croix avec effronterie, comment interpréter ce geste ? Une petite mosquée blanche porte deux colonnes antiques sur le mur extérieur.

La mosquée aux trois portes

La mosquée aux trois portes est bien nommée : ses trois portes occupent toute la façade.

FAçade Mosquée aux trois portes : détail

Je continue le circuit touristique par des rues tranquilles où il y a seulement de petites échoppes qui vendent des recharges de téléphone et des fruits secs (et des milliers de bricoles).

maison du gouverneur

La Maison du Gouverneur  est mi-musée, mi-boutique de tapis ; On passe du patio couvert/salon d’apparat à des chambres luxueusement meublées, bois peint, tissus brillants, lits clos…Le vendeur déroule des tapis de Kairouan en sa plaignant de la Crise, de l’absence des touristes qui nuit au commerce. Il accorde de généreux rabais.

Zaouia al Ghariani

Enfin, j’arrive à la Zaouia Sidi Abib Al Ghariani construite au 14ème siècle. Elle a un joli patio aux arcades blanc et noir et au très beau dallage au sol. Les plafonds aussi sont remarquables. Les carrelages aux murs rappellent ceux de la Mosquée du Barbier.

Je reviens par le Bir Barouta, le puits au dromadaire prisonnier à l’étage. La Mosquée du Bey est elle aussi perchée (on ne visite pas). Les pâtisseries sont bien tentantes. Je ne résiste pas au plaisir de les photographier les pyramides de makroud dans les petites roulottes vitrées.

Hôtel Kasbah : café maure

Nous rentrons à l’hôtel au coucher du soleil sous une merveilleuse lumière qui colore minarets et coupoles. C’est l’heur où ouvre le Café Maure dans une galerie aveugle à arcades très hautes de briques. A quoi pouvait donc servir cet endroit ? Prison, arsenal, salle de garde ? Tapissé de kilims, avec des coussins sur des banquettes. Eclairage tamisé. Une musique s’échappe d’une radio ancienne en bois. Sur une table au fond du couloir, une rangée de narguilés. Quand on regarde les photos, on pense plutôt à un autel dans une crypte. Dans chaque alcôve, un couple se pelote en douce. Pas très catholique !

Un car de Japonais est arrivé, pantalons et chaussures de randonnées, gilets sans manches matelassés.

La salle à manger est pleine, en plus des Japonais, il y a un séminaire d’entreprise. On nous assigne une table. Avec cette affluence, le buffet est décoré de légumes sculptés : citrouille, carottes, concombres. C’est très joli. Les salades ont été renouvelées. Point de vue gustatif, c’est toujours la cantine. Les dîners-buffets des hôtels sont parfaitement décevants.  Choix entre légumes insipides et trop cuits, trop gras, viandes tièdes. Desserts écœurants.

 

Klee en Tunisie – Nizar Mouakhar – Les éditions du Net

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Klee est un peintre que j’aime depuis toujours. L‘exposition Bauhaus et les lectures sur ce thème , entre autres, Le Bal  mécanique de Yannick Grannec, l‘exposition Schoenberg….m’ont donné envie de creuser ce sillon. Le voyage de Klee en Tunisie est un événement marquant dans l’oeuvre du peintre. Il l’a raconté dans son journal.

Nizar Mouakhar écrit : « C’est grâce à cette virée tunisienne de 1914 que Paul Klee a pu saisir, in fine le miracle prophétique de la couleur. 

Trouvé par les algorithmes de Babélio ou d’Amazon, j’ai donc commandé ce livre.

J’ai été surprise en ouvrant le paquet : un mince opuscule de 41 pages, y compris les blanches, la table des matières et la bibliographie. Pour 13€, cela fait cher de la page de lecture! Des illustrations? Bof : une photo d’époque (6cmx6cm) et une reproduction en couleur du tableau Devant les Portes de Kairouan, encore plus petite. Cela fait cher de la page de lecture!

Le contenu en valait-il la peine?

L’étude du tableau Devant les Portes de Kairouan est bien conduite :

 » Cette oeuvre est l’une des dernières aquarelles du voyage de Klee en Tunisie. Elle fut réalisée le jour-même où Klee déclara avoir acquis la certitude d’être enfin peintre ».

L’auteur  analyse avec précision la construction du tableau, , l’organisation des formes et des couleurs, les espaces vierges, les relations centre-périphérie….

Je n’ai pas tout compris mais c’est une façon de regarder avec attention ce tableau qui est vraiment un chef d’oeuvre.

