Les statues de granite sont dispersées dans le domaine. La plus fameuse et la plus grande est la tête du poète Krisjanis Barons qui collecta les dainas, les chansons traditionnelles lettones. La main posée sur la bouche suggère que ces chansons étaient restées secrètes dans l’illégalité comme l’identité et la culture lettone. Cette statue est d’autant plus intéressante qu’elle présente plusieurs faces. A l’arrière, trois femme, trois générations, mère, fille, grand-mère, glorifient les femmes lettones qui ont conservé et transmis cette culture. Un homme très musculeux occupe la troisième face.
Plus loin, le cheval de la Destinée dans une belle courbe évidée est double, un cheval semble au galop tandis qu’une autre tête repose en sommeil.
Ces statues sont magnifiques. Mais d’où provient donc le granite ? Ici, affleure plutôt du grès. Peut être des blocs erratiques apportés par les glaciers.
Certaines statues sont bifaces, d’autres encore plus complexes. Dans un bloc, face avant, une tête de femme, sur un côté, une femme couchée, la tête renversée et sur une troisième un groupe d’hommes au travail tandis qu’un homme barbu se trouve en dessous ; Plusieurs statues sont mixtes, hommes-femmes selon le côté.
Ces statues sont réparties sur une pelouse que des jardiniers tondent consciencieusement où poussent des arbres magnifiques chênes et tilleuls. J’emprunte un sentier qui descend dans un vallon parcouru par un frais ruisseau. Au sol, un tapis de muguet mais aussi des prêles sous des chênes, des épicéas et des charmes.
L’autre chaussée de l’autoroute est cachée par une futaie de sapins sans glissière, ni grillage , on a l’impression de rouler seules dans une magnifique forêt sauvage.
Sigulda
Le relief s’accentue, dans la « Suisse lettone ». Moins d’une heure pour arriver de Riga à l’ hôtel Sigulda, fondé par le prince russe Nicolaï Dimitrovitch Krotopkine, promoteur de l’activité touristique de Sigulda, du bobsleigh au ski. Si l’hôtel est historique, notre chambre est située dans l’aile moderne et la bâtisse ancienne de gros moellons de granite égayée par un décor de briques rouges sur lequel court une clématite, a été transformée en restaurant. Nous ne dormirons pas dans les lits des aristocrates russes !
Dépassant les châteaux de Sigulda, nous passons la rivière Gauja. Le donjon de Turaïda surgit sur un éperon.
chateau de sigulda
Turaïda
La Réserve de Turaïda est très vaste : le château n’occupe qu’un promontoire tandis qu’une grande pelouse accueille des statues et qu’un domaine agricole exploite encore les terres. On peut y louer des chevaux. Les zones escarpées sont restées sauvages et aménagées pour la promenade. Le droit d’entrée, assez élevé, donne droit à une bonne demi-journée de visite (et même plus si nous en avions le temps). La dame de l’accueil est charmante.Elle nous conseille une belle promenade le long de la rivière Gauja. Et m’offre le prix « retraitée » sans que je n’aie rien demandé. C’est la première fois que cela se fait naturellement. Autrefois, le caissier, en clignant des yeux me faisait savoir qu’il m’offrait un passe-droit. Maintenant avec mes 60 ans et mes cheveux blancs, j’y ai peut être vraiment droit !
Le château de Turaïda avec son donjon de 42 m est une forteresse en brique fondé par l’Archevêque de Riga en 1214. Une autre tour de guet (15ème siècle) garde un étroit passage. L’extension maximale des fortifications fut achevée au 16ème siècle. En 1776, un incendie détruisit toutes les structures de bois qui ne furent jamais reconstruites.
L’Histoire de la Lettonie de 1214 au 18ème siècle est mise en scène très pédagogiquement. Les objets, nombreux, et pas spectaculaires, mais la muséographie est exceptionnelle. Des panneaux de très bon goût accompagnent des témoignages du temps passé, clés, morceaux de briques ou céramique d’un vieux poêle. Les explications sont présentées dans un vieux livre en imitation parchemin. Des lanières de cuir font des signets séparant les feuilles en letton, russe, allemand ou anglais. Les textes sont très fournis. Une matinée entière serait nécessaire pour tout lire et tout assimiler.
carreau de poêle
Au rez-de chaussée : les pouvoirs de l’Archevêque de Riga, du Chapître et de son bailli. Les Archevêques de Riga entraient parfois en conflit avec les Chevaliers Teutoniques ou Porte-Glaive.
