Madaba et le Mont Nebo

CARNET DE JORDANIE

 

Mosaïque de Madaba (parc archéologique)

Pour le Mont Nebo je fais confiance au GPS qui nous guide dans les petits chemins et les villages jusqu’à Madaba. Malheureusement, il est réglé sur le centre artisanal de ce nom et non pas sur le monastère. Petites rues embouteillées, nous avons un avant-goût de la conduite dans cette petite ville. La route du Mont Nebo est bordée de pins puis de centres artisanaux et des restaurants pour touristes.

Difficile de distinguer le « mont » sur l’épaulement des collines. Il est coiffé d’une « église » moderne Entrée payante (2JD) le Jordan Pass n’est pas accepté. Les nombreux cars ont déversé des classes de filles. Nombreuses sont « en cheveux » est-ce parce qu’elles sont chrétiennes ou parce qu’elles sont trop jeunes pour être voilées ? Elles ne s’intéressent que très peu aux mosaïques, trop occuper à se photographier les unes les autres. Les touristes les intriguent. Deux grandes (voilées) me font passer un véritable interrogatoire « Pourquoi avez-vous choisi la Jordanie ? – avez-vous visité d’autres pays du Moyen Orient ? pourquoi pas Dubai ? » . Les plus petites exercent leur anglais « what is your name ? ». Elles sont bien amusantes.

Mosaïque du Mont Nebo, la « girafe » tenue en laisse
girafe tenue en laisse

L’église, très moderne est conçue pour protéger une église ancienne et les précieuses mosaïques très exotiques avec des animaux. Un noir tient e laisse une autruche, un dromadaire, des chasseurs transpercent un ours et un sanglier ; thèmes de chasse étonnant dans une église. Cette œuvre remarquable a été datée (530) et signée. Elle conviendrait mieux au Palais de Constantinople qu’à un lieu sait.

La terrasse garde les fondations du monastère. Chacun vient contempler le panorama comme Moïse qui n’a pu fouler la Terre Promise.

Face à la Terre Promise, sur la Terrasse du Mont Nebo, crucifix ou bâton de Moïse avec le serpent.

Pour le déjeuner, les restaurants prometteurs semblent fermés (l’un d’eux avec des  scènes de la Bible en plâtre dans le jardin,  n’ouvrira que pour le dîner) le parking du suivant est encombré de cars…La conduite dans Madaba devient un véritable cauchemar pour Dominique. Le fenêtre « batterie faible » occupe l’écran, au pire moment  l’appareil s’éteint à nombreuses reprises (bien qu’il soit branché sur l’allume-cigare de la voiture depuis ce matin 8h) .  J1’ai programmé le Parc Archéologique c’est un complexe d’églises anciennes en pleine ville. Les rues commerçantes sont étroites, embouteillées ; Les habitants laissent leur voiture au milieu de la circulation, ouvrent leur portière, klaxonnent. Quand, enfin on a garé la voiture à proximité du parc archéologique, ce sont les restaurants qui sont introuvables.

On a tourné près de deux heures au hasard, empruntant toujours les mêmes rues. Enfin, à la limite de la ville, nous découvrons une échoppe de falafels . Pour 1JD nous avons deux pita/falafel et pour un autre JD deux oranges, deux bananes. Déjeuner tout à fait suffisant !

Madaba : église de la vierge, curieuse mosaique ronde

Le parc archéologique expose de nombreuses mosaïques provenant des églises voisines, il contient l’Eglise de la Vierge redécouverte en 1857, érigée sur un ancien temple romain. On voit encore les arches romaines . Le  plan circulaire inhabituel pour une église repose sur les structures du temple. Une très belle mosaïque ronde entourée d’entrelacs islamiques fait la synthèse entre toutes ces origines, l’art byzantin rencontre l’art islamique.

La salle d’Hippolyte raconte la tragédie d’Euripide. On reconnait Phèdre, Aphrodite, et les petits amours. Trois villes sont personnifiées Rome, Gregoria et Madaba (j’ai cherché sans trouver Gregoria). C’est une mosaïque vraiment extraordinaire

Moins spectaculaires, les mosaïques de l’église de Matrouh : les médaillons ronds ou hexagonaux sont entourés de belles frises en camaïeu gris-beige-jaune ou rouge-rose-bleu.

Sur un mur, on voit de belles maisons représentant les villes des environs.

Le decumanus de la ville romaine passe dans le Parc Archéologique.

Il y a aussi une mosaïque provenant de la forteresse de Machéronte  d’Hérode le grand que nous verrons demain.

La mosaïque la plus fameuse est celle du plan de la Palestine qui se trouve dans l’église Saint Georges. A l’issue de ma visite au Parc Archéologique je pars à la recherche de Saint George. Me guidant à un clocher qui dépasse les maisons j’arrive à la grande église Saint Jean Baptiste qui est diamétralement opposée sur le plan. Il faut dire que nous avons tant tourné que j’ai perdu le  nord.

les écoliers de Saint Jean Baptiste

Saint Jean Baptiste est une église catholique encore en fonction avec un haut clocher carré coiffé d’un toit à 4 pentes et surmonté d’une croix. Dans le presbytère, on aménagé une sorte de musée avec la reproduction moderne de la mosaïque de Saint Etienne. Aux murs des photographies anciennes très intéressantes des années 1900 : on voit des paysans et les élèves des écoles catholiques. Les petits garçons arbore une tenue bédouine avec chèche et cordelette, les filles habillées de noir et parfois voilées.

Le prêtre me propose de découvrir les souterrains sous l’église ; C’est une promenade très surprenante. Je ne sais pas trop où j’arrive. Je renonce à l’autre attraction : grimper au sommet du clocher pour avoir une vue plongeante sur Madaba. Des souterrains on débouche dans l’église, très vaste, moderne de peu d’intérêt.

A proximité, notre hôtel Saint Jean. Je retourne à la voiture en mémorisant le parcours. Nous sommes passée dans ces rues, n’avions pas remarqué l’hôtel ni les resaturants alors que les cherchions.

Comme il est déjà 16h et que tout ferme à 17, je choisis les visites les plus proches.

Le Musée est poussiéreux. J’aurais sans doute profité de la visite si un vieil homme à caffieh à damier ne s’était imposé comme guide et ne m’avait imposé ses commentaires en arabe. Les mosaïques ont perdu leur éclat dans la poussière, les lampes à huile en poterie, les lourds bracelets en argent auraient mérité des efforts de présentation.  Par politesse, je laisse mon hôte me détailler chaque objet, il méritera son bakshish !

