Saint Lucie de Tallano

CARNET CORSE 2021 de BASTIA à BONIFACIO

Santa Lucia di Talllano vue du couvent franciscain

6h30,  bain matinal. 4 dames font du longe-côte. Il y a quelques vagues ce matin. On a « construit » avec des flotteurs jaunes une « piscine » rectangulaire. D’habitude, j’aime nager le plus loin possible parallèlement à la côte. Avec les vagues et la « fermeture » de la plage, (sans aucun avis la confirmant) je ne veux pas cumuler les transgressions et reste dans la piscine.

Saint-Lucie-de-Tallano est située à 8.5 km de Levie. la  D59  est un peu plus fréquentée que dimanche dernier mais toujours dans un paysage sauvage, des forêts magnifiques. J’admire les chênes-liège, les pins mésogéens très hauts.  Le GPS  est aussi altimètre,  j’essaie de déterminer la limite des chênes et des pins. Ce n’est pas net, n’est pas Humboldt qui veut ! Même exercice avec les châtaigniers qui poussent plutôt vers l’intérieur tandis que les chênes-liège se trouvent près du littoral. Les châtaigniers sont en fleurs, forte de feu d’artifice végétal, jaune pâle. Les châtaigniers sont aussi ceux dont les branches desséchées dépassent des cimes vertes. Souffrent-ils de la sècheresse ou sont-ils malades ?

le couvent saint François

A l’entrée de Sainte-Lucie-de-Tallano, au-dessus du parking, une grande église se trouve près d’un haut bâtiment. C’est le Couvent Saint  François . Bâti à l’écart du village, il est précédé par une terrasse en balcon plantée de mûriers, fraîche et ombragée avec un point de vue sur le village et les montagnes environnantes qui sont dominées par le Monte San Petru (1400 m). Le couvent a été construit en 1492 sur l’emplacement d’une maison-forte par Rinucciu della Rocca qui fut d’bord un partisan des Génois puis leur ennemi. Le 6 vendémiaire de l’an XII, bien national il abrita un bataillon d’infanterie.

Il fait frais dans la montagne, le vent souffle sous les mûriers. Pas facile de prendre en photo la grande église, très sobre ni les arcades du cloître, je filme quand je n’arrive pas à trouver le cadrage satisfaisant.

 

Sur la place du village, d’un côté l’église et un magasin de souvenirs qui vend des bracelets avec « l’œil de Sainte Lucie » qui est l’opercule d’un mollusque (Astrée rugueuse ou Bolma rugosa) .

Maison forte

En face le Monuments aux morts de la Grande Guerre qui est signalé à cause du socle en diorite orbiculaire, roche volcanique locale très décorative, noir polie criblée de disques rayonnés blancs en cercles concentriques. Ces monuments sont toujours pour moi un sujet de stupeur avec de si longues liste pour de si petits villages.

Pressoir è huile

Pour terminer le tour de la place, un café (clients locaux), un restaurant et au fond une pizzeria avec une terrasse-jardin. Nous choisissons le Santa2 Lucia qui a une grande terrasse ouverte surplombant la place (covid oblige) et je file au Moulin à Huile, au bout du village  qui ferme à 12h précises. Entrée 2€ visite guidée des presses, des jarres et du mécanisme entraîné par la roue à aube (mais il n’y a plus d’eau). Dans la pièce voisine une cheminée garde une température assez douce pour que l’huile ne fige pas. Il y a aussi une chaudière pour la seconde pression à chaud qui donnera de l’huile d’éclairage ou pour le savon de Marseille. Aujourd’hui, on n’utilise plus ce pressoir antique (qui n’est plus aux normes mais qui pourrait fonctionner) on porte les olives à un pressoir moderne.

jarre à huile

La carte du Santa Lucia est variée. Elle propose des assiettes de charcuterie (comme partout en Corse, des salades, des pâtes et des plats consistants comme du sanglier. Je choisi des tripettes de veau servies dans une sauce rouge parfumée avec une grosse pomme de terre fondante. Bien servi, je renonce aux desserts à a châtaignes bien alléchants.