Au 2ème étage, la Réforme :
au 16ème siècle l’état théocratique de Livonie fut en crise. A la Diète de Valmiera, en 1513, l’archevêque avouait ne pas pouvoir s’opposer au concubinage des prêtres. S’il avait sévi contre les curés, le nombre des prêtres serait descendu dramatiquement. Pratiquement simultanément, en 1515, Luther publia ses thèses qui séduisirent une bonne partie de la population scandalisée par le train de vie de l’Eglise. De 1524-1527, les Archevêques de Riga luttèrent contre l’extension de la Réforme. En 1525, Johannes Lohmüller, secrétaire du Conseil de Riga, abolit le pouvoir temporel de l’Archevêque.
Au 3ème étage : la vie au Château de 1566 à 1776.
1601, les troupes suédoises envahirent Turaïda. C’est à cette période que se situe la légende de la Rose de Mai ou rose de Turaïda. Une petite fille trouvée presque morte de faim après la bataille, devint ensuite une très belle jeune fille. Fiancée au jardinier Victor du château de Sigulda, ils se retrouvaient dans une grotte sur le chemin reliant le château de Sigulda à celui de Turaïda. Deux déserteurs polonais Adam Jakubovski et Peter Skuditz s’approchèrent de la jeune fille. Jakubovski demanda sa main. Majja déjà fiancée refusa. Dédaigné, le soudard inventa un piège pour prendre Majja par la force. Cette dernière se défendit, proposant un cadeau magique : l’écharpe rouge qu’elle portait le protègerait de l’ennemi. Pour tester la magie, il transperça la gorge de Majja. Désespéré Victor enterra sa fiancée près de l’église de Turaïda. Chaque année des jeunes filles viennent fleurir sa tombe.
La dernière tour abrite un parchemin réel de l’Archevêque de Branenburg daté du mai 1545. Remarquablement mis en valeur : enserré dans un gros volume relié et évidé, posé sur un velours violet ecclésiastique.
cheval de la Destinée
Dans la maison du Jardinier, à l’entrée du château, une exposition est consacrée aux Lives du 11ème siècle au 13ème occupant le site avant la christianisation et la croisade des Porte-Glaive qui les a chassés : pointes de lances, outils de fer, surtout bijoux mais aussi, métiers à tisser. Vivant de la cueillette des baies, noisettes et champignons, de la pêche et de la chasse, ils étaient aussi agriculteurs. Païens, leurs divinités étaient l’Eau et la Terre. Le cheval était capable de révéler la volonté des Dieux. La légende du Cheval de la Destinée, est illustrée dans le Parc des statues. Alors que l’évêque Meinhard prêchait avec un moine cistercien Théodoricus, les Lives ont voulu sacrifier le moine. Le cheval intercéda.
Les Lives vivent encore en Lettonie. Leur langue d’origine finno-ougrienne est en train de mourir. Il ne reste plus que 180 locuteurs.
Empruntant Dzirnavu iela vers l’ouest, vers le port, j’atteins rapidement les ensembles architecturaux Art Nouveau.
Antonjas 8, juste après la taverne russe, une façade porte un chat de pierre, assis, regardant les passants du haut de sa corniche et un ours au faite. L’ensemble architectural le plus spectaculaire se trouve rue Alberta. Plus que les motifs végétaux, ce sont les figures féminines parfois grimaçantes qui caractérisent ce mouvement Art Nouveau de Riga. La profusion, la démesure sont de mise surtout dans le dernier immeuble de la rue face au Musée de l’Art Nouveau. Une forêt de colonnes, une ornementation délirante. Je me prends à regretter les formes sobres et simples. J’ai découvert l’Art Nouveau à Vienne (je n’avais pas fait attention aux immeubles de Guimard et au bouches du métro parisien dans le quartier de mon enfance). A Vienne le mouvement Sécession réagissait contre les lourdeurs des historicistes viennois. En Hongrie, à Budapest, à Keszkemet ou à Pecs, nous avions photographié les immeubles Art Nouveau. Mais à Riga, c’est trop ! Trop délirant, trop décoré, surchargé !