L’Eglise des Apôtres se trouve en périphérie de la vieille ville. Ce n’est pas une église mais une structure protégeant les mosaïques. Pierre et tuile, rien de l’extérieur ne laisse deviner que c’est une construction relativement récente. Le gardien fait des efforts pour mobiliser mon attention en pulvérisant de l’eau pour raviver les couleurs des mosaïques. Je lui donne un JD qu’il accepte en feignant d’être surpris.

Il est trop tard pour l’église Saint George. Je ne verrai pas la mosaïque la plus célèbre de Jordanie.

Hôtel saint John : lobby

Accueil très chaleureux à l’Hôtel Saint John dont la gestion est familiale. Comme tous les Jordaniens, le réceptionniste s’inquiète de notre perception de la Jordanie et des Jordaniens ?

Notre chambre est simple mais confortable ; Il y a un très grand lit et un écran plat de grande taille (avec BFMTV en français. La climatisation a été inversée pour servir de chauffage. La fenêtre est petite et il n’y a pas de vue, ce qui n’est pas grave puisqu’au 4ème étage la terrasse est très agréable avec une vue étendue sur la ville, le clocher de l’église Saint Jean Baptiste, la coupole dorée et les minarets comme   effilés au taille-crayon, de type turc.

Sur une terrasse voisine, un homme brandit une épuisette à la manière d’un filet à papillons. Il siffle. Une troupe de pigeons arrive à son appel.

Nous y passons le reste de la soirée. Thé à la menthe au soleil couchant en triant les photos dans des fauteuils confortables/ La température a sérieusement fraîchi, j’enfile une polaire et m’enroule dans le cachemire de ma grande écharpe grise.

Des jeunes filles aux longs cheveux lâchés jouent aux cartes en fumant des narguilés. Elles  sont très gaies (et bruyantes). La musique est au volume maximum La lumière passe du rouge au bleu donnant au Skybar une ambiance de boîte de nuit (il n’est pas 19h). De nouvelles jeunes filles arrivent, toutes sur le même modèle, pantalons serrés, blousons gris ou rouge, cheveux très longs, peu ou pas de maquillage à la différence des voilées qui arborent un rouge brillant et des yeux très charbonnés. Embrassades entre filles (discrètes) entre garçons, bises, pas de mélange de genres. Autant les filles sont exubérantes, autant les garçons silencieux.

Quand arrive l’heure de la prière, la musique est mise en sourdine ; l’hôtel Saint John est catholique mais respect le chant du muezzin.

Les pigeons au coucher du soleil

On nous apporte une très grande variété de salades : persil haché et tomates coupées très fin, servie sur des feuilles de salade, humus décoré de feuilles de menthe et lignes de sumac, tehina décorée de pois chiches, fétouche avec des croutons arrosés d’une sauce couleur caramel, une salade absolument  délicieuse de tomates, concombres aubergines finement hachés avec des poivrons, de la pomme et des amandes. Au début nous chipotons, ne picorons que pour goûter – pour garder de l’appetit pour le plat principal – puis on liquide tout. C’est tellement bon ! Quand on nous apporte le poulet coupé en dés dans des oignons recouvert de pita chaude nous n’avons plus faim ; Nous goûtons pour faire honneur au cuisinier en se forçant un peu.

La Mer Morte

CARNET DE JORDANIE

Mer Rouge et cristaux de sel

Après la route de l’aéroport,  fluide, la descente est interminable dans les collines. Avec un dénivelé de 1200m, les oreilles se bouchent comme en avion. Au détour d’un virage j’aperçois la Mer Morte dans une atmosphère très embrumée.

.Nous renonçons à Béthanie, le site du baptême du Christ – payant hors Jordan Pass – qui nous rallongerait le circuit. Nous ne sommes pas en pèlerinage !

la Mer morte  et la Plaine du Jourdain noyés dans la brume

La vallée du Jourdain est moins verte que je ne le présumais. Nous passons devant une bananeraie (bien gourmande en eau). Dans la luzerne tournent  les arroseuses. Plus loin des champs de pommes de terre et des choux. Des haies de cyprès cachent d’autres cultures. Enfin elle émerge de la brume, bleue opaline, évanescente. Les collines de Judée estompées se confondent avec le ciel. Je suis submergée de souvenirs : descente d’Arad à Metzada à grande vitesse dans els tournants, baignade vers Ein Gedi….

les écolières à la plage, en face la Rive Occidentale

Une première tentative d’approcher la mer tourne court. Nous empruntons une petite route agricole qui s’arrête 50m plus tard dans un champ. Une piste nous ramène à la route par des acacias. Deuxième essai près d’un hôtel, on arrive sur un grand parking où sont garés deux minibus. Un cavalier fonce sur nous à bride abattue « Bicture ? »je fais « non » d’un claquement de langue puis me dirige vers le groupe de gamines qui pique-niquent sur des tables de bois. Elles sont mignonnes. La baignade c’est beaucoup plus bas et inaccessible. Les hôtels de luxe ont installé des plages privées invisibles et surtout très chères. Il y a bien une plage publique Amman Beach mais l’entrée est à 20JD cela fait très cher si on n’a pas l’intention d’y passer la journée. Nous renonçons, il y a tant à voir dans cette journée. Le maillot sera inutile, ainsi que les soins intensifs pour guérir à temps les bobos aux pieds aussi.

derrière le drmadaire, Amman Beach

La température était de 12°C à Amman, sur le bord de la Mer Morte elle frise les 30°C et le soleil brûle, au lieu de rouler la caffiah en turban, je me voile pour cacher le visage .

Nous dépassons les hôtels espérant approcher de l’eau, en vain. J’arrive quand même à photographier des concrétions salines qui font une frange blanche brillante sur les roches foncées. Les nuages se sont dissipés, la brume s’est levée. Les montagnes de Judée – Palestine ou Israël ? – en face sont blanches tandis que la rive jordanienne est brune ou pourpre.

Une route passant par le « complexe panoramique » et les sources chaudes de Ma’in va vers Madaba. Spectacle en technicolor, les strates alternent brunes et vertes ou roses et blanches, photogéniques !La descente sur la cascade de Ma’in est impressionnante. A l’entrée du site, il y a une grande queue. Entrée 15 JD chacune.  Comme pour la Mer Morte, nous renonçons à la baignade, je privilégie les mosaïques de Madaba. Décidément il manque une journée Mer Morte à notre programme ! la remontée se fait bien, et continue dans le désert jusqu’à ce que je remarque des asphodèles (fanées) puis des pins, isolés au début, enfin une véritable forêt. Nous sommes au col, les pins sont touffus. Le plateau est cultivé, blé bien vert sur la terre rouge, paysage agricole paisible, oliviers gris-bleus, maisons dispersées. Il y a aussi des vignobles avec de hauts ceps et des sarments courant sur les fils.