Toutefois j’aurais mieux fait de commander le Journal de Klee ed. Les Cahiers Rouges et le livre de Duvignaud : Klee en Tunisie

 

Kairouan : Grande Mosquée, mausolées

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La grande Mosquée

Kairouan, selon les Kairouannais, est la 4ème ville sainte de l’Islam. Les villes saintes me font peur. La Grande Mosquée m’a intimidée. Puisque on vend aux touristes un tickets, c’est qu’on peut la visiter. Je vérifie que mon foulard de Samarcande est bien dans mon sac. Nous partons à 9h ce qui est tôt en Tunisie. Les rues ne s’animent pas avant 9h45. Nous trouvons les parvis vide. .  On a prêté un foulard rouge à Dominique.  Un homme nous accueille chaleureusement et nous fait l’honneur d’un guidage bénévole.

Il nous montre les chapiteaux et les colonnes antiques réemployées : « il n’y en a pas deux kif-kif ». Les bâtisseurs ont bien choisi : elles sont magnifiques, innombrables. Ni le guide Bleu ni le guide Gallimard n’en livrent le décompte exact. Les plus belles, colorées, encadrent la grande porte de la salle de prière.

Dans la vaste cour dallée on peut observer le puits, une ancienne colonne évidée, usée par les cordes qui ont remonté le seau pour les ablutions pendant des siècles. Des trous collectent les eaux de pluie. La cour de la mosquée est comme souvent une grande citerne. L’inclinaison du pavage a été calculé pour collecte l’eau au centre où une sorte de labyrinthe retient les impuretés.

Un cadran solaire est percé sur un piédestal. Le calcul de l’heure pour appeler à la prière a toujours été un souci chez les Musulmans ?

La porte du minaret est particulièrement soignée, encadrée de frises délicates (encore du réemploi) juste à côté des blocs présentent des inscriptions latines ?

Je m’apprêtais à entrer dans la salle de prière, bien couverte, voilée, et déchaussée, quand un homme lourd et peu amène vient m’en chasser. « Ici c’est pour les Musulmans ! ». Je ne me laisse pas démonter : »et comment savez vous si je suis musulmane ou non ? » « Ici, c’est pour prier, vous n’avez pas fait vos ablutions ! Pour les photos, faites-les de l’extérieur ! »

 

L’homme qui nous a guidée me conduit sur une terrasse d’où je peux avoir une vue sur toute la Grande Mosquée. Au rez de chaussée, il y a un magasin de tapis où l’on m’accueille avec du thé et des gâteaux. Je refuse les gâteaux, accepte le thé, ce serait impoli. Mais comme hier j’annonce que je n’ai pas l’intention d’acheter un tapis. « Cela ne coûte rien de regarder ». Les prix sont tout à fait intéressants, pour un tapis de 3mx2m il descend jusqu’à 170dinars, même pas 60€ « vous le revendrez 400€ à saint Maclou ! c’est l’occasion qui fait le larron ». Ici encore je m’enfuis comme une voleuse.

 

De la Grande Mosquée on longe les murailles de la ville jusqu’à Bab Ech-Chouahada. Sur mon plan, figure la Mosquée de la Rose que je ne trouve pas ; Peut être sommes nous passées devant sans la voir. Les mosquées sont nombreuses, à Kairouan, les modernes comme les anciennes, sans parler des discrètes en étage (cela me rappelle Berat en Albanie avec la Mosquée des Célibataires au-dessus d’une boutique de textiles).

Nous sommes coincées dans un embouteillage et entendons des chants et des grands cris. Une manifestation ? pas du tout. Un passant nous explique « Le Hadj en Arabie Saoudite » Un car emmène les pèlerins. Familles et amis assistent à leur départ et prodiguent leurs encouragements. Pour sortir de là, un homme à mobylette nous fait suivre de le suivre.  Ensuite, ce « guide » s’incruste et il est difficile de s’en débarrasser à moins de lui donner une somme qu’il juge suffisante. Nous plantons le motocycliste aux environs de la Grande Mosquée. Ensuite nous connaissons le chemin vers l’Hôtel Kasbah puis la Mosquée du Barbier.

Mosquée du Barbier : Zaouia Sidi Sahbi

C’est là que repose un compagnon du Prophète Abou Zam’a el Balaoui qui n’était pas barbier mais qui conservait toujours sur lui 3 poils de la barbe du Prophète. C’est un monument très ancien qui a été remanié au 17ème siècle. Le minaret de la medersa est coloré de céramique de teintes vives, très gaies. On peut aussi admirer les stucs délicats de la coupole. A l’extérieur, au contraire, de simples briques tandis que coupoles et autres murs sont chaulés.