Heureusement certains architectes surtout sur Ausekja ont construit des maisons plus sobres où l’Art Nouveau se caractérise alors par certaines courbures, des frises. Mon immeuble préféré porte une seule grande femme blanche, apaisée sur la hauteur de la façade.
Musée Art Nouveau
Au coin de Alberta iela et Strelnieku iela, dans un immeuble jaune surmonté d’un clocheton où les balcons d’angle aux courbes gracieuses se décalent et où des motifs végétaux colonisent de larges surfaces. L’hôtesse du musée, coiffée d’un élégant chapeau 1900, met en route un audiovisuel pour me faire patienter. Un groupe russe occupe l’appartement guidé par une autre dame en chapeau 1900. Evidemment je ne comprends rien au commentaire mais je la trouve très couleur locale.
Nous visitons un appartement meublé et décoré dans lequel on a vécu. Le hall bleu a un décor de marguerites et un lacis enrubanné blanc au plafond. Une baie vitrée est séparée de la pièce par une boiserie aux formes arrondies.les lys blancs et orange se marient ave le décor. Dans la Salle de la cheminée, la couleur dominante est le vert. Une frise de feuilles de marronniers aux bogues ouvertes court tout autour de la pièce. La cheminée en faïence vert foncé porte également un décor de marronnier. Dans des cadres une chouette et un écureuil. Je remarque aussi un magnifique gramophone.
La salle à manger est au motif de la pomme de pin, les boiseries sont vertes sur une peinture vieux rose soutenu. La vaisselle est assortie. Les vitraux portent des iris, des grenouilles et des nénuphars. Des hortensias vert en bouquet.
La cuisine est plus classique mais sophistiquée pour l’époque : un gaufrier pivotant est encastré dans la cuisinière.
. On visite également la salle de bain et les toilettes ainsi que la chambre de bonne s’ouvrant sur la cuisine avec son lit étroit et son pot de chambre.
Musée Janis Rozenthal et Rudolfs Blaumanis
Janis Rozenthal (1866-1916) marié à une cantatrice finlandaise s’installèrent au 4ème étage dans un duplex. Je monte péniblement le magnifique escalier en colimaçon très décoré mais aux étages très hauts. En 1904, le confort moderne incluait toilettes à chasse d’eau, baignoire mais pas encore l’ascenseur. La visite de leur appartement est un peu décevante. Il y a peu de tableaux, surtout des photos. La vue, en revanche, sur l’immeuble d’en face à la forêt de colonnes aux figures féminines et expressives jusqu’à l’hystérie me permet de faire plein de photos.
Deux jours sont bien courts pour assimiler tout cet ensemble Art Nouveau. Il me vient l’envie d’approfondir. Atlantes, caryatides, sphinx et lourds décors sont ils vraiment Art Nouveau. Cette décoration boursouflée « baroque-Art Nouveau » est elle spécifique de Riga ?
Je suis ici plus réticente qu’à Budapest. J’aimerais creuser, architecte par architecte, du travail de recherche en perspective !
J’aimerais en savoir plus sur cette période 1900 qui est la période bâtisseuse : sur quoi reposait la prospérité ? Qui étaient les élites qui occupaient les demeures prestigieuses de ce quartier ? Des Lettons, des Russes ? Des juifs ? Comment la Révolution de 1905 a-elle-été vécue à Riga ?
Autre piste à suivre : celle du Russe, beaucoup plus présent à Riga que je ne l’imaginais. Au Centre Communautaire Juif, dans la rue, au Musée, j’entends du Russe. Sont-ils des Russophones de Lettonie ou des touristes russes. Quelle fraction de la population de Riga ?
Et l’Europe ? Sentiment très fort d’une culture européenne ici : fusion d’influences allemandes, russes, finlandaise (chez les peintres). Il me vient l’envie très forte de visiter Saint Saint-Pétersbourg de comparer. Toujours cet appel du voyage encore plus lointain !
rue Skolas, perpendiculaire à Dzinavu, à 30m de notre hôtel.
Dans le Centre Communautaire, un bel immeuble Art Nouveau.
Entrée un peu désuète : une très vieille dame, dans une cabine en bois démodée, se tient près de la porte. Croyant qu’elle vend des tickets, je m’adresse à elle. Non ! Le musée est au 2ème étage. Tout l’affichage est en Russe. Je m’étais attendue au yiddish. Non ! C’est en Russe. Impression d’étrangeté, retour en arrière dans le temps.