Gertrud Bell – archéologue- aventurière agent secret – CHRISTEL MOUCHARD

VOYAGE EN ORIENT

 

 

J’ai choisi Gertrude Bell pour m’accompagner en Jordanie. Je viens de terminer la biographie de TE Lawrence, son presque contemporain, et collègue en archéologie et en espionnage… J’ai lu récemment son récit de son  expédition en 1905 de Palestine en Syrie The Desert an the Sown et j’ai eu envie de connaître mieux cette grande dame. Quelle compagne! Globe-trotter, archéologue, puis espionne et diplomate…

La biographie de Christel Mouchard est passionnante. C’est un travail sérieux et minutieux, inspiré de la correspondance de Gertrud Bell qui écrivait pratiquement chaque jour à Florence, sa belle-mère et à ses sœurs ainsi qu’à nombreuses relations. A la fin de l’opus elle livre toutes ses sources avec précision.

Christel Mouchard raconte avec luxe de détails la vie d’une certaine aristocratie britannique pendant l’époque victorienne qui a forgé le caractère de l’héroïne.

 

Née dans une famille d’industriels, Gertrude Bell, dès l’enfance, a manifesté une indépendance et un caractère bien trempé. Elle a commencé sa « carrière » par de solides études à Oxford qu’elle réussi avec succès. A l’issue de ses études c’est une jeune fille parfaite

« Où trouverait-on une jeune fille plus accomplie? [….] Elle a de la grâce, de l’élégance. elle sait danser, converser, séduire. Sa dot a de quoi faire rêver… »

Elle a le goût des toilettes, fréquente le meilleur monde. elle est même très exigeante, terriblement snob. Les maris potentiels  apprécieront  peu son érudition et sa force de caractère.

Sa famille l’envoie à Bucarest en compagnie d’un cousin qui est quasiment son fiancé en voyage romantique mais…

« Gertrude a beau répéter qu’elle ne rêve que mariage et enfant, elle n’arrive pas à rester dans son rôle: elle parle comme si elle rêvait aussi d’influer sur la marche du monde »

Après Bucarest, Téhéran, elle apprend le Persan, goûte la poésie, fait des randonnées en compagnie de Cadogan, dont elle tombe amoureuse. Que serait arrivé de Gertrude si son père avait consenti au mariage?

Désormais, elle ne cherchera plus de mari et voyagera …

« Il est de coutume de dire des femmes qui voyagent qu’elles fuient. elles partent pour éviter le face à face avec elles mêmes, pour ne pas réfléchir sur les occasions manquées…. »

« Voyageuse victorienne » ou « globe-trotteuse« , elle va sillonner le monde « Curieuse, résolue, enthousiaste…ces qualités, Miss Bell les a en commun avec ses consoeurs… » N‘allez pas imaginer une routarde. Attentive à à la mode en toutescirconstances, elle n’a pas peur des bagages volumineux. Dans le désert, elle emporte sa baignoire et son service à thé en porcelaine, son matérielphotographique  et « kodake tout ce qui veut bien se laisser kodaker », et les théodolites dees cartographes . Plus encore que des bagages, elle est soucieuse d’apprendre la langue des pays qu’elles visite

« comprendre un beau jour la conversation de deux mendiants; voir le visage d’une vieille marchande à laquelle on demande une pomme s’illuminer de surprise : c’est le bonheur ultime »

De touriste, de globe-trotteuse, elle va devenir orientaliste, elle apprend l’arabe, achète un cheval et affrète une véritable caravane. Elle ne voyage plus seulement our le plaisir : elle devient archéologue.  A Kerkemish elle rencontre, entre autres, Lawrence ainsi que les archéologues émérites:

« Ce chantier-là a quelque chose de plus que les autres. Kerkemish n’est pas seulement une antique cité hittite sortie du néant, c’est un carrefour de l’espionnage européen »

Une passion amoureuse, malheureuse, on n’imagine pas comment la sexualité féminine est contrainte dans la bonne société anglaise de l’époque, la conduit près de la dépression. Son remède est encore d’aller plus loin, tenter ce qui n’a pas été exploré : la traversée de l’Arabie, du Hedjaz, mal contrôlée par les Ottomans, sous le règne des tribus bédouines.

 

« Aujourd’hui je retourne au désert. |…]Puis, traversant les rails, frontière du monde extérieur, je me suis sentie comme cette divinité qui incarne le Destin, armée de ses grands ciseaux – Clotho, devant laquelle nous courbons la tête. j’ai coupé le fil. »

« par dessus tout, elle va chercher le rappe omniprésent de la mort. Elle sait combien les Arabes y sont sensibles, et la voyageuse reprend à son compte le fatalisme mystique des nomades »

Malgré son expérience, malgré la fortune, le voyage est difficile. Elle est même retenue prisonnière. Physiquement elle a souffert de cette expédition. 

En 1915, l’aventurière sans aventure, sans mari, sans amant croit que sa vie est finie quand elle reçoit un appel du Caire, de David Hogarth, l’archéologue , chef des services secrets. Elle va retrouver ses collègues de Kerkemish, TE Lawrence aussi. sa connaissance du terrain, ses entrées au Foreign office, ses relations avec les tribus arabes font d’elle non seulement une espionne mais aussi une diplomate.

A l’issue de la Première Guerre Mondiale, dans le partage de l’empire Ottoman, elle jouera le rôle de conseillère auprès du roi du nouvel état créé : l’Irak. Elle s’installera à Bagdad, fondera le Musée Archéologique de Bagdad et s’y éteindra le 12 juillet 1926.

 

 

 

 

 

 

Ajloun, le château de Saladin

CARNET DE JORDANIE

 

Ajloun, le château de Saladin

Théoriquement, c’est facile de se rendre de Jerash à Ajloun deux sites touristiques majeurs. La route, très large, est balisée  par de gros panneaux. Notre GPS s’empresse de nous faire quitter la grande route (sans doute pour faire gagner quelques km). Nous dévalons une colline plantée de vergers, arrivons dans un agréable village aux maisons cachées dans des jardins. C’est enchanteur mais le GPS clame « vous êtes arrivés » alors que je ne vois pas de château fort ! J’ai programmé Dayr Ajlun et non pas la citadelle. Nous demandons notre chemin « castle ? » sans succès « kalaat ? » on nous explique en arabe. Heureusement je sais dire « droit » et « gauche ». Après maints détours nous arrivons au bourg d’Ajloun bien embouteillé. Le château qui couronne la montagne se voit de loin.