Santa Lucia di Tallano rue du village

La visite suivante : saint Jean Baptiste à côté du hameau de Poggio était le but d’une promenade d’une heure sur » un sentier frais avec passage d’un gué » vanté par le guide vert. Nous n’avons jamais trouvé le départ et ce n’est pas faute d’avoir cherché ! pourtant tous les gens nous ont dit qu’il y avait un panneau. Après avoir tourné, retourné, je renonce à la promenade et nous arrivons beaucoup trop tôt à Sotta où un concert de polyphonies corse se donnait à 19h. Nous aurions dû attendre 2h30 !

 

 

 

 

 

 

 

 

Eglises pisanes dans le Nebbio

CARNET CORSE 2021 de BASTIA à BONIFACIO

Canonica

Circuit 130 km sur les routes tortueuses du Nebbio avec le thème des églises pisanes.

Canonica

La Canonica, cathédrale romane pisane, consacrée en 1119 par l’évêque de Pise sous le nom de Santa Maria Assunta se trouve près du littorale. Actuellement isolée en pleine campagne, elle fut bâtie sur le site antique que la ville romaine de Mariana.

Googlemaps ne conduit pas l’automobiliste vers une ville antique mais plutôt là où se trouvent des établissements commerciaux. Après l’aéroport de Poretta il nous guide vers le Lido de Mariana : sable fin, eau claire, restaurants de plage mais aussi bateau pétrolier et citernes non loin.

Cadnonica

La Canonica est fermée, déserte mais extrêmement belle avec ses pierres claires polies de calcaire cipolin et « une subtile polychromie allant du gris jaune au vert clair » selon le Guide Vert. Harmonie des volumes, sobriété des décors : quelques frises, les entrelacs du linteau, six claveaux figurant des animaux ou des personnages naïfs. Ma plus belle surprise, du côté de l’abside, mon attention a été attirée par le piaillement des petits fauconneaux excités par le retour des parents. L’oiseau adulte ne se montre pas tant que je reste proche du nid installé dans un trou de bouline. En prenant du recul, je constate que toutes ces cavités sont occupées par des oiseaux.

Ville antiaque de Mariana

La cité romaine de Mariana fut fondée au er siècle av. J.C. par Marius. Sur le site on observe les fondations en briques quelques colonnes également en briquais, d’autres rondes en granite. Aucun panneau explicatif. Le guide Vert signale une basilique paléochrétienne et un baptistère. Evidemment je n’ai rien reconnu mais j’ai aimé le calme du site, le pin parasol et l’olivier qui se détachent sur le décor des montagnes. Un beau musée devrait s’ouvrir prochainement, sur Internet il est annoncé pour le 22 juin 2021.

Défilé de Lancone

Défilés de Lancone

La D62 croise la T11 à Biguglia. Après avoir traversé des quartiers résidentiels la petite route passe sous de très beaux chênes-liège puis s’élève entre les buissons de cistes. Clin d’œil à Humboldt, les cistes, fanés au niveau de la mer, ont une floraison blanche merveilleuse. Le Bevinco qui a creusé les gorges coule nettement en dessous de la route, on ne le devine même pas sauf à la fin avec une cascade. Je marche le long du parapet pour une promenade pittoresque. Sur une plateforme, un écriteau signale d’anciennes galeries de mines de cuivre d’un complexe comprenant 3 galeries sous la route abritant 5 espèces de chauve-souris protégées : 10 gites de transit du Minioptère de Schreibers et 7 gites de Rhinolophe Euryali . Après plus d’un an de Covid on n’a pas envie de fréquenter les mines abandonnées aux chiroptères. Les falaises servent également d’habitat à nombreux oiseaux. Une ZNIEFF protège ces habitats et ces populations. Plus on monte et plus le site devient spectaculaire. Les roches affleurent. Un site d’escalade est aménagé avec cordes et pitons.

La route débouche sur un carrefour au Col de San Stefano où se trouve encore un monument au souvenir de la Résistance.