Zaouia Sidi Amor Abbada

Une vaste place a été aménagée avec des bassins rectangulaire et des bancs où Dominique m’attend pendant que je vais à la Zaouia Sidi Amor  Abbada qu’on appelle aussi Mosquée des Sabres. J’emprunte une rue bordée d’arbres, commerçante et passante. Cette zaouia est l’œuvre d’un marabout, Amor-El Ayari Abada, maître-forgeron qui avait la faveur des beys (1835 – 1854).  Personnage hors du commun, mégalomane mais d’une remarquable présence d’esprit. Les savants s’en méfiait mais les gens du peuple le craignaient et recherchaient sa bénédiction croyant en ses pouvoirs surnaturels. La zaouïa – mausolée du Forgeron – reflète sa personnalité. Construite dans un faubourg modeste, elle se distingue par l’étendue de son aire.

La grande salle contient des objets ayant appartenu au forgeron ou fabriqués par lui. Ces pièces peu fonctionnelles traduisent sa mégalomanie : lourds sabres, pipe géante, ancre et coffres récupérés à la base navale de Ghar Melh ou offertes par le bey.  Les portes sont couvertes de calligraphies du Coran.

Dominique a eu la visite d’un troupeau de chèvres. Des chèvres en plein centre-ville ! C’est une surprise, mais pourquoi pas après le « mouton de combat » ?

 

Kairouan : la Médina

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Une Porte de la Médina de Kairouan

Le mur d’enceinte de la Médina se trouve au coin de l’Hôtel Kasbah.  Quelques gouttes qui ne mouillent pas, tombent quand j’arrive à la porte. Ce n’est pas aujourd’hui que les bassins vont se remplir!

Une accumulation d’objets hétéroclite encombre la très belle porte : congélateurs industriels, vitrines réfrigérées, machines à laver, toute une exposition d’électroménager d’occasion, matériel trop encombrant pour entrer dans les rues étroites. La porte est en arc en plein cintre surhaussé, reposant sur deux colonnes antiques. Le linteau de bois est surmonté d’une inscription.

Ferblanterie, quincaillerie

J’entre par une sorte de chicane où est installé un ferblantier et parviens à une autre porte Bab el Tounes d’où part la rue principale de la Médina la Rue Bethaouane qui est presque droite et qui relie la port Bab Ech-Chouada, place des Martyrs. Cet axe est bien commode pour ne pas se perdre. C’est aussi là que sont concentrés des commerces variés. Cette variété rend la médina vivante et contemporaine : artisanat traditionnel, quelques rares boutiques pour touristes avec des poteries colorés et des tapis mais aussi de l’utilitaire.

Poteries

Qui veut un burnous marron, une bassine en plastique, un ensemble Hello Kitty, des lunettes Lacoste chez l’opticien ? Des pyramides de pâtisseries sont présentées dans de petites roulottes vitrées. J’entre dans la librairie à la belle vitrine bleue : tout un mur est occupé par des livres de poche en français et en anglais, 10/18, Penguins. Tout Flaubert, Victor Hugo, Camus, James Joyce…je demande au vendeur : « avez-vous des romans policiers ? » – « oui mais en arabe ». Je photographie tout, les fenêtres bleues, les petits minarets de brique, les amoncellements de poteries orange, les étalages…Je me perds dans un premier souk, couloir sombre où œuvrent les cordonniers, trouve le souk des bijoutiers, celui des tapis…Certains de ces couloirs sont déserts. J’ai appris à Tunis que les souks fermaient la nuit. Il ne faudrait pas se laisser enfermer. Il fait nuit à 17h, à quelle heure est la fermeture ?

souks

Au détour d’une ruelle, je découvre le Bir Baruta : c’est un puits, mais où est-il donc ? Je balaie des yeux le carrefour, et ne découvre qu’un escalier. Il faut monter. A l’étage un dromadaire paré de foulards colorés fait tourner une noria. J’ai été instruite de l’usage de ces dromadaires prisonniers à vie à Djerba. Celui-ci ne fait plus monter l’eau avec le système traditionnel.

Bir Baruta : le dromadaire

Le puits antique a été creusé en 180 de l’hégire ( 796) la légende raconte qu’il communiquerait ave celui de la Mecque. IL est dans un monument de 13 m de haut.