Le château d’Ajloun

Construit par Saladin (1171 -1250), avec 4 tours, des douves et un pont levis. C’était une citadelle surveillant la route de Damas et le sud de la vallée du Jourdain, il sécurisait le passage des caravanes et des pèlerins passant par le Hedjaz. Il ne fut jamais conquis par les Croisés, mais pris par les Mongols  puis par les mamelouks et Baybars qui l’agrandirent. Le château avait aussi des activités métallurgiques protégeant des mines de fer.

Ajloun : pont levis et barbacane

Après le passage par la barbacane et le couloir en L, on entre dans une très haute salle voûtée. Un petit musée présente des poteries de l’Âge de Bronze, du verre et des lampes byzantines, et de l’époque mamelouke un dispositif pour filtrer le sucre.

Je parviens dans la Tour de Baybars – héros du conte du conteur de Hakawati de Rabih Alameddine – où je découvre toute une réserve de boulets de pierre.

Ajloun tour de Baibars

Vers la terrasse supérieure on découvre le système de récupération de l’eau : citerne et filtration par les plantes de l’eau des bassins. Chaque tour avait un garde qu’i s’occupait des pigeons (encore une référence dans Hakawati).

Retour par le même chemin qu’à l’allée route 35 puis soirée tranquille. Dîner dans la chambre de yaourt (labneh) de Sabri j’avais aussi acheté des feuilles de vignes farcies qui ont atterri dans la poubelle, trop vinaigrées.

Jerash, la ville romaine de Gerasa

CARNET DE JORDANIE

Gerasa : Arc d’Hadrien

Départ à 7h30, l’heure où les Jordaniens vont travailler. Les rues sont très encombrées. L’une d’elle est bouchée par une foule de piétons : une manifestation ? non simplement des gens qui attendent l’autobus. La circulation est anarchique, trois voies deviennent 4 voire 5 avec le trottoir, un goulet d’étranglement se forme quand le trottoir disparaît. Il faudra plus d’une heure pour sortir d’Amman.

jardineries le long de la route 35

Les nuages noirs menaçants donnent de la pluie qui cesse dès qu’on aborde la campagne. La route 35 est une belle route à chaussées séparées presque une autoroute. D’Amman jusqu’à Jerash, elle est bordée de pépinières et de jardineries très colorées. Sur les bas côtés, géraniums, œillets d’inde, pétunias et bougainvillées font une bordure multicolore et très gaie ;. Vers la campagne les plants se diversifient, on vend aussi des oliviers et des arbres fruitiers. La campagne est très urbanisée. Les maisons de ciment sont souvent « inachevées » sans crépi avec les armatures métalliques qui dépassent du béton. Cette pratique de la maison jamais terminée s’étend sur tout le pourtour méditerranéen de la Sicile à la Grèce. Des serres en plastique alternent avec les oliveraies. Les maraîchers vendent leur production sur le bord de la route : amandes vertes et fraises, salades romaines, concombres, aubergines et courgettes. Je retrouve avec grand plaisir la végétation méditerranéenne : oliviers, pins, eucalyptus, mimosas fleuris et faux poivriers…

Le relief est très marqué. Avec la pluie et la poussière des nombreux chantiers, la route est glissante.

Arrivée à Jerash, l’Arc de triomphe d’Hadrien se voit de loin avec les arcades de l’hippodrome.

Gerasa : Hippodrome

Le site est très étendu, la ville romaine de Gerasa était déjà immense et elle fut agrandie sur la route d’Amman, alors Philadelphia – autre ville de la Décapole – par l’adjonction de l’hippodrome (220-749 ap JC) et la construction du magnifique Arc d’Hadrien commémorant sa visite, il a passé l’hiver129-130 à Gerasa .Sur une partie du fronton gravé en grec, posé au sol, la dédicace « sacrée, asile et autonome » fut effacée après les révoltes juives de 132 à 135.

De l’autre côté de la route L’église de Marianos (570-749) fut édifiée pour les artisans potiers, teinturiers venus occuper par leurs ateliers l’hippodrome.

Hippodrome (220-749) dimensions 265mx50m, bordé au sud par de belles arcades, quelques gradins sont visibles, les murs extérieurs avec un appareillage bosselé.

Gerasa : boutiques près de la Porte Sud

La Porte sud moins spectaculaire que l’arc d’Hadrien, pourrait avoir été construite en l’honneur de ce dernier, intégrée aux remparts après que des pillards eurent pillé la ville au 4ème siècle. Près de cette porte se trouve le souk avec une quinzaine de boutiques une poterie, un charpentier, un bronzier et une huilerie creusée dans la roche dont il reste la meule.

Gerasa : Place Ovale

La Place ovale est l’élément architectural le plus original et le plus étonnant de Gerasa. Elle assure la connexion entre le Cardo maximus, le sanctuaire de Zeus, et des axes divergents. En  plus des portiques de colonnes qui subsistent actuellement, deux monuments  ornaient alors la place : un groupe de prêtresses et un dais porté par colonnes abritant la statue d’Hadrien. Le pavage est tout à fait spectaculaire surtout vu d’en haut en montant au sanctuaire de Zeus. Les Romains m’ont habituée aux routes ou rues tracées au cordeau se coupant d’équerre avec un forum carré, à la limite triangulaire. Le guide bleu qualifie de pré-baroque l’urbanisme de Gerasa.

Gerasa : sanctuaire de Zeus

Sanctuaire de Zeus (62-163)s’étage sur deux terrasses au sommet de la colline/. Il fut transformé en monastère au 5ème siècle puis réoccupé par des Croisés au 12ème . Une grotte était occupée par un oracle. Les autels étaient consacré à la « déesse Vierge Vérité », à » Zeus Ange », à Apollonius, philosophe platonicien qui avait offert à Hadrien un recueil d’oracles.

Le Théâtre Sud (90 à 749)

La date 749 récurrente est celle du séisme destructeur de la ville.

Quand j’entre dans le théâtre, il résonne de cornemuses non pas écossaises mais bédouines. Souvenir des britanniques, si les airs sont british,  le tambour est arabe. Le mur de scène est particulièrement bien conservé : les frontons triangulaires sont d’une grande finesse avec des frontons triangulaires soutenus par des colonnettes au dessus de petites niches

Il est extraordinairement bien conservé bien qu’il eut servi de carrière à la construction des églises.

S’éloignant du centre, le site devient plus sauvage. Je suis un peu déçue par l’absence des fleurs qui ornaient en cette saison les sites grecs ou siciliens. A Jerash, les buissons sont ras, les coquelicots minuscules, à la place des anthémis jaunes, des pissenlits ou de maigrelettes floraisons de moutarde. Une anémone rouge m’émeut.