San Michele

San Michele

A l’entrée de Murato, San Michele est une jolie église pisane isolée sur un plateau herbu construite en 1280.

De 1077 à 1284, après avoir chassé les Sarrazins, la Corse passe sous l’autorité de la République Pisane, en rivalité avec Gènes. Pour asseoir son autorité Pise dote la Corse de nombreuses édifices religieux. Bicolore, elle est construite de calcaire blanc de Saint Florent et de Serpentine du Bevinco. Elle fut remarquée en 1839 par Prosper Mérimée.

Murato

Gros bourg de montagne animé. Corses et touriste heureux du déconfinement, sont nombreux aux terrasses des bars et des restaurants. Trop tôt pour déjeuner maintenant, on décide de faire des courses. J’achète à la boulangerie des « tartines grillées » au fromage fondu et petits légumes(tomates poivrons champignons) et miel et chèvre.

Murato : Hôtel de la monnaie

Les curiosités du village sont l’église de l’Annonciation (en haut) et l’Hôtel de la monnaie où Paoli fit battre monnaie en 1763 : les « soldi ».

La très étroite et très tortueuse D62 relie les villages de Rapale , Pieve, Sorio et S Pietro-di-Tenda. A l’heure du déjeuner il y a peu de circulation et c’est heureux parce que les croisements seraient hasardeux. Le plus souvent nous sommes à l’ombre de beaux arbres : chênes de taille impressionnante, parfois des frênes et des châtaigniers en pleine floraison. Quand on sort de la forêt, les genêts à balai égaient la route, très hauts, et très jaunes, et toujours des cistes. Les oliviers sont anciens, très hauts mais leur ombre est moins dense et moins fraîche.

Pieve : 3 statues-menhirs

Nous traversons le village ombragé par de grands platanes. Comme à l’accoutumée, parking impossible, on gare la voiture à quelques centaines de mètres après la sortie du village. Un homme qui promenait ses chiens de chasse m’indique un raidillon qui conduit à l’église – campanile très haut, fronton baroque – elle ne retient pas mon attention. Les trois statues-menhir sont protégées sous un petit édicule vitré. Comme à Patrimonio, elles ne sont guère mises en valeur. La ressemblance avec une silhouette humaine n’est pas évidente.

Sorio

Sorio ressemble aux villages précédents, accroché à la pente, morcelé en plusieurs quartiers. Deux églises se font face à quelque distance mais séparées par un vallon. L’une est peinte en rose avec des décors blancs, l’autre est jaune. Près de l’église jaune une source est cachée dans une petite cabane de schiste.

Village perché du Nebbio

On ne visitera pas S Pietro-di-Tenda village plus important mais situé à l’écart de la route.

La D62 est encore plus étroite. Croiser un camping-car fut une épreuve : le camion a reculé, Dominique a mis deux roues dans le bas-côté, cela passait juste.

Après avoir passé l’Alisio sur un pont de pierre, nous trouvons enfin le coin-piquenique idéal sous un grand platane, une fontaine, un petit bassin de pierre avec des têtards, un banc de schiste. Personne ne passera sur la route pendant que nous goûtons nos tartines.

Saint Florent

Baignade sur la Plage de la Roya en face d’un club aux activités diverses (location de kayaks de mer, excursions aux plages des Agriate, paddle, mais aussi sports aériens), un zodiac porte une aile…le sable est blanc, l’eau claire manque de profondeur, il faut aller loin pour avoir de l’eau au-dessus de la taille.

Saint Florent Cathédrale du Nebbio Santa Maria Assunta

L’ancienne Cathédrale du Nebbio Santa Maria Assunta achevée en 1140 ressemble beaucoup à la Canonica en plus grande et moins brillante. Visite payante (1.5€). Le maître-autel et le chœur XVIIème sont baroque. On peut aussi admirer un Christ noir et sous un catafalque de verre, la dépouille de Saint Flor,, soldat romain martyr, habillé d’une sorte de cotte de maille avec la tunique brodée de perles argentées. Lors de la fête patronale on le porte sur la plage puis parmi les chemins muletiers du Nebbio.