Au premier étage de très vieilles dames dansent des danses folkloriques israéliennes sous la direction d’un Russe qui ressemble à un danseur classique et qui donne ses directives en Russe.
Au second, une exposition très émouvante de photographies de pierres tombales descimetières de l’Est : Lettonie mais aussi Roumanie. Une photo a été prise à Sighet, une autre dans un village de Maramures, la stèle porte un violon sculpté
. La deuxième salle présente la communauté juive de Riga à la veille de la Seconde Guerre Mondiale : photos de classe, portrait d’intellectuels, coupures de Presse, tout un monde disparu. La troisième salle commémore le désastre de 1941, le rassemblement, le charnier, les Justes aussi qui cachèrent les Juifs. 164 ont survécu à Riga. Nombre dérisoire.
« izcor ! » c’est tout ce qu’on peut faire, se souvenir. Des Américaines, une famille d’Argentine parcourent le musée, pour se souvenir.
Un Musée de Plein Air est une collection de maisons authentiques démontées et remontées afin de reconstituer la vie traditionnelle rurale disparue. Nous avons visité de tels musées en Hongrie, à Szombathely, en Roumanie à Sibiu et Bucarest, à Hanoi et au Canada. C’est toujoursune promenade très agréable, promenade dans le temps, découverte d’un pays.
La grande avenue Birlibas commence au Monument de la Liberté et coupe tout droit dans la ville. De beaux immeubles Art Nouveau la bordent, dans les quartiers périphériques c’est plus ou moins bien réussi. Au-delà des barres soviétiques aux balcons rouillés deux grands centres commerciaux sont sortis de terre récemment. A la sortie de la ville, on longe un lac : c’est tout de suite à droite.
Le premier groupe de maisons provient d’un village de Courlande. La maison d’habitation est vaste. On a disposé partout à l’intérieur des feuillages qui sèchent en bouquets sur la table,le tilleul. De l’autre côté de la cour, dans la remise un artisan du bois fabrique des jouets au tour : toupies, hélices volantes qui reviennent comme des boomerangs. Des traîneaux et charrettes sont rangés.
Sauna
A l’écart, la petite hutte-sauna est composée de trois pièces:une petite entrée, la cabine de déshabillage et la pièce principale. Un gros tas de pierres chauffé dans le feu, occupe tout un coin. Au milieu, se trouve un baquet dans lequel on plonge les pierres. En face, des estrades pour transpirer avec les branchettes de bouleau.
A l’arrière du groupe des maisons se tient un beau moulin carré avec des ailes mais pas de voilure.
Poêle et bouquets qui sèchent, travail du lin
De là, le sentier descend très raide vers le lac Jugla qui remplace la mer Baltique. Au bord du lac sont installés les villages de pêcheurs avec les petites huttes, fumoirs à poisson. Un autre village des pêcheurs est composé de petites cabanes pour les filets, de petites maisons mais aussi d’une très belle maison du capitaine (n°21)qui vient de Lusikis, district de Liepaja. On y entre par une entrée ouverte sous un toit à deux pans, les rambardes sont en bois ouvragé, un banc permet de s’y asseoir. La porte est peinte de jaune, noir, bleu et rouge. La maison est construite en trois partie : au centre la cuisine principale et la chambre de la grand-mère de chaque côté les appartements du capitaine et du jeune couple. Chaque appartement est chauffé par un poêle accolé à la cuisine. L’homme qui fait visiter la maison nous montre un outil de bois avec des dents pour casser les fibres du lin. Devant la maison est planté un beau massif fleuri et une rangée de lilas, de côté un verger de trois pommiers avec des ruches. Un peu plus loin, se trouve la grange à grain.
Sur une butte, comme une demi barque coupée, plantée debout, une fumerie très simple, le foyer à terre, les poissons sont suspendus sur une tringle par des crochets. On raconte ici l’histoire des Lives, peuple finno-ougrien dont il ne reste plus que 180 locuteurs. Les Lives vénéraient le Terre et l’Eau. Les fermiers Lives semaient avoine, seigle pois et haricots. Ils cueillaient les noisettes et les champignons et vivaient de la pêche.
les anciens magasins du port de Lipaja
Notre excursion en Courlande se termine par la très belle maison à colombage avec un beau toit de bardeaux, entrepôt de 1640 à Liepaja.