Gerasa : Eglise St Cosme St damien

Près des  églises Pierre et Paul et la « mortary church » (7ème siècle) je vois un long et fin serpent se couler entre deux pierres et renonce aux mosaïques. Un peu plus loin, j’aperçois une autre église avec une belle mosaïque. Un groupe d’Italiens, conduits par un curé – sans doute un pèlerinage en Terre Sainte – s’y attarde. Mais ils ne sont pas accueillants. J’apprends que c’est l’église Saint Cosme et Saint Damien qui sont représenté près de l’autel tandis que dans la nef, des médaillons représentent des animaux exotiques.

Gerasa : Temple d’Artémis

Le temple d’Artémis (135-749) est un édifice imposant, périptère et hexastyle. Très grand, il est resté inachevé, couvert seulement d’une toiture provisoire au dessus de la cella. Il faut également fortifié par les Croisés.

Dans l’église de l’évêque Isaïe (558) les mosaïques ont souffert de la crise iconoclastique.

Au dessus du ravin, un Poste de Garde ottoman rappelle l’époque ou Tchétchènes et Tcherkesses furent transplantes (1875) .

 

Gerasa a un plan double, le Temple d’Artémis correspond au sanctuaire de Zeus, le Théâtre nord fait pendant au Théâtre sud, ses gradins sont plus pentus qu’au sud. Des bas-reliefs représentant des musiciennes font penser qu’il était peut être dédié à des spectacles musicaux.

Gerasa : Cardo maximus

Après la visite du théâtre, je  néglige les thermes et l’agora. , je rejoins le cardo, entre deux rangées de colonnes. A la croisée du Cardo et du Décumanus nord, est érigé le Tetrapyle nord. Les Propyléees du Temple d’Artémis sont un escalier monumental montant du wadi au temple, invisible. Un guide prétend que l’effet de surprise quand on montait au temple augmentait la théâtralité du lieu sacré. Le long du cCardo je passe devant un magnifique nymphée puis par le Tétrapyle sud  symétrique du tétrapyle nord.

Nymphée

A l’entrée du parking du site, un restaurant a installé des tables dehors, très agréables. Le menu-buffet  (10DJ) propose un choix de salades et des plats chauds : ratatouille, boulettes, poulet dans une sauce, courgettes et chou-fleur sauté  avec des crêpes fourrées. Nous nous réjouissons de l’abondance de légumes. La cuisine manque de raffinement  ; elle a une saveur de cantine. Peu importe ! l’endroit est agréable et nous l’avons trouvé sans peine.

Le Promeneur d’Alep – NIROZ MALEK

Touriste insouciante, visitant châteaux et mosaïques, j’ai approché de trop près la frontière syrienne, vu les tentes des réfugiés pour oublier la tragédie qui se joue non loin d’ici. Cette lecture est un contrepoint à la béatitude vacancière de celle qui n’a même pas accès aux actualités. C’est à Wadi Rum que des touristes français, connectés, m’ont appris que des Syriens avaient été gazés…que Trump avait réagi…

Ce recueil de textes poétiques est le journal d’un écrivain qui n’a pas pu quitter Alep et qui témoigne de l’enfer quotidien de ses habitants.

« – Le corps  pourrait-il survivre sans âme? C’est pour cela que je ne partirai pas de chez moi, car il n’y a pas de valise assez grande pour contenir mon âme »

Texte très courts racontant le quotidien dans la ville, entre bombardements et barrages, parfois prosaïques, de celui qui malgré tout rencontre des amis, va au café, tente une promenade, retrouve ses souvenirs de jeunesse ou d’enfance dans un square où jouaient les enfants….

Textes hallucinés entre vie et mort. Le narrateur est-il encore vivant, est-il échappé de la morgue comme celui qui grelotte de froid dans le chaud été syrien?

Des personnages interviennent, on ne sait pas si l’enfant nu est un fantôme…si la jeune fille amoureuse survivra à son fiancé… des histoires de vivants se trament quand même.

Un texte que je ne suis pas prête d’oublier.

 

Les chateaux du désert d’El Azrak à Zarqa

CARNET JORDANIEN

Chateau d’Al Azrak

El Azrak

Nous arrivons vers midi à El Azrak. Cette petite ville est située dans une oasis ancienne : de grands et hauts tamaris se balancent au vent. Deux  réserves  dans des zones humides à proximité permettraient des promenades et peut être l’observation des oiseaux et de la faune locale. El Azrak est aussi un carrefour routier entre la route allant vers le sud et l’Arabie Saoudite et Aqaba et celle de l’Irak vers l’est. Deux routes relient Amman , la 40 par laquelle nous sommes arrivées et la 30 qui passe plus au nord. De boutiques exposent leur marchandise sur le trottoir et il y a de nombreux restaurants.

chateau d’Al Azrak

 

Le château d’El Azrak se trouve 6 km au nord du village principal, à l’entrée du bourg El Azrak-ash-shimali. Sa taille est impressionnante. Il est construit de gros blocs de basalte. Le guide bleu attribue sa construction aux Nabatéens, pour surveiller la route caravanière. Deux blocs gravés en latin et en grec attestent de la présence romaine. On dit que Dioclétien et Maximilien  le fortifièrent. Il fut occupé par les Omeyyades : en 744 le calife omeyyade Walid II construisit une enceinte. Il est surtout célèbre parce Lawrence y fit halte avant la conquête de Damas avec Fayçal. On veut voir « la chambre de Lawrence »accessible par deux escaliers de pierre. C’est une salle voûtée au plafond de basalte. Il ne reste rien de Lawrence, un séisme l’a détruite. En revanche, la porte du château  date de l’Antiquité ; ses battants sont en lourd basalte tournent  sur ses gonds de pierre. Je me suis amusée à la pousser. Elle est très lourde. J’imagine son grincement sinistre dans la nuit raconté par Lawrence dans les Sept Piliers de la Sagesse.

Retour au carrefour pour chercher la Réserve, la station service et le restaurant Al-Ryad recommandé par le Guide du Routard. Proche de la station service (éclipsée par la cafetière géante) reconnaissable aux murets de basalte et à la balustrade blanche. L’accueil est cordial. Au menu, diverses grillades et brochettes. Dominique commande un demi-poulet grillé et moi, un plat jordanien typique : du mensaf : sur une bonne portion de riz parsemé de persil ciselé et de cacahouètes grillées se trouve un pavé jaune qui est de l’ageau mitonné, fondant (du collier semble-t-il. Avec on a servi un bol d’un liquide jaune fumant – sauce ou soupe ? – citronné délicieux.