Nous rentrons par la D238 entre les domaines viticoles de Patrimonio à Oletta puis par le Col de Teghime.

 

 

 

Pascal Paoli – Antoine-Marie Graziani

LIRE POUR LA CORSE

buste de Paoli à l’Île-Rousse

Dès qu’on débarque en Corse, deux personnages sont « incontournables » (je déteste ce mot mais il convient ici) : Pascal Paoli et Napoléon Bonaparte. J’ai cherché un livre d’histoire sur Paoli et celui d’Antoine-Marie Graziani existe en format numérique ce qui est bien pratique pour la voyageuse.

C’est un ouvrage sérieux, très (trop?) détaillé. J’ai parfois peiné dans la lecture de tous les détails de querelles entre des personnages dont je n’avais jamais entendu parler et que je ne rencontrerai sans doute plus.

J’ai beaucoup apprécié le rappel d’Histoire des Idées Politiques de Tite-Live à Machiavel, de Montesquieu à Rousseau. Paoli est un politique, un général, mais surtout un personnage des Lumières. Son action s’inscrit, avant la Révolution Française et même avant l’Indépendance américaine, dans la mouvance des Encyclopédistes. Ce n’est pas un hasard s’il a commandé une Constitution à Jean-Jacques Rousseau. En revanche, Voltaire endosse un mauvais rôle en caressant Choiseul dans sa lutte contre les paolistes!

Histoire de la corse et équilibres géopolitiques : 

Depuis le Moyen-Âge, la Corse est une île trop petite pour être vraiment indépendante. Elle s’est trouvée sous la protection de Pise, puis depuis le 13 ème siècle de Gênes. La gestion de la République de Gênes fut pendant des siècles calamiteuse. Depuis 1729,  des révolutions contre Gênes se sont succédé à la suite du prélèvement inique des impôts. Gênes a fait appel à l’empereur Charles VI, et envoie des mercenaires allemands en 1731.

En 1736 « un roi de carnaval« , Théodore de Neuhoff débarque d’un tout petit bâtiment, et se fait sacrer Roi de Corse. Son règne éphémère mis en scène par Voltaire dans Candide au Carnaval de Venise.

 

Gênes se retourne ensuite vers le roi de France et signe un accord secret en 1737. En 1738, un corps expéditionnaire français débarque à Bastia.  De leur côté, les Corses et Paoli cherchent la protection d’abord du Saint Siège et même de Malte, se tournent un moment vers l’Espagne. Il faut se rappeler que l’Italie est encore une mosaïque avec des équilibres subtils entre la Papauté, l’Espagne, l’Autriche et les Bourbons de Sardaigne.

L’Angleterre entre aussi dans les alliances. En 1743 sa flotte attaque Bastia.

Les luttes des Corses contre l’occupation génoise dure des décennies

« Cette représentation des Corses comme les héritiers des vertus classiques, et les défenseurs d’une cause juste, sera reprise par Jean-Jacques Rousseau, et les esprits libéraux et éclairés d’Europe jusqu’en 1768″

 Paoli :

Exilé à Naples avec son père,   il a servi  dans le régiment Corsica du Roi de Naples. Il étudie à Naples, lit Montesquieu, s’intéresse à la franc- maçonnerie. En 1755, il rentre sur son île.

Je me suis un peu perdue dans les événements décrits avec minutie par Graziani qui n’épargne aucune intrigue entre les protagonistes corses et les rivalités des familles et qui mêle au récit du retour de Paoli une analyse de ses idées politiques. Paoli arrive en Corse porteur d’un projet solide pour la constitution d’un Etat. en Aout 1755 il écrit :

« Ce peuple au cours d’une assemblée générale unie juridiquement, a décidé de m’obliger à abandonner mon service pour que je gouverne, il m’a concédé plus d’autorité que n’en aurait voulu avoir aucun roi de Corse parce que le décret n’a aucune limitation »