Nous entrons dans la province de Vidzeme. Les maisons sont en rondins mal équarris. Deux objets m’amusent : le puits à balancier (identique à ceux que nous avons découverts en Hongrie dans la puszta et les échelles d’un rondin creusé identiques à celles des Tata Sombas du Bénin. Parentés des formes, par de là la géographie, pour un emploi similaire.
On visite ensuite Latgale, la province Est de la Lettonie : une église en bois précédée d’un curieux clocheton deux poteaux soutiennent un auvent à quatre pans. La chapelle est celle d’Eleornoraville 1815 : à l’intérieur le plafond est bleu étoilé. Un lustre baroque de salon à pendeloque est un peu étrange dans cette église de bois rustique.
Ecorce de bouleau
L’artisanat de la Lettonie est présent : objets en écorce de bouleau tissée pour des ceintures, enroulée pour faire des boites avec des couvercles, tressé pour des chaussons. Le parfum des Rosa Canina est entêtant. Il y a aussi une petite église orthodoxe provenant de Rogoska. Nous continuons la promenade dans l’odeur du seringat. Les groseilles sont mûres.
Zemgale, le Sud de la Lettonie, est plus développé : les maisons sont en planches sciées et le machinisme agricole a été introduit plus tôt que dans le reste du pays.
la Place de la Cathédrale vue du clocher de St Pierre
Je traverse la place sans un regard pour le buste deHerder dans la place éponyme pour retrouver D près d’un palais caramel à un angle du Dom Laukum (Place de la Cathédrale) C’est le Palais dela Bourse, construit en 1855 par un Allemand de Saint Saint-Pétersbourg. S’inspirant d’un palais vénitien symbolisant la richesse et l’opulence, ce qui convient au siège de la Bourse. Actuellement c’est un Musée. Riga était alors la troisième ville de l’Empire Russe après Saint Saint-Pétersbourg et Moscou. Le carillon aigrelet de la Bourse tinte au coin de la rue dans une niche grillagée.
Sur la place, encombrée de cafés perchés sur des estrades de bois, un orgue de barbarie et une très jeune fille joue du cymbalon.
Maison des Chats
Autour de la place, les rues recèlent des surprises Art Nouveau : la Maison du Paon, La Maison des chats, peinte en jaune vif, avec deux chats faisant le dos rond au sommet de leurs poivrières respectives, à l’angle d’une autre maison une femme est une sorte de figure de proue. Ironiquement, les chats perchés très haut imposeraient la supériorité de leur propriétaire aux maitres de la Grande Guilde.
Grande Guilde
Petite Guilde et Grande Guilde se font face près de la Place des Lives. Construites au 14ème siècle pour réunir les artisans et les marchands de la ville. Malheureusement, rénovées au 19ème siècle, l’architecture historiciste en a fait deux châteaux gothiques peints en blanc cassé avec des fenêtres à ogives et des créneaux compliqués qui ont perdu tout charme médiéval. Ils évoquent plutôt le château de Blanche Neige que la réunion de marchands. Selon la plaquette distribuée à l’Office de Tourisme, les intérieurs seraient fastueux. Ce n’est pas le moment d’aller les visiter. Des dizaines d’étudiants en toge noire, portant bonnet carré et écharpe violette et bleue traversent la rue Amatu des bouquets de fleurs dans les bras : c’est le jour de la remise des diplômes !
les jolies maisons de la Place des Lives
Nous déjeunons de sandwiches place des Lives face à un groupe de maisons colorées très pittoresques, la plus petite est peinte en bleu avec une vache grise comme enseigne et des fenêtres fleuries de géraniums. Elle encadrée à gauche par une façade rose aux trois niveaux de fenêtres soulignées de blanc tandis que celle de droite est jaune. Les toits de tuiles à forte pente s’emmêlent et se chevauchent avec les hautes cheminées et les fenêtres en chien assis.
s’alignent pour la photo ou forment des cercles parfaits. Sous la toge de satin noir, les filles portent des minijupes et leurs talons sont très hauts. Elles dépassent parfois d’une tête les garçons. Soit très blondes, soit aile-de-corbeau, les cheveux des lettones ne connaissent pas la nuance, sauf une version carotte. Elles provoquent relevant la toge pour montrer les cuisses enserrées dans des fourreaux roses ou noirs très sexys. Les défilés de porteurs de bouquets m’amusent. Je les compte au début puis laisse rapidement tomber.
les trois frères
Les Trois Frères sont trois vieilles maisons de Riga, non loin de la place du Dom, maisons de marchands très étroites à trois étage avec des crochets pour hisser la marchandise comme dans les maisons hollandaises.