En face, se trouve un salon de thé où l’on sert aussi des jus de fruits frais.

magasin de tapis

Une boutique de tapis a suspendu des tapis et kilim sous une magnifique moucharabieh bleu. En face un marchand se tient devant son magasin. Je le préviens tout de suite : « je n’achèterai pas de tapis » – « Pour le plaisir des yeux ! » expression consacrée de l’Atlantique à l’Asie Centrale, de Marrakech à Boukhara…. ». J’adore les tapis, les tapis de Kairouan sont célèbres. J’insiste : « je n’ai pas mon sac, pas ma carte Bleue ». Le marchand se défend : « je n’ai jamais étranglé mes clients… ». Il me fait une démonstration du point noué sur un métier, déroule un premier tapis dans les teintes brunes. Puis il explique une autre technique « pour le point noué, la tisserande se trouve devant le métier, pour ce point-ci elle est derrière. ». Il me fait comparer l’envers des deux tapis ; le second est plus épais, plus solide comme rebrodé par-dessus. Il explique les motifs : »ici la main de Fatma, là les gâteaux makroud, celui-ci s’est inspiré de la Grande Mosquée : ici, le mirhab, ici des escaliers. On peut aussi voir dans le motif du lustre un calendrier avec les 12 mois… ». J’adore ces histoires. Je pourrais les écouter à l’infini. J’ai honte d’abuser du temps du marchand de tapis. « Je n’achèterai rien » je répète. Pourtant les prix sont très bas, 80€ pour mon préféré, un brun rebrodé, de toute beauté, 150 pour le grand noué, dans les teintes vertes, teinture végétale, affirme-t-il à base de menthe. Même s’il vient à l’hôtel pour que je fasse une Carte Bleue, même si l’expédition à domicile est prévue… « C’est petit chez moi, j’ai déjà des tapis ! ». Je suis catégorique mais je m’enfuis comme une voleuse.

La Vie Errante – Maupassant

LECTURES TUNISIENNES

En 1890, lassé de Paris, Maupassant par pour l’Italie, la Sicile, l’Algérie puis Tunis et Kairouan. La Vie Errante est son journal de voyage. J’avais lu le début à l’occasion d’un voyage en Sicile  

De retour de Tunisie j’ai repris avec un grand plaisir cette lecture. Et j’ai lu ses descriptions des paysages que nous avons traversés récemment avec un grand plaisir Inutile de souligner la qualité du style, les descriptions précises des paysages. Maupassant s’attache à décrire avec fantaisie ville et campagne :

A propos de Tunis

« Où sommes-nous? sur une terre arabe ou dans la capitale éblouissante d’Arlequin, d’un Arlequin qui s’est amusé à costumer son peuple avec une fantaisie étourdissante. »

Il saisit le pittoresque des costumes,  la variété des matières comme des coloris de ce « défilé de féerie » et nous enchante quand il nous fait pénétrer dans les passages les plus secrets, dans les voûtes des souks et des bazars, dans les quartiers de débauche ou  avec les fumeurs de haschich,  les femmes obèses, ou les princesses des Mille et unes Nuits…

Quand il traverse la campagne, c’est un observateur au regard aiguisé. Il s’émerveille d’un vol de flamants roses

« Avec ma lunette-jumelle, j’aperçois, dans l’eau, des flamants, et je quitte la voiture afin de ramper vers eux entre les broussailles et de les regarder de plus près. J’avance. Je les vois mieux. Les uns nagent, d’autres sont debout sur leurs longues échasses. Ce sont des taches  blanches et rouges qui flottent, ou bien des fleurs énormes poussées sur une menue tige de pourpre, des fleurs groupées par centaines, soit sur la berge, soit dans l’eau; On dirait des plates-bandes de lis carminés, d’où sortent, comme une corolle, des têtes d’oiseaux tachées de sang au bout d’un cou mince et recourbé. »

Il saisit l’inhabituel, le fantastique d' »invraisemblables silhouettes de chameaux laboureurs attelées aux charrues.  » ou les inquiétantes haies de figuiers de barbaries que Flaubert appelle nopals et Maupassant « cactus » 

« ces bois de cactus ont un aspect fantastique. les troncs tordus ressemblent à des corps de dragons, à des membres de monstres aux écailles soulevées et hérissées de pointes. Quand on en rencontre le soir, au clair de lune, on croirait vraiment entrer dans un pays de cauchemar »

C’est un voyage poétique, mais pas seulement. Maupassant constate comment dans l’Enfida les colons français exploitent les domaines 