Le préambule de la constitution corse de 1755 évoque celui de la future Déclaration d’indépendance américaine : « la Diète générale représentant le peuple de Corse – seul habilité à décider légitimement de ses destinées – convoquée selon les formes dans la cité de Corte par le général.... »

« En 1764, il parlera à Salvini d’un grand projet constitutionnel et s’il présentera à Symonds quatre réformes qu’il veut voir instituer dans son île : abolition de la torture, la nomination à vie des juges de la Rota civile, l’introduction des procédures anglaises du cautionnement et du système du jury »

Le pays est divisé, Pascal Paoli doit lutter contre des factions. On assiste à une véritable « guerre civile » ou une « vendetta » à grande échelle. Paoli fut confronté à la pauvreté de la communauté insulaire et n’était pas toujours à même de payer ses soldats. Les réalisations de Paoli sont impressionnantes, entre autres la création d’une université, d’une marine, y compris pour la course, développement du port de l’Île Rousse et même l’introduction de la pomme de terre…

Là, je décroche un peu dans la lecture…les dissidences corses, les différentes consulte m’embrouillent. Les relations avec le Saint Siège sont également compliquées. Il faut être plus au fait de l’histoire corse pour suivre sans difficultés.

Un anglais, Boswell, introduit justement auprès de Paoli, en 1765, après une visite chez Rousseau se fera le chantre de cette lutte et de son champion Paoli.

Par le Traité de Versailles, le 15 mai 1768, Gênes cède la Corse à la France à la condition très révélatrice : « que jamais la Corse ne puisse devenir souveraine et indépendante ni posséder aucune place ou établissement maritime, ni être en état de causer préjudice à la navigation ».

J’ai eu du mal à comprendre la véritable nature des relations de Paoli avec Marbeuf et Choiseul et de suivre les batailles de Borgo et à Ponte Novu; encore plus les division des Corses entre « parti français » et paolistes.

Après la défaite de Ponte Novu (1769), c’est l’exil de Paoli et de ses partisans, par l’Italie et jusqu’en Angleterre où Paoli reste 22 ans, accueilli comme le « Thémistocle de notre siècle ». 

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Paoli ne sera rappelé  en Corse qu’après la Révolution de 1789. Les rapports entre Paoli et les révolutionnaires sont aussi compliqués. Cette histoire est passionnante. Au début, les rapports sont bons « Le mentor de Paoli à Paris est La Fayette[…]belle image sans doute que de voir le héros de la liberté corse aux côté du héros français de l’indépendance américaine! »

Paoli sait qu’on l’a fait venir en Corse pour rétablir l’ordre. Au début il est accueilli par un immense succès.Il est ensuite fragilisé par les divisions des Corses puis la situation politique se brouille, les « intriguants » envoient des doléances à la Convention fin 1792. Une expédition en Sardaigne est une catastrophe qui contribue à pourrir la situation. L’arrivée de volontaires « Marseillais » à Ajaccio  en 1793« anarchistes semant la terreur » provoque une presque guerre civile. La calomnie atteint Paoli qu’on soupçonne de prendre le parti de l’Angleterre, même de vouloir se faire roi. On cherche à le piéger en l’attirant en métropole. Lucien Bonaparte, lui-même dénonce Paoli à Toulon, « Paoli est la victime des affrontements entre Montagnards et Girondins’.

Tandis que les royalistes corses prennent contact avec l’Angleterre, Paoli reste d’abord fidèle aux républicains mais quand Paoli se trouve « hors la loi », « traître à la République française » il fait sécession, récupère ses couleurs et se considère sous la protection de la Grande Bretagne.

la Corse en 1793 est redevenue indépendante.  en 1794, les anglais débarquent . Devant Calvi l’amiral Nelson perd son oeil gauche.

A nouveau l’exil…Paoli termine sa vie en Angleterre…

Malgré des longueurs et des passages embrouillés pour la non-spécialiste que je suis, j’ai été passionnée par l’étude de l’Histoire des idées politiques, et les rapports entre Paoli et la Révolution de 1789.