Juste derrière se trouve l’église catholique Saint Jacques que rien ne distingue extérieurement des églises luthériennes : briques et fin clocher, ni intérieurement : nef haute et blanche sans ornement. Elle fut le théâtre de l’ »émeute du calendrier » quand les Réformés refusèrent le calendrier grégorien à l’initiative papale et saccagèrent les symboles papistes.
Retour par le chemin des écoliers au hasard des ruelles pour ne rien rater. On tourne un film devant le Parlement, encore un palazzo italiénisant dont le bossage imite celui du Palais Pitti de Florence. Le 19ème siècle historiciste a beaucoup copié l’Italie. Une tour ronde, la Tour des Poudre et des remparts de briques, rénovés récemment, trop neufs.
Alexandre Gulmant (1837-1877) paraphrase sur un thème d’Haendel
Léon Bölmann (1862-1897) prière
Théodore Dubois (1837-1924) Fiat Lux
Contrairement à Saint Pierre, vide, seulement quelques bancs, ici, dans la Cathédrale, tout l’espace est encombré de sorte de stalles fermées, orientées vers la chaire rappelant l’organisation des églises écossaises, en immense. L’orgue de la Cathédrale avec ses 6700 tuyaux fut au temps de Franz Liszt le plus grand du monde, Liszt composa les pièces destinées à son inauguration. Le buffet d’orgue, 15ème siècle est en bois peint camaïeu vert. Je filme pendant Vivaldi la merveilleuse chaire baroque surmontée d’un ange musicien. Lentement je suis la spirale descendante décorée de statuettes de bois représentant les apôtres et les évangélistes de Thobias Heines(1644). J’aurais bien filmé le buffet d’orgue pendant Haendel (Le Messie) malheureusement il est à moitié caché par un échafaudage.
De ma place, je ne vois qu’un seul vitrail (19ème siècle) et la rosace. La Prière de Bölmannn n’est pas convaincante. Le Fiat Lux fait résonner toute la cathédrale.
A la fin, le public est hésitant : applaudir ou ne pas applaudir dans une église ? L’assistance se précipite dans le vaste cloître dont les hautes galeries en ogives sont encombrées de vestiges divers : statue de l’évêque Albrecht von Buxhoeveden , le fondateur de Riga, vieux cadran d’horloge, coq de girouette, poutres calcinées, cloches… Incongrue : une grosse tête d’idole païenne taillée ans un bloc de granite.
La place de l’Hôtel de Ville de Riga est proche de Saint Pierre.Pour admirer le plus célèbre bâtiment de la ville, la maison des Têtes Noires, nous prenons place sous la statue de Roland, celui qui est mort à Roncevaux. Comment est-il arrivé là ? Sur la piste des animaux de Brême, sur Internet, j’ai trouvé un élément de réponse. Brême possède la réplique des Musiciens de Brême, et aussi Roland. C’est donc via Brême que Riga possède aussi son Roland. Pourquoi ? Mystère !
La Maison des Têtes Noires, construite en 1334, fut louée à la confrérie des Têtes noires devant son nom à son saint patron, saint Maurice(le Maure, représenté comme un noir). Cette confrérie réunissait les négociants célibataires qui organisaient de joyeux carnaval.
Flânant au hasard dans les petites rues et les belles demeures, nous parvenons à la Cathédrale, haute construction de briques, surmontée d’un fin clocher néogothique remanié au 19ème siècle par Daniel Felsko comme celui de Saint Jean. Un concert d’orgue est donné à 12 heures, nous reviendrons donc à midi.