Comme chez Hacheem, le serveur a recouvert la table d’un film plastique, apporté du pain arabe et des cuillers. Perplexité : comment manger sans couteau ni fourchette. J’ai toujours mon canif dans mon sac, on réclame des fourchettes, puis je mets les doigts pour détacher des lambeaux d’agneau. Quatre jordaniens s’installent à la table voisine, galabiehs brunes ou blanches impeccable et caffiehs à damier. Je les regarde se servir de leur pain pour emballer la nourriture qu’ils pincent sans se salir els doigts. De l’autre côté, les chats veillent, discrètement au début, bruyamment ensuite. Ils se tiennent derrière une rangée de narguilés argentés bien astiqués.

La route de la Réserve débouche juste en face. Elle est très payante : 7JD, le Jordan Pass n’est pas accepté. Nous renonçons à la promenade sur les pontons, les seuls animaux annoncés sont des gamousses. On ne va pas payer 7JD chacune (environ 12€) pour voir des buffles !

E circuit emprunte la route 30 – excellente route dans un désert de cailloutis légèrement ondulé de collines ; Bizarrement, les routes ne sont pas fléchées avec le nom des villes mais avec la direction des pays voisins. A gauche nous longeons le camp de réfugiés d’Azrak, tentes ou maisonnette blanches serrées les unes contre les autres à perte de vue, enfermées dans un grillage. Sur els bords de la route, des véhicules militaires avec mitrailleuse lourde et même des chars. Cela n’incite pas au tourisme. On construit des infrastructures, des parkings, des canalisations, des routes. Un nuage de poussière signale un nouveau chantier. Bizarrement, on ne voit ni gens ni voitures. J’aurais pensé une plus grande animation. Ce camp a été construit il y a déjà trois ans mais les articles que j’ai pu lire sur Internet signalent qu’il n’est que partiellement occupé.

qsar-al-habalat

D’après la carte deux châteaux du circuit devraient se trouver non loin de la route, on ne les voit pas, il faut dire que tout ce chantier peut les cacher ! Il y a aussi une grande base militaire et ces carrières de pierre à bâtir. 15 km avant Zarqa un complexe d’usines chimiques borde la route. Il nous faut donc faire le détour par le nord et Ad-Dulay pour retourner vers l’Est avec l’aide du GPS.

Qasr-al-Halabat

Le château est perché sur la colline, il est surplombé par une haute grue qui montre une restauration en cours. A l’entrée le Centre des Visiteurs en belle pierre blanche est fermé. La billetterie est vide « no tickets » et le musée est fermé. Je monte librement sur la colline. Un joli bâtiment carré, la mosquée, a été bien restauré (je présume que c’est une mosquée à cause du mirhab) encadré par une jolie arche.

Qsar al Haballat mélange de pierre calcaire et de basalte

Le Château est un peu plus loin, noir et blanc. Un adolescent surgit « chouf el qsar ? « . Il ne parle pas anglais mais joue les guides et me montre les mosaïques, je vois le canard mais pas le serpent à barbe signalé par le Guide Bleu p 193. Des ordures jonchent les précieuses mosaïques. Il y a un beau puits ciselé dans la cour ; Sur une tour trois copain de mon « guide » sont perchés, puis le gardien arrive « no problem ? » Je lui réponds que je suis professeur et que mes élèves ont leur âge. Penaud il rétorque que les jeunes font écrouler les murs en grimpant et qu’il est forcé de les chasser.

Je n’ai pas reconnu la forteresse romaine construite sous Caracalla ni la villa omeyyade, ni le monastère.

Hammami es-Sara

Comme ce matin, un établissement de bains à proximité du château. Bien restauré mais peu intéressant après la visite de ce matin.

Nous rentrons par Zarqa. Madame GPS nous enjoint en même temps de tenir la droite et de monter sur la bretelle à gauche. Avec ces ordres contradictoires, nous perdons la route principale pour passer par une ville embouteillée ; la traversée de Zarqa est interminable. C’est une grande ville de près d’un million d’habitants. La circulation y est infernale dans les petites rues. Nous rentrons à la tombée de la nuit à l’Hotel Retaj heureusement il est facile à trouver sur la grande voie rapide Zahran Street Four Seasons très haut et Sheraton nous servent de repère.

 

 

 

 

 

 

 

 

Les châteaux du Désert Qsar Kharaneh et Qusair Amra

CARNET JORDANIEN

Qasr- el- Kharaneh

C’est l’aventure !

Nous quittons Amman par la route de l’aéroport selon les conseils du portier de Retaj. Le pictogramme du petit avion nous guide, il y a très peu d’indications en lettres latines. A la sortie de la ville, le GPS prend le relais dans les zones artisanales ou commerciales, d’autant plus que seules Aqaba et la Mer Morte sont indiquées (vers le sud alors que les châteaux sont à l’Est)

On traverse les villes de Sahab et de Al Muqqawar.  Des marchandises sont artistiquement empilées dans la rue. Nous achetons un pack de 6 bouteilles d’eau pour seulement 1 JD , le même prix que la minuscule bouteille de l’hôtel. Je prends le pack, entre dans la boutique, attendant patiemment que la cliente au comptoir emballe tout un caddy de friandises. Le magasin embaume le café moulu sur place. Dans une grande vitrine on a mélangé amandes cacahouètes et pistaches, le mélange est du meilleur effet. Des tiroirs ouverts contiennent des friandises emballées dans du papier brillant. Les pots de khalva ont la taille de pots de peinture. Cette confiserie est tellement appétissante.

La route 40 traverse un désert caillouteux plutôt plat. Rien n’accroche le regard, à part la ligne électrique. Le matin tôt, seuls quelques gros pick up foncent. Plus tard arriveront les gros camions qui vont en Irak et en Arabie Saoudite. Ils transportent surtout du matériel de construction, sacs de ciment ou énormes blocs calcaires.

Qasr -el –Kharaneh

Notre premier château du désert se dresse fièrement non loin de la route. Solide cube de belles pierres claires, renforcé de tours rondes à chaque coin. Daté 711 ap.JC  du règne du calife Omeyyade Al-Walid-ibn-al-Malik. Plusieurs interprétations à propos du rôle de ce château, forteresse ou Khan?il ressemble aux caravansérails vus en Turquie, en Arménie et en Ouzbékistan.

Au rez de chaussée les hautes ouvertures des écuries permettaient aux dromadaires de s’y abriter. Des pièces sont réparties autour d’une cour centrale carrée. Deux escaliers extérieurs en pierre conduisent à l’étage où 4 grandes chambres s’ouvrent sur d’autres plus petites. Un gradé accompagné par un jeune policier s’entête à chercher le hammam. Il m’explique en bon anglais que le calife avait 4 femmes qui devaient avoir tout le confort. Comme j’ai lu que  le château était un caravansérail, je pense qu’il y avait plutôt des marchands que les femmes du calife. J’en ai conclu que le gros policier était un macho. L’étape suivante m’expliquera son obsession du hammam.