 

 

 

 

 

 

La plage d’Arone – Porto et sa tour génoise

CARNET CORSE

La Baie de Porto au petit matin

Nous avons attendu une belle journée pour faire l’excursion à la belle plage d’Arone. Pour éviter ‘affluence sur la corniche, nous sommes parties tôt. Les calanches dans la belle lumière du matin sont un enchantement ! Sans chercher à faire des photos, nous profitons des formes fantastiques. Après Piana, c’est l’inconnu. La route D824 dessert les plages. D’un mirador nous avons une vue plongeante sur Ficajola accessible par un raidillon qui descend aux maisons mais pas à la plage, vue sur les crêtes et sur Scandola qui a une magnifique couleur rouge. Nous découvrons le Capo Rosso, éperon de porphyre rouge et la tour Turghiu qui le surmonte. La randonnée à la tour est trop longue (3h30). Un peu plus loin, un café-boutique touristique propose des balades à ânes.

Capo Rosso

Au petit col (404 m), changement de paysage, plus doux, plus vallonné. Le maquis touffu est remplacé par des buissons plus bas, plus épineux et des oliviers. Les hauts pics déchiquetés sont loin.

Deux routes desservent la plage, la première conduit au restaurant Casablanca, passant par un portail imposant, son parking est vaste et ombragé. Un escalier descend à une ravissante plage équipée de lits luxueux avec même des serviette-éponge. Le restaurant est composé de deux parties distinctes : un restaurant très chic aux belles tables, nappes et argenterie, des tables et des bancs de bois pour un « glacier, panini, pizzas ». Le côté panini a l’air fermé. Nous avons revêtu nos plus beaux atours, ce n’est pas pour nous contenter d’un sandwich !

Plage d’Arone – « côté plage »

Deuxième essai : « Le Café de la Plage », même disposition : un restaurant s’ouvre sur la rue, menu dégustation 65€ aucun plat à moins de 25€ ( des entrées froides) inaccessible pour notre porte-monnaie ! Comme chez Casablanca, « côté plage » est une annexe, snack de luxe qui sert des pizzas, seulement le soir. Dans le décor enchanteur, à l’ombre de filets, dans d’agréables fauteuils Dominique commande un verre de vin blanc (belle corolle à moitié vide, 6€40, quand même !

La plage d’Arone est merveilleuse avec son sable blanc très fin, son eau limpide, turquoise comme un lagon, presque sauvage, 3 établissements avec des lits et des parasols, peu nombreux et discrets, un chalet-poste de secours. Un seul voilier amarré, un seul zodiac en action. C’est donc une baignade de rêve. Quelques dames du 3ème âge s’essaient au paddle. A voir les efforts désespérés d’une grande blonde à silhouette sportive, hissée par son mari sur la planche et sa chute quelques minutes plus tard, cela me dissuade définitivement d’essayer. Je préfère nager mes longes traversées entrecoupées par la marche sur le sable fin.

plage d’Arone

Il existe quelques méthodes d’éviter le tourisme de masse sur les plages : autour de Calvi on empêche les voitures d’approcher des plages en installant les parkings tellement loin que les visiteurs, portant glacières et parasols, qui  doivent venir à pied (ou en train) hésitent. A Arone : sélection par l’argent. Aucune buvette, aucune cafétéria ; seulement des établissements de luxe. Les fauchés poseront leur serviette pour une heure et rentreront déjeuner chez eux !

soupe de poisson au Robinson

12h15, nous quittons cet endroit paradisiaque pour un restaurant aux prix plus abordables : le Robinson à Porto sur le port où nous commandons une soupe de poissons. Samedi, quand Dominique attendait le retour de mon bateau le fumet de la soupe de poisson l’avait alléchée. Cette soupe est servie dans une belle soupière blanche, accompagnée de croûtons faits maison et de gousses d’ail à frotter nous-même, de la rouille excellente et du gruyère râpé. Nous pensions terminer par un moelleux aux châtaignes. Après 3 assiettes de soupe nous n’avons vraiment plus faim. Sans attendre le café, je monte à la tour génoise qui domine le port.