« Rien n’est plus intéressant que l’étude de cet immense domaine où les intérêt des indigènes ont été sauvegardés avec autant de soin que ceux des Européens. C’est là, un modèle de gouvernement agraire pour ces pays mêlés où les moeurs essentiellement opposées et diverses appellent des institutions très délicates et prévoyantes »

Il s’intéresse aux coutumes aussi bien à la manière de cultiver qu’au droit de propriété et de cession de ces propriétés. Il est assez critique sur la construction des routes françaises qui s’effondrent parce qu’on ne tient pas compte de la crue des oueds qui emporte les ponts…

A l’approche de Kairouan il rencontre des dromadaires, une chamelle qui vient de mettre bas…. dans un paysage qui devient étrange, « des lignes de pierres qui sortent de terre rangées comme des soldats, toues de même ordre de même sens, penchées vers Kairouan, invisible encore. On les dirait en marche, par bataillons, ces pierres dressées, l’une derrière l’autre[….]Ce soulèvement est un des plus curieux du monde; Il a d’ailleurs sa légende. Quand Sidi-Okba avec ces cavaliers, arriva dans ce désert sinistre où s’étale aujourd’hui la ville sainte, il campa dans cette solitude. Ses compagnons surpris de le voir s’arrêter dans ce lieu, lui conseillèrent de s’éloigner, mais il répondit : – nous devons rester ici et même y fonder une ville car telle est la volonté de Dieu. [….] le lendemain on vint lui annoncer qu’une levrette avait trouver de l’eau. On creusa donc à cet endroit, et on découvrit à seize mètre du sol, la source qui alimente le grand puits coiffé d’une coupole où un chameau tourne le long du jour, la manivelle élévatoire…. »

J’aurais aimé laisser Maupassant décrire Kairouan et me taire.

« Puis, sur la droite, s’estompe un monument chargé de dômes : c’est la mosquée dite du Barbier, et enfin apparaît la ville, une masse indistincte, indécise, derrière le rideau de pluie ; et le minaret semble moins grand que tout à l’heure comme s’il venait s’enfoncer dans les murs après s’être élevé jusqu’au firmament pour nous guider vers la cité »

Ces Portes de Kairouan m’évoquent naturellement le tableau de Paul Klee. 

Et voilà, en cherchant sur Internet une bonne image de cette aquarelle, je tombe sur un blog inconnu qui m’a émerveillée et rendue très jalouse. Exactement le post que j’aurais voulu écrire : Maupassant illustré par Klee! Une autre bloggeuse (eur) l’a fait avant moi! Je vais retourner souvent feuilleter ce blog : POISON ET CARAMEL  : bravo!

Kairouan : l’hôtel Kasbah – Bassins aghlabites

CARNET TUNISIEN DU NORD AU SUD

Kairouan : Bassin des Aghlabites

Kairouan (140.000 habitants) est précédée de quartiers modernes, une zone industrielle, mais rien de trop envahissant. En suivant les panneaux routiers nous trouvons facilement le centre-ville. Un homme ne pétrolette nous guide jusqu’à l’Hôtel Kasbah(il fait des détours inutiles pour nous prouver son utilité et gagner son pourboire).

Hôtel Kasbah 5*

Une chambre 5*

Nous nous retrouvons devant une forteresse de brique avec un porche majestueux. Une discrète calligraphie élégante : c’est bien notre hôtel et il a 5 étoiles ! A l’entrée du parking le portier passe un miroir sous le châssis de la voiture. L’accueil est sympathique même sans les vouchers que nous avons perdus, nous sommes attendues !

 

Le hall, aussi imposant que luxueux, s’ouvre sur un patio occupé par une piscine turquoise à débordement, piscine découverte, pas de baignade en cette saison. Notre chambre est un décor des 1001 nuits, majolique jaune et bleue, couvre-lit bleu, coussins jaunes et bleus, boiseries peintes de motifs végétaux comme les tables de nuit à dessus de marbre, table de marbre. Tapis Kairouan, bien sûr, rebrodés dans les tons verts et bleus, sur fond gris. Au plafond, une coupole chaulée blanche encâdrée par une corniche de bois foncé peinte avec une vigne ondulante. La salle de bains est carrelée de majolique verte et jaune, spacieuse. Une petite terrasse vitrée meublée de deux fauteuils et une table ronde.