Qusayr Amra

Qusayr Amra : les bains

Plus qu’un château, c’est une halte de plaisance avec des bains dont les fresques sont surprenantes. Ce site exceptionnel fut découvert par Alois Musil en 1907 et connu une restaurationpar  une équipe espagnole en 1971 et 20 ans plus tard avec les français. Classé au Patrimoine de l’Humanité,  son Centre des Visiteurs est très intéressant. Des panneaux en arabe- anglais et français donnent des explications très complètes sur le site mais également sur les califes omeyyades

Califes omeyyades :

la capitale fut Damas et qui entreprirent l’arabisation de la région avec le développement de l’écriture coufique et l’émergence d’une littérature arabe. Sus leur règne la tolérance permit l’intégration des cultures locales byzantines et perses. En plus des monuments emblématiques comme la Mosquée de Damas et le Dôme du Rocher à Jérusalem, on leur doit, en Jordanie la citadelle d’Amman et plusieurs châteaux  du désert.

Site de Qusayr Amra :

Dans un climat semi-aride, le Wadi Botoum  permettait avec des barrages, des citernes et des ouvrages hydrauliques d’entretenir une quasi oasis. En outre il était situé le long des pistes caravanières. Les habitations étaient construites en hauteur à l’abri des inondations tandis que les bains se situaient dans la zone basse. Des tamaris marquent le lit de l’oued.

Les fresques

Fresque
Fresques : les artisans et les métiers

Une des fresques représente les rois Caesar”, l’empereur byzantin, “Kisra”, l’empereur sassanide, “Negus”, le roi d’Abyssinie et “Rodéric”, le roi wisigoth d’Espagne.

Le prince est dans une construction d’image montrant l’art de recevoir les baigneurs. L’histoire est racontée sur plusieurs registres ; En haut ce sont des scènes de chasse avec le rabattage des onagres, au milieu on voit le roi dans un jardin, une femme au bain. La présence de personnages et même de personnages féminins fort peu vêtus est tout à fait étonnant dans la peinture islamique.  Sans doute, le caractère tout à fait profane du lieu (un hammam) explique cela. Dans la salle voûtée, sur le plafond sont peintes les constellations.

constellations

Une autre pièce est décorée d’animaux dans des médaillons tandis qu’un plafond montre le travail des artisans de l’époque.

L’habilité  et la finesse des fresques évoque l’art des miniaturistes, Ariane à Naxos aurait servi de modèle à la femme aux bains ce qui dénote une influence byzantine.

aniamux musiciens

Malgré les abondantes explications, à l’entrée dans le bâtiment c’est la surprise totale. Je n’aurais jamais imaginé une telle fraîcheur, une telle variété des couleurs et des thèmes. C’est aussi un miracle que je l’ai trouvé ouvert ; A la fin de ma visite, un bédouin en galabieh brune et caffieh à damier rouge ferme le verrou .

Amman, citadelle et Musée archéologique

les vedettes du musée : statuettes d’Ain Ghazal

CARNET JORDANIEN

Dans l’Odéon – théâtre de poche, très bien restauré, un guide francophone sort me montrer les escaliers qui permettent de monter à pied à la citadelle. Des Jordaniens nous disent de prendre le taxi qui ne coûterait que 1 JD, pour nous ce sera 2.

Grotte préhistorique

La Citadelle est construite à l’aplomb du  théâtre. Comme il n’y a pas de source sur la colline un système de citernes et de collecte  de l’eau est encore visible. Pas une goutte  ne devait être gaspillée. Le site est occupée depuis l’âge de Bronze (1700 – 1550avant JC) On peut voir une grotte

Les Romains ont fortifié la citadelle.

Temple d’Hercule et la main de la statue colossale, au fnd, la ville d’Amman

Un grand temple fut dédié d’abord à Tyché de Philadelphia puis à Hercule. Tyché, la Fortune, divinité hellénistique était vénérée en Orient, à Alexandrie, en Crète, à Antioche. Le temenos d’Hercule fut détruit pendant la période byzantine. Il en reste 6 colonnes à chapiteaux corinthiens (161-166 ap.JC). la figure d’Hercule a été retrouvée sur de la monnaie battue à Philadelphia il était associé au dieu ammonite Milkom. 3 chapiteaux corinthiens sont à hauteur d’homme, on mesure mieux l’énormité des proportions.

Musée archéologique

statuette d’Ain Ghazal

Devant le musée on voit   la main  d’une statue colossale. Le musée est vieillot, un peu poussiéreux mais recèle des trésors. Les vedettes sont les statuettes d’Ain Ghazal (8000-4000 av. JC) certaines sont des statues jumelles : d’un corps sommaire, rectangulaire émergent deux têtes délicates au nez et yeux bien formés ; Les yeux sont soulignés de noir (asphalte). Le Louvre héberge une statue d’Ain Ghazal, c’est même la plus ancienne statue du Louvre ; J’irai lui rendre visite à la prochaine occasion.

Statuettes ammonites

L’âge de fer correspond à la Période ammonite et au site de KHirbet-el-Hajjar (8ème siècle av.JC) les statuettes en calcaire sont originales. L’une d’elle porte une inscription en phénicien.

De la période romaine on trouve des céramiques, des statuettes en terracotta, genre des tanagra, des lampes à huile et une barque funéraire, aussi du verre, ‘industrie du verre romain aurait commencé au 1er siècle ap JC.

Antiquités byzantines

La plus jolie poterie byzantine est une lampe à 7 mèches.  Je photographie aussi un cygne formé à partir d’une coquille de porcelaine. On peut voir sur le site une vaste église byzantine ( 550 ap JC)

La ville bruisse de l’appel à la prière du vendredi et des prêches diffusés par des micros.

Palais Omeyyades

En sortant du musée je découvre le Palais Omeyyade  avec la salle de réception restaurée : on a reconstitué le dôme en bois et les décors d’arcs soulignés par des dents (d’influence perse) agrémentées aussi d’entrelacs et de motifs végétaux. Le complexe palatial comprenait aussi des bains, de l’Iwan ou salle d’audience, il ne reste plus grand chose.