La tour Génoise et quelques personnages  

La Tour génoise de Porto

Une exposition historique raconte qu’entre 1510 et 1620 une centaine de tous furent construites, formant une ceinture de surveillance avec tours à signaux. La Sérénissime Gènes avait cédé la gestion de la Corse à l’Office de Saint Gorges.

Le gardien de la tour, le Torregiano était faiblement armé, rarement une pièce d’artillerie, le plus souvent des arquebuses ou mousquets. En plus du rôle de surveillance, il exerçait le contrôle sanitaire du port, était un agent du fisc, prélevait le droit d’ancrage et les taxes de chargement sur l’huile et le vin.

Au 16ème siècle les Barbaresques dominaient la Méditerranée, le Cap Corse était ruiné. L’expédition de 1540 par Gianettino Doria aboutit à la capture de Dragut. Dragut est un personnage récurrent dans mes carnets : j’ai mentionné sa razzia sur Gozo, son échange contre l’île Tabarque en Tunisie (Tabarka), je l’ai retrouvé à Mahdia, à  Djerba (horrible anecdote de pyramide de crânes) dans le siège de Malte où il finit sa vie.

Les pirates barbaresques attaquaient les bateaux razziaient les villages pour emporter les habitants esclaves vendus sur le marché d’Alger. Parallèlement il s’était constitué un commerce florissant du rachat des esclaves.

Sampiero Corso (1498 – 1567) était surnommé « le plus brave des Corses » ; condottière au service de Jean de Médicis, puis de François 1er en 1536, en 1553 il embarque sur els galères d’Henri II à côté de la bannière de Soliman. 1559, par le Traité de Cateau-Cambrésis, la corse est restituée à Gènes. Catherine de Médicis, épouse de Henri II fut la protectrice de Sampiero. Elle plaida en sa faveur alors qu’il avait tué sa femme Vanina 1563, demandant l’abandon de toute sanction pour les hommes ayant combattu sous la bannière du roi de France.

Gènes imposa sa volonté de repeupler la zone littorale et pratiqua une politique de colonisation agraire imposant aux propriétaires de greffer et planter de la vigne et 4 arbres fruitiers et au moins un châtaigner.

Dans le prix du billet est incluse la visite du « musée de la Bruyère » que je ne trouve pas. C’est un petit appentis dans lequel des panneaux racontent l’histoire de la bruyère qui a trahi Jésus alors que les Romains le poursuivaient ou plutôt qui l’a mal caché alors qu’il tentait de se cacher dans son feuillage. La bruyère n’est donc pas la bienvenue dans les maisons corses sauf sous forme de balai ou de pipe ! Musée insignifiant !

Je termine la journée à la plage de Bussaghia.

 

Une famille corse 1200 ans de solitude – Robert Colonna d’Istria

LIRE POUR LA CORSE

La collection Terre Humaine ne m’a jamais déçue. 1200 ans d’histoire corse m’intéressent. J’ai commencé  à le lire à Ajaccio.

Il m’a fallu de la persévérance pour venir à bout de la longue introduction, beaucoup de considérations « île, insularité, solitude » qui s’adressent autant aux membres de la famille Colonna d’Istria dont l’auteur va conter la généalogie et l’histoire qu’au lecteur inconnu qui s’embarque pour une lecture au long cours.

« L’île est facteur d’identité. Pour l’insulaire, l’île est à la fois omphalos et axis mundi, centre et pilier, point de commencement, résumé, concentré du monde, explication de tout »

« deuxième réalité attachée aux îles : il faut en partir »

Pour l’islomane que je suis, cela ne peut que m’intéresser! 

« La vérité sur la Corse? Son âme? Son charme supérieur? Ses secrets les mieux gardés? Tout cela, dit-on, est caché dans les villages »

Seulement voilà, c’est long, très long, et Colonna d’Istria s’appesantit sur l’insularité et sur la notion de famille, la généalogie, longuement, longuement. Une quarantaine de pages avant que l’histoire ne commence.