Les mosquées se visitent le matin, la Grande Mosquée ferme à 14 heures pour les visites. Au programme de l’après-midi : les bassins aghlabites et la médina

Les bassins aghlabites

Kairouan : bassin aghlabite et office de Tourisme

Les bassins aghlabites sont au bout de la rue à moins d’un kilomètre de l’hôtel. Le rond-point et le début de la rue sont enfumés par des barbecues où l’on grille de la viande mais surtout du poisson que l’on peut choisir soi même chez le poissonnier entre deux restaurants. Sur le grill : dorades et rougets. Nous nous promettons de déjeuner là demain midi !

L’hôpital  Ibn El Jazzar occupe tout un bloc en face des bassins. El Jazzar est un médecin fameux du Moyen Âge natif de Kairouan  (898 – 980).

Les bassins des Aghlabites sont des réservoirs construits au 9ème siècle pour approvisionner la ville en eau. L’Office de Tourisme se trouve à proximité. On peut monter sur la terrasse pour avoir une vue aérienne. Deux grands bassins ronds sont chacun reliés à un petit. (Cette forme me rappelle le bassin dans lequel je suis tombée au Désert Blanc en Egypte). Sous quelques arbres clairsemés un homme promène un mouton, « c’est un mouton de combat » déclare le vieil homme qui s’est proposé pour être notre guide, mais que nous n’avons pas agréé comme tel (il est collant, gâteux et s’exprime mal en français). Le « mouton » porte des cornes enroulées. Nous fuyons le vieux collant et entrons dans le parc. L’entrée est devant Monoprix, c’est un parc ouvert au public. Le ciel est maintenant noir, les bassins cerclés de blanc, les petites coupoles se détachent bien.

Le Guide Bleu m’apprend que les bassins ne sont pas vraiment circulaires mais formés d’un polygone à 48 côtés pour le grand et 17 pour le petit. 48, cela se conçoit, mais 17 ? nombre premier, quel géomètre a pu concevoir un tel polygone ? A chaque angle se trouve un contrefort arrondi ; Ce qui explique que j’avais cru voir un cercle du haut de la terrasse. Il y a peu d’eau dans le bassinet encore moins dans le « petit bassin de décantation ». Kairouan souffre de la sècheresse depuis longtemps ; « il n’a pas plu depuis deux ans » s’était plaint le vieux collant. Justement ces nuages noirs ne sont-ils pas porteurs de pluie ?

Pendant que je fais seule le tour des bassins, je remarque que Dominique n’est plus seule sur son banc, le vieux a enfourché son vélo pour venir nous rejoindre. Quelle plaie !

 

du Cap Bon à Kairouan, du pays des oranges au Sahel

CARNET TUNISIEN DU NORD AU SUD

Marché de gros : oranges et mandarines de Beni Khaled

 

Sous le soleil, dans les oliveraies à perte de vue, passons un petit pont de pierre, affleurent grès et sable. Dans le lointain, les crêtes violette du Zaghouan dont la silhouette en carnassière est reconnaissable.

Menzel Bouzelfa  – Beni Khaled – pays de l’orange

A l’entrée de Menzel Bouzelfa, grandes usines, coopératives agricoles, huileries. A Beni Khaled,  partout on voit des caisses plastiques colorées remplies d’oranges ou de mandarines empilées sur les bords de la route. C’est un marché de gros, j’essaie d’acheter quelques oranges, on m’offre 5 mandarines gentiment. Mais où poussent donc les orangers ? Les orangeraies sont à l’abri d’immenses cyprès (thuyas) ou derrière de grands murs fermés par de grands portails.

A Grombalia nous montons sur l’autoroute jusqu’à Enfidha . la silhouette du Jebel Zaghouan nous accompagne, du côté sud il est aride, il semble surgir de la plaine amis en observant mieux, on distingue une série de collines qui ont une direction structurale parallèle.

A la sortie de l’autoroute des stands de vente de burnous se succèdent , il semble que ce soit la spécialité locale : burnous hommes marrons et grenats, ils sont brodés pour enfants. On traverse aussi des étendues sableuses. La route P2 traverse Kondar, dommage que ce ne soit pas l’heure du déjeuner, les restaurants sont nombreux et très appétissants, il y a des vendeurs de thé aux amandes, et des grillades. La route longe une étendue désertique. Le paysage change complètement, on voit des troupeaux de moutons

Roseaux à vendre sur les bord de la route

. A Metbasta (13km avant Kairouan un dromadaire tout seul, des roseaux, c’est ici une specialité, on les met en botte sur le bord de la route et on fait de jolis empilements. Puis on voit des tas blancc, est-ce du sol ? les buissons sont ras et clairsemés