Déjeuner chez Hacheem

Tous les taxis connaissent le restaurant populaire Hacheem  recommandé par le guide du Routard. Les  prix des taxis  ont augmenté depuis ce matin : 3JD . Les tables d’Hacheem sont installées dans une ruelle. Des familles jordaniennes sont attablées ainsi que des touristes. Le service est expéditif : le serveur dispose un film plastique sur la table, des cuillers en plastique, une corbeille de pain pita. Au menu, des mezzés : humus, falafels, tomates et oignons, aubergines. C’est très bon et bon marché (5JD pour les deux), à la bonne franquette mais les remplaçants  se présentent et nous ne pouvons nous attarder.

robes brodées

Après la prière du vendredi, les commerçants ont ouvert les boutiques. Des robes brodées rouges ou noirs sont suspendues ou sur des mannequins, mais plutôt que des souvenirs, je cherche une boutique de téléphone qui me remettra ma carte SIM française, et j’espère redonnera vie au téléphone bloqué. Les boutiques de téléphone ne manquent pas. Gracieusement un jeune homme replace la puce – sans résultat pour ranimer le smartphone –  « go to combany ! » me conseille-t-il. Dans la rue commerçante, je trouve le Nymphée romain monumental mais peu gracieux.

 

Après avoir goûté à une pâtisserie locale le Kunafa  au fromage fondu  chez Habiba  dégusté chaud  dans la rue sur le rebord d’un muret (on n’est pas toutes seules).

 

Nous décidons de remonter à la Citadelle pour voir le coucher du soleil. L’ambiance est différente de ce matin. Les familles ont remplacé les touristes. Des enfants font voler des cerfs-volants qui sont des drapeaux jordaniens agrémentés de franges vertes. Je dessine la ville, le théâtre à mes pieds et les collines en face. Dessiner permet de fixer mon attention ? Amman est très minérale avec ses maisons de belle spierres calcaires, quelques cyprès émergent entre les terrasses. Une mosquée à bandes noire et blanches me fait penser à certaines églises toscanes. Je constate une réelle homogénéité de l’architecture, brisée seulement par deux tours jumelles et un ou deux autres gratte-ciel qui dépassent. Il fait frais, le soir,  à Amman, nous n’avons pas prévu de lainage et retournons en taxi à l’hôtel Retaj.

Amman vue de la citadelle

Omar de l’Agence Enjoy Jordan vient nous apporter un petit Nokia hors d’âge et un GPS que nous lui avons réclamés. Nous lui faisons part de nos ennuis : s’il avait donné le Nokia à ses employés hier, je n’aurais pas verrouillé mon téléphone. Il ne s’attarde pas à donner des conseils touristiques. Pour un peu, nous décourage de faire le circuit des châteaux du désert du guide Bleu en entier.

L’hôtel Retaj n’a pas de restaurant mais il est situé dans un quartier où les restaurants de toutes sortes abondent, du fast food Burger King au chic Moulin(en français sur l’enseigne lumineuse) je découvre même un Carrefour Contact. A 50m du Retaj , sur le même trottoir  Jabri sera notre « cantine » c’est une sorte de self service qui propose de la cuisine jordanienne excellente à manger sur place ou à emporter. Sur place, il y a un décor « self service » sans intérêt, j’emporte donc pour 13.5JD deux plats de riz et poulet et deux yaourt lebaneh. On paie à la caisse et le serveur prépare les plats . C’est très bien servi.  Il y en a pour quatre ! Le riz est le meilleur que j’ai jamais mangé : des grains longs et fins sautés et des amandes grillées, le poulet est excellent quand au yaourt ! du yaourt grec en meilleur, plus épais, plus crémeux, un peu acide, une merveille. Nous en mangerons souvent.

Pour terminer la soirée, nous trouvons la BBC et CNN parmi la centaine de chaines en arabe.

 

 

 

 

Amman, une journée pour découvrir la ville :Downtown

Amman théâtre romain précédé de la colonnade du Cardo maximus

CARNET JORDANIEN

A notre programme, une journée libre pour explorer la ville.

Hier soir, nous avons parcouru de grandes artères très larges, bien éclairées passant à travers des quartiers modernes aux belles maisons au parement de pierre (la même qu’à Jérusalem). Un pont suspendu aux éclairages colorés et changeants, relie deux collines « le plus haut du Moyen Orient » commente le chauffeur. Autour de l’Hôtel Retaj où nous logerons quatre nuits, je remarque des grands hôtels, Four Seasons, Sheraton , repères utiles pour retrouver notre chemin.

Aujourd’hui, nous circulons en taxi. Je négocie la course avant de monter :

« Downtown ! 3 JD »

Le chauffeur ne sait pas où nous déposer. Il téléphone à un ami anglophone et me passe l’appareil « au théâtre romain ! ». La course va très vite. Le vendredi matin tout le monde dort, les boutiques sont encore fermées.

Le théâtre romain et l’ancien forum de la ville romaine Philadelphia sont bien conservés. Une belle place dallée avec des arbres maigrelets dans des grandes jardinières les mettent en valeur. Une belle colonnade, reste des galeries bordant le Cardo maximus précède le théâtre. Le théâtre est adossé à une colline très raide. Les gradins sont vertigineux. Une fois grimpée en haut, j’hésite à descendre, encombrée de ma jupe longue. Le mur de scène est encore orné. Je découvre d’en haut le petit odéon.

De chaque côté du théâtre se trouve le Musée Jordanie. A droite, des bijoux et costumes folkloriques de Jordanie et de Palestine sont magnifiques mais les photos sont interdites. Si mon téléphone fonctionnait j’aurais volé des clichés. Les visiteurs sont jordaniens pour la plupart (ou originaire de la région, je sais les reconnaître). Les familles sont accueillantes. Les enfants exercent leur anglais scolaire « What is your name ? Where do you come from ? ». Les femmes me montrent les plus beaux bijoux d’argent ciselé, de corail ou d’ambre.

Dans l’autre partie du musée, on a reconstitué des scènes de la vie quotidienne : un salon urbain de la bourgeoisie, des scènes villageoises.  L’arrivée de la mariée dans un palanquin – véritable cabine carrée faite d’épais tapis – et la procession de dromadaires est spectaculaire.  La fabrication du fromage se fait  dans une outre de peau de chèvre. Divers artisans sont représentés: le vannier et le tisserand,(les fils de laine sont teints  au jus de grenade), le repasseur de couteau, le bijoutiers. Une tente bédouine a été montée, en deux parties, dans la moitié des hommes on prend le café préparé sur les braises à l’extérieur, dans le coin de repos des femmes l’une d’elle fume une longue pipe.  La famille qui m’a adoptée me fait partager son enthousiasme.

Dans l’Odéon – théâtre de poche, très bien restauré, un guide francophone sort me montrer les escaliers qui permettent de monter à pied à la citadelle. Des Jordaniens nous disent de prendre le taxi qui ne coûterait que 1 JD, pour nous ce sera 2.