La Préhistoire, ici se prolonge jusqu’au 12ème siècle, époque où la Lettonie fut christianisée. Mocassins de cuir, écailles d’esturgeon gravées, morceaux de bateaux bien conservés, sont préhistoriques sans être si anciens que cela. Les marchands allaient jusqu’en Méditerranée. Etaient-ils assimilés aux Vikings ? Le Musée accumule tout un bric-à-brac dans des vitrines un peu vieillottes jusqu’à une mobylette « Riga » et des objets d’un passé récent. L’ennui est que les objets sont étiquetés en Letton et en Russe. La lecture de cahiers en anglais résumant les renseignements est rébarbative. La visite se termine par deux salles de maquettes de bateaux.
Une arche de briques laisse le passage dans la Cour Saint Jean bordée des anciennes fortifications, très rénovées et fleuries de géraniums, trop neuves pour être émouvantes. Certaines rénovations exigent plus de patine ! Une autre arche dans un mur de brique permet de passer dans la ruelle qui borde l’église luthérienne Saint Jean en briques avec un haut pignon à redan et un clocher néogothique (restauration 19ème siècle). Les marchandes de souvenirs ont installé leur marchandise sur la placette comprise entre l’église Saint Jean et l’église Saint Pierre : bijoux d’ambre, chaussettes tricotées-main, gadgets en bois…
les musziciens de Brème
Une curieuse statue de bronze m’intrigue : un âne, un chien, un chat et un coq sont empilés les uns sur les autres. Cette statue a été offerte par la ville de Brême d’où était originaire l’évêque Albert l’un des premiers évêques de la ville. Une rengaine revient de mon enfance « les animaux de Brême, de Brême.. », je ne me souviens que de ces mots, j’ai oublié le conte des Musiciens de Brême évoqué par la statue.
Nous voulions commencer la visite de Riga en découvrant le panorama du clocher de l’église saint Pierre accessible par un ascenseur. Il faudra attendre 10heures pour que l’église ouvre. Nous avons le temps d’admirer les statues de pierre du portail baroque du 18ème siècle juxtaposé sur la façade austère de briques rouges. La découverte de Riga est passionnante. Deux ponts enjambent la Daugava, un peu plus loin le port. Les petites maisons colorées se serrent les unes contre les autres sans ordre apparent. Au loin les hangars à zeppelins abritent le marché Central.
La nef de l’église Saint Pierre est très haute, très claire avec de larges ouvertures vitrées mais elle est dépouillée, seuls éléments décoratifs : un portrait de Luther, des écussons et un monument funéraire : le sépulcre des Gardes Bleus.
Le petit déjeuner est servi au bar. En face du comptoir de la réception, quelques tables ornées de bouquets secs, tons légers beige et gris, un ensemble raffiné. Au buffet, un assortiment de fromages et charcuteries, un choix de pains, concombres, tomates en tranches fines … un très bon cappuccino, le thé est curieusement servi : d’un côté un sachet de l’autre l’eau bouillante dans une chope de verre élégante. L’œuf au plat est accompagné de deux tomates cerise et d’un brin d’aneth, design !
La grande rue Valdemara qui vient du pont suspendu arrive à l’Esplanade, un jardin ombragé que nous traversons en diagonale découvrant les coupoles de la cathédraleorthodoxe de la Nativité, construite en 1884, un peu neuve.
Eglise de la Nativité dans son cadre de verdure
Un peu plus loin, une statue monumentale de granite rose attire mon attention. Non ! ce n’est pas Lénine ! C’est un poète Janis Raïnis(1865-1929)
Au pied du poète, une petite patinoire et des trampolines. Passé l’église russe, au milieu du boulevard : l’immense statue du Monument de la Liberté : aiguille portant une femme personnalisant la Liberté et l’Indépendance de la Lettonie, vert de gris portant trois étoiles dorées figurant les trois provinces du pays. Réalisme soviétique, ou statue de style fasciste ? Non point ! Ce monument fut érigé en 1935 grâce à une collecte populaire. Contemporaine des horribles constructions mussoliniennes ou staliniennes. Il n’en porte peut être pas les péchés totalitaires, mais n’en est pas élégant pour autant ! Sans parler du socle lourdingue avec des combattants aussi peu gracieux.
Un jardin de part et d’autre d’une rivière ou d’un canal enjambé par de gracieux ponts, est navigable en pédalo, canoë ou en vedette de bois. Des statues sont mises en valeur par des massifs de fleurs. Nous parvenons à l’Opéra, bâtiment peint en blanc curieusement accompagné d’une cheminée d’usine.