« Le premier à porter le nom de Colonna a été Ugo en l’an de grâce 818″

« Compagnon de Charlemagne, qui aurait bouté les mahométans hors de l’île« 

Ugo est le fondateur présumé de cette grande et vieille noblesse. Rien ne prouve qu’Ugo ait vraiment existé. Aucune preuve formelle, des arguties discutant la véracité du personnage et peu de faits historiques. Ce moyen âge est décidément bien obscur. Je m’impatiente, et commence un roman qui lui a une histoire, un héros.

« Un paladin, à cheval, se promène sur les crêtes entre la vallée de Taravo – son domaine – et les vallées voisines – territoires de ses rivaux….« six cents ans ont passé, Vicentello est un héros du XIV ème siècle, temps des malheurs : peste, famine, brigandage, piraterie, guerre…Vincentello choisit Aragon plutôt que Gênes ou Pise.

« En 1358 dans le nord de l’île, il y a un grand soulèvement populaire. Les communauté renversent la table et se placent sous l’autorité directe de la commune de Gênes. Une idée qu’elles ont eue….Gênes va y rester 400 ans »

On entre enfin dans la Grande Histoire, pour mon plus grand bonheur. Mais les prétentions aristocratiques de cette famille qui revendique sa noblesse depuis Charlemagne, ont tendance à m’agacer. 

M’ont beaucoup plus intéressée les contestations et les révoltes du XVII ème et XVIII ème siècle causées  par l’impôt payé à Gênes et surtout sa collecte. La justice mal rendue par Gênes. Le récit de la Révolte de la saint Laurent en 1615 contre le pouvoir le rôle de l’Eglise sont racontés en détail et de manière vivante. Les faits ont pour moi plus de charme que les mythes des paladins médiévaux.

 » XVIII ème siècle, finalement, aura été pour la Corse celui des révolutions. Dans l’île, ou après cinq cents ans de présence, Gênes va s’effacer. En France, à laquelle la Corse est incorporée en 1768, où l’Ancien Régime va être balayé par la Révolution de 1789″

Point de départ des révoltes, révoltes anti-fiscales1730. 1755, élection de Pascal Paoli,

Le chapitre archaïsmes  évoque le règne éphémère du roi Théodore, que j’ai lu citer par Colomba de Mérimée. Il raconte la « manière corse d’habiter la Terre et de vivre en société »les codes d’honneur, la vendetta. Il analyse aussi les causes économiques, le système de propriété foncière. Dans ces sociétés agricoles, « l’autoconsommation est la règle, l’autosuffisance, un signe d’aisance ». La modestie de la démographie, expliquerait selon l’auteur l’importance des tombes, « on se sert de tous, les vivants et les morts pour marqer le territoire, et ne pas rester seuls, écrasés par le vide... ». Dans ce chapitre il raconte aussi les légendes, les revenants, les sorciers les mazzeri. Toute cette partie du livre s’intègre parfaitement à la démarche anthropologique de la Collection Terre Humaine.

La deuxième partie du livre traite de la période qui commence avec la fin de la Révolution jusqu’à nos jours. Comme la première, les chapitres sont d’intérêt assez inégaux.

« chez nous, on aime le pouvoir« 

Les relations des membres de sa famille au pouvoir, royaliste avec la recherche de titres de noblesse ronflants, de l’église avec des prélats influents, judiciaires … ces relations donc sont examinés minutieusement, trop minutieusement à mon goût avec des longueurs. Et entre ces recherches généalogiques et parfois fastidieuses des anecdotes sont savoureuses. Des faits historiques, la participation de sa famille (et des corses en général) à la saignée de la Première Guerre mondiale, à l’aventure coloniale et à la Résistance, sont parfois fort intéressants.

Ce gros livre (416 p) est donc une mine de renseignements et mérite qu’on se donne la peine d’y consacrer un temps de lecture, même si je ne me suis pas interdit de lire certaines pages en diagonale